ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"98"> ter la chaleur jusqu'au haut de l'étuve, afin que les pains soient tous étuvés dans le même tems. Il faut faire un feu toujours égal. Si dans les premiers jours on en faisoit, il seroit à craindre que l'eau du pain ne tombât dans la pâte; ce qui le feroit fouler, & donneroit beaucoup de peine à refaire: si on en fait trop, une grande quantité de pains rougiront au lieu de blanchir.

ETUVÉE (Page 6:98)

ETUVÉE, s. f. en terme de Cuisine, est le nom qu'on donne à une sorte de préparation de poisson, que l'on fait cuire dans de bon vin, avec oignons, champignons, & épices; le tout ensemble sur un grand feu dont on fait monter la flamme dans la casserole poissonniere, ou autre ustensile dont on se sert pour lors, afin de brûler le vin.

ETUVER (Page 6:98)

ETUVER, en terme de Cirier, c'est mettre dans un lit des cierges nouvellement jettés, afin de concentrer la chaleur & de la réduire au degré nécessaire, pour recevoir les impressions qu'il faut donner à la cire.

ETYMOLOGIE (Page 6:98)

ETYMOLOGIE, s. f. (Lit.) c'est l'origine d'un mot. Le mot dont vient un autre mot s'appelle primitif, & celui qui vient du primitif s'appelle dérivé. On donne quelquefois au primitif même le nom d'étymologie; ainsi l'on dit que pater est l'étymologie de pere.

Les mots n'ont point avec ce qu'ils expriment un rapport nécessaire; ce n'est pas même en vertu d'une convention formelle & fixée invariablement entre les hommes, que certains sons réveillent dans notre esprit certaines idées. Cette liaison est l'effet d'une habitude formée dans l'enfance à force d'entendre répéter les mêmes sons dans des circonstances à - peu - près semblables: elle s'établit dans l'esprit des peuples, sans qu'ils y pensent; elle peut s'effacer par l'effet d'une autre habitude qui se formera aussi sourdement & par les mêmes moyens. Les circonstances dont la répétition a determiné dans l'esprit de chaque individu le sens d'un mot, ne sont jamais exactement les mêmes pour deux hommes; elles sont encore plus différentes pour deux générations. Ainsi à considérer une langue indépendamment de ses rapports avec les autres langues, elle a dans elle - même un principe de variation. La prononciation s'altere en passant des peres aux enfans; les acceptions des termes se multiplient, se remplacent les unes les autres; de nouvelles idées viennent accroître les richesses de l'esprit humain; il faut détourner la signification primitive des mots par des métaphores; la fixer à certains points de vûe particuliers, par des inflexions grammaticales; réunir plusieurs mots anciens, pour exprimer les nouvelles combinaisons d'idées. Ces sortes de mots n'entrent pas toûjours dans l'usage ordinaire: pour les comprendre, il est nécessaire de les analyser, de remonter des composés ou dérivés aux mots simples ou radicaux, & des acceptions métaphoriques au sens primitif. Les Grecs qui ne connoissoient guere que leur langue, & dont la langue, par l'abondance de ses inflexions grammaticales, & par sa facilité à composer des mots, se prêtoit à tous les besoins de leur génie, se livrerent de bonne heure à ce genre de recherches, & lui donnerent le nom d'étymologie, c'est - à - dire, connoissance du vrai sens des mots; car XTUMUN TG=S2 LEC?WS2 signifie le vrai sens d'un mot, d'ETOMUS2, vrai.

Lorsque les Latins étudierent leur langue, à l'exemple des Grecs, ils s'apperçurent bien - tôt qu'ils la devoient presque toute entiere à ceux - ci. Le travail ne se borna plus à analyser les mots d'une seule langue, à remonter du dérivé à sa racine; on apprit à chercher les origines de sa langue dans des langues plus anciennes, à décomposer non plus les mots, mais les langues: on les vit se succéder & se mêler, comme les peuples qui les parlent. Les recherches s'étendirent dans un champ immense; mais quoiqu'elles devinssent souvent indifférentes pour la connoissance du vrai sens des mots, on garda l'ancien nom d'étymologie. Aujourd'hui les Savans donnent ce nom à toutes les recherches sur l'origine des mots; & c'est dans ce sens que nous l'employcrons dans cet article.

