ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
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"756"> Cette table vérifie ce que nous avons remarqué plus haut, que tous les degrés mesurés en France ne vont pas exactement en diminuant du nord au sud; mais le dernier degré de France vers le sud est de 36 toises plus petit que le dernier degré vers le nord; & cela suffit pour qu'il soit certain que les degrés vont en diminuant du nord au sud dans l'étendue de la France.

A cette table j'ajoûterai la suivante que M. l'abbé de la Caille m'a communiquée.

Dans l'hypothèse de la longueur d'un degré du méridien sous l'équateur, de 56753 toises, comme il résulte des mesures faites sous l'équateur, & de celle de 57422 toises sous le parallele de 66d 19' [omission: formula; to see, consult fac-similé version] selon la mesure du nord, après en avoir ôté 16 toises pour l'effet de la réfraction, ainsi que l'ont pratiqué tous ceux qui ont mesuré des degrés, on a le rapport des axes de 214 à 215 ou de 1, à 1, 00467, en supposant la Terre un sphéroïde elliptique régulier. Et en supposant que les accroissemens des degrés du méridien sont comme les quarrés des sinus des latitudes, on a les longueurs suivantes:

Latitude.    Longueur      Longueur
                   du degré.   mesurée.
   0d        56753,         0     56753,        0  sous l'équateur.
   5                  56759,         0
  10                  56777,         0
  15                  56806,         4
  20                  56846,         3
  25                  56895,         4
  30                  56952,         4
  33 18 [omission: formula; to see, consult fac-similé version] 56993,         5     57037            au Cap.
  35                  57015,         4
  40                  57082,         6
  41                  57096,         3
  42                  57110,         1
  43                  57124,         0
  43 30               57131,         0     56979            en Italie.
  44                  57137,         9
  45                  57151,         8
  46                  57165,         7
  47                  57179,         6
  48                  57193,         5
  49                  57207,         3
  49 22               57212,         3     57074,       4   en France.
                                      
  50                  57221,         0     57183            selon d'autres.
  55                  57288,         1
  60                  57351,         2
  65                  57408,         1
  66 19 [omission: formula; to see, consult fac-similé version] 57422,         0     57422            en Lapponie.
  70                  57457,         2
  75                  57497,         2
  80                  57526,         6
  85                  57544,         6
  90                  57550,         6

On voit par cette table, que le degré du cap est moindre de 44 toises seulement que le degré mesuré; que celui de France à 49d 22'est plus grand de 29 toises seulement que le degré de France supposé de 57183, mais plus grand de 138 toises que le degré supposé de 57074; enfin que le degré d'Italie est plus grand de 152 toises, que le degré mesuré. Ainsi il n'y a proprement que le degré d'Italie, & le degré de France supposé de 57074 toises (degré encore en litige), qui ne quadrent pas avec l'hypothèse elliptique & l'applatissement de [omission: formula; to see, consult fac-similé version]; car les différences des autres sont trop petites, pour ne pas être mises sur le compte de l'observation. Je ne parle point de la valeur des autres degrés de France; elle est encore incertaine, jusqu'à ce qu'on ait vérifié la correction faite à la base de M. Picard. Il n'est pas inutile d'ajoûter que le degré de longitude mesuré à 43d 32', & trouvé de 41618 toises, differe aussi de très - peu de toises de ce qu'il doit être dans l'hypothèse de la terre elliptique & de l'applatissement supposé à [omission: formula; to see, consult fac-similé version]. En effet M. Bouguer a trouvé que ce degré ne différoit que de 11 toises de la longueur qu'il devroit avoir, en supposant l'applatissement de [omission: formula; to see, consult fac-similé version], qui differe peu de [omission: formula; to see, consult fac-similé version]. De plus il n'est pas inutile de remarquer qu'en faisant de legeres corrections aux degrés qui quadrent avec ce dernier applatissement de [omission: formula; to see, consult fac-similé version], on retrouveroit exactement l'applatissement de [omission: formula; to see, consult fac-similé version], tel que Newton l'a donné. M. de la Condamine, comparant deux à deux dans l'hypothèse elliptique les quatre degrés suivans, celui du Pérou, celui de Lapponie, celui de France supposé de 57183 toises, & le même degré supposé de 57074, trouve que le rapport des axes varie depuis [omission: formula; to see, consult fac-similé version] jusqu'à [omission: formula; to see, consult fac-similé version]. Voyez son ouvrage, page 261. Enfin nous devons ajoûter que l'applatissement de la Terre a toûjours été trouvé beaucoup plus grand que celui de M. Huyghens, soit par la mesure des degrés, soit par l'observation du pendule; d'ou il semble qu'on peut conclure avec assez de fondement, que la pesanteur primitive n'est pas dirigée vers le centre de la Terre, ni même vers un seul centre, comme M. Huyghens le supposoit.

