ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"603"> 5 piés autour de cet arbre plusieurs chicots de différente forme & de différente grandeur, quelques-uns un peu au - dessus de terre, & d'autres depuis un pié de haut jusqu'à quatre; leur tête est couverte d'une écorce rouge & unie. Ces chicots sortent des racines de l'arbre, cependant ils ne produisent ni feuilles ni branches; car l'arbre ne vient que du grain de semence, qui est de la même force que celui des cyprès ordinaires, & qui contient une substance balsamique & odoriférante. Le bois de charpente qu'on fait de cet arbre est excellent, surtout pour couvrir les maisons, à cause qu'il est leger, qu'il a le grain délié, & qu'il résiste aux injures du tems mieux que ne fait aucun autre que nous ayons dans ce pays - ci. Il est aquatique, & croît ordinairement depuis un pié jusqu'à cinq & six de profondeur dans l'eau. Il semble que sa situation invite un grand nombre de différentes sortes d'oiseaux à se loger sur ses branches, pour y multiplier leur espece; le perroquet entr'autres y fait volontiers son nid, & se nourrit des pepins en Octobre qui est le tems de leur maturité ».

On peut multiplier cet arbre de semences qui levent aussi promptement que celles des autres cyprès, & qui s'éleveront jusqu'à seize pouces la premiere année. Mais comme il s'en faut bien qu'il y ait dans ceroyaume des arbres de cette espece assez âgés pour donner des graines, & qu'à peine il s'en trouve en Angleterre un ou deux qui en rapportent, il faut tirer ces graines soit de la Caroline, soit de la Virginie où il croît une grande quantité de ces arbrès, & les semer dans des caisses afin de pouvoir abriter les jeunes plans pendant les deux ou trois premiers hyvers. Car quoique M. Miller assûre que ces arbres sont extrèmement robustes, & qu'ils ne craignent nullement le froid, je crois que cela ne peut leur être applicable que lorsqu'ils sont parvenus à un certain âge, puisque j'al toûjours vû périr au bout de deux ou trois ans tous ceux qu'on avoit voulu élever en plein air. Les jeunes plans qu'on a essayé de faire venir dans des pots n'ont pas mieux réussi, & ne se sont pas soutenus plus long tems; les grandes sécheresses les ont toûjours détruits, malgré de fréquens arrosemens. Mais n'y auroit - il pas un moyen de sauver ces arbres en leur procurant de bonne heure toute l'humidité qu'ils demandent? C'est l'épreuve que je fais faire actuellement, en faisant enfoncer peu - à - peu dans l'eau, & en y laissant séjourner pendant les sécheresses, les caisses & les pots où ces arbres sont plantés. Cependant M. Miller assûre qu'il y a en Angleterre deux fort gros arbres de cette espece, qui y ont bien réussi sans être dans un terrein marécageux, & même dont l'un est placé sur un terrein sec. Celui - ci, dit l'auteur cité, a été transplanté étant déjà très - grand, & il rapporte des graines; l'autre a été planté dans une cour, où quoiqu'on ne lui ait donné aucune culture, il est parvenu à trente piés de haut & à une grosseur considérable, mais il n'a point encore donné de graine. L'auteur attribue la stérilité de ce dernier arbre au manquement d'eau, & la fertilité de l'autre à la transplantation. On peut aussi multiplier cet arbre de bouture, suivant que le même auteur s'en est assûré par plusieurs épreuves.

Cyprès d'Amérique ou le cédre blanc. Cet arbre n'étant point encore connu en France, nous avons recours pour sa description & sa culture à M. Miller, dont nous ne prendrons que les principaux faits.

