ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"886"> à connoìtre & à juger des faits d'armes & des matieres de guerre. C'est à la cour du connétable & à celle des maréchaux, qu'appartenoit la connoissance des contrats & des faits d'armes hors du royaume, & des combats & des armoiries au - dedans. Voyez Maréchal.

Le premier connétable d'Angleterre fut créé par Guillaume le Conquérant: cette charge devint ensuite héréditaire jusqu'à la treizieme année du regne de Henri VIII. qu'elle fut abolie, étant devenue si puissante, qu'elle en étoit insupportable au roi. Depuis ce tems - là les connétables n'ont été créés que par occasion pour des causes importantes, & supprimés aussi tôt après la décision de la cause.

Edouard I. créa dans la treizieme année de son regne, par une ordonnance de Winchester, d'après ces connétables d'Angleterre qui avoient été si puissans, d'autres connétables inférieurs, que l'on a appellé depuis connétables des cantons; & ce roi ordonna qu'il y auroit deux de ces connétables dans chaque canton pour la conservation de la paix, & la révision des armes.

C'est ceux - ci qu'ils appellent présentement constabularii capitales, ou principaux connétables; parce que la suite des tems & l'augmentation du peuple en ayant occasionné d'autres dans chaque ville d'une autorité inférieure, ils ont été appellés petits connétables ou sub constabularii. La nomination du petit connétable appartient aux seigneurs de différentes seigneuries, jure feudi.

Mais outre ceux - ci, il y en a encore qui tirent leurs noms de différentes places, comme le connétable de la tour du château de Douvre, du château de Windsor, de celui de Caernarvan, & de beaucoup d'autres châteaux de la province de Galles, que l'on prend pour autant de palais appartenans au roi, ou pour un fort: ainsi le château de Windsor n'est qu'une maison royale, & le château de Douvre une forteresse, de même que celui de Caernarvan. Leur charge est la même que celle des châtelains ou gouverneurs de châteaux. Chambers.

En France, le connétable est devenu insensiblement le premier officier de la couronne. Il est vrai que d'abord il n'étoit pas plus puissant que le grand-chambellan & le chancelier: mais depuis que le connétable eut été regardé comme le général né des armées, sa dignité devint bien supérieure. Il commandoit à tous les généraux, même aux princes du sang, & gardoit l'épée du Roi qu'il recevoit toute nue, & dont il faisoit hommage aux princes. Cette charge n'étoit que personnelle, & non héréditaire, le Roi y nommant qui il lui plaisoit. Le connétable régloit tout ce qui concerne le militaire; comme la punition des crimes, le partage du butin, la reddition des places, la marche des troupes, &c. Il avoit un prevôt de la connétablie, pour juger les délits commis par les soldats. Cette charge fut supprimée par Louis XIII. en 1627. Cependant au sacre des Rois, un seigneur de la premiere distinction représente le connétable; le maréchal d'Etrées en fit les fonctions au sacre de Louis XIV. & le maréchal de Villars à celui de Louis XV. Son autorité & jurisdiction particulieres sont exercées par le corps des maréchaux de France, sous le nom de eribunal de la connétablie, qui se tient à Paris sous le plus ancien des maréchaux. Voyez Maréchal. Depuis la suppression de la charge de connétable, on a imaginé en France un nouveau titre militaire qui est le maréchal général des camps & armées du Roi; mais il s'en faut beaucoup que l'autorité de cet officier soit aussi étendue que l'étoit celle de l'ancien connétable. Voyez Maréchal général. (G)

CONNETABLIE (Page 3:886)

CONNETABLIE, s. f. & MARECHAUSSEE DE FRANCE, (Jurispr.) est la jurisdiction du connéta<cb-> ble & des maréchaux de France sur les gens de guerre, & sur tout ce qui a rapport à la guerre directement ou indirectement, tant en matiere civile que criminelle.

On l'appelle connétablie & maréchaussée, parce que quand il y avoit un connétable, cet otherer & les maréchaux de France ne faisoient qu'un corps dont le connétable étoit le chef, & rendoit avec eux la justice dans cette jurisdiction.

Depuis la suppression de l'office de connétable, cette jurisdiction a cependant toûjours retenu le nom de connétablie, & est demeurée aux maréchaux de France, dont le premier qui représente le connétable pour tout le corps des maréchaux de France, est le chef de cette jurisdiction.

Elle est la premiere des trois jurisdictions qui sont comprises & dénommées sous le titre général de siége de la table de marbre du palais à Paris; savoir la connétablie, l'amirauté, & les eaux & forêts. Leur dénomination commune vient de ce qu'autrefois ces jurisdictions tenoient leurs séances sur la table de marbre qui étoit en la grand - salle du palais, & qui fut détruite lors de l'incendie arrivé en 1618.

Cette jurisdiction a aussi le titre de justice militaire.

