ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"46"> les Géometres la considerent, voyez l'art. Géométrie, auquel cette diseussion appartient immédiatement.

Etendue (Page 6:46)

Etendue, (Voix.) La nature a donné à la voix humaine une étendue fixe de tons; mais elle en a varié le son à l'infini, comme les phisionomies.

De la même maniere qu'elle s'est assujettie à certaines proportions constantes dans la formation de nos traits, elle s'est aussi attachée à nous donner un certain nombre de tons qui nous servissent à exprimer nos différentes sensations; car le chant est le premier langage de l'homme. Voyez Chant.

Mais ce chant formé de sons qui tiennent de la nature l'expression du sentiment qui leur est propre, a plus ou moins de force, plus ou moins de douceur, &c. le volume de la voix qui le forme, est ou large ou étroit, lourd ou leger: l'impression qu'il fait sur notre oreille, a des degrés d'agrément; il étonne ou slate, il touche ou il egaye. Voyez Son. Or dans toutes ces différences il y a dans la voix bien organisée qui les produit, un nombre fixe de tons qui forment son étendue, comme dans tous les visages il y a un nombre constant de traits qui forme leur ensemble. Lorsque le chant est devenu un art, l'expérience a décomposé les voix differentes de l'homme, pour en établir la qualité & en apprécier la valeur. Nos Musiciens en France n'ont consulté que la nature, & voici la division qui leur sert de regle.

Dans les voix des femmes, le premier & le second. dessus: ce dernier est aussi appellé bas - dessus. On donne le même nom & on divise de la meme maniere les voix des enfans avant la mue. Voyez Mue.

Les voix d'homme sont tailles ou haute - contres, ou basse - tailles ou basse - contres. Nous regardons comme inutiles les concordans & les faussets.

Nous n'admettons donc en France dans la composition de notre musique vocale, que six sortes de voix, deux dans les femmes, & quatre dans les hommes. La connoissance de leur étendue est nécessaire aux compositeurs: on va l'expliquer par ordre.

Premier dessus chantant: clé de sol sur la seconde ligne, parcourt depuis l'ut au - dessous de la clé, jusqu'au la octave au - dessus de celui de la clé; ce qui fait diatoniquement dix tons & demi.

Second dessus, ou bas - dessus chantant: clé d'ut sur la premiere ligne, donne le sol en - bas au - dessous de la clé, & monte jusqu'au sa octave de celui de la clé; ce qui fait diatoniquement onze tons.

Cette espece de voix est très - rare; on en donne mal - à - propos le nom à des organes plus volumineux & moins étendus que les premiers dessus ordinaires, parce qu'on ne sait quel nom leur donner.

Je dois au surplus avertir que je parle ici, 1° des voix en général: il y en a de plus étendues; mais c'est le très - petit nombre, & les observations dans les arts ne doivent s'arrêter que sur les points généraux: les regles ont des vûes universelles, les cas particuliers ne forment que des exceptions sans conséquence. 2° Qu'en fixant diatoniquement l'étendue ordinaire des voix, on les suppose au ton de l'opéra, par exemple. Il n'y en a point qui, en prenant le ton qui lui est le plus favorable, ne parcoure sans peine àpeu - près deux octaves. Mais elles se trouvent resserrées ou dans le haut ou dans le bas, lorsqu'elles sont obligées de s'assujettir au ton général établi; & c'est de ce ton général qu'il est nécessaire de partir pour se former des idées exactes des objets qu'on veut faire connoître.

La haute - contre: clé d'ut sur la troisieme ligne. Son étendue doit être depuis l'ut au - dessous de la clé, jusqu'à l'ut au - dessus; ce qui fait deux octaves pleines, ou douze tons. Voyez Haute - contre.

Taille: clé d'ut sur la quatrieme ligne. Elle doit donner l'ut au - dessous de la clé, & le la au - dessus; ce qui fait diatoniquement dix tons & demi.

