ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

RECHERCHE Accueil Mises en garde Documentation ATILF ARTFL Courriel

Previous page

"635"> leur, joüissant de toute l'activité du feu, & se manifestant par les mêmes troubles & par les mêmes effets.

Les vésicatoires, de la classe de ceux que l'on distingue par la dénomination de rubéfians ou de phénigmes, n'excitant qu'une legere inflammation dans les tégumens du corps humain, seroient totalement impuissans sur le cuir du cheval; mais l'impression des épispastiques, auxquels on accorderoit un certain intervalle de tems pour agir, seroit très - sensible. Les particules acres & salines de ceux - ci sont doüées d'une telle subtilité, qu'elles enfilent sans peine les pores, quelle que soit leur ténuité: elles s'insinuent dans les vaisseaux sudorifiques, elles y fermentent avec la sérosité qu'ils contiennent; & les tuniques de ces canaux cedant enfin à leurs efforts, & à un engorgement qui augmente sans cesse par la raréfaction & par le nouvel abord des liqueurs, laissent échapper une humeur lymphatique qui soûleve l'épiderme, & forme un plus ou moins grand nombre de vessies qui se montrent à la superficie de la peau. Les alongemens par lesquels cette membrane déliée se trouvoit unie aux vaisseaux qui ont été dilacérés, demeurent flottans, & s'opposent à la sortie de la sérosité dans laquelle ils nagent; mais cette humeur triomphe néanmoins de ces obstacles après un certain tems, puisqu'elle se fait jour, & qu'elle suinte sous la forme d'une eau rousse & plus ou moins limpide.

A la vûe de l'inertie des cathérétiques appliqués sur les tégumens, & de leur activité sur les chairs vives, on ne sauroit douter de la difficulté que leurs principes salins ont de se dégager, puisqu'il ne faut pas moins qu'une humidité aussi considérable que celle dont les chairs sont abreuvées, pour les mettre en fonte, pour briser leurs entraves, pour les extraire, & pour les faire joüir de cette liberté sans laquelle ils ne peuvent consumer & détruire toutes les fangosités qui leur sont offertes.

Ceux qui composent une partie de la substance des ruptoires, sont sans doute moins enveloppés, plus acres, plus greffiers, plus divisés & plus susceptibles de dissolution, dès qu'ils corrodent la peau même, & que de concert avec les particules ignées qu'ils renferment, ils privent de la vie la partie sur laquelle leur action est imprimée; ce que nous observons aussi dans les cathérétiques, qui, de même que les ruptoires, ne peuvent jamais être envisagés comme des caustiques simples, & qui brûlent plus ou moins vivement toutes celles que la peau ne garantit pas de leurs atteintes.

Les ouvrages qui ont eu pour objet la medecine des chevaux, contiennent plusieurs formules des médicamens rétoires: celui qui a été le plus usité, est un onguent décrit par M. de Soleysel. L'insecte qui en fait la base, est le méloé; il est désigné dans le système de la Nature, par ces mots, antennoe filiformes, elytra dimidiata, aloe nulloe. Linnaeus, Fauna suecica, n°. 596. l'appelle encore scaraboeus majalis unctuosus. Quelques auteurs le nomment proscaraboeus, cantharus unctuosus; le scarabé des Maréchaux. Il est mou, & d'un noir - foncé; il a les piés, les antennes, le ventre, un peu violets, & les fourreaux coriaces. On le trouve dans les mois d'Avril & de Mai, dans les terreins humides & labourés, ou dans les blés. On en prend un certain nombre que l'on broye dans suffisante quantité d'huile de laurier, & au bout de trois mois on fait fondre le tout: on coule, on jette le marc, & on garde le reste comme un remede très - précieux, & qui doit, selon Soleysel, dissiper des suros, des molettes, des vessigons, &c. mais qui est très - inutile & très - impuissant, selon moi, dans de pareilles circonstances.