Cette espece de cyprès se trouve dans les terreins humides & marécageux du nord de l'Amérique; il est toûjours verd; il prend une figure réguliere; il s'éleve à une hauteur considérable; il fournit un bois de service très - utile, & le froid ne lui fait jamais de tort, Ses jeunes branches sont garnies de feuilles qui ressemblent à celles de l'arbre - de - vie, & les baies qu'il produit ne sont pas si grosses que celles du geniévre, dont il n'est pas aisé de les distinguer du premier aspect; mais en examinant leur enveloppe, on voit que ce sont des cones parfaits qui ont plusieurs cellules comme la pomme du cyprès ordinaire. On éleve cet arbre de graine, que l'on doit semer au printems dans des caisses où elles ne leveront qu'au bout d'un an; il faudra les abritter l'hyver suivant, parce que cet arbre est un peu délicat dans sa jeunesse. On pourra les planter en pepiniere au commencement d'Avril, mais il faudra les enlever avec soin par un tems couvert ou de pluie. Trois ou quatre ans après, lorsque ces arbres auront environ 3 piés de haut, il faudra les transplanter à demeure fixe dans le tems & avec les mêmes précautions que la premiere fois, & sur - tout les enlever avec une motte de terre, si l'on veut qu'ils ne courent pas le risque de périr. La transplantation réussit rarement à ces arbres lorsqu'ils sont un peu âgés, & illeur faut de fréquens arrosemens dans les sécheresses; autrement en été il en périra la plûpart, attendu qu'ils se refusent absolument à un terrein sec. Il leur faut une terre forte & humide, où ils feront de grands progrès; circonstance qui doit rehausser le mérite de cet arbre, parce qu'elle se trouve rarement dans les arbres toûjours verds. (c)

Cyprès (Page 4:603)

Cyprès, (Mat. med.) Les fruits de cyprès sont en usage en Medecine; ils sont astringens, fortifians; on les donne intérieurement, soit en substance, soit en décoction dans les cas d'hémorrhagie ou de relâchement, où l'adstriction proprement dite est absolument indiquée, comme dans les diarrhées invétérées & colliquatives, dans les hémorrhagies internes, qui font craindre par leur abondance pour la vie du malade. Elles passent pour fébrifuges; on en donne dans cette vûe la poudre dans du vin à la dose d'un gros; on en peut effectivement espérer de bons effets dans les fievres intermittentes, & surtout dans les fievres quartes automnales qui attaquent les habitans des lieux marécageux. Plusieurs auteurs les vantent comme spécifiques dans les incontinences d'urine. Mathiole recommande beaucoup la décoction des pommes de cyprès, fraîches ou nouvelles, faite dans du vin, & donnée tous les jours à la dose de trois onces dans les hernies.

On peut employer aussi leur décoction dans tous les cas où il est question de remédier aux relâchemens & aux gonflemens oedémateux de quelques parties. Les fruits de cyprès sont nommés par les Pharmacologistes, fruits, cones, noix, ou pilules de cyprès, & sont ceux de gabuloe, galbuli, & galluloe. Voyez l'article précédent.

Le fruit de cyprès entre dans plusieurs compositions pharmaceutiques externes, dont les plus usitées sont l'emplâtre ad hernias de Fernel, & dans l'onguent de la comtesse de Zwelfer. (b)

Cyprés (Page 4:603)

* Cyprés, (Myth.) symbole de la tristesse. On le plantoit autour des tombeaux. Il étoit consacré à Pluton.

CYPRINE ou CYPRIS (Page 4:603)

* CYPRINE ou CYPRIS, (Mythol.) surnom de Vénus, ainsi appellée de l'île de Cypre qui lui étoit consacrée, & aux environs de laquelle on pretendoit qu'elle avoit été formée de l'écume de la mer.

