ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"349"> fité de quelques - unes de ses réflexions sur la fable, & nous renvoyons encore le lecteur à son discours, comme à un morceau de poétique excellent à beaucoup d'égards. Mais avec la même sincérité nous avons crû devoir observer ses erreurs dans la théorie, & ses fautes dans la pratique, ou du moins ce qui nous a paru tel; c'est au lecteur à nous juger.

Comme Lafontaine a pris d'Esope, de Phedre, de Pilpay, &c. ce qu'ils ont de plus remarquable, & que deux exemples nous suffisoient pour développer nos principes, nous nous en sommes tenus aux deux fabulistes françois. Si l'on veut connoître plus particulierement les anciens qui se sont distingués dans ce genre de poésie, on peut consulter l'article Fabuliste. Article de M. Marmontel.

Fable (Page 6:349)

Fable, (Belles - Lettr.) fiction morale. Voyez Fiction.

Dans les poëmes épique & dramatique, la fable, l'action, le sujet, sont communément pris pour synonymes; mais dans une acception plus étroite, le sujet du poëme est l'idée substantielle de l'action: l'action par conséquent est le développement du sujet, l'intrigue est cette même disposition considérée du côté des incidens qui nouent & dénouent l'action.

Tantôt la fable renferme une vérité cachée, comme dans l'Iliade; tantôt elle présente directement des exemples personnels & des vérités toutes nues, comme dans le Télémaque & dans la plûpart de nos tragédies. Il n'est donc pas de l'essence de la fable d'être allégorique, il suffit qu'elle soit morale, & c'est ce que le P. le Bossu n'a pas assez distingué.

Comme le but de la Poésie est de rendre, s'il est possible, les hommes meilleurs & plus heureux, un poëte doit sans doute avoir égard dans le choix de son action, à l'influence qu'elle peut avoir sur les moeurs; &, suivant ce principe, on n'auroit jamais dû nous présenter le tableau qui entraîne OEdipe dans le crime, ni celui d'Electre criant au parricide Oreste: frappe, frappe, elle a tué notre pere.

Mais cette attention générale à éviter les exemples qui favorisent les méchans, & à choisir ceux qui peuvent encourager les bons, n'a rien de commun avec la regle chimérique de n'inventer la fable & les personnages d'un poëme qu'après la moralité; méthode servile & impraticable, si ce n'est dans de petits poëmes, comme l'apologue, où l'on n'a ni les grands ressorts du pathétique à mouvoir, ni une longue suite de tableaux à peindre, ni le tissu d'une intrigue vaste à former. Voyez Epopée.

Il est certain que l'Iliade renferme la même vérité que l'une des fables d'Esope, & que l'action qui conduit au développement de cette vérité, est la même au fond dans l'une & dans l'autre; mais qu'Homere, ainsi qu'Esope, ait commencé par se proposer cette vérité; qu'ensuite il ait choisi une action & des personnages convenables, & qu'il n'ait jetté les yeux sur la circonstance de la guerre de Troye, qu'après s'être décidé sur les caracteres fictifs d'Agamemnon, d'Achille, d'Hector, &c. c'est ce qui n'a pû tomber que dans l'idée d'un spéculateur qui veut mener, s'il est permis de le dire, le génie à la lisiere. Un sculpteur détermine d'abord l'expression qu'il veut rendre, puis il dessine sa figure, & choisit enfin le marbre propre à l'exécuter; mais les évenemens historiques ou fabuleux, qui sont la matiere du poëme héroïque, ne se taillent point comme le marbre: chacun d'eux a sa forme essentielle qu'il n'est permis que d'embellir; & c'est par le plus ou le moins de beautés qu'elle présente ou dont elle est susceptible; que se décide le choix du poëte: Homere lui - même en est un exemple.

L'action de l'Odyssée prouve, si l'on veut, qu'un état ou qu'une famille souffre de l'absence de son chef; mais elle prouve encore mieux qu'il ne faut point abandonner ses intérêts domestiques pour se mêler des intérêts publics, ce qu'Homere certainement n'a pas eu dessein de faire voir.

De même on peut conclure de l'action de l'Enéïde, que la valeur & la piété réunies sont capables des plus grandes choses; mais on peut conclure aussi qu'on fait quelquefois sagement d'abandonner une femme après l'avoir séduite, & de s'emparer du bien d'autrui quand on le trouve à sa bienséance; maximes que Virgile étoit bien éloigné de vouloir établir.

Si Homere & Virgile n'avoient inventé la fable de leurs poëmes qu'en vûe de la moralité, toute l'action n'aboutiroit qu'à un seul point; le dénouement seroit comme un foyer où se réuniroient tous les traits de lumiere répandus dans le poëme, ce qui n'est pas: ainsi l'opinion du pere le Bossu est démentie par les exemples mêmes dont il prétend l'autoriser.

La fable doit avoir différentes qualités, les unes particulieres à certains genres, les autres communes à la Poésie en général. Voyez pour les qualités communes, les articles Fiction, Intérêt, Intrigue, Unité , &c. Voyez pour les qualités particulieres, les divers genres de Poésie, à leurs articles.