Il est encore d'autres rétoires faits avec le soufre en poudre, du beurre vieux, de l'huile de laurier, des poudres d'euphorbe & de cantharides. J'ai reconnu que la qualité drastique de ces insectes n'est pas moins nuisible à l'animal qu'à l'homme, & qu'ils ne font pas en lui des impressions moins fâcheuses sur la vessie & sur les conduits urinaires; mais quoique ces vésicatoires m'ayent réussi dans une paralysie subite de la cuisse, il faut convenir que dans la pratique nous pouvons nous dispenser en général d'en faire usage; le séton brûlant opérant avec beaucoup plus de succès dans les cas où ils semblent indiqués, c'est - à - dire dans l'épilepsie, l'apoplexie, la léthargie, la paralysie, les affections soporeuses, les maladies des yeux, en un mot dans toutes celles où il s'agit d'ébranler fortement le genre nerveux, d'exciter des secousses favorables, & de produire des révulsions salutaires.

Les cathérétiques que nous employons le plus communément, sont l'alun brûlé, le cuivre brûlé, le verdet, l'iris de Florence, la sabine, l'arsenic blanc, le sublimé corrosif, l'arsenic caustique, le précipité blanc, l'onguent brun, l'onguent égyptiac, le baume d'acier ou le baume d'aiguille, &c.

Les ruptoires, que nous ne mettons presque toûjours en oeuvre que comme cathérétiques, sont l'eau ou la dissolution mercurielle, l'esprit de vitriol, l'esprit de sel, l'esprit de nitre, le beurre d'antimoine, l'huile de vitriol, l'eau - forte, la pierre infernale. Je dis que nous ne les appliquons communément que sur les chairs découvertes de la peau: il est rare en effet que dans les cas où il est question d'ouvrir des tumeurs, nous ne préférions pas le cautere actuel, dont les opérations sont toûjours plus promptes, & dont les malades que nous traitons ne font point effrayés, à ces médicamens potentiels, qui peuvent d'ailleurs perter le poison dans le sang par l'introduction de leurs corpuscules, & qui demandent, eu égard à ce danger, beaucoup de circonspection & de sagacité dans le choix, dans les préparations, & dans l'application que l'on en fait. (e)

Feu (Page 6:635)

Feu, (Manége.) cheval qui a du feu, cheval qui a de la vivacité, expressions synonymes. Il y a une très - grande différence entre le feu ou la vivacité du cheval, & ce que nous nommons en lui proprement ardeur. Le feu ou la vivacité s'appaisent, l'ardeur ne s'éteint point. Trop de feu, trop de vivacité formeront, si on le veut, ce que l'on doit entendre par le mot ardeur, & conséquemment ce terme présentera toûjours à l'esprit l'idée de quelque chose de plus que celle que nous attachons à ceux de vivacité & de feu. Le cheval qui a de l'ardeur, quelque vigoureux, quelque nerveux qu'il puisse être, doit être peu estimé. Le desir violent & immodéré qu'il a d'aller en - avant, & de devancer les chevaux qui marchent ou qui galopent devant lui; son inquiétude continuelle, son action toûjours turbulente, son trépignement, les différens mouvemens auxquels il se livre en se traversant sans cesse, & en se jettant indistinctement tantôt sur un talon, tantôt sur un autre; sa disposition à forcer la main, sont autant de raisons de le rejetter. Non - seulement il est très - incommode & très fatigant pour le cavalier qui le monte, mais il se lasse & s'épuise lui - même; la sueur dont il est couvert dans le moment, en est une preuve. Ces chevaux, dont le naturel est à - jamais invincible, sont d'ailleurs bientôt ruinés; s'ils manquent de corps, la nourriture la meilleure & la plus abondante, l'appétit le plus fort, ne peuvent en réparer les flancs: ils demeurent toûjours étroits de boyau, & très - souvent la pousse termine leur vie. Tous ces vices ne se rencontrent point dans le cheval qui n'a que du feu: si son éducation est confiée à des mains habiles, sa vivacité ne le soustraira point à l'obéissance; elle sera le garant de sa sensibilité & de son courage, elle ne se montrera que lorsque l'animal sera recherché, [p. 636] il n'en répondra que plus promptement aux aides, il n'en aura que plus de finesse; & lorsqu'elle le déterminera à hâter, sans en être sollicité, ses mouvemens & sa marche, elle ne sera jamais telle qu'elle lui suggere des desordres, & qu'elle l'empêche de reconnoître le pouvoir de la main qui le guide. En un mot, la vivacité ou le feu du cheval peut être tempéré, son ardeur ne peut être amortie. Pourquoi donc a - t - on jusqu'à présent confondu ces expressions? Il n'est pas étonnant que l'on abuse des termes dans un art où l'on n'a point encore médité sur les choses. (e)

