ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"179"> ladie, sur - tout lorsqu'elle n'est que sporadique: elle s'y trouve presque toûjours, lorsqu'elle est épidémique, & lorsque la matiere morbifique est fort âcre, agit en irritant fortement, ou lorsqu'elle n'est portée de quelqu'autre partie du corps dans les intestins, que par l'effet d'une grande agitation ou d'un grand trouble. La fievre précede toûjours la dyssenterie, lorsque celle - ci en est un symptome.

Les dyssenteriques sont ordinairement pressés par la soif, sont fort dégoûtés: la douleur qu'ils ressentent, se fait ordinairement sentir au - dessus du nombril, dans les intestins supérieurs; elle est quelquefois si violente, qu'elle occasionne des défaillances avec sueurs, insomnies & grande foiblesse.

On peut savoir par les signes suivans, si l'exulcération a son siége dans les petits ou dans les gros intestins: la matiere qui vient des premiers est plus puante, & a plus de ressemblance avec la raclure de chair: celle qui vient des derniers, est distinguée par la douleur qui se fait sentir au - dessous du nombril, & par le sang qui sort avec les excrémens, & n'est point mêlé avec eux, au lieu qu'il l'est lorsqu'il vient des boyaux grêles; & la raison s'en présente aisément, parce qu'il a roulé long - tems dans le canal intestinal avec tout ce qui y est contenu; & au contraire des gros.

On peut encore connoître le siége de la maladie, par la grandeur des pellicules rendues avec les excrémens; si elles sont peu étendues & minces, elles ont été détachées des boyaux grêles; si elles sont larges & épaisses à proportion, elles appartiennent aux gros. Lorsque les petits intestins font affectés, les déjections sont plus bilieuses, jaunatres, verdâtres; elles sont plus mordicantes, plus fatiguantes; & quand ils le sont dans le voisinage de l'estomac, la maladie est accompagnée de vomissemens, & d'une plus grande aversion pour les alimens, ce qui est une marque que ce viscere est aussi affecté. Lorsque c'est l'intestin jejunum qui est ulceré, la matiere des déjections est plus crue, la soif est plus grande, & les nausées sont plus fréquentes. Quand le siége du mal est dans les gros, il y a moins d'intervalle de tems de la tranchée à la déjection; on ressent une douleur à l'anus, qui est plus forte dans ce cas.

La crudité & la coction en général, distinguent les différens tems de la maladie.

On peut établir sommairement le prognostic de la dyssenterie de la maniere qui suit. Le vomissement qui survient aux dyssenteriques est très - dangereux; c'est un signe que l'exulcération a son siége dans les petits intestins: le danger est plus grand, parce qu'ils sont d'un tissu plus délicat, attendu qu'ils ne sont pas destinés, comme les gros, à contenir des matieres susceptibles à contracter une putréfaction acrimonieuse; étant plus voisins du foie, ils en reçoivent la bile plus pure, par conséquent plus active, plus irritante: d'où une plus grande douleur.

Cependant la dyssenterie qui est produite par des alimens âcres & par la bile jaune, se guérit facilement; c'est le contraire, si elle provient d'une matiere pituiteuse, saline, parce qu'elle s'attache opiniâtrément aux tuniques des intestins, & agit constamment sur la même partie, qu'elle ronge & pénetre plus profondément.

La dyssenterie qui est produite par une matiere bilieuse, noirâtre, est mortelle, selon Hippocrate, aphor. xxjv. sect. 4. parce que l'ulcere qui s'ensuit approche de la nature du chancre, qui ne guérit presque jamais, quand même il a son siége sur des parties externes.

Si cependant c'est de l'atrabile portée par un mouvement de crise dans les intestins, qui occasionne la dyssenterie, la maladie n'est pas si dangereuse; mais il faut prendre garde à ne pas prendre pour de l'atra<cb-> bile, du sang figé & noirâtre qui a long - tems séjourné dans les boyaux.

Si les dyssenteriques rendent par les selles des ca<-> roncules, c'est - à - dire de petites portions de chair, c'est un signe mortel, selon Hippocrate, aphorisme xxvj. sect. 4. il indique la profondeur de l'ulcere, qui détruit la substance même du boyau.

Les longues insomnies, la soif ardente, la douleur dans la région épigastrique, le hocquet, les déjections de matiere sans mélange, noires, puantes; l'évacuation abondante de sang, annoncent le plus souvent une dyssenterie mortelle. Ce dernier signe fait comprendre que les tuniques des intestins sont pénétrées assez avant pour que les vaisseaux sanguins en soient déchirés, ouverts.

Les goutteux & ceux qui ont des obstructions à la rate, sont soulagés lorsque la dyssenterie leur survient, selon Hippocrate dans les prognostics, & aphor. xlvj. sect. 6. mais dans ce cas est - ce une véritable dyssenterie, & n'est - ce pas plûtôt une diarrhée critique, qui sert à évacuer la matiere morbifique?

