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Les critiques qui n'en ont pas eu le germe en eux - mêmes,
trop foibles pour se former des modeles intellectuels,
ont tout rapporté aux modeles existans;
c'est ainsi qu'on a jugé Virgile, Lucain, le Tasse, &
Milton, sur les regles tracées d'après Homere: Racine & Corneille sur les regles tracées d'après Euripide & Sophocle. Les premiers ont réuni les suffrages
de tous les siecles. On en conclut qu'on ne peut
plaire qu'en suivant la route qu'ils ont tenue: mais
chacun d'eux a suivi une route différente; qu'ont
fait les critiques? Ils ont fait, dit l'auteur de la Henriade, comme les Astronomes, qui inventoient tous les
jours des cercles imaginaires, & créoient ou anéantissoient
un ciel ou deux de crystal à la moindre difficulté. Combien l'esprit didactique, si on vouloit l'en croire,
ne retréciroit - il pas la carriere du génie?
Vos exemplaria graca
Nocturnâ versate manu, versate diurnâ.
Mais avec Horace il vous dira aussi,
O imitatores, servum pecus.
Il ajoûtera,
Dans le poëme épique, passez - vous du merveil<cb->
C'est ainsi que le critique supérieur laisse au génie toute sa liberté; il ne lui demande que de grandes choses, & il l'encourage à les produire. Le critique subalterne l'accoûtume au joug des regles, il n'en exige que l'exactitude, & il n'en tire qu'une obéissance froide & qu'une servile imitation. C'est de cette espece de critique, qu'un auteur que nous ne saurions assez citer en fait de goût, a dit, ils ont laborieusement écrit des volumes sur quelques lignes que l'imagination des poëtes a créées en se jouant.
Qu'on ne soit donc plus surpris, si à mesure que le goût devient plus difficile, l'imagination devient plus timide & plus froide, & si presque tous les grands génies depuis Homere jusqu'à Lucrece, depuis Lucrece jusqu'à Milton & à Corneille, semblent avoir choisi, pour s'élever, les tems où l'ignorance leur laissoit une libre carriere. Nous ne citerons qu'un exemple des avantages de cette liberté. Corneille eût sacrifié la plûpart des beautés de ses pieces, & eût même abandonné quelques - uns de ses plus beaux sujets, tels que celui des Horaces, s'il eût été aussi severe dans sa composition qu'il l'a été dans ses examens; mais heureusement il composoit d'après lui, & se jugeoit d'après Aristote. Le bon goût, nous dira - t - on, est donc un obstacle au génie? Non, sans doute; car le bon goût est un sentiment courageux & mâle qui aime sur - tout les grandes choses, & qui échauffe le génie en même tems qu'il l'éclaire. Le goût qui le gêne & qui l'amollit, est un goût craintif & puérile qui veut tout polir & qui affoiblit tout. L'un veut des ouvrages hardiment conçus, l'autre en veut de scrupuleusement finis; l'un est le goût du critique supérieur, l'autre est le goût du critique subalterne.
Mais autant que le critique supérieur est au - dessus du critique subalterne, autant celui - ci l'emporte sur le critique ignorant. Ce que celui - ci sait d'un genre, est à son avis tout ce qu'on en peut savoir; renfermé dans sa sphere, sa vûe est pour lui la mesure des possibles; dépourvû de modeles & d'objets de comparaison, il rapporte tout à lui même; par - là tout ce qui est hardi lui paroît hasardé, tout ce qui est grand lui paroît gigantesque. C'est un nain contrefait qui juge d'après ses proportions une statue d'Antinoüs ou d'Hercule. Les derniers de cette derniere classe sont ceux qui attaquent tous les jours ce que nous avons de meilleur, qui louent ce que nous avons de plus mauvais, & qui font, de la noble profession des Lettres, un métier aussi lâche & aussi méprisable qu'eux - mêmes (M. de Voltaire dans les Mensonges imprimés). Cependant comme ce qu'on méprise le plus, n'est pas toûjours ce qu'on aime le moins, on a vû le tems où ils ne manquoient ni de lecteurs ni de Mecenes. Les magistrats eux - mêmes cédant au goût d'un certain public, avoient la foiblesse de laisser à ces brigands de [p. 497]
Nous parlons ici de ce qui est arrivé dans les différentes époques de la Littérature, & de ce qui arrivera sur - tout, lorsque le beau, le grand, le sérieux en tout genre, n'ayant plus d'asyle que dans les bibliotheques & auprès d'un petit nombre de vrais amateurs, laisseront le public en proie à la contagion des froids romans, des farces insipides, & des sottises polémiques.