CYRBES & AXONES (Page 4:603)

CYRBES & AXONES, (Hist. anc.) noms donnés aux lois que Solon établit à Athenes, parce qu'elles étoient écrites sur des tables de bois faites en triangle. Les cyrbes contenoient tout ce qui regardoit particulierement le culte des dieux, & les autres lois pour le civil étoient comprises dans les axones. On gardoit toûjours l'original de ces lois dans l'acropolis ou forteresse d'Athenes: mais Ephialte en fit transporter des copies au pritanée, afin que les juges pussent les consulter plus commodément. Bochart prétend que les cyrbes étoient écrites de la sorte; [p. 604] la premiere ligne alloit de la gauche à la droite, la seconde de la droite à la gauche, & ainsi de suite. V. Boustrophedon. Dict. de Trév. & Chamb. (G)

CYRÉNAIQUE (Page 4:604)

* CYRÉNAIQUE. (secte) Hist. anc. de la Philosophie & des Philosophes. On vit éclore dans l'école Socratique, de la diversité des matieres dont Socrate entretenoit ses disciples, de sa maniere presque sceptique de les traiter, & des différens caracteres de ses auditeurs, une multitude surprenante de systèmes opposés, une infinité de sectes contraires qui en sortirent toutes formées; comme on lit dans le poëte, que les héros grecs étoient sortis tout armés du cheval de Troye; ou plûtôt comme la Mythologie raconte, que naquirent des dents du serpent des soldats qui se mirent en pieces sur le champ même qui les avoit produits. Aristippe fonda dans la Lybie & répandit dans la Grece & ailleurs, la secte Cyrénaique; Euclide, la Mégarique; Phedon, l'Eliaque; Platon, l'Académique; Antisthene, la Cynique, &c.

La secte Cyrénaïque dont il s'agit ici, prit son nom de Cyrene, ville d'Afrique, & la patrie d'Aristippe fondateur de la secte. Ce philosophe ne fut ennemi ni de la richesse, ni de la volupté, ni de la réputation, ni des femmes, ni des hommes, ni des dignités. Il ne se piqua ni de la pauvreté d'Antisthene, ni de la frugalité de Socrate, ni de l'insensibilité de Diogene. Il invitoit ses éleves à joüir des agrémens de la société & des plaisirs de la vie, & lui - même ne s'y refusoit pas. La commodité de sa morale donna mauvaise opinion de ses moeurs; & la considération qu'on eut dans le monde pour lui & pour ses sectateurs, excita la jalousie des autres philosophes: tanta ne animis coelestibus, &c. On mesinterpréta la familiarité dont il en usoit avec ses jeunes éleves, & l'on répandit sur sa conduite secrette des soupçons qui seroient plus sérieux aujourd'hui qu'ils ne l'étoient alors.

Cette espece d'intolérance philosophique le fit sortir d'Athenes; il changea plusieurs fois de séjour, mais il conserva par - tout les mêmes principes. Il ne rougit point à Egine de se montrer entre les adorateurs les plus assidus de Laïs, & il répondoit aux reproches qu'on lui en faisoit, qu'il pouvoit posséder Laïs sans cesser d'être philosophe, pourvû que Laïs ne le possédât pas; & comme on se proposoit de mortifier son amour propre en lui insinuant que la courtisane se vendoit à lui & se donnoit à Diogene, il disoit: Je l'achete pour m'en servir, & non pour empècher qu'un autre ne s'en serve. Quoi qu'il en soit de ces petites anecdotes, dont un homme sage sera toûjours très - reservé, soit à nier, soit à garantir la vérité, je ne comprens guere par quel travers d'esprit on permettoit à Socrate le commerce d'Aspasie, & l'on reprochoit à Aristippe celui de Laïs. Ces femmes étoient toutes deux fameuses par leur beauté, leur esprit, leurs lumieres, & leur galanterie. Il est vrai que Socrate professoit une morale fort austere, & qu'Aristippe étoit un philosophe très - voluptueux; mais il n'est pas moins constant que les philosophes n'avoient alors aucune répugnance à recevoir les courtisanes dans leurs écoles, & que le peuple ne leur en faisoit aucun crime.

