ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
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"25"> que l'aliénation soit faite sous la faculté de rachat perpétuel, pour assûrer au roi le droit de rentrer dans un bien que la nécessité de l'état l'a forcé d'aliéner. On peut consulter Chopin, liv. II. du domaine, titre 14. où cette matiere est traitée amplement.

Le premier engagement du domaine fut fait par François I. par lettres patentes du 1er Mai 1519, selon la remarque de Chopin; & Mezerai en son abrégé sur l'an 1522, fixe aussi la même époque aux engagemens. Ces aliénations se faisoient d'abord par actes devant notaires: cette forme s'observoit encore sous le regne d'Henri IV; mais ce prince donna une autre forme aux aliénations du domaine, en nommant des commissaires pour en faire des adjudications au plus offrant, & cette forme est celle qui a depuis été suivie dans ces sortes d'actes.

Les aliénations faites en vertu des édits de Mars 1619, Décembre 1652, & autres édits postérieurs, durerent jusqu'en 1662, recommencerent en 1674 jusqu'en 1681. De nouveaux édits qui ordonnerent l'aliénation du domaine, des mois de Mars & Avril 1695, étendirent l'objet des précédens, en ordonnant le rachat des rentes dûes au domaine, l'aliénation des droits d'échange, la confirmation des précédens engagemens, l'aliénation des places qui avoient servi aux fossés & remparts des villes. Deux édits des mois d'Avril 1702, & Août 1708, ordonnerent de nouveau l'aliénation du domaine.

Un autre édit postérieur du mois d'Août 1717, & une déclaration du 5 Mars 1718, en ont autorisé une nouvelle, tant en engagement qu'à vie. Enfin, par un arrêt du conseil du 13 Mai 1724, il a été ordonné que les offres & encheres pour la revente des domaines engagés, ne se feroient à l'avenir qu'en rentes payables au domaine, & à la charge de rembourser les précédens engagistes.

Une troisieme maniere dont le domaine peut être diminué, est l'aliénation par échange: car quoique le contrat d'échange ne soit pas une aliénation véritable, puisqu'au lieu du bien que l'on y abandonne, on en reçoit un autre de parcille valeur, cependant comme il peut arriver que le terme d'échange ne soit qu'un déguisement qui couvre une aliénation véritable, les ordonnances ont mis cette espece de contrat au rang des aliénations du domaine qu'elles prohibent. On en trouve des exemples dans celles du 29 Juillet 1318, & 5 Avril 1321. Cependant l'égalité qui doit régner dans l'échange fait dire à Chopin, liv. III. du domaine, tit. 16. n°. 1. que l'ordonnance de 1566 n'a pas entierement reprouvé les échanges du domaine, dont il rapporte plusieurs exemples. Mais pour la validité de ces sortes d'échanges, il faut qu'il y ait nécessité ou utilité évidente pour le domaine; que les formalités nécessaires pour les aliénations y soient observées; qu'il y ait dans l'échange une égalite parfaite, de maniere que le domaine du roi n'en soit point diminué; enfin que les lettres patentes qui autorisent cet échange, soient dûement registrées: alors les biens cédés au roi en contre - échange, prennent la place des biens domaniaux, & deviennent de même nature.

Une derniere maniere d'aliéner le domaine provenoit autrefois des dons de la libéralité de nos rois. Pour la validité de ces dons, il étoit nécessaire qu'il en fùt expédié un brevet en forme, & qu'il fùt enregistré en la chambre du thrésor: mais les dons étant de véritables aliénations, sont sujets à être révoqués, même lorsqu'ils sont faits pour récompense de service; ce qui s'est ainsi pratiqué de tout tems. En effet, on voit dans les formules de Marculfe que dès le tems de la premiere race, ceux qui avoient eu du roi des fonds en don, faisoient confirmer ces libéralités par les rois ses successeurs. On pratiquoit aussi la même chose du tems de la seconde race; de sorte que le prince étoit censé faire une seconde libéralité, lorsqu'au lieu de révoquer le don fait par ses prédécesseurs, il vouloit bien le confirmer. On a tellement reconnu l'abus qui pouvoit résulter de ces sortes d'aliénations, que depuis plusieurs années nos rois en affermant sans reserve toutes les parties de leur domaine, soit fixes, soit casuelles, se sont privés de la liberté d'en pouvoir faire à l'avenir aucun don.

Administration du domaine. Pour ce qui est de l'administration du domaine, on n'entrera point ici dans le détail de tout ce qui peut y avoir quelque rapport; il suffira d'observer que de tems immémorial, les biens du domaine ont toûjours été donnés à ferme au plus offrant & dernier encherisseur, même les émolumens des sceaux & ceux des écritures, c'est - à - dire des greffes & de tabellionage. On affermoit aussi le produit des prevôtés & bailliages: les anciennes ordonnances disent, que ces sortes de biens seront vendus par cris & subhastation, ce qui ne doit pas néanmoins s'entendre d'une vente proprement dite, mais d'un bail à ferme.