Avant que de porter notre jugement sur l'état présent de cette grande question de la figure de la l'erre, & sur tout ce qui a été fait pour la résoudre, il est nécessaire que nous parlions des expériences sur l'alongement & l'accourcissement du pendule, observés aux différentes latitudes; car ces expériences tiennent immédiatement à la question de la figure de la Terre. Il est certain en général, que si la Terre est applatie, la pesanteur doit être moindre à l'équateur qu'au pole, que par conséquent le pendule à secondes doit retarder en allant du pole vers l'équateur, & que par la même raison, le pendule qui bat les secondes à l'équateur, doit être alongé en allant de l'équateur vers le pole. De plus, si l'applatissement [omission: formula; to see, consult fac-similé version], donné par M. Newton, avoit lieu, il est démontré que la pesanteur à l'équateur seroit moindre de [omission: formula; to see, consult fac-similé version] que la pesanteur au pole, & de plus, que l'accroissement de la pesanteur, de l'équateur au pole, doit suivre la raison des quarrés des sinus de latitude. Or, par la loi observée de l'alongement du pendule, en allant de l'équateur vers le pole, on connoît la loi de l'augmentation de la pesanteur dans le même sens, & cette augmentation qui est proportionnelle à l'alongement du pendule (voyez Pendule), se trouve, par les observations, assez exactement proportionelle aux quarrés des sinus de latitude.

En effet les longueurs du pendule corrigées par le barometre, & réduites à celle d'un pendule qui oscilleroit dans un milieu non

résistant, sont sous l'équa - Lign.    Differenc.
teur .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .   439,       21
 A Portobello à 9 degrés de
latitude .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  439,       30    0,     09
 Au petit Goave à 18 degrés
de latitude .  .  .  .  .  .  .  .  .  439,       47    0,     26
 A Paris .  .  .  .  .  .  .  .  .  . 440,       67    1,     46
 A Pello .  .  .  .  .  .  .  .  .  . 441,       27    2,     06

Or, selon le calcul du P. Boscovich, les differeuces proportionnelles aux quarrés des sinus de latitude, ou, ce qui revient au même, à la moitié du sinus verse du double de la latitude (voyez Sinus), sont 7, 24, 138, 206, un peu plus petites à la vérité que celles de la table, comme je l'avois déjà remarqué dans mes Recherches sur le système du monde, II. part. pag. 288 & 289. en employant un calcul moins rigoureux que le précédent; cependant comme le plus grand écart entre l'observation & la théorie est ici de [omission: formula; to see, consult fac-similé version] de ligne, il semble qu'on peut regarder la proportion des quarrés des sinus de latitude comme assez exactement observée dans l'alongement [p. 757] du pendule. Il est à remarquer que dans la table précédente, on a augmenté de [omission: formula; to see, consult fac-similé version] de ligne les longueurs du pendule observées à Paris & à Pello (ce que je n'avois pas sait dans l'endroit cité de mes Recherches sur le système du monde); parce que les longueurs observées 440, 57, & 441, 17, sont celles du pendule dans l'air, & que les longueurs 440, 67, 441, 27, sont celles du même pendule dans un milieu non résistant, ainsi que les trois autres qui les précedent.

Mais si d'un côté la loi de l'accourcissement du pendule est assez conforme à l'hypothese elliptique, de l'autre la quantité de l'accourcissement sous l'équateur ne se trouve pas telle qu'elle devroit être, si l'applatissement de la Terre étoit [omission: formula; to see, consult fac-similé version]; elle est plus grande que cette fraction. Ainsi les expériences du pendule semblent aussi donner quelque échec à la théorie Newtonienne de la figure de la Terre, dans laquelle on regarde cette planete comme fluide & homogene. Ceci nous conduit naturellement à parler de tout ce qui a été fait jusqu'à nos jours, pour étendre & perfectionner cette théorie.

M. Huyghens avoit déterminé la figure de la Terre dans l'hypothese, que la pesanteur primitive fût dirigée au centre, & que la pesanteur altérée par la force centrifuge fût perpendiculaire à la surface. M. Newton avoit supposé que la pesanteur primitive résultât de l'attraction de toutes les parties de la Terre, & que les colonnes centrales fussent en équilibre, sans égard à la perpendicularité à la surface. MM. Bouguer & de Maupertuis ont fait voir de plus dans les mémoires de l'académie des Sciences de 1734, que la Terre étant supposée fluide avec MM. Huyghens & Newton, il étoit nécessaire, pour qu'il y eût équilibre entre les parties, dans une hypothèse quelconque de pesanteur vers un ou plusieurs centres, que les deux principes hydrostatiques de M. Huyghens & de M. Newton s'accordassent entr'eux, c'est - à - dire que la direction de la pesanteur fût perpendiculaire à la surface, & que de plus les colonnes centrales fussent en équilibre. Ils ont démontré l'un & l'autre qu'il y a une infinité de cas où les colonnes centrales peuvent être en équilibre, sans que la pesanteur soit perpendiculaire à la surface, & réciproquement; & qu'il n'y a point d'équilibre, à moins que l'observation de ces deux principes ne s'accorde à donner la même figure. Du reste ces deux habiles géometres ont principalement envisagé la question de la figure de la Terre, dans la supposition que la pesanteur primitive ait des directions données vers un ou plusieurs centres: l'hypothèse newtonienne de l'attraction des parties rendoit le problème beaucoup plus difficile.