On tenta en 1602 d'établir une connétablie à Roüen; mais ce projet n'ayant pas eu lieu, la connétablie est la seule jurisdiction de son espece pour toute l'étendue du royaume.

L'établissement de la connétablie paroît être aussi ancien que celui du connétable, qui remonte jusqu'aux premiers tems de la monarchie. Les grands officiers de la couronne avoient chacun une jurisdiction pour ce qui éroit de leur ressort: ainsi il est probable que le connétable ayant été décoré du titre d'officier de la couronne, & étant ensuite devenu le premier des officiers militaires, exerça des - lors une jurisdiction sur ceux qui étoient soùmis à son commandement.

On ne trouve point d'ordonnance qui ait institué cette jurisdiction: mais dans un mémoire dressé au siége en 1655, il est dit que ce siége subsistoit depuis 400, ce qui feroit remonter son institution jusqu'en 1255. Miraulmont dit qu'anciennement elle s'exerçoit à la suite de nos Rois; que le connétable & maréchaux de France avoient des prevôts qui avoient jurisdiction criminelle au camp & durant la guerre, & en tems de paix, sur les vagabonds & non domiciliés; qu'ils connoissoient des matieres de leur compétence à la suite du camp & armée, & des connétable & maréchaux de France: mais que depuis l'établissement du parlement à Paris, cette jurisdiction fut fixée au siége de la table de marbre.

Le plus ancien vestige que l'on trouve dans le siége de son ancienneté, est une sentence du 9 Février 1316, dont l'appel fut porté au parlement; & un arrêt de cette cour du 22 Janvier 1361, qui sur l'appel d'une sentence du même siége, la qualifie sentence de l'audience de la cour des maréchaux, qui probablement étoit la même jurisdiction que la connétablie.

Miraulmont rapporte que Charles V. ordonna le 13 Décembre 1374, que les assignations devant les maréchaux de France se feroient pour comparoir en la ville de Paris, & non ailleurs; que les ajournemens seroient libellés & non royaux, & faits par les sergens royaux des lieux, & non par aucun commis - sergent, ou officier des maréchaux: ce qui se fit, dit - il, afin d'établir la jurisdiction des connétable & maréchaux de France au palais à Paris.

Les connétables, & depuis eux les maréchaux de France tenoient autrefois cette jurisdiction en fief du Roi comme un domaine de la couronne, dont la propriété appartenoit au Roi, & qui leur avoit été [p. 887] inféodée à cause de leurs offices: ils en faisoient hommage lors de leur prestation de serment. On en voit des exemples dans le Feron en 1424, 1631, 1637, & 1655: mais depuis ce tems, cette jurisdiction est devenue royale, & les officiers ont le titre de conseillers du Roi.

Cette jurisdict on étoit d'abord ambulatoire à la suite du connétable pres de la personne du Roi, & ne fut rendue sédentaire à Paris que vers le tems où le parlement y fut fixé. Dans cette ville, le siége se tenoit en 1543, au - dessus de l'auditoire du bailliage du palais. Il fut transféré en 1549 aux Augustins, & en 1590 à Tours, puis rétabli à Paris en 1594; en 1671, il fut placé, où il est présentement, dans la galerie des prisonniers; & depuis le 22 Septembre 1741 jusqu'au milieu d'Avril 1742, il se tint par emprunt dans la chambre des eaux & forêts, pendant qu'on travailloit à la galerie des prisonniers.

Comme les officiers de la couronne avoient anciennement le droit d'établir tels officiers qu'ils jugeoient à - propos, pour exercer sous eux & en leur nom les mêmes fonctions dont ils étoient chargés, le connétable & les maréchaux de France ne pouvant vaquer continuellement à l'expédition de la justice à cause de leurs occupations militaires, ils instituerent un lieutenant général & un procureur d'office, pour juger conjointement avec eux, & juger seuls en leur absence les assaires qui sont portées à ce tribunal. L'établissement d'un lieutenant particulier dans ce siége, résulte de la création des lieutenans particuliers, faite en 1581 dans tous les siéges royaux.

La connétablie est composée présentement d'un lieutenant général, un lieutenant particulier, un procureur du roi; il y avoit aussi un office d'avocat du roi, dont Me Simon le Norman étoit pourvû en 1562, & par le décès duquel il fut uni à celui de procureur du roi, suivant des lettres du 8 Juillet 1563; un greffier en chef, un commis - greffier, trois huissiers - audienciers, & un très - grand nombre d'autres huissiers de la connétablie qui sont répandus dans les baillages du royaume pour le service de la connétablie, & compris sous les différentes dénominations d'huissiers, archers, archers - huissiers, archers - gardes, huissiers - sergens royaux & d'armes, lesquels joüissent de plusieurs priviléges, notamment du droit d'exploiter par tout le royaume: ils sont justiciables de la connétablie pour leur service & fonctions de leur charge.