Sur - tout comme il y a une vraissemblance absolue & une vraissemblance hypothétique ou de convention, & que toutes sortes de poëmes ne sont pas indifféremment susceptibles de l'une & de l'autre, voyez, pour les distinguer, les articles Fiction, Merveilleux & Tragédie. Article de M. Marmontel.

FABLIAUX (Page 6:349)

FABLIAUX, s. m. (Littérat. franç.) Les anciens contes connus sous le nom de fabliaux, sont - des poëmes qui, bien exécutés, renferment le récit élégant & naïf d'une action inventée, petite, plus ou moins intriguée, quoique d'une certaine proportion, mais agréable ou plaisante, dont le but est d'instruire ou d'amuser.

Il nous reste plusieurs manuscrits qui contiennent des fabliaux: il y en a dans différentes bibliotheques, & sur - tout dans celle du Roi; mais un manuscrit des plus considérables en ce genre, est celui de la bibliotheque de saint Germain des Prés, n°. 1830. Les auteurs les moins anciens dont on y trouve les ouvrages, paroissent être du regne de S. Louis.

Ces sortes de poésies du xij. & xiij. siecles, prouvent que dans les tems de la plus grande ignorance, non - seulement on a écrit, mais qu'on a écrit en vers: le manuscrit de l'abbaye de S. Germain en contient plus de 150 mille. M. le comte de Caylus en a extrait quelques morceaux dans son mémoire sur les fabliaux, inséré au tome XX. du recueil de l'académie des Inscript. & Belles - Lettres. Cependant le meilleur des fabliaux de ce manuscrit, ainsi que ceux dont le plan est le plus exact, sont trop libres pour être cités; & en même tems, au milieu des obscénités qu'ils renferment, on y trouve de pieuses & longues tirades de l'ancien Testament. Une telle simplicité fait - elle l'éloge de nos peres? Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

FABRICATION (Page 6:349)

* FABRICATION, s. f. terme d'Art méchan. c'est l'action par laquelle on exécute certains ouvrages selon les regles prescrites. Il s'applique plus fréquemment aux arts qui employent la laine, le fil, le coton, &c. qu'aux autres. On dit la fabrication d'une étoffe; ainsi faire est plus général que fabriquer.

Fabrication (Page 6:349)

Fabrication, s. m. à la Monnoie, est l'exécution d'une ordonnance qui prescrit la fonte & le monnoyage d'une quantité de métal. Voyez Monnoie.

FABRICIEN (Page 6:349)

FABRICIEN, s. m. (Hist. mod.) officier ecclésiastique ou laïc, chargé du soin du temporel des églises. C'est dans les paroisses la même chose que le marguillier. Dans les chapitres, c'est un chanoine chargé des réparations de l'église, de celle des biens, fermes, &c. & de leur visite, dont il perçoit les revenus & en compte au chapitre. On le nomme en quel<pb-> [p. 350] ques endroits chambrier. Dans certains chapitres il est perpétuel; dans d'autres il n'est qu'à tems, amovible ou révocable à la volonté du chapitre. (G)

FABRIQUANT (Page 6:350)

* FABRIQUANT, s. m. (Commerce.) On appelle ainsi celui qui travaille ou qui fait travailler pour son compte des ouvrages d'ourdissage de toute espece, en soie, en laine, en fil, en coton, &c. Il est rare qu'on applique à d'autres arts le terme de fabriquant. Je crois celui de fabrique un peu plus étendu.

FABRIQUE DES EGLISES (Page 6:350)

FABRIQUE DES EGLISES, (Jurisp.) Ce terme pris dans le sens littéral, signifie la construction des églises. On entend aussi par - là les reconstructions & autres réparations quelconques, & généralement toutes les dépenses qui se font, soit pour le bâtiment, soit pour sa décoration, & pour les vases sacrés, livres & ornemens qui servent au service divin.

On entend encore par ce même terme de fabrique, le temporel des églises, consistant, soit en immeubles, ou en revenus ordinaires ou casuels, affectés à l'entretien de l'église & à la célébration du service divin.

Enfin par le terme de fabrique on entend aussi fort souvent ceux qui ont l'administration du temporel de l'église, lesquels en certaines provinces sont appellés fabriciens, en d'autres marguilliers, luminiers, &c. La fabrique est aussi quelquefois prise pour le corps ou assemblée de ceux qui ont cette administration du temporel. Le bureau ou lieu d'assemblée est aussi quelquefois désigné sous le nom de fabrique.

Dans la primitive Eglise, tous les biens de chaque église étoient en commun; l'évêque en avoit l'intendance & la direction, & ordonnoit comme il jugeoit à propos de l'emploi du temporel, soit pour la fabrique, soit pour la subsistance des ministres de l'église.

Dans presque tous les lieux les évêques avoient sous eux des économes, qui souvent étoient des prêtres & des diacres, auxquels ils confioient l'administration du temporel de leur église, dont ces économes leur rendoient compte.

Ces économes touchoient les revenus de l'église, & avoient soin de pourvoir à ses nécessités, pour lesquelles ils prenoient sur les revenus de l'église ce qui étoit nécessaire; ensorte qu'ils faisoient vraiment la fonction de fabriciens.

