ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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L'engagiste peut pendant sa joüissance sous - inféoder, ou donner à cens ou rente quelque portion du domaine qu'il tient par engagement: mais en cas de rachat de la part du roi, toutes ces aliénations faites par l'engagiste sont révoquées, & le domaine rentre franc de toute hypotheque de l'engagiste.

Cependant jusqu'au rachat, l'engagiste peut disposer comme bon lui semble du domaine; il est considéré comme propre dans sa succession; le fils aîné y prend son droit d'aînesse; le domaine engagé peut être vendu par l'engagiste, ses héritiers ou ayans cause; il peut être saisi & decreté sur eux: mais tout cela ne préjudicie point au rachat.

Tant que l'engagement subsiste, l'engagiste doit acquitter les charges du domaine; telles que les gages des officiers, & autres prestations annuelles, pour fondation ou autrement, entretenir les bâtimens, prisons, ponts, chemins, chaussées, fournir le pain des prisonniers, payer les frais de leur transport, & généralement tous les frais des procès criminels où il n'y a point de partie civile; gages d'officiers, rentes, revenant - bons, décharges & épices des comptes des domaines: mais cet édit n'a pas été par - tout pleinement exécuté. L'édit d'Octobre 1705 a ordonné que les engagistes rembourseroient les charges locales, telles que le payement des fiefs & aumônes; à l'effet dequoi il est obligé d'en remettre le fonds au receveur des domaines & bois, lequel rapporte au jugement de son compte, les pieces justificatives de l'acquittement desdites charges.

Loyseau en son traité des offices, & Chopin en son traité du domaine, ont parlé des engagemens; mais quoique ces auteurs ayent dit d'excellentes choses, il faut prendre garde que leurs principes ne sont pas toûjours conformes au dernier état de la jurisprudence sur cette matiere.

On peut aussi voir ce que Guyot en a dit en son traité des fiefs, tome VI. & en ses observations sur les droits honorisiques. Voyez Domaine. (A)

Engagement (Page 5:679)

Engagement, s. m. (Hist. mod.) nom donné aux voeux des anciens chevaliers dans Jeurs entreprises d'armes. Je n'en dirai qu'un mot d'après M. de Sainte - Palaye, & seulement pour crayonner une des plus singulieres extravagances dont l'homme soit capable.

Les chevaliers qui formoient des entreprises d'armes, soit courtoises, soit à outrance, c'est - à - dire meurtrieres, chargeoient leurs armes de chaînes, ou d'autres marques attachées par la main des dames, qui leur accordoient souvent un baiser, moitié oüi, moitié non, comme celui que Saintré obtint de la sienne.

Cette chaîne ou ce signe, quel qu'il fût, qu'ils ne quittoient plus, étoit le gage de l'entreprise dont ils juroient l'exécution, quelquefois même à genoux, sur les Evangiles. Ils se préparoient ensuite à cette exécution par des abstinences & par des actes de piété qui se faisoient dans une église où ils se confessoient, & dans laquelle ils devoient envoyer au retour, tantôt les armes qui les avoient fait triompher, tantôt celles qu'ils avoient remportées sur leurs ennemis.

On pourroit faire remonter l'origine de ces especes d'enchaînemens jusqu'au tems de Tacite, qui rapporte quelque chose de semblable des Cattes dans ses moeurs des Germains. Je crois pourtant qu'il vaut mieux la borner à des siecles postérieurs, où les débiteurs insolvables devenant esclaves de leurs créanciers, & proprement esclaves de leur parole, comme nous nous exprimons, portoient des chaînes de même que les autres serfs, avec cette seule distinction, qu'au lieu de fers ils n'avoient qu'un anneau de fer au bras. Les pénitens, dans les pélerinages auxquels ils se voüoient, également débiteurs envers l'église, porterent aussi des chaînes pour marque de leur esclavage; & c'est de - là sans doute que nos chevaliers en avoient pris de pareilles, pour acquitter ce voeu qu'ils faisoient d'accomplir leurs entreprises d'armes.

Ces emprises une fois attachées sur l'armure d'un chevalier, il ne pouvoit plus se décharger de ce poids qu'au bout d'une ou de plusieurs années, suivant les conditions du voeu, à moins qu'il n'eût trouvé quelque chevalier qui s'offrant de faire arme contre lui, le délivrât en lui levant son emprise, c'est - à - dire en lui ôtant les chaînes ou autres marques qui en tenoient lieu, telles que des pieces différentes d'une armure, des visieres de heaumes, des gardesbras, des rondelles, &c.