Il l'étoit d'autant plus que la maniere dont il avoit éte résolu par M. Newton pouvoit être regardée non seulement comme indirecte, mais encore comme insuffisante & imparfaite à certains égards: dans cette solution, M Newton supposoit d'abord que la Terre fût elliptique, & il déterminoit d'après cette hypothèse l'applatissement qu'eile devoit avoir: or quoique cette supposition de la Terre elliptique fût légitime dans l'hypothèse de la Terre homogene, cependant elle avoit besoin d'être démontrée; sans cela c'étoit proprement supposer ce qui étoit en question. M. Stirling démontra le premier rigoureusement dans les Transactions philosoph. que la supposition de M. Newton étoit en effet légitime, en regardant la Terre comme un fluide homogene, & comme très - peu applatie. Bien - tôt après M. Clairaut, dans les mêmes Transactions, n°. 449. étendit cette théorie beaucoup plus loin. Il prouva que la Terre devoit être un sphéroïde elliptique, en supposant non - seulement qu'elle fût homogene, mais qu'elle fût composée de couches concentriques, dont chacune en particulier différât par sa densité des autres couches; il est vrai qu'il regardoit alors les couches comme semblables; or la similitude des couches, ainsi que nous le verrons plus bas, & que M. Clairaut s'en est assûré ensuite, ne peut subsister dans l'hypothese que ces couches soient fluides.

En 1740, M. Maclaurin, dans son excellente piece sur le flux & reflux de la mer, qui partagea le prix de l'académie des Sciences, démontra le premier cette belle proposition, que si la Terre est supposée un fluide homogene, dont les parties s'attirent, & soient attirées outre cela par le Soleil ou par la Lune, suivant les lois ordinaires de la gravitation, ce fluide tournant autour de son axe avec une vitesse quelconque, prendra nécessairement la forme d'un sphéroïde elliptique, quel que soit son applatissement, c'est - à - dire très - petit ou non. De plus M. Maclaurin faisoit voir que dans ce sphéroïde, non - seulement la pesanteur étoit perpendiculaire à la surface, & les colonnes centrales en équilibre, mais encore qu'un point quelconque pris à volonté au - dedans du sphéroïde, étoit également pressé en tout sens. Cette derniere condition n'étoit pas moins nécessaire que les deux autres, pour qu'il y eût équilibre; cependant aucun de ceux qui jusqu'alors avoient traité de la figure de la Terre, n'y avoient pensé; on se bornoit à la perpendicularité de la pesanteur à la surface, & à l'équilibre des colonnes centrales, & on ne songeoit pas que selon les lois de l'Hydrostatique (voyez Fluide & Hydrostatique), il faut qu'un point quelconque du fluide soit également pressé en tout sens, c'est - à - dire que les colonnes du fluide, dirigées à un point quelconque, & non pas seulement au centre, soient en équilibre entr'elles.

M. Clairaut ayant médité sur cette derniere condition, en a déduit des conséquences profondes & curieuses, qu'il a exposées en 1742 dans son traité intitulé, Théorie de la figure de la Terre, tirée des principes de l'Hydrostatique. Selon M. Clairaut, il faut pour qu'un fluide soit en équilibre, que les efforts de toutes les parties comprises dans un canal de figure quelconque qu'on imagine traverser la masse entiere, se détruisent mutuellement. Ce principe est en apparence plus général que celui de M. Maclaurin; mais j'ai fait voir dans mon essai sur la résistance des fluides, 1752. art. 18. que l'équilibre des canaux curvilignes n'est qu'un corollaire du principe plus simple de l'équilibre des canaux rectilignes de M. Maclaurin; ce qui, au reste, ne diminue rien du mérite de M. Clairaut, puisqu'il a déduit de ce principe un grand nombre de vérités importantes que M. Maclaurin n'en avoit pas tirées, & qu'il avoit même assez peu connues pour tomber dans quelques erreurs; par exemple, dans celles de supposer semblables entr'elles les couches d'un sphéroïde fluide, comme on le peut voir dans son traité des fluxions, art. 670. & suiv.

M. Clairaut, dans l'ouvrage que nous venons de citer, prouve (ce que M. Maclaurin n'avoit pas fait directement) qu'il y a une infinité d'hypothéses, où le fluide ne seroit pas en équilibre, quoique les colonnes centrales se contre - balançassent, & que la pesanteur fût perpendiculaire à la surface. Il donne une méthode pour reconnoître les hypothèses de pesanteur, dans lesquelles ane masse fluide peut être en équilibre, & pour en déterminer la figure; il démontre de plus, que dans le système de l'attraction des parties, pourvû que la pesanteur soit per pendiculaire à la surface, tous les points du sphéroïde seront également pressés en tout sens, & qu'ainsi l'équilibre du sphéroïde dans l'hypothèse de l'attraction, se réduit à la simple loi de la perpendicularité à la surface. D'après ce principe, il cherche les lois de la figure de la Terre dans l'hypothèse que les parties s'attirent, & qu'elle soit composée de couches hétérogenes, soit solides, soit fluides; il trouve que la Terre doit avoir dans tous ces cas une figure elliptique plus ou moins

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