L'Histoire nous a transmis quelques étymologies, comme celles des noms des villes ou des lieux auxquels les fondateurs ou les navigateurs ont donné, soit leur propre nom, soit quelque autre relatif aux circonstances de la fondation ou de la découverte. A la reserve du petit nombre d'étymologies de ce genre, qu'on peut regarder comme certaines, & dont la certitude purement testimoniale ne dépend pas des regles de l'art étymologique, l'origine d'un mot est en général un fait à deviner, un fait ignoré, auquel on ne peut arriver que par des conjectures, en partant de quelques faits connus. Le mot est donné; il faut chercher dans l'immense variété des langues, les différens mots dont il peut tirer son origine. La ressemblance du son, l'analogie du sens, l'histoire des peuples qui ont successivement occupé la même contrée, ou qui y ont entretenu un grand commerce, sont les premieres lueurs qu'on suit: on trouve enfin un mot assez semblable à celui dont on cherche l'étymologie. Ce n'est encore qu'une supposition qui peut être vraie ou fausse: pour s'assûrer de la vérité, on examine plus attentivement cette ressemblance; on suit les altérations graduelles qui ont conduit successivement du primitif au dérivé; on pese le plus ou le moins de facilité du changement de certaines lettres en d'autres; on discute les rapports entre les concepts de l'esprit & les analogies délicates qui ont pû guider les hommes dans l'application d'un même son à des idées très - différentes; on compare le mot à toutes les circonstances de l'énigme: souvent il ne soûtient pas cette épreuve, & on en cherche un autre; quelquefois (& c'est la pierre de touche des étymologies, comme de toutes les vérités de fait) toutes les circonstances s'accordent parfaitement avec la supposition qu'on a faite; l'accord de chacune en particulier forme une probabilité; cette probabilité augmente dans une progression rapide, à mesure qu'il s'y joint de nouvelles vraissemblances; & bien - tôt, par l'appui mutuel que celles - ci se prêtent, la supposition n'en est plus une, & acquiert la certitude d'un fait. La force de chaque vraissemblance en particulier, & leur réunion, sont donc l'unique principe de la certitude des étymologies, comme de tout autre fait, & le fondement de la distinction entre les étymologies possibles, probables, & certaines. Il suit de - là que l'art étymologique est, comme tout art conjectural, composé de deux parties, l'art de former les conjectures ou les suppositions, & l'art de les vérifier; ou en d'autres termes l'invention & la critique: les sources de la premiere, les regles de la seconde, sont la division naturelle de cet article; car nous n'y comprendrons point les recherches qu'on peut faire sur les causes primitives de l'institution des mots, sur l'origine & les progrès du langage, sur les rapports des mots avec l'organe qui les prononce, & les idées qu'ils expriment. La connoissance philosophique des langues est une science très - vaste, une mine riche de vérités nouvelles & intéressantes. Les étymologies ne sont que des faits particuliers sur lesquels elle appuie quelquefois des principes généraux; ceuxci, à la vérité, rendent à leur tour la recherche des étymologies plus facile & plus sûre; mais si cet article devoit renfermer tout ce qui peut fournir aux étymologistes des conjectures ou des moyens de les vérifier, il faudroit qu'il traitât de toutes les Sciences. Nous renvoyons donc sur ces matieres aux articles Grammaire, Interjection, [p. 99] Langue, Analogie, Mêlange, Origine & Analyse des Langues, Métaphore, Onomatopée, Ortographf, Signe , &c. Nous ajoûterons seulement, sur l'utilité des recherches étymologiques, quelques réflexions propres à désabuser du mépris que quelques personnes affectent pour ce genre d'étude.

Sources des conjectures étymologiques. En matiere d'étymologie, comme en toute autre matiere, l'invention n'a point de regles bien déterminées. Dans les recherches où les objets se présentent à nous, où il ne faut que regarder & voir, dans celles aussi qu'on peut soûmettre à la rigueur des démonstrations, il est possible de preserire à l'esprit une marche invariable qui le mene sûrement à la vérité: mais toutes les fois qu'on ne s'en tient pas à observer simplement ou à déduire des conséquences de principes connus, il faut deviner; c'est - à - dire qu'il faut, dans le champ immense des suppositions possibles, en saisir une au hasard, puis une seconde, & plusieurs successivement, jusqu'à ce qu'on ait rencontré l'unique vraie. C'est ce qui seroit impossible, si la gradation qui se trouve dans la haison de tous les êtres, & la loi de continuité généralement observée dans la nature, n'etablissoient entre certains faits, & un certain ordre d'autres faits propres à leur servir de causes, une espece de voisinage qui diminue beaucoup l'embarras du choix, en présentant à l'esprit une étendue moins vague, & en le ramenant d'abord du possible au vraissemblable; l'analogie lui trace des routes où il marche d'un pas plus sûr: des causes déjà connues indiquent des causes semblables pour des effets semblables. Ainsi une mémoire vaste & remplie, autant qu'il est possible, de toutes les connoissances relatives à l'objet dont on s'occupe, un esprit exercé à observer dans tous les changemens qui le frappent, l'enchainement des effets & des causes, & à en tirer des analogies; sur - tout l'habitude de se livrer à la méditation, ou, pour mieux dire peut - être, à cette rêverie nonchalante dans laquelle l'ame semble renoncer au droit d'appeller ses pensées, pour les voir en quelque sorte passer toutes devant elles, & pour contempler, dans cette confusion apparente, une foule de tableaux & d'assemblages inattendus, produits par la fluctuation rapide des idées, que des liens aussi imperceptibles que multipliés amenent à la suite les unes des autres; voilà, non les regles de l'invention, mais les dispositions nécessaires à quiconque veut inventer, dans quelque genre que ce soit; & nous n'avons plus ici qu'à en faire l'application aux recherches étymologiques, en indiquant les rapports les plus frappans, & les principales analogies qui peuvent servir de fondement à des conjectures vraissemblables.

