ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"373"> pas de mauvaise foi, qui fortunoe vitio, vel suo, vel partim fortunoe, partim suo vitio, non solvendo facius foro cessit, dit Cicéron en sa seconde philippique.

La banqueroute proprement dite, qui est toûjours réputée frauduleuse, est lorsque le débiteur s'absente & soustrait malicieusement ses effets, pour faire perdre à ses créanciers ce qui leur est dû.

Le dérangement des affaires du débiteur n'est qualifié de faillite ou de banqueroute, que quand le débiteur est marchand ou négociant, banquier, agent de change, fermier, sous - fermier, receveur, trésorier, payeur des deniers royaux ou publics.

La faillite est réputée ouverte du jour que le débiteur s'est retiré, ou que le scellé a été mis sur ses effets, comme il est dit en l'ordonnance du commerce, tit. ij. art. 1.

On peut ajoûter encore deux autres circonstances qui caractérisent la faillite; l'une est lorsque le débiteur a mis son bilan au greffe; l'autre est lorsque les débiteurs ont obtenu des lettres de répi ou des arrêts de défenses générales: les faillites qui éclatent de cette derniere maniere, sont les plus suspectes & les plus dangereuses, parce qu'elles sont ordinairement préméditées, & que le débiteur peut, tandis que les défenses subsistent, achever de détourner ses effets, au préjudice de ses créanciers.

Ceux qui ont fait faillite, sont tenus de donner à leurs créanciers un état certifié d'eux de tout ce qu'ils possedent & de tout ce qu'ils doivent. Ordonnance de 1673, tit. xj. art. 2.

L'article suivant veut que les négocians, marchands & banquiers en faillite, soient aussi tenus de représenter tous leurs livres & registres, cotés & paraphes, en la forme prescrite par les articles 1, 2, 3, 4, 5, 6 & 7. du tit. iij. de la même ordonnance, pour être remis au greffe des juges & consuls, s'il y en a, sinon de l'hôtel commun des villes, ou ès mains des créanciers, à leur choix.

La déclaration du 13 Juin 1716, en expliquant ces dispositions de l'ordonnance de 1673, veut que tous marchands, négocians, & autres, qui ont fait ou feront faillite, soient tenus de déposer un évat exact, détaillé & certifié véritable de tous leurs effets mobiliers & immobiliers, & de leurs dettes, comme aussi leurs livres & registres au greffe de la jurisdiction consulaire du lieu, ou la plus prochaine, & que faute de ce, ils ne puissent être reçûs à passer avec leurs créanciers aucun contrat d'atermoyement, concordat, transaction, ou autre acte, ni d'obtenir aucune sentence ou arrêt d'omologation d'iceux, ni se prévaloir d'aucun sauf - conduit accordé par leurs créanciers.

Pour faciliter à ceux qui ont fait faillite, le moyen de dresser cet état, la même déclaration veut qu'en cas d'apposition du scellé sur leurs biens & effets, leurs livres & registres soient remis & délivrés après néanmoins qu'ils auront été paraphés par le juge ou autre officier commis par le juge, qui apposera le scellé, & par un des créanciers qui y assisteront; & que les feuillets blancs, si aucun y a, auront été bâtonnés par ledit juge ou autre officier; le tout néanmoins, sans déroger aux usages des priviléges de la conservation de Lyon.

A Florence le débiteur doit se rendre prisonnier avec ses livres, les exhiber & rendre raison de sa conduite; & si la faillite est arrivée par cas fortuit, & qu'il n'y ait pas de sa faute, il n'en est point blâmé, mais il faut qu'il représente ses livres en bonne forme.

L'ordonnance de 1673, tit. xj. art. 4. déclare nuls tous les transports, cessions, ventes & donations de biens meubles ou immeubles, faits par le failli en fraude de ses créanciers, & veut que le tout soit apporté à la masse commune des effets.