Suivant une ordonnance de Philippe le Long, du 27 Mai 1320, chaque receveur devoit faire procéder aux baux des domaines de sa baillie ou recette: les baux de justice & droits en dépendans, ne devoient être faits que pour un an & séparément de ceux des châteaux, que le receveur pouvoit affermer pour une ou plusieurs années, selon ce qui paroissoit le plus avantageux au roi. Postérieurement l'usage établi par les déclarations du roi & les arrêts, a été que les thrésoriers de France ne peuvent faire les baux du domaine pour plus de neuf années; autrement ces baux seroient considérés comme une aliénation qui ne peut être faite sans nécessité & sans être autorisée par des lettres patentes dûment registrées. Depuis plusieurs années, on ne voit plus de baux particuliers du domaine, & tous les domaines du roi sont compris dans un seul & même bail, qui fait partie du bail général des fermes.

On a établi dans chaque généralité des receveurs généraux des domaines & bois, auxquels les fermiers & receveurs particuliers sont obligés de porter le produit de leurs baux & de leurs recettes. Les receveurs généraux ont chacun des contrôleurs qui tiennent un double registre de tous les payemens faits aux receveurs. Les fermiers & receveurs du domaine sont obligés d'acquitter les charges assignées sur leur recette: leurs recettes & dépenses sont fixées par des états du roi, arrêtés tous les ans au conseil sur les états de la valeur & des charges du domaine, qui doivent être dressés & envoyés par les thrésoriers de France. Ces états du roi sont adressés aux bureaux des finances de chaque généralité par des lettres patentes de commission, pour tenir la main à leur exécution. L'année de l'exercice expirée, les receveurs généraux sont tenus de compter par état, au vrai, de leur recette & dépense, d'abord au bureau des finances dans le ressort duquel est leur administration; ensuite au conseil, & enfin de présenter leurs comptes en la chambre des comptes, en y joignant les états du roi & les états au vrai arrêtés & signés.

Il se trouve à la chambre des comptes plusieurs anciennes ordonnances, qui portent, qu'entre les charges du domaine, on doit d'abord payer les plus anciens fiefs & aumôn, les gages d'officiers, les réparations, & que ces sortes de charges doivent passer avant les dons & autres assignations.

Les possesseurs des biens domaniaux sont aussi tenus d'en payer les charges accoûtumées, quoique le contrat d'engagement n'en fasse pas mention: c'est la disposition des anciennes ordonnances, rappellée [p. 26] dans une déclaration du 12 Octobre 1602, ensorte néanmoins que les acquéreurs puissent retirer le denier vingt du prix de leur acquisition, & ne soient point chargés au - delà.

Jurisdiction du domaine. La forme de l'administration du domaine ne pourroit long - tems subsister, si elle n'étoit soûtenue par les lois établies pour sa conservation, & par les juges spécialement chargés d'y veiller, ce qui forme la jurisdiction du domaine.

On a exposé plusieurs des lois du domaine dans le détail des priviléges qui le concernent, & ce n'est point ici le lieu d'en faire une plus longue énumeration: mais on ne peut se dispenser de donner une idée des juges auxquels cette jurisdiction a été confiée.

On a mis au rang des priviléges les plus essentiels du domaine, le droit de ne pouvoir être soûmis à la jusstice des seigneurs particuliers, de n'être consié qu'aux juges royaux, & même d'avoir ses causes attribuées à certains juges royaux à l'exclusion de tous autres, soit en premiere instance, soit par appel.

Les thrésoriers de France connoissoient d'abord seuls des affaires domaniales dans toute l'étendue du royaume: mais le domaine s'étant augmenté par les différens duchés & autres seigneuries qui furent unies à la couronne, les thrésoriers de France souvent occupés près de la personne du roi, & ne pouvant toûjours vaquer par eux - mêmes à l'expédition des affaires contentieuses, en commettoient le soin à des personnes versées au fait de judicature, qui faisoient la fonction de conseillers, sans néanmoins en prendre le titre. On en voit dès 1356, d'abord au nombre de quatre, ensuite de six: le premier de ces juges commis par les thrésoriers de France étoit ordinairement un évêque ou autre grand seigneur. En 1380 l'évêque de Langres présidoit en qualité de conseiller super facto domanii regis: les jugemens & commissions émanés de ce juge étoient intitulés, les conseillers & thrésoriers au thrésor, comme on le voit par un ancien livre des causes par eux expédiées en 1379, & par le compte des changeurs du thrésor.

Comme il étoit peu convenable que la connoissance du domaine de la couronne fût confiée à des personnes privées & sans caractere, le roi, en 1388, donna deux adjoints aux thrésoriers de France, qui étoient alors au nombre de trois, & ordonna que deux d'entr'eux vaqueroient au fait de la distribution & gouvernement des deniers, & les trois autres à l'expédition des causes du domaine; ensorte que l'on distingua depuis ce tems le thrésorier de France sur le fait des finances ou de la direction, & le thrésorier de France sur le fait de la justice.