Les maréchaux de France sont les présidens de cette jurisdiction, & y viennent quand ils le jugent à propos; ils y viennent ordinairement en corps, habillés comme les ducs & pairs en petit manteau, & avec des chapeaux ornés de plume, le premier maréchal de France étant accompagné des gardes de la connétablie, avec deux trompettes à la tête qui sonnent jusqu'à la porte de l'auditoire, & en sortant de l'audience, ils sont reconduits dans le même ordre & avec la même pompe.

Le lieutenant général va prendre les opinions des maréchaux de France, qui en matieres sommaires opinent assis, mais découverts, & en s'inclinant. Si c'est une affaire de discussion, les maréchaux de France se réunissent près du doyen, & donnent leur avis debout & découverts. Le lieutenant général a seul la parole & prononce.

En l'absence des maréchaux de France, c'est lui qui préside. Il a en outre plusieurs autres droits curieux par leur ancienneté, & qui ont été cédés à cet officier par le maréchal de France, auquel ils appartenoient à cause de son office; entre autres une redevance dûe par les habitans d'Argenteuil, pour les îles dites de la maréchaussée, situées vis - à - vis d'Argenteuil: cette redevance consiste de la part des ha<cb-> bitans à venir faire la foi & hommage à chaque nouveau lieutenant général; à venir tous les ans la veille de la Pentecôte, par eux ou par leurs syndics & marguilliers, inviter le lieutenant général à se trouver à la fête du lieu, qui est ordinairement le lundl de la Pentecôte. Lorsque le lieutenant général accepte d'y aller, ils doivent venir au - devant de lui jusqu'à l'entrée de l'ile, & le recevoir avec tous les honneurs convenables; lui payer trois sous parisis de cens, quarante sous tournois d'argent, & lui donner à dîner & à sa compagnie. Le lieutenaut général s'y transporta, en 1525, avec son grestier & un huissier, accompagné du prevôt à la suite du maréchal d'Aubigny, assisté de ses archers & de deux notaires au châtelet. Les marguilliers vinrent au - devant de lui avec les hautbois & autres instrumens: ils lui offrirent au nom des habitans du pain, du vin, & une tarte, les trois sous de cens, & à diner; ce qu'il accepta. Mais par arrêt du parlement du 15 Juin 1624, ce diner a été évalué à cinquante sous tournois, au moyen dequoi la redevance en argent est présentement de quatre livres dix sous outre les trois sous de cens.

Les habitans de Nanterre doivent aussi une redevance au lieutenant général pour l'ile de la maréchaussée située dans ce lieu. La redevance étoit d'un denier de cens, & en outre d'un pain blanc de la largeur d'un fer - à - cheval. Ce pain a été depuis converti en neuf sous parisis d'argent, ensuité évalué à seize sous parisis & un agneau gras, & enfin en 1604 arbitré à quarante sous tournois.

Il a encore un droit appellé ceinture de la reine à prendre sous le pont de Neuilly, qui consiste à prendre sur tous les bateaux montans ou descendans sous le pont de Neuilly, depuis la veille de la Notre - Dame de Mars jusqu'à la S. Jean - Baptiste, dix - huit deniers parisis pour chaque bateau chargé, & douze deniers parisis pour chaque bateau vuide, & un droit de neuvage de trois sou; parisis sur chaque bateau neuf, sous peine de confiscation des bateaux & d'amende albitraire.

C'est lui qui a la garde du sceau du premier maréchal de France, dont on se sert pour sceller toutes les expéditions de ce siége Ce sceau qui contient les armoiries du connétable, & au - dessous celles du premier maréchal, leur a été accordé par nos Rois, comme on voit par des lettres de Charles IX. du 6 Décembre 1568; il change à l'avenement de chaque maréchal de France; l'empreinte des armes du connétable est néanmoins toûjours la même: mais l'écusson des armes du doyen des maréchaux de France, qui est au dessous des armes du connétable, change à chaque mutation de doyen; c'est pourquoi chaque doyen donne un nouveau sceau. Le privilége de ce sceau est d'être exécutoire partout le royaume, sans visa ni pareatis.

Comme il n'y a que deux juges dans ce siége, dans les procès criminels on y appelle pour conseil un troisieme gradué; & depuis long - tems le lieutenant général, ou en son absence celui qui préside, sont dans l'usage d'inviter pour cet effet un ou plusieurs avocats du parlement.

A l'égard des affaires civiles, il y en a quelquesunes d'une nature particuliere où le lieutenant général invite en tel nombre qu'il juge à propos les commissaires, contrôleurs, & thrésoriers des guerres, lesquels en ce cas y ont séance & voix délibérative, dans les contestations entre les thrésoriers & leurs commis. Les commissaires des guerres s'y assemblent en outre les premiers lundis de chaque mois, pour y délibérer des affaires de leur compagnie.

On y a quelquefois appellé des maîtres des comptes, lorsqu'il s'agissoit de finance.

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