Feu (Page 6:636)

Feu, (Manége.) Accoûtumer le cheval au feu. Si la perte de la vie, & si, dans de certaines circonstances, la perte de l'honneur même du cavalier, peuvent être les suites funestes de l'emportement & de la fougue d'un animal qui, frappé de l'impression subite & fâcheuse de quelqu'objet, méconnoît aussitôt l'empire de toutes les puissances extérieures qui le maîtrisent, il est d'une importance extrème de ne négliger aucune des voies qui sont propres à donner de l'assûrance à des chevaux timides & peureux.

M. de la Porterie, mestre de camp de dragons, dans ses institutions militaires, ouvrage qui n'a paru minutieux qu'à des personnes peut - être plus bornées que les petits détails qu'elles méprisent & qu'elles dédaignent, propose des moyens d'autant plus sûrs d'accoûtumer l'animal au feu, que l'expérience a démontré l'excellence de sa méthode.

Il recommande d'abord d'en user avec beaucoup de sagesse & de patience: le succès dépend en effet de ces deux points. Il ne s'agit pas ici de vaincre & de dominer par la force un tempérament naturellement porté à l'effroi; une terreur réitérée ne pourroit que donner aux fibres un nouveau degré de propension à celle qu'elles ont déjà; il ne faut que les obliger insensiblement à céder & à se prêter au pli & aux déterminations qu'il est essentiel de leur suggérer.

La route que tient M. de la Porterie, est entierement conforme à ces vûes. Le bruit qui résulte du jeu des ressorts différens des armes à feu, est le premier auquel il tente d'habituer le cheval. Il fait mouvoir ces ressorts dès le matin à la porte & aux fenêtres de l'écurie, & ensuite dans l'écurie même avant la distribution de l'avoine ou du fourrage, qui est aussi précédée de l'action de flater, de caresser l'animal, & de s'en approcher avec circonspection, de maniere qu'il puisse flairer ou sentir le bassinet. Cette manoeuvre répetée & continuée chaque fois qu'on doit lui présenter la ration de grain qui lui est destinée, appaise & familiarise peu - à - peu ceux qui semblent être les plus farouches, sur - tout si l'on a encore, & tandis qu'ils mangent, le soin de laisser les pistolets devant eux & dans l'auge. Alors on brûle des amorces, en observant les mêmes gradations; & sans oublier qu'il est d'une nécessité indispensable d'accoûtumer le cheval à l'odeur de la poudre, & de le mettre par conséquent à portée de la recevoir. Des amorces on en vient aux coups à poudre; on n'employe que la demi - charge, & les armes ne sont point bourrées. Enfin M. de la Porterie conseille de frapper de grands coups de bâtons sur les portes, pour suppléer au défaut de la quantité de munition dont les régimens auroient besoin à cet effet; & la fréquente répetition du mot feu, pour habituer l'animal à ce commandement, qu'il redoute souvent autant que le feu même.