Cet article ne fixoit point où ces sortes d'actes commencent à être prohibés; mais le reglement fait pour la ville de Lyon le 2 Juin 1667, art. 13. ordonne que toutes cessions & transports sur les effets des faillis, seront nuls, s'ils ne sont faits dix jours au moins avant la faillite publiquement connue, sans y comprendre néanmoins les viremens des parties faits en bilan, lesquels sont bons & valables, tant que le failli ou son facteur porte bilan.

Cette loi a été rendue générale pour tout le royaume par une déclaration du mois de Novembre 1702, portant que toutes les cessions & transports sur les biens des marchands qui font faillite, seront nuls, s'ils ne sont faits dix jours au moins avant la faillite publiquement connue, comme aussi que les actes & obligations qu'ils passeront devant notaires, ensemble les sentences qui seront rendues contre eux, n'acquerront aucune hypotheque ni privilége sur les créanciers chirographaires, si ces actes & obligations ne sont passés, & les sentences ne sont rendues pareillement dix jours au moins avant la faillite publiquement connue; ce qui a été étendu aux transports faits par les gens d'affaires, en pareil cas de faillite, suivant un arrêt de la cour des aides du 14 Mars 1710.

Tous les actes passés dans les dix jours qui précedent la faillite, sont donc nuls de plein droit, sans qu'il soit besoin de prouver spécialement qu'il y a eu fraude dans ces actes; ce qui n'empêche pas que les actes antérieurs à ces dix jours, ne puissent être déclarés nuls, lorsque l'on peut prouver qu'ils ont été faits en fraude des créanciers.

Ceux qui ont fait faillite ne peuvent plus porter bilan sur la place des marchands ou du change: à Lyon on ne souffre pas qu'ils montent à la loge du change.

Il y a eu plusieurs déclarations du roi qui ont attribué pour un certain tems la connoissance des faillites aux juges - consuls; savoir, celles des 10 Juin & 7 Décembre 1715, 27 Novembre 1717, 5 Août 1721, 3 Mai 1722, 21 Juillet 1726, 7 Juillet 1727, 19 Septembre 1730, & une derniere du 5 Août 1732, qui prorogeoit cette attribution jusqu'au premier Septembre 1733.

Il y a encore eu depuis une autre déclaration du 13 Septembre 1739, concernant les faillites & banqueroutes, qui regle les formalités des affirmations des créanciers & des contrats d'atermoyement. Voy. Bornier sur le tit. jx. de l'ordonnance de 1673, & les mots Affirmation, Atermoyement, Banqueroute, Créanciers, Délibération, Union (A)

FAIM, APPÉTIT (Page 6:373)

* FAIM, APPÉTIT, (Gram. Syn.) l'un & l'autre désignent une sensation qui nous porte à manger. Mais la faim n'a rapport qu'au besoin, soit qu'il naisse d'une longue abstinence, soit qu'il naisse de voracité naturelle, ou de quelque autre cause. L'appétit a plus de rapport au goût & au plaisir qu'on se promet des alimens qu'on va prendre. La faim presse plus que l'appétit; elle est plus vorace; tout mets l'appaise. L'appétit plus patient est plus délicat; certain mets le réveille. Lorsque le peuple meurt de faim, ce n'est jamais la faute de la providence; c'est toûjours celle de l'administration. Il est également dangereux pour la santé de souffrir de la faim, & de tout accorder à son appétit. La faim ne se dit que des alimens; l'appétit a quelquefois une acception plus étendue; & la morale s'en sert pour désigner en général la pente de l'ame vers un objet qu'elle s'est représentée comme un bien, quoiqu'il n'arrive que trop souvent que ce soit un grand mal.

Faim (Page 6:373)

Faim, s. f. (Physiol.) en grec LIMO/S2, WEINH; par les auteurs latins esuritio, cibi cupiditas, cibi appetentia; sensation plus ou moins importune, qui nous solli<pb-> [p. 374] cite, nous presse de prendre des alimens, & qui cesse quand on a satisfait au besoin actuel qui l'excite.