Cette espece de voix est la plus ordinaire à l'homme; on s'en sert peu cependant pour nos théatres & pour notre musique latine. On croit en avoir appercû la cause, 1° dans son étendue, moindre que celle de la haute - contre & de la basse - taille: 2° dans l'copece de ressemblance qu'elle a avec elles. La taille ne forme point le contraste que les sons de la basse - taille & de la haute - contre ont naturellement entr'eux; ce qui donne au chant une variété nécessaire.

Basse - taille: clé de fa sur la quatrieme ligne, donne le sol au - dessous de la clé, & le fa * au - dessus: diatoniquement onze tons & demi. Voyez Bassetaille.

Basse - contre: même clé & même portée en - bas que la basse - taille, mais ne donne que le mi en - haut. Le volume plus large, s'il est permis de se servir de cette expression, en fait une seconde différence. On fait usage de ces voix dans les choeurs; elles remplissent & soûtiennent l'harmonie: on en a trop peu à l'opera, l'effet y gagneroit. Voyez Instrument.

On a déjà dit que le concordant & le fausset étoient regardés comme des voix bâtardes & inutiles. Le premier est une sorte de taille qui chante sur la même clé, & qui ne va que depuis l'ut au - dessous de la clé, jusqu'au sa au - dessus: huit tons & demi diatoniquement.

On voit par le seul exposé, combien on a abusé de nos jours de l'ignorance de la multitude à l'égard d'une voix très - précieuse que nous avons perdue. On veut parler ici de celle du sieur Lepage, qu'on disoit tout - haut n'être qu'un concordant, & qui étoit en effet la plus legere, la mieux timbrée & la moins lourde basse - taille que la nature eût encore offerte en France à l'art de nos Musiciens. Ce chanteur parcouroit d'une voix égale & aisée, plus de tons que n'en avoient encore parcouru nos voix de ce genre les plus vantées. Il avoit de plus une grande facilité pour les traits de chant, qui seuls peuvent l'embellir & le rendre agréable. On lui refusoit l'expression, l'action théatrale, les graces de la déclamation: peut - être en effet n'étoit - il que médiocre dans ces parties; mais quelle voix! & il faut premierement chanter, & avoir dequoi chanter à l'opéra.

Le fausset est une voix de dessus factice; elle parcourt avec un son aigre les mêmes intervalles que les voix de dessus. Il y a des chanteurs qui se le donnent, en conservant la voix qu'ils avoient avant la mue. Voyez Mue. D'autres l'ajoûtent à leur voix naturelle, & c'est une misérable imitation de ce que l'art a la cruauté de pratiquer en Italie.

C'est - là qu'un ancien usage a prévalu sur l'humanité; une opération barbare y produit des voix de dessus, qu'on croit fort supérieures aux voix que la nature a voulu faire; & de ce premier écart on a passé bientôt à un abus dont les inconvéniens surpassent de beaucoup les avantages qu'on en retire.

On a vû plus haut quelle est l'étendue déterminée par la nature des voix de dessus. Les musiciens d'Italie ont trouvé cette étendue trop resserrée; ils ont travaillé dès l'enfance les voix des castrati, & à force d'art ils ont crû en écarter les bornes, parce qu'ils ont enté deux voix factices & tout - à - fait étrangeres, sur la voix donnée. Mais ces trois voix de qualités inégales, laissent toûjours sentir une dissemblance qui montre l'art à découvert, & qui par conséquent dépare toûjours la nature.