Vous trouverez dans Olivier de la Marche les formalités qui s'observoient pour lever ces emprises, & les engagemens des chevaliers. On croit lire des contes arabes en lisant l'histoire de cet étrange fanatisme des nobles, qui régna si long - tems dans le midi de l'Europe, & qui n'a cessé dans un royaume voisin que par le ridicule dont le couvrit un homme de lettres, Miguel Cervantes Saavedra, lorsqu'il mit au jour, en 1605, son incomparable roman de dom Quichote. Voyez Ecuyer, Chevalier, & les mémoires de M. de Sainte - Palaye, dans le recueil de l'académie des Belles - Lettres. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

Engagement (Page 5:679)

Engagement, c'est dans l'Art militaire, un acte que signe un particulier, par lequel il s'engage pour servir dans les troupes en qualité de soldat ou de cavalier. Tout engagement doit être au moins de six ans, à peine de cassation contre les officiers qui en auront fait pour un moindre tems. Voy. Deserteur. (Q)

Engagement d'un Matelot (Page 5:679)

Engagement d'un Matelot, (Marine.) c'est la convention qu'il fait avec le capitaine, ou le maître d'un navire, pour le cours du voyage. (Z)

Engagement des Marchandises (Page 5:679)

Engagement des Marchandises, (Comm.) est une espece de commerce ou de négociation tres commune à Amsterdam, & qui se fait ordinairement lorsque le prix des marchandises diminue considérablement, ou qu'il y a apparence qu'il augmentera de beaucoup dans peu. Dans ces deux cas, les marchands qui ont besoin d'argent comptant, & qui cependant veulent éviter une perte certaine, en donnant à trop bas prix ce qui leur a coûté fort cher, ou s'assûrer du gain qu'ils esperent de l'augmentation de leurs denrées, ont recours à l'engagement de leurs marchandises qui se fait en la maniere suivante.

Le marchand qui veut les engager, s'adresse à un courtier, & lui en donne une note. On convient de l'intérêt, qui est ordinairement depuis trois ou trois & demi jusqu'à six pour cent par an, selon l'abondance ou la rareté de l'argent; on regle ce qu'il en doit coûter pour le magasinage, &c. L'accord fait, le courtier en écrit l'obligation sur un sceau, c'est - à - dire sur un papier scellé du sceau de l'état, à peu - près comme ce que nous appellons du papier timbré, dans une forme à peu - près semblable à la suivante, que Jean Pierre Ricard, dans son traité du Négoce d'Amsterdam, donne comme une formule de ces sortes d'engagemens, & dans laquelle il suppose que les marchandises engagées sont huit mille livres de caffé, valant lors de l'engagement vingt sols la livre, qu'on engage sur le pié de vingt - cinq sols la livre pour six mois, à raison de quatre pour cent d'intérêt par an, & à trois sols par balle par mois de magasinage.

Formule d'un engagement de marchandises.

« Je soussigné, confesse par la présente, devoir loyalement à M. NN.... la somme de dix mille florins argent courant, pour argent comptant reçû de lui à ma satisfaction; laquelle somme de dix [p. 680] mille florins je promets payer en argent courant dans six mois après la date de la présente, franc & quitte de tous frais audit Sieur NN.... ou au porteur de la présente, avec intérêt d'icelle, à raison de quatre pour cent par an; & en cas de prolongation, jusqu'au payement effectif du capital & de l'intérêt, engageant pour cet effet ma personne & tous mes biens, sans exception d'aucun, les soûmettant à tous juges & droits. En foi de quoi j'ai signé la présente de ma propre main. A Amsterdam, le 2 Novembre 1718. J. P. R.»

On ajoûte ensuite:

« Et pour plus grande assûrance du contenu ci - dessus, j'ai délivré & remis au pouvoir dudit Sieur NN... comme un gage volontaire, seize balles de caffé marqués J. P. R. de numero 1 à 16, pesant huit mille livres ou environ, desquels je le rends & fais maître dès - à - présent, l'autorisant de les vendre & faire vendre comme il trouvera à propos, même sans en demander aucune permission en justice, si je ne lui paye pas la susdite somme avec les intérêts & les frais au jour de l'échéance; & au cas de prolongation, jusqu'à son entier remboursement. Promettant de plus de lui payer trois sols par livre à chaque fois que le caffé pourra baisser de deux ou trois sols par livre, & trois sols par chaque balle par mois pour le magasinage, & tous autres frais qu'il pourra faire sur lesdites balles, l'affranchissant bien expressément de la perte ou dommage qui pourroit arriver audit caffé, soit par eau, soit par feu, par vol, ou par quelqu'autre accident prévû ou imprévû. A Amsterdam, ce 2 Novembre 1718. J. P. R.»

Quand l'intérêt est trop haut, comme de six pour cent par an, on se garde bien de le spécifier dans l'obligation, parce qu'il est usuraire; mais on met qu'il sera payé à un demi par mois, ce qui revient au même, mais qu'on tolere, parce que l'emprunteur est censé pouvoir retirer sa marchandise tous les mois.

Si un emprunteur veut retirer sa marchandise avant le terme stipulé, il n'en paye pas moins l'intérêt convenu pour tout le tems, parce qu'en ce cas on suppose qu'il trouve sur sa marchandise un bénéfice considérable qui suffit pour payer l'intérêt.