Les enfans & les vieillards succombent plus facilement à la dyssenterie, que ceux du moyen âge, dit Hippocrate dans ses prognostics: la raison en est que les enfans sont d'un tissu lâche, sur lequel la matiere morbifique corrosive fait plus de progrès, & qu'ils sont plus difficiles à conduire dans le traitement de la maladie; & pour les vieillards, c'est qu'ils n'ont pas assez de force pour résister à un mal qui les épuise beaucoup, & qui occasionne un grand trouble dans l'oeconomie animale, puisqu'ils ont moins de disposition que tous autres à produire l'humeur dyssenterique. Les femmes supportent aussi plus difficilement cette maladie que les hommes; cette différence vient de la constitution plus délicate des personnes du sexe: cependant si la dyssenterie survient aux femmes accouchées, elle n'est pas dangereuse, parce qu'elle sert à évacuer une partie des lochies.

La convulsion & le délire à la suite de la dyssen<-> terie, & le froid des extrémités, annoncent une mort prochaine. S'il survient à un dyssenterique une inflammation à la langue, avec difficulté d'avaler, c'est fait du malade, on peut l'assûrer aux assistans. Si la dyssenterie est mortelle, le malade périt quelquefois bientôt, comme dans la premiere semaine ou dans la seconde: quelquefois la maladie s'étend jusque dans la troisieme.

Lorsque la dyssenterie se termine par un ulcere avec suppuration, les malades rendent pendant long - tems des matieres purulentes par les selles; ils s'épuisent, & périssent enfin comme les phthisiques.

La dyssenterie bénigne dure quelquefois plusieurs mois sans avoir de suites bien fâcheuses; la maligne cause des symptomes très - violens, & fait périr plusieurs de ceux qui en sont attaqués: on l'appelle pesti<-> lentielle, lorsqu'il en meurt plus qu'il n'en échappe. Extrait de Pison. Sennert, Riviere, Baglivi.

La curation de la dyssenterie doit tendre à remplir les indications suivantes; savoir de corriger l'acrimonie des humeurs qui en est la cause, de les évacuer, de déterger les boyaux affectés, de consolider l'exulcération, & d'arrêter le flux de ventre. On peut employer à cette fin la diete & les remedes.

Pour ce qui regarde le premier de ces moyens, on doit d'abord avoir attention de placer le malade dans un lieu sec; il faut lui ordonner le repos & lui faciliter le sommeil: il doit éviter toute peine, toute contention d'esprit. A l'égard de la nourriture, il doit en prendre très - peu dans le commencement, la quantité doit être réglée par ses forces: en raison inverse, on doit toûjours avoir attention que dans le cas même où il n'y auroit point de fievre, il faudroit que le malade s'abstînt de manger, parce que ce [p. 180] sont les organes qui doivent travailler à la digestion, qui sont affectés; ainsi on ne doit accorder que très - peu d'alimens, & fort legers, à plus forte raison s'il y a fievre; ce qui doit être observé sur - tout pendant les trois premiers jours, après lesquels, si rien ne contre - indique, on peut donner du lait, qui non - seulement est une bonne nourriture, mais encore un bon remede pour la dyssenterie, sur - tout si on y ajoûte quelque qualité dessiccative, comme d'y éteindre une pierre, un morceau de fer rougi au feu; si on le rend détersif, dessiccatif, en y délayant du miel, en le coupant avec la seconde eau de chaux: le petit - lait peut être aussi donné dans la même vûe; l'un & l'autre sont très - propres pour adoucir toutes les humeurs âcres qui se trouvent dans les boyaux, & pour en émousser l'activité corrosive. Le lait de chevre doit être préféré, & à son défaut le lait de vache. S'il y a beaucoup de fievre, on pourra couper le lait avec égale quantité d'eau de riviere; de cette maniere il pourra être employé sans crainte de mauvais effets: s'il n'y a pas de fievre, on pourra faire prendre au malade différentes préparations alimentaires, avec le lait, des soupes de différentes manieres, avec de la farine du ris, &c. On peut aussi mêler des oeufs avec du lait. Les légumes, comme les lentilles, les pois cuits dans le bouillon de viande, sont une bonne nourriture dans cette maladie; si elle est opiniâtre, on peut avoir recours aux alimens astringens. Si les forces sont bien diminuées, il faut employer des consommés, des gelées de vieux coq: on peut dans ce cas accorder un peu de bon vin, qui ne soit cependant pas violent, & assez modérément trempé. On conseille aussi le vin blanc avec l'eau ferrée, pour déterminer les humeurs âcres vers les couloirs des urines, & les évacuer par cette voie.

Venons à l'autre partie de la curation, qui doit être operée par le moyen des remedes. Pour remplir les indications qui se présentent, on doit, selon Sydenham, employer la saignée, pour faire révulsion aux humeurs qui se portent dans les entrailles, & qui engorgent les vaisseaux de leurs membranes; il faut par conséquent détourner la fluxion avant que de travailler à la guérison de l'exulcération, à moins que le transport de l'humeur ne soit critique, & non symptomatique.