1°. Il est naturel de ne pas chercher d'abord loin de soi ce qu'on peut trouver sous sa main. L'examen attentif du mot même dont on cherche l'étymologie, & de tout ce qu'il emprunte, si j'ose ainsi parler, de l'analogie propre de la langue, est donc le premier pas à faire. Si c'est un dérivé, il faut le rappeller à sa racine, en le dépouillant de cet appareil de terminaisons & d'inflexions grammaticales qui le déguisent; si c'est un composé, il faut en séparer les différentes parties: ainsi la connoissance profonde de la langue dont on veut éclaircir les origines, de sa grammaire, de son analogie, est le préliminaire le plus indispensable pour cette étude.

2°. Souvent le résultat de cette décomposition se termine à des mots absolument hors d'usage; il ne faut pas perdre, pour cela, l'espérance de les éclaircir, sans recourir à une langue étrangere: la langue même dont on s'occupe s'est altérée avec le tems; l'étude des révolutions qu'elle a essuyées fe<cb-> ra voir dans les monumens des siecles passés ces mêmes mots dont l'usage s'est perdu, & dont on a conservé les dérivés; la lecture des anciennes chartes & des vieux glossaires en découvrira beaucoup; les dialectes ou patois usités dans les différentes provinces, qui n'ont pas subi autant de variations que la langue polie, ou qui du moins n'ont pas subi les mêmes, en contiennent aussi un grand nombre: c'est là qu'il faut chercher.

3°. Quelquefois les changemens arrivés dans la prononciation effacent dans le dérivé piesque tous les vestiges de sa racine. L'étude de l'ancien langage & des dialectes, fournira aussi des exemples des variations les plus communes de la prononciation; & ces exemples autoriseront à supposer des variations pareilles dans d'autres cas. L'ortographe, qui se conserve lorsque la prononciation change, devient un témoin assez sûr de l'ancien état de la langue, & indique aux étymologistes la filiation des mots, lorsque la prononciation la leur déguise.

4°. Le probleme devient plus compliqué, lorsque les variations dans le sens concourent avec les changemens de la prononciation. Toutes sortes de tropes & de métaphores détournent la signification des mots; le sens figuré fait oublier peu - à - peu le sens propre, & devient quelquefois à son tour le fondement d'une nouvelle figure; ensorte qu'à la longue le mot ne conserve plus aucun rapport avec sa premiere signification. Pour retrouver la trace de ces changemens entés les uns sur les autres, il faut connoître les fondemens les plus ordinaires des tropes & des métaphores; il faut étudier les différens points de vûe sous lesquels les hommes ont envisagé les différens objets, les rapports, les analogies entre les idées, qui rendent les figures plus naturelles ou plus justes. En général, l'exemple du présent est ce qui peut le mieux diriger nos conjectures sur le passé; les métaphores que produisent à chaque instant sous nos yeux les enfans, les gens grossiers, & même les gens d'esprit, ont dû se présenter à nos peres; car le besoin donne de l'esprit à tout le monde: or une grande partie de ces métaphores devenues habituelles dans nos langues, sont l'ouvrage du besoin où les hommes se sont trouvés de faire connoître les idées intellectuelles & morales, en se servant des noms des objets sensibles: c'est par cette raison, & parce que la nécessité n'est pas délicate, que le peu de justesse des métaphores n'autorise pas toûjours à les rejetter des conjectures étymologiques. Il y a des exemples de ces sens détournés, très - bisarres en apparence, & qui sont indubitables.

5°. Il n'y a aucune langue dans l'état actuel des choses qui ne soit formée du mélange ou de l'altération de langues plus anciennes, dans lesquelles on doit retrouver une grande partie des racines de la langue nouvelle: lorsqu'on a poussé aussi loin qu'il est possible, sans sortir de celle - ci, la décomposition & la filiation des mots, c'est à ces langues étrangeres qu'il faut recourir. Lorsqu'on sait les principales langues des peuples voisins, ou qui ont occupé autrefois le même pays, on n'a pas de peine à découvrir quelles sont celles d'où dérive immédiatement une langue donnée, parce qu'il est impossible qu'il ne s'y trouve une très - grande quantité de mots communs à celle - ci, & si peu déguisés que la dérivation n'en peut être contestée: c'est ainsi qu'il n'est pas nécessaire d'être versé dans l'art étymologique, pour savoir que le françois & les autres langues modernes du midi de l'Europe se sont formées par la corruption du latin mêlé avec le langage des nations qui ont détruit l'Empire romain. Cette connoissance grossiere, où mene la connoissance purement historique des invasions succes<pb->

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