Quant à ce qui se passe de nos jours, nous y tenons de trop près pour en parler en liberté; nos loüanges & nos censures paroîtroient également suspectes. Le silence nous convient d'autant mieux à ce sujet, qu'il est fondé sur l'exemple des Fontenelle, des Montesquieu, des Buffon, & de tous ceux qui leur ressemblent. Mais si quelque trait de cette barbarie que nous venons de peindre, peut s'appliquer à quelques - uns de nos contemporains, loin de nous retracter, nous nous applaudirons d'avoir présenté ce tableau à quiconque rougira ou ne rougira point de s'y reconnoître. Peut - être trouvera - t - on mauvais que dans un ouvrage de la forme de celui - ci, nous soyons entrés dans ce détail; mais la vérité vient toûjours à - propos dès qu'elle peut être utile. Nous avoüerons, si l'on veut, qu'élle eût pû mieux choisir sa place; mais par malheur elle n'a point à choisir.
Qu'il nous soit permis de terminer cet article par un souhait que l'amour des Lettres nous inspire, & que nous avons fait autrefois pour nous - mêmes. On voyoit à Sparte les vieillards assister aux exercices de la jeunesse, l'animer par l'exemple de leur vie passée, la corriger par leurs reproches, & l'instruire par leurs leçons. Quel avantage pour la république littéraire, si les auteurs blanchis dans de sçavantes veilles, après s'être mis par leurs travaux au - dessus de la rivalité & des foiblesses de la jalousie, daignoient présider aux essais des jeunes gens, & les guider dans la carriere; si ces maîtres de l'art en devenoient les critiques; si, par exemple, les auteurs de Rhadamiste & d'Alzire vouloient bien examiner les ouvrages de leurs éleves qui annonceroient quelque talent: au lieu de ces extraits mutilés, de ces analyses seches, de ces décisions ineptes, où l'on ne voit pas même les premieres notions de l'art, on auroit des jugemens éclairés par l'expérience &
Disce puer virtutem ex me, verumque laborem.
Cet article est de M.
CRIVITZ (Page 4:497)
CRIVITZ, (Géographie.) ville d'Allemagne dans la basse - Saxe, au duché de Meklenbourg, dans le comté de Schwerin.
CROATIE (Page 4:497)
CROATIE, (Géog.) pays de Hongrie borné par l'Esclavonie, la Bosnie, la Dalmatie, le golfe de Venise & la Carniole. Il est presqu'entierement sous la domination de la maison d'Autriche; le gouverneur qu'elle y établit, se nomme le ban de Croatie. Ce pays est fort exposé aux invasions des Turcs.
CROC (Page 4:497)
CROC, s. m. (Ustensile de ménage.) fer recourbé qui a une ou plusieurs pointes crochues, auxquelles on suspend de la viande de boucherie, de la volaille, &c. Ce terme a d'autres acceptions. V. les art. suiv.
Croc de Candelette (Page 4:497)
Crocs de palans; ce sont deux crocs de fer qui sont mis à chaque bout d'une corde fort courte que l'on met au bout du palan, lorsqu'on a quelque chose à embarquer.
Crocs de palans de canon; ce sont aussi des crocs de fer mis à chaque bout de ces palans: leur usage est de croquer à l'erse de l'affût, ou à un autre croc qui est à chaque côté du sabord.
Crocs de palanquin; ce sont de petits crocs de fer qui servent à la manoeuvre dont ils portent le nom. (Z)
Croc (Page 4:497)
Crocs (Page 4:497)
Croc (Page 4:497)
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