Quelle sensation singuliere! quel merveilleux sens que la saim! Ce n'est point précisément de la douleur, c'est un sentiment qui ne cause d'abord qu'un petit chatouillement, un ébranlement leger; mais qui se rend insensiblement plus importun, & non moins difficile à supporter que la douleur même: enfin il devient quelquefois si terrible & si cruel, qu'on a vû armer les meres contre les propres entrailles de leurs enfans, pour s'en faire malgré elles d'affreux festins. Nos histoires parlent de ces horreurs, commises au siége des villes de Sancerre & de Paris, dans le triste tems de nos guerres civiles. Lisez - en la peinture dans la Henriade de M. de Voltaire, & ne croyez point que ce soit une fiction poétique. Vous trouverez dans l'Ecriture - sainte de pareils exemples de cette barbarie: manus mulierum misericordium coxerune filios suos, facti sunt cibus earum, dit Ezéchiel, ch. v. V. 10. Et Josephe, au liv. V. ch. xxj. de la guerre des Juifs, raconte un trait fameux de cette inhumanité, qu'une mere excrça contre son fils pendant le dernier siége de Jérusalem par les Romains.

On recherche avec empressement quelles sont les causes de la faim, sans qu'il soit possible de rien trouver qui satisfasse pleinement la curiosité des Physiologistes. Il est cependant vraissemblable qu'on ne pent guere soupçonner d'autres causes de l'inquiétude qui nous porte à desirer & à rechercher les alimens, que la structure de l'organe de cette sensation, l'action du sang qui circule dans les vaisseaux de l'estomac, celle des liqueurs qui s'y filtrent, celle de la salive, du suc gastrique, pancréatique, & finalement l'action des nerfs lymphatiques.

Mais il ne faut point perdre ici de vûe que la sensation de la faim, celle de la soif, & celle du goût, ont ensemble la liaison la plus étroite, & ne sont, à proprement parler, qu'un organe continu. C'est ce que nous prouverons au mot Gout (Physiolog.). Continuons a présent à établir les diverses causes de la faim que nous venons d'indiquer.

Le ventricule vuide est froissé par un mouvement continuel; ce qui occasionne un frotement dans les rides & les houpes nerveuses de cette partie. Il paroît si vrai que le frotement des houpes & des rides nerveuses de l'estomac est une des causes de la faim, que les poissons & les serpens qui manquent de ces organes, ont peu de faim, & joüissent de la faculté de pouvoir jeûner long - tems. Mais d'où naît ce froissement? Il vient principalement de ce que le sang ne pouvant circuler aussi librement dans un estomac flasque, que lorsque les membranes de ce sac sont tendues, il s'y ramasse & fait gonfler les vaisseaux: ainsi les vaisseaux gonflés ont plus d'action, parce que leurs battemens sont plus forts; or ce surcroît d'action doit chatouiller tout le tissu nerveux du viscere, & l'irriter ensuite en rapprochant les rides les unes des autres. Joignez à cela l'action des muscles propres & étrangers à l'estomac, & vous concevrez encore mieux la nécessité de ces frotemens, à l'occasion desquels la faim est excitée.

Il ne faut pas douter que la salive & le suc stomacal ne produisent une sensation & une sorte d'irritation dans les houpes nerveuses du ventricule; on l'éprouve à chaque moment en avalant sa salive, puisque l'on sent alors un picotement agréable si l'on se porte bien: d'ailleurs l'expérience nous apprend que dès que la salive est viciée ou manque de couler, l'appétit cesse. Les soldats émoussent leur saim en fumant du tabac, qui les fait beaucoup cracher. Quand Verheyen, pour démontrer que la salive ne contribuoit point à la faim, nous dit qu'il se coucha sans souper, cracha toute sa salive le lendemain matin, & n'eut pas moins d'appétit à dîner, il ne fait que prouver une chose qu'on n'aura point de peine à croire, je veux dire qu'un homme dîne bien quand il n'a pas soupé la veille. La salive & le suc gastrique sont donc de grands agens de la faim, & d'autant plus grands, qu'ils contribuent beaucoup à la trituration des alimens dans l'estomac, & à leur chylification.