L'étendue factice des voix procurée par l'art, ne pouvoit pas manquer d'exciter l'ambition des femmes, qui se destinant au chant, n'avoient cependant qu'une voix naturelle. Dés qu'un dessus artificiel fournissoit (n'importe comment) plusieurs tons dans le haut & dans le bas, qui excédoient l'étendue d'un [p. 47] dessus naturel, il s'ensuivoit que celui - ci paroissoit lui être inférieur, & devenoit en effet moins utile. Les compositeurs resserrés dans les bornes de dix tons & demi, prescrites par la nature, se trouvoient bien plus à leur aise avec des voix factices, qui leur donnoient la liberté de se joüer d'une plus grande quantite d'intervalles, & qui rendoient par consequent leurs compositions beaucoup plus extraordinaires & infiniment moins difficiles. Les voix de femme. si bien saites pour porter l'emotion jusqu'au fond de nos coeurs, n'étoient plus dans leur état naturel qu'un obstacle aux écarts des musiciens; & ils les auroient abandonnées à perpétuité pour se servir des castrati (qu'on a d'ailleurs employés de tous les tems en femmes sur les théatres d'ltalie), si elles n'avoient eu l'adresse & le courage de gâter leurs voix pour s'accommoder aux circonstances.

Ainsi à torce d'art, de travail & de constance, elles ont calqué sur leurs voix plusieurs tons hauts & bas au - deslus & au - dessous du diapason naturel. L'art est tel dans les grands talens, qu'il enchante les ltaliens habitues à ces sortes d'écarts, & qu'il surprend & slate même les bonnes oreilles françoises. Avec cet artifice les temmes se sont soûtenues au théatre, dont elles auroient été bannies, & elles y disputent de talent & de succès avec ces especes bisarres que l'inhumanité leur a donné pour rivales. Voyez Chanteur, Chantre.

A la suite de ces détails, qu'il soit permis de faire deux réflexions. La premiere est suggérée par les principes de l'art. Il n'est & ne doit être qu'une agréable imitation de la nature; ainsi le chant réduit en regles, soûmis à des lois, ne peut être qu'un embellissement du son de la voix humaine; & ce son de la voix n'est & ne doit être que l'expression du sentiment, de la passion, du mouvement de l'ame, que l'art a mtention d'imiter: or il n'est point de situation de l'ame que l'organe, tel que la nature l'a donné, ne puisse rendre.

Puisque le son de la voix (ainsi qu'on l'a dit plus haut, & qu'on le prouve à l'article Chant) est le premier langage de l'homme, les différeas tons qui composent l'étendue naturelle de sa voix, sont donc relatifs aux differentes expressions qu'il peut avoir à rendre, & suffisans pour les rendre toutes. Les tons divers que l'art ajoûte à ces premiers tons donnés, sont donc, 1° superflus; 2° il faut encore qu'ils soient tout - à - fait sans expression, puisqu'ils sont inconnus, étrangers, inutiles à la nature. Ils ne sont donc qu'un abus de l'art, & tels que le seroient dans la Peinture, des couleurs factices, que les diverses modifications de la lumiere naturelle ne sauroient jamais produire.

La seconde réflexion est un crï de douleur & de pitie sur les égaremens & les préjugés qui subjuguent quelquefois des nations entieres, & qui blessent leur sensibilité au point de leur laisser voir de sang - froid les usages les plus barbares. L'humanité, la raison, la religion, sont également outragées par les voix factices, qu'on fait payer si cher aux malheureux à qui on les donne. C'est sur les noirs autels de l'avarice que des peres cruels immolent eux - mêmes leurs fils, leur postérité, & peut - être des citoyens qu'on auroit vû quelque jour la gloire & l'appui de leur patrie.

Qu'on ne croye pas, au reste, qu'une aussi odieuse cruauté produise infailliblement le fruit qu'on en espere; de deux mille victimes sacrifiées au luxe & aux bisarreries de l'art, à peine trouve - t - on trois sujets qui réunissent le talent & l'organe: tous les autres, créatures oisives & languissantes, ne sont plus que le rebut des deux sexes; des membres paralytiques de la société; un fardeau inutile & flétrissant de la terre qui les a produits, qui les nourrit, & qui les porte. Voyez Egalité, Son, Voix, Maître à chanter . (B)

ETENTES, ETATES, PALIS, CIBAUDIERE (Page 6:47)

* ETENTES, ETATES, PALIS, CIBAUDIERE, termes synonymes de Péche; sorte de rets ou filets. Los rets de hauts - pares, dans le ressort de l'amirauté du bourg d'Ault, qui sont les étentes étates ou palis pour la pêehe du poisson passager, sont conformes au calibre prescrit par l'ordonnance de 1681. Les pieces qui ont vingt, trente, quarante, cinquante brasses, ont une brasse ou une brasse & demie de chûte; ces filets sont pour lors montés sur une haute perche, bout - à - terre, bout - à - la - mer. On les tend encore en demi - cercle.