Dans la neuvieme session du concile de Chalcedoine, tenu en 451, on obligea les évêques, à l'occasion d'Ibas évêque d'Edesse, de choisir ces économes de leur clergé; de leur donner ordre sur ce qu'il convenoit faire, & de leur faire rendre compte de tout. Les évêques pouvoient déposer ces économes, pourvû que ce fût pour quelque cause légitime.

En quelques endroits, sur - tout dans l'église greque, ces économes avoient sous eux des co - adjuteurs.

On pratiquoit aussi à - peu - près la même chose dans les monasteres; on choisissoit entre les religieux les plus anciens, celui qui étoit le plus propre à gouverner le temporel pour lui.

Vers le milieu du jv. siecle les choses changerent de forme dans l'église d'Occident; les revenus de chaque église ou évêché furent partagés en quatre lots ou parts égales, la premiere pour l'évêque, la seconde pour son clergé & pour les autres clercs du diocèse, la troisieme pour les pauvres, & la quatrieme pour la fabrique, c'est - à - dire pour l'entretien & les réparations de l'église.

Ce partage fut ainsi ordonné dans un concile tenu à Rome du tems de Constantin. La quatrieme portion des revenus de chaque église fut destinée pour la réparation des temples & des églises.

Le pape Simplicius écrivoit à trois évêques que ce quart devoit être employé ecclesiasticis fabriciis. C'est apparemment de - là qu'est venu le terme de fabrique.

On trouve aussi dans des lettres du pape Gelase; en 494, dont l'extrait est rapporté dans le canon vobis XXIII. causâ xij. quest. 1. que l'on devoit faire quatre parts, tant des revenus des fonds de l'église, que des oblations des fideles; que la quatrieme portion étoit pour la fabrique, fabricis verò quartam; que ce qui resteroit de cette portion, la dépense annuelle prélevée, seroit remis à deux gardiens idoines, choisis à cet effet, afin que s'il survenoit quelque dépense plus considérable, major fabrica, on eût la ressource de ces deniers, ou que l'on en achetât quelque fonds.

Le même pape repete cette disposition dans les can. 25. 26. & 27. au même titre. Il se sert par - tout du terme fabricis, qui signifie en cet endroit les construction & réparations; & la glose observe sur le canon 27, que la conséquence qui résulte naturellement de tous ces canons, est que les laïcs ne sont point tenus aux réparations de la fabrique, mais seulement les clercs.

Saint Grégoire le Grand, dans une lettre à saint Augustin apôtre d'Angleterre, prescrit pareillement la reserve du quart pour la fabrique.

Le decret de Gratien - contient encore, loco citato, un canon (qui est le 31.) prétendu tiré d'un concile de Tolede, sans dire lequel, où la division & l'emploi des revenus ecclésiastiques sont ordonnés de même; ensorte, est - il dit, que la premiere part soit employée soigneusement aux réparations des titres, c'est à - dire des églises & à celles des cimetieres, secundùm apostolorum proecepta: mais ce canon ne se trouve dans aucun des conciles de Tolede. La collection des canons faite par un auteur incertain, qui est dans la bibliotheque vaticane, attribue celui - ci au pape Sylvestre: on n'y trouve pas ces paroles, secundùm apostolorum proecepta; & en effet du tems des apôtres il n'étoit pas question de fabriques dans le sens où nous le prenons aujourd'hui, ni même de réparations.

Quoi qu'il en soit de l'autorité de ce canon, celles que l'on a déjà rapportées sont plus que suffisantes au moins pour établir l'usage qui s'observoit depuis le jv. siecle par rapport aux fabriques des églises; usage qui s'est depuis toûjours soûtenu.

Grégoire II. écrivant en 729 aux évêques & au peuple de Thuringe, leur dit qu'il avoit recommandé à Boniface leur évêque de faire quatre parts des biens d'église, comme on l'a déjà expliqué, dont une étoit pour la fabrique, ecclesiasticis fabricis reservandam.

En France on a toûjours eu une attention particuliere pour la fabrique des églises.

Le 57e canon du concile d'Orléans, tenu en 511 par ordre de Clovis, destine les fruits des terres que les églises tiennent de la libéralité du roi, aux réparations des églises, à la nourriture des prêtres & des pauvres.

Un capitulaire de Charlemagne, de l'année 801, ordonne le partage des dixmes en quatre portions, pour être distribuées de la maniere qui a déjà été dite: la quatrieme est pour la fabrique, quarta in fabricâ ipsius ecclesioe.

Cette division n'avoit d'abord lieu que pour les fruits; & comme les évêques & les clercs avoient l'administration des portions de la fabrique & des pauvres, ce reglement fut observé plus ou moins exactement dans chaque diocèse, selon que les administrateurs de la part de la fabrique étoient plus ou moins scrupuleux.

Dans la suite l'administration de la part des fabriques, dans les cathédrales & collégiales, fut confiée à des clercs qu'on appella marguilliers en quelques églises. On leur adjoignit des marguilliers laïcs, comme dans l'église de Paris, où il y en avoit dès l'an 1204.

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