Cependant pour que la salive excite l'appétit, il ne faut pas qu'elle soit trop abondante jusqu'à inonder l'estomac; il ne faut pas aussi qu'elle le soit trop peu; car dans le premier cas, le frotement ne se fait point sentir, il ne porte que sur l'humeur salivaire; & dans le second, les papilles nerveuses ne sont point assez picotées par les sels de la salive: d'où il résulte que ces deux causes poussées trop loin, ôtent la faim. Mais puisqu'à force de cracher, on n'a point d'appétit, faut - il faire diette jusqu'à ce qu'il revienne? Tout au contraire, il faut prendre des alimens pour remédier à l'épuisement où on se trouveroit, & réparer les sucs salivaires par la boisson. D'ailleurs la mastication attire toûjours une nouvelle salive, qui descend avec les alimens, & qui servant à leur digestion, redonne l'appétit.

Il est encore certain que le suc du pancréas & la bile contribuent à exciter la faim; on trouve beaucoup de bile dans le ventricule des animaux qui sont morts de faim; le pylore relâché, laisse facilement remonter la bile du duodenum, lorsque cet intestin en regorge: si cependant elle étoit trop abondante ou putride, l'appétit seroit détruit, il faudroit vuider l'estomac pour le renouveller, & prendre des boissons acidules pour émousser l'acrimonie bilieuse.

Enfin l'imagination étend ici ses droits avec empire. Comme on sait par l'expérience que les alimens sont le remede de cette inquiétude que nous appellons la faim, on les desire & on les recherche. L'imagination qui est maîtrisée par cette impression, se porte sur tous les objets qui ont diminué ce sen, timent, ou qui l'ont rendu plus agréable: mais si elle est maîtrisée quelquefois par ce sentiment, elle le maîtrise à son tour, elle le forme, elle produit le dégoût & le goût, suivant ses caprices, ou suivant les impressions que font les nerfs lympathiques dans le cerveau. Par exemple, dès que l'utérus est dérangé, l'appétit s'émousse, des goûts bisarres lui succedent: au contraire dès que cette partie rentre dans ses fonctions, l'appétit fait ressentir son impression ordinaire. Cet appétit bisarre s'appelle malacie. Voyez Malacie.

Voilà, ce me semble, les causes les plus vraissemblables de la faim. Celles de l'amour, c'est - à - dire de l'instinct qui porte les deux sexes l'un vers l'autre, seroient - elles les mêmes? Comme de la structure de l'estomac, du gonflement des vaisseaux, du mouvement du sang & des nerfs dans ce viscere, de la filtration du suc gastrique, de l'empire de l'imagination sur le goût, il s'ensuit un sentiment dont les alimens sont le remede; de même de la structure des parties naturelles, de leur plénitude, de la filtration abondante d'une certaine liqueur, n'en résulte - il pas un mouvement dans ces organes; mouvement qui agit ensuite par les nerfs sympathiques sur l'imagination, cause une vive inquiétude dans l'esprit, un desir violent de finir cette impression, enfin un penchant presque invincible qui y entraîne. Tout cela pourroit être. Mais il ne s'agit point ici d'entrer dans ces recherches délicates; c'est assez, si les causes de la faim que nous avons établies, répondent généralement aux phénomenes de cette sensation. M. Senac le prétend dans sa physiologie: le lecteur en jugera par notre analyse.

1°. Quand on a été un peu plus long - tems que de coûtume sans manger, l'appétit s'évanoüit: cela se conçoit, parce que le ventricule se resserre par

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