Les pêcheurs qui sont voisins de l'embouchure de la riviere de Brest, où les truites & les saumons entrent volontiers, en font aussi la pêche avec ces silets: ils sont pour lors tendus de la même maniere que les rets traversiers de la côte de basse - Normandie. Les pêcheurs plantent leurs petites perches ou piochons en droite ligne, bout - à - terre, bout - à - la - mer, ainsi que dans les hauts - parcs; mais ils forment à l'extremité un rond où ces poissons s'arrêtent. Cette sorte de pêcherie peut alors être regardée comme une espece de parc de perches & de filets, n'y ayant aucunes claies ni pierres par le pié pour le garnir.

ETERNALS (Page 6:47)

ETERNALS, s. m. pl. (Hist. ecclés.) hérétiques des premiers siecles. Ils croyoient qu'après la résurrection le monde dureroit éternellement tel qu'il est, & que ce grand évenement n'apporteroit aucun changement dans les choses naturelles.

ETERNELLE (Page 6:47)

ETERNELLE, s. f. (Hist. nat. Botan.) clichrysum. Cette plante est ainsi nommée, parce que sa fleur, quoique coupée de dessus le pié, se conserve sans changer de couleur. C'est un petit bouton jaunepâle ou rougeatre, dont la tige & les feuilles sont d'un verd - blanchâtre; elle vient de graine ou de bouture, & ne demande qu'une culture ordinaire. (K)

ETERNITE (Page 6:47)

ETERNITE, (Métaphys.) durée infinie & incommensurable.

On envisage l'éternité ou la durée infinie, comme une ligne qui n'a ni commencement ni fin. Dans les spéculations sur l'espace infini, nous regardons le lieu où nous existons, comme un centre à l'égard de toute l'étendue qui nous environne; dans les spéculations sur l'éternité, nous regardons le tems qui nous est présent, comme le milieu qui divise toute la ligne en deux parties égales: de - là vient que divers auteurs spirituels comparent le tems présent à une isthme qui s'eleve au milieu d'un vaste océan qui n'a point de bornes, & qui l'enveloppe de deux côtés.

La philosophie scholastique partage l'éternité en deux, celle qui est passée, & celle qui est à venir; mais tous les termes scientifiques de l'école n'apprennent rien sur cette matiere. La nature de l'éternité est inconcevable à l'esprit humain: la raison nous démontre que l'éternité passée a été, mais elle ne sauroit s'en former aucune idéequi ne soit remplie de contradictions. Il nous est impossible d'avoir aucune autre notion d'une durée qui a passé, si ce n'est qu'elle a été toute prélente une fois; mais tout ce qui a été une fois présent, cst à une certaine distance de nous; & tout ce qui est à une certaine distance de nous, quelqu'éloigné qu'il soit, ne peut jamais être l'éternité.

La notion même d'une durée qui a passé, emporte qu'elle a été présente une sois, pussque l'idee de celle - ci renferme actuellement l'idée de l'autre. C'est donc là un mystere impénétrable à l'esprit numain. Nous sommes assûrés qu'il y a eu une éternite; mais nous nous contredisons nous - mêmes, dès que nous voulons nous en former quelque idée.

Nos difficultés tur ce point, viennent de ce que nous ne saurions avoir d'autres idées d'aucune sorte de durée, que celle par laquelle nous existons nous<pb->

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