Il y eut plusieurs changemens dans leur nombre jusqu'en 1412, qui sont peu importans à connoître. En cette année, sur les remontrances des états du royaume, il fut établi par le roi un clerc conseiller du thrésor, pour juger avec les thrésoriers de France les affaires contentieuses du domaine. Depuis ce tems les thrésoriers de France observerent entr'eux exactement de tenir deux séances différentes, l'une pour les affaires de finance ou de direction, que l'on ne traitoit plus qu'en la chambre de la finance, appellée depuis le bureau des finances; l'autre pour les affaires contentieuses, qui se tenoit en une chambre appellée chambre de la justice, depuis chambre du thrésor.

Les registres les plus anciens de ces chambres font mention des officiers des deux chambres, & des dépenses faites pour les menues nécessités de l'une & de l'autre: on y trouve que le 3 Février 1413, un procureur s'étant présenté en la chambre des finances, pour demander aux thrésoriers de France la main - levée de biens qu'ils avoient fait saisir sur un particulier, les thrésoriers de France répondirent qu'ils iroient incessamment tenir l'audience en la chambre de la justice, & qu'ils y feroient droit sur sa requête.

Le 25 Mars de la même année le roi créa un second conseiller du thrésor, reçu le 17 Avril suivant. Ses provisions portent qu'il est créé pour tenir l'auditoire & siége judiciaire au thrésor. Dans le procès - verbal de réception d'un autre conseiller, le 23 Avril 1417, il est dit qu'il fut installé au bureau de la justice & auditoire du thrésor, pour tenir & exercer le fait de la justice pour & au nom des thrésoriers de France.

En l'année 1446 le roi créa un troisieme office de conseiller du thrésor. Un quatrieme office fut créé le 4 Août 1463; & un cinquieme office le fut de même le 26 Septembre 1477. Enfin, par une déclaration du 13 Août 1496, le nombre des conseillers du thrésor fut fixé aux cinq qui étoient alors subsistans, & c'est à cette époque que l'on doit considérer l'établissement stable & permanent de la chambre du thrésor, depuis appellée chambre du domaine. Le nombre des officiers de cette chambre fut dans la suite porté à dix, par la création de trois nouveaux offices de conseillers du thrésor, par un édit du mois de Février 1543, & par celle postérieure d'un lieutenant général & d'un lieutenant particulier.

Pour connoître l'étendue de la jurisdiction de la chambre du thrésor, il faut considérer ses époques différentes depuis la déclaration du 13 Août 1496, que l'on peut regarder comme son premier âge. Par cette déclaration, la chambre du thrésor avoit le droit de connoître des affaires domaniales de tout le royaume. Tel étoit son territoire; elle étoit l'unique tribunal où l'on pût porter ces sortes de contestations: mais comme les thrésoriers de France avoient exercé la jurisdiction du thrésor, & que cette jurisdiction étoit un démembrement de la leur, ils conserverent la prérogative de venir prendre place dans cette chambre, & d'y présider.

Le roi François I. parut donner atteinte à l'étendue de la jurisdiction de la chambre du thrésor par l'édit de Crémieu, de l'année 1536, qui est le commencement du second âge de cette chambre: cet édit renferme deux clauses qu'il est nécessaire d'observer: la premiere, l'attribution aux baillis & sénéchaux des causes du domaine: la seconde, la prévention qu'on y réserve dans son entier à la chambre du thrésor; ainsi par cet édit la chambre du thrésor partage ses fonctions, & a des concurrens, mais conserve son territoire en entier: on ne borne point son étendue, & si on ne lui laisse point cette prévention & cette concurrence, elle est dépouillée entierement, on ne lui laisse aucune jurisdiction, ce qui est contraire aux termes de l'édit, qui l'a reservé en son entier. Par rapport aux thrésoriers de France, on n'en fait nulle mention dans cet édit: ils demeurent dans leur ancien état; ils conservent leur séance d'honneur dans la jurisdiction du thrésor.

Le concours donné aux baillis & sénéchaux par l'édit de 1536, fut modéré par un édit du mois de Février 1543, qui est le commencement du troisieme âge de la chambre du thrésor. Cet édit rendit à cette chambre une partie de sa jurisdiction, en lui attribuant la privative dans l'étendue de dix bailliages, & lui conservant la prévention dans le reste du royaume.

Tel étoit l'état auquel les thrésoriers de France établis en corps de bureaux sous le titre de bureaux des finances, par un édit du mois de Juillet 1577, ont trouvé la chambre du thrésor lors de cet établissement. Il n'y eut aucun changement à cet égard jusqu'en l'année 1627. Par un édit donné au mois

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