Ainsi dans le cas où le malade a des forces, paroît d'un tempérament sanguin, robuste, on doit tirer du sang dès le commencement de la maladie, avec ménagement & en petite quantité, parce que les fréquentes déjections, l'insomnie & l'inflammation qui accompagnent souvent la dyssenterie, affoiblissent beaucoup & promptement le malade: si elle provient d'une suppression d'hémorroïdes ou de menstrues, on doit donner la préférence à la saignée du pié: en un mot, ce n'est qu'en tirant du sang que l'on peut arrêter efficacement les progrès de la phlogose qu'excite dans les boyaux l'irritation causée par les humeurs âcres, rongeantes.

On doit ensuite s'occuper, aussi dès les premiers jours de la maladie, du soin d'évacuer les humeurs; car il seroit trop long de les corriger, sur - tout lorsqu'elles abondent: en restant appliquées à la partie souffrante, elles ne cesseroient pas de l'irriter jusqu'à ce qu'elles fussent entierement adoucies. D'ailleurs on doit encore se proposer par le moyen de la purgation, de diminuer l'engorgement des vaisseaux, & d'emporter les humeurs surabondantes. S'il y a quelque disposition au vomissement, on doit tenter de purger par cette voie, parce que non - seulement on diminue la matiere morbifique, mais on fait une puissante diversion: c'est ce qu'enseigne Hippocrate, aph. xv. sect. 6. « Pendant le cours de ventre opiniâtre, si le vomissement survient, il termine heureusement la maladie ». C'est, dit Gallien sur ce même aphorisme, un des exemples de ce que la nature s'efforce de faire utilement, que le medecin doit suivre: il doit donc placer dès le commencement les remedes purgatifs, ou par haut ou par bas; & s'il ne peut pas les répeter tous les jours, il doit le faire de deux en deux jours, ou de trois en trois jours au moins. L'hypécacuanha & la rhubarbe sont principalement en usage pour remplir ces indications. Le premier de ces médicamens a la propriété de faire vomir, & même de purger par le bas, & le second produit sûrement ce dernier effet; mais outre ce, l'un & l'autre ont une vertu astringente sur la fin de leur action, qui est très - salutaire dans cette maladie, dans laquelle on regarde l'hypécacuanha comme un remede spécifique. Le simarouba n'est pas moins recommandable, parce qu'il a les mêmes propriétés, & qu'il a de plus celle de calmer les douleurs; ainsi il peut satisfaire presqu'à toutes les indications que l'on doit se proposer de remplir dans cette maladie.

Car Sydenham, qui en a si bien traité, conseille expressément de ne pas manquer d'employer un remede parégorique chaque nuit, soit après la saignée, soit après la purgation; il préfere pour cet effet le laudanum liquide, auquel seul il veut qu'on ait recours pour achever la curation, après avoir purge le malade trois ou quatre fois.

On peut administrer quelques lavemens dans cette maladie, mais on ne doit les employer que par grands intervalles & à petite dose, sur - tout si le vice est dans les gros intestins, parce qu'en dilatant les boyaux ils augmentent la douleur: Sydenham conseille de les composer avec le lait & la thériaque. On peut aussi en employer qui ne sont qu'adoucissans, lénitifs & détersifs; on use dans cette vûe du lait, du bouillon de tripes, de l'eau d'orge avec le beurre frais, l'huile d'olive bien douce, le miel, &c. sur la fin de la maladie on peut les rendre corroborans, astringens; on les prépare pour cela avec différentes décoctions appropriées, auxquelles on peut ajoûter avec succès une certaine quantité de vin.

La diete satisfait, comme il a êté dit, à l'indication d'adoucir l'acrimonie des humeurs, par l'usage du lait diversement employé. Si le malade ne peut pas le supporter, on aura recours à l'eau de poulet, ou d'orge, ou de ris, &c. aux tisannes émulsionnées. On s'est quelquefois bien trouvé de faire boire de la limonade dans cette maladie, lors sur - tout qu'elle ne provient que d'une effervescence de bile.

Si la maladie résiste aux remedes ci - dessus mentionnés, & qu'elle affoiblisse beaucoup le malade, on doit employer la diete anoleptique, les cordiaux, les astringens, en poudre, en opiate, en décoctions, juleps, auxquelles on joindra toûjours le laudanum liquide, si rien ne contre - indique. On peut aussi faire usage de fomentations, d'épithemes appropriés.

Baglivi dit avoir employé avec succès dans les cours de ventre, dyssenteries, tenesme, chûte de boyaux invétérée, la fumée de la térébenthine jettée sur les charbons ardens, & reçûe par le fondement. Il recommande aussi en général de ne pas user de beaucoup de remedes dans cette maladie, & de ne pas recourir trop tôt aux astringens, qui peuvent produire de très - mauvais effets lorsqu'ils sont employés mal - à - propos, comme le prouve fort au long Sennert, en alléguant l'expérience de tous les tems, & les observations des plus habiles praticiens. Au reste la dyssenterie admet presque tous les remedes de la diarrhée bilieuse. Voyez Diarrhée. (d)

DYSTOCHIE (Page 5:180)

DYSTOCHIE, s. f. (Med.) accouchement difficile, laborieux, ou absolument impossible. Tout cela

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