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Ce bassiot est fait avec des douves, comme sont celles des tonneaux; il est lié avec des cerceaux, comme on lie les tonneaux; il est fermé ou foncé dessus & dessous pour la conservation, & empêcher l'évaporation de l'eau - de - vie qui y entre. Ce bassiot a deux trous sur son fond d'en - haut, qui ont chacun leur bouchon mobile; l'un des trous est celui où entre la queue du petit entonnoir, & l'autre sert pour sonder & voir combien il y a d'eau - de - vie de venue. Ce bassiot est jaugé à la jauge d'usage dans le pays, afin que l'on puisse savoir précisément ce qu'il contient. On sait ce qu'il y a dedans d'eau - de - vie, quoiqu'il ne soit pas plein; on a pour cela un bâton fait exprès, sur lequel on a mesuré exactement les pots & veltes de liqueur que l'on y a mise, à mesure qu'on l'a jaugé, tellement que quand il n'y a dans le bassiot que quatre, cinq, six, sept pots plus ou moins de liqueur, en coulant le bâton dedans & l'appuyant au fond du bassiot, l'endroit où finit la hauteur de la liqueur qui est dans le bassiot, doit marquer sur le bâton le nombre des pots ou veltes qui y sont contenues, & cela par des marques graduées & numérotées, qui sont empreintes ou entaillées sur ce bâton. Ce bassiot doit être posé bien à - plomb & bien solide dans le faux bassiot. On sait que pour un pot il faut deux pintes, & que la velte contient quatre pots.
On a dit qu'au fourneau qui est sous la chaudiere, il y avoit deux ouvertures; l'une pour y faire entrer le bois, & l'autre pour laisser échapper la fumée. Ces deux ouvertures ont chacune leur fermeture de fer; celle de devant par une plaque de fer, avec une poignée, pour la placer ou l'enlevér à volonté: on appelle cette plaque, une trappe. L'ouverture de la fumée a également sa fermeture, mais elle n'est pas placée à l'orifice du trou; on sait que par ce trou, la fumée du feu monte dans la cheminée pour se répandre dans l'air; la fermeture de ce trou est placée au - dessus de la maçonnerie de la chaudiere, un peu sur le côté: ensorte que le tuyau de cette fumée, qui prend sous la chaudiere, est un peu dévoyé, pour gagner le conduit de la cheminée. Cette fermeture consiste dans une plaque de ser, longue environ d'un pié, & large de quatre pouces & demi, ce qui doit boucher le tuyau de la cheminée: ainsi ce tuyau ne doit avoir que cela de largeur, & être presque quarré; on appelle cette fermeture, une tirette, parce qu'on la tire pour l'ôter, & on la pousse pour la remettre, c'est - à - dire pour ouvrir & fermer ce trou, qui répond au - dehors au - dessus de la chaudiere par une fente, dans le mur du tuyau de la cheminée; il ne faut pas néanmoins que cette tirette bouche tout - à - fait le tuyau de la cheminée, parce que pour l'entretien du feu, il faut qu'il s'en exhale un peu de fumée, sans quoi il seroit étouffé sous le fourneau: ainsi il peut rester autour de la tirette une ligne ou deux de vuide.
Ces deux plaques de fer servent pour entretenir le feu sous le fourneau dans un degré égal de chaleur; & quand il n'y a pas assez d'air, on tire tantsoit - peu la tirette; s'il y en a trop, on la pousse tout - à - fait: de façon que le feu qui est sous la chaudiere, n'étant point animé par un air étranger, brûle également, & entretient le bouillon de la chaudiere dans une égale effervescence, ce qui fait que l'eau - de - vie vient toûjours presque également & doucement; ce qui contribue beaucoup à sa bonté.