Aristippe se montra de lui - même à la cour de Denis, où il réussit beaucoup mieux que Platon que Dion y avoit appellé. Personne ne sut comme lui se plier aux tems, aux lieux, & aux personnes; jamais déplacé, soit qu'il vecût avec éclat sous la pourpre, & dans la compagnie des rois, soit qu'il enseignât obscurément dans l'ombre & la poussiere d'une école. Je n'ai garde de blâmer cette philosophie versatile; j'en trouve même la pratique, quand elle est accompagnée de dignité, pleine de difficultés & fort au - dessus des talens d'un homme ordinaire. Il me paroît seulement qu'Aristippe manquoit à Socrate, à Diogene, & à Platon, & s'abaissoit à un rôle indigne de lui, en jettant du ridicule sur ces hommes respectables, devant des courtisans oisifs & corrompus, qui ressentoient une joie maligne à les voir dégradés; parce que cet avilissement apparent les consoloit un peu de leur petitesse réelle. N'est - ce pas en effet une chose bien humiliante à se représenter, qu'une espece d'amphithéatre élevé par le philosophe Aristippe, où il se met aux prises avec les autres philosophes de l'école de Socrate, les donne & se donne lui - même en spectacle à un tyran & à ses esclaves?

Il faut avoüer cependant qu'on ne remarque pas dans le reste de sa conduite, ce défaut de jugement avec lequel il laissoit échapper si mal - à - propos le mépris bien ou mal fondé qu'il avoit pour les autres sectes. Sa philosophie prit autant de faces différentes, que le caractere féroce de Denis; il sut, selon les circonstances, ou le mépriser, ou le réprimer, ou le vaincre, ou lui échapper, employant alternativement ou la prudence ou la sermeté, ou l'esprit ou la liberté, & en imposant toûjours au maître & à ses courtisans. Il fit respecter la vertu, entendre la vérité, & rendre justice à l'innocence, sans abuser de sa considération, sans avilir son caractere, sans compromettre sa personne. Quelque forme qu'il prît, on lui remarqua toûjours l'ongle du lion qui distinguoit l'éleve de Socrate.

Aristippe cultiva particulierement la morale, & il comparoit ceux qui s'arrêtoient trop long - tems à l'étude des beaux arts, aux amans de Pénélope, qui négligeoient la maîtresse de la maison pour s'amuser avec ses femmes. Il entendoit les Mathématiques, & il en faisoit cas. Ce fut lui qui dit à ses compagnons de voyage, en appercevant quelques figures de Géométrie sur un rivage inconnu où la tempête les avoit jettés: Courage mes amis, voici des pas d'homme. Il estima singulierement la Dialectique, sur - tout appliquée à la Philosophie morale.

Il pensoit que nos sensations ne peuvent jamais être fausses; qu'il est possible d'errer sur la nature de leur cause, mais non sur leurs qualités & sur leur existence.

Que ce que nous croyons appercevoir hors de nous est peut - être quelque chose, mais que nous l'ignorons.

Qu'il faut dans le raisonnement rapporter tout à la sensation, & rien à l'objet, ou à ce que nous prenons pour tel.

Qu'il n'est pas démontré que nous éprouvions tous les mêmes sensations, quoique nous convenions tous dans les termes.

Que par conséquent en dispute rigoureuse, il est mal de conclure de soi à un autre, & du soi du moment présent, au soi d'un moment à venir.

Qu'entre les sensations, il y en a d'agréables, de fâcheuses, & d'intermédiaires.

Et que dans le calcul du bonheur & du malheur, il faut tout rapporter à la douleur & au plaisir, parce qu'il n'y a que cela de réel; & sans avoir aucun égard à leurs causes morales, compter pour du mal les fâcheuses, pour du bien les agréables, & pour rien les intermédiaires.

Ces principes servoient de base à leur philosophie. Et voici les inductions qu'ils en tiroient, rendues à - peu - près dans la langue de nos géometres modernes.

Tous les instans où nous ne sentons rien, sont zéro pour le bonheur & pour le malheur.

Nous n'avons de sensations à faire entrer en compte dans l'évaluation de notre bonheur & de notre malheur, que le plaisir & la peine.

Une peine ne differe d'une peine, & un plaisir ne differe d'un plaisir, que par la durée & par le degré<pb->

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