Telles sont les opérations qui se pratiquent dans l'écurie: celles qu'il prescrit ensuite dans le dehors, concourent au même but, & ne tendent qu'à confirmer le cheval, & à le guérir de toute appréhension. On place & l'on assûre dans un lieu convenable, des especes d'auges volantes, à l'effet d'y dé<cb-> poser différentes portions d'avoine. On monte quelques chevaux que l'on mene à ces auges, & devant lesquels marchent des hommes à pié qui font joüer & mouvoir les ressorts des armes dont ils sont munis; & qui arrivés dans l'endroit fixé, les portent aux naseaux de ces animaux. Tandis qu'ils commencent à manger leur avoine, un ou deux de ces hommes à pié tournent autour d'eux, & leur font entendre de nouveau & par intervalle le bruit des ressorts. On les fait reculer encore à dix ou douze pas. Quand ils sont éloignés ainsi de l'auge, les hommes à pié s'en approchent, meuvent les chiens & les platines, pendant qu'on sollicite & qu'on presse les chevaux de se porter en - avant, & de revenir au lieu qu'ils ont abandonné; après quoi on leur permet de manger: & on les interrompt de même plusieurs fois, jusqu'à ce qu'il ne reste plus rien de leur ration. On les reconduit dans l'écurie & à leur place avec le même appareil; on les y flate, on leur parle, & on leur fait sentir les armes.

C'est avec de semblables précautions & de tels procédés plus ou moins long - tems mis en usage, que l'on parvient à leur ôter entierement la crainte & l'effroi que peuvent leur inspirer les amorces & le bruit des pistolets, mousquetons ou fusils que l'on décharge. Dans la leçon qui suit immédiatement celle que nous venons de détailler, il faut seulement observer qu'aucun grain de poudre & qu'aucun éclat de la pierre n'atteignent le nez du cheval, ce qui le révolteroit, & le rendroit infiniment plus difficile à réduire & à apprivoiser; & dans la manoeuvre qui consiste à tirer des coups à poudre, les armes étant bourrées, on doit faire attention, 1° de ne point les adresser directement sous les auges, afin de ne chasser ni terre ni gravier contre ses jambes; 2° de tenir en - haut le bout des pistolets lorsqu'on les tirera, les chevaux ayant reculé, pour que les bourres ne les offensent point & ne soient point dirigées vers eux, & à l'effet de les accoûtumer à les voir enflammées, supposé qu'elles tombent sur le chemin qu'ils ont à faire pour se rapprocher de leur avoine.

Dans les exercices, M. de la Porterie ne s'écarte point de cet ordre; mais soit qu'il fasse tirer des pistolets non - amorcés, soit qu'il fasse brûler des amorces, soit qu'il s'agisse d'une véritable décharge de la part de deux troupes vis - à - vis l'une de l'autre, il faut toûjours faire halte pour tirer, & marcher ensuite en - avant, au lieu de faire demi - tour à droite sur le coup; mouvement pernicieux, & auquel les chevaux ne sont que trop disposés au moindre objet qui les épouvante.

Du reste nous avons simplement ici rendu ses idées & développé ses principes, nous ne saurions en proposer de meilleurs; & nous osons assûrer qu'il suffira de les appliquer à - propos, de s'armer de la patience qu'exige la réitération de ces leçons, & de saisir & de suivre exactement l'esprit dans lequel il pratique, pour réussir pleinement dans cette partie essentielle de l'éducation des chevaux. (e)

Feu (Page 6:636)

Feu, (marque de) Manége, Maréchal. Nous appellons de ce nom le roux éclatant quoiqu'obscur, dont est teint & coloré naturellement le poil de certains chevaux bais - brun, à l'endroit des flancs, du bout du nez & des fesses. Ce cheval, disons nous, a des marques de feu; ces marques sont directement opposées à celle du cheval bai - brun, fessés lavées, qui est nommé ainsi, lorsque ces mêmes parties sont couvertes d'un poil jaune, mais mort, éteint & blanchâtre. (e)

Feu (Page 6:636)

Feu, (mal de feu) Maréchal. Je ne sai pourquoi les auteurs qui ont écrit sur l'Hippiatrique nomment ainsi la fievre ardente dans le cheval; il me semble que les choses devroient tirer & prendre leur dénomination de ce qu'elles sont en effet. Voyez Fievre. (e)

Next page


The Project for American and French Research on the Treasury of the French Language (ARTFL) is a cooperative enterprise of Analyse et Traitement Informatique de la Langue Française (ATILF) of the Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), the Division of the Humanities, the Division of the Social Sciences, and Electronic Text Services (ETS) of the University of Chicago.

PhiloLogic Software, Copyright © 2001 The University of Chicago.