Quand la chaudiere est coiffée, on continue à mettre du menu bois sous le fourneau, jusqu'à ce
Quand la chaudiere est en bon train, que le bassiot pour la réception de l'eau - de - vie est bien posé, on laisse venir l'eau - de - vie tout doucement, jusqu'à ce qu'il n'y ait plus d'esprit supérieur dans le vin; car il faut savoir que dans le vin il y a trois sortes de choses, un esprit fort & supérieur, un esprit foible ou infirme, & une partie épaisse, compacte & flegmatique. L'esprit fort & supérieur, est celui qui forme l'eau - de - vie, qui est inflammable, évaporable, fort, brûlant, savoureux, brillant comme du crystal, qui avec sa force a de la douceur qui est agréable à l'odorat & au goût, quoique violent: cet esprit, quand le feu le détache par son activité des parties grossieres qui l'enveloppent, forme une liqueur extrèmement claire, brillante, vive, & blanche; ce que nous appellons eau - de - vie, la bonne & forte eau - de - vie. L'esprit foible & infirme, est celui qui s'exhale des parties épaisses, après que l'esprit fort comme plus subtil est sorti: cet esprit foible est assez clair, blanc, transparent; mais il n'a pas, comme l'esprit fort, cette vivacité, cette inflammabilité, cette saveur, ce bon goût & cette bonne odeur qu'a l'esprit fort: cet esprit n'est dit foible & infirme, que parce qu'il est composé de quelques parties d'esprit fort, & de parties aqueuses & flegmatiques, lesquelles étant supérieures de beaucoup à celles de l'esprit fort, l'absorbent & le rendent tel qu'on vient de le dire; & comme il y a encore dans ce mêlange des particules de l'esprit fort que l'on veut avoir, & qui feront, comme le pur esprit fort, de bonne eau - de<-> vie, c'est ce qui fait qu'après la bonne eau - de - vie tirée, on laisse venir jusqu'à la fin cet esprit foible, pour le repasser dans une seconde chauffe. On appelle cet esprit foible, en terme de fabrication d'eau<-> de - vie, la seconde, c'est - à - dire la seconde eau - de - vie. La troisieme partie du vin, qui est le reste du dedans de la chaudiere, après que ces deux esprits en sont sortis, est - une matiere liquide, trouble & brune, qui n'a aucune propriété pour tout ce qui regarde l'eau<-> de - vie: aussi la laisse - t - on couler dehors par des canaux faits exprès, où elle se vuide par un tuyau de cuivre long d'un pié & de deux pouces de diametre, qui est joint & soudé à la chaudiere sur le côté près le fond, afin que tout puisse se bien vuider; lequel tuyau est bien & solidement bouché pendant toute la chauffe. On appelle cette derniere partie du vin, la décharge, c'est - à - dire cette partie grossiere qui chargeoit les esprits du vin, & que le feu a séparée & divisée.
On laisse venir cette eau - de - vie dans le bassiot jusqu'à ce qu'il n'y ait plus d'esprit fort; & pour le connoître, on a une petite bouteille de crystal bien transparente, longue de quatre à cinq pouces, d'un pouce de diametre dans son milieu, & d'un peu moins dans ses extrémités: on l'appelle une preuve, parce qu'elle sert à éprouver; avec laquelle bouteille on
Quand on veut avoir de l'eau - de - vie très - forte, on leve le bassiot dès qu'elle perd; on n'y laisse entrer aucune partie de seconde: on appelle cela, couper à la serpentine, ou de l'eau - de - vie coupée à la serpentine. Et pour recevoir ensuite la seconde, on place un autre bassiot où étoit le premier, qui reçoit cette seconde, comme le premier avoit reçu la bonne eau - de<-> vie.
Mais comme cette eau - de - vie coupée à la serpentine n'est pas une eau - de - vie de commerce, où on ne la demande pas si forte, quoiqu'on l'y reçoive bien; quand on la vend telle, les brûleurs - marchands - vendeurs y laissent venir une partie de la seconde, qui tempere le feu & la vivacité de cette premiere eau<-> de - vie.
Il y a eu dans une province du royaume (l'Aunis) où l'on fabrique beaucoup d'eau - de - vie, des contestations
au sujet de ce mêlange de la seconde avec
la bonne eau - de - vie, ou de l'eau - de - vie sorte; les acheteurs
disoient qu'il y avoit trop de seconde, & que
cela rendoit l'eau - de - vie extrèmement foible au bout
de quelques jours, sur - tout après quelque transport
& trajet sur mer; les vendeurs de leur côté disoient
que non, & qu'ils fabriquoient l'eau - de - vie comme
ils avoient toûjours fait, & que s'il y avoit de la
fraude, elle ne venoit pas de leur part: ensorte que
cela mettoit dans ce commerce d'eau - de - vie des contestations
qui le ruinoient; chacun crioit à la mauvaise
foi, chacun se plaignoit, & peut - être les deux
parties avoient raison de se plaindre l'une de l'autre.
Sur ces contestations, & pour rétablir & faire refleurir
cette branche du commerce, le Roi, par les
soins & attentions de M. de Boismont, intendant de
la province, a interposé son autorité; & par son arrêt
du conseil du 10 Avril 1753, sa Majesté a ordonné,
art. 1. que les eaux - de - vie seront tirées au quart,
garniture comprise, c'est - à - dire que sur seize pots
d'eau - de - vie forte il n'y aura que quatre pots de seconde.
Pour entendre ceci, il faut se rappeller ce
que l'on a ci - devant dit; que la forte eau - de - vie venoit
dans le bassiot; qu'elle étoit forte jusqu'à ce
qu'elle eût perdu; que pour savoir ce qui en étoit
venu, & combien il y en avoit dans le bassiot, on
avoit un bâton fait exprès, sur lequel il y avoit des
marques numérotées qui indiquoient la quantité de
liqueur qu'il y avoit dans le bassiot: ainsi supposant
qu'en sondant avec le bâton, il marque qu'il y a de
la liqueur jusqu'au n°. 20, cela veut dire qu'il y a
vingt pots d'eau - de - vie dans le bassiot; ainsi y ayant
vingt pots d'eau - de - vie forte, on peut la rendre & la
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