Si l'on convient d'une prolongation, on en fait mention au bas de l'obligation. Enfin si le préteur, après avoir averti l'emprunteur, veut avoir son argent à terme, & que celui - ci ne paye pas, les marchandises peuvent être vendues par autorité de justice en faveur du premier, jusqu'à concurrence du remboursement de la somme prêtée & des intérêts, l'excédant du prix qu'on en retire tournant au profit de celui qui a engagé la marchandise. Dictionn. de Commerce, de Trévoux, & de Chambers. (G)

Engagement (Page 5:680)

Engagement, en fait d'escrime, c'est l'effort réciproque de deux épées qui se touchent. Il y a engagement, lorsqu'un escrimeur place le fort ou le talon de son épée sur le foible de celle de son ennemi, & la force de façon qu'il ne peut plus la détourner.

ENGAGER (Page 5:680)

ENGAGER, v. act. mettre en gage. (Commerce.)

Engager (Page 5:680)

Engager, (Commerce.) signifie aussi disposer d'une chose: j'ai engagé mes fonds.

Engager (Page 5:680)

Engager, (Commerce.) joint au pronom personnel ou réciproque se, veut quelquefois dire s'endetter, quelquefois entrer dans une affaire, dans une société, d'autres fois cautionner quelqu'un, & souvent prendre parti avec un maître.

Dans toutes ces significations, on dit en termes de commerce, qu'un marchand s'est engagé de tous côtés, qu'on s'engage dans une entreprise, qu'un jeune homme s'est engagé en qualité d'écrivain avec la compagnie des Indes, qu'un tel s'est engagé de dix mille écus pour tirer son associé d'affaire, qu'un compagnon s'est engagé chez un maître pour tel tems & à telles conditions. Diction. de Com. de Trévoux, & de Chambers. (G)

Engager (Page 5:680)

Engager, (Escrime.) c'est faire toucher son épée à celle de l'ennemi. On dit engagez quarte & tirez quarte, ou engagez quarte & tirez tierce, &c. On entend aussi par engager, saisir du fort ou du talon de son épée le foible de celle de l'ennemi, de maniere qu'il ne puisse plus détourner l'épée de son adversaire de sa direction. Voyez Engagement.

ENGAGISTE (Page 5:680)

ENGAGISTE, (Jurisprud.) est celui qui jouit d'un bien à titre d'engagement: il y a deux sortes d'engagistes.

Les uns qui joüissent d'un bien par forme d'antichrese pour sûreté de leurs créances.

Les autres sont ceux qui joüissent d'un domaine de la couronne à titre d'engagement.

L'engagiste qui joüit à titre d'antichrèse, peut retenir le fonds qui lui a été engagé jusqu'à ce que le débiteur lui ait payé toutes les sommes qu'il lui doit, même au - delà du prix de l'engagement.

Aucune vente, soit pure & simple, ou à faculté de rachat, ou simplement des fruits, ne peut préjudicier au droit acquis antérieurement à l'engagiste.

Suivant le droit romain, l'engagiste peut stipuler qu'il retiendra les fruits de l'héritage, pour lui tenir lieu des intérêts de ses créances, ce qui s'observe au parlement de Toulouse; mais au parlement de Paris cela n'est jamais permis, à moins que les fruits de l'héritage ne fussent fixes & certains; comme si c'est une rente en argent, auquel cas l'engagiste seroit tenu d'imputer l'excédent, s'il y en a, sur le principal.

Ce ne sont pas seulement les fruits perçûs par l'engagiste dont il doit rendre compte, mais aussi ceux qu'il a pû percevoir.

Il est de son devoir de joüir comme un bon pere de famille, & par conséquent de faire toutes les réparations: mais aussi en cas de rachat, il est en droit de répéter toutes les dépenses utiles & nécessaires qu'il a faites à la chose engagée; & jusqu'à ce qu'il en soit remboursé, il peut retenir le bien engagé. A l'égard des dépenses voluptuaires, il ne peut les répéter, à moins qu'il ne les eût faites de l'ordre du débiteur.

Les cas fortuits ne sont pas à la charge de l'engagiste, nisi culpa casum proecessit.

L'engagiste ne peut par aucun tems prescrire le fonds contre le débiteur, à moins que l'engagement ne fût coloré du nom de vente à faculté de rachat, auquel cas il pourroit prescrire par trente ans.

Il peut aussi, par une joüissance de trente ans, prescrire l'hypotheque contre les créanciers antérieurs de son débiteur.

S'il vend, comme propriétaire, le bien à lui engagé, le tiers acquéreur pourra prescrire de son chef, n'ayant pas succédé à son vendeur à titre d'engagement.

Les créanciers, soit antérieurs ou postérieurs à l'engagement, ne peuvent faire saisir sur l'engagiste les fruits du fonds engagé par leur débiteur; ils ne peuvent s'en prendre qu'au fonds par la voie de la saisie réelle.

Tant que l'engagiste n'a pas encore prescrit l'hypotheque, le créancier antérieur peut agir directement sur le fonds engagé, sans être obligé de discuter les autres biens du débiteur; mais les créanciers postérieurs au contrat d'engagement ne peuvent déposséder l'engagiste qu'en le remboursant de son principal, frais & loyaux coûts.

Pour savoir quel peut être l'effet du pacte commissoire à l'égard de l'engagiste, voyez Pacte commissoire.

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