ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS
Previous page
CEINTURE
(Page 2:798)
* CEINTURE, s. f. (Hist. anc. & mod.) lisiere de
soie, de laine, de cuir ou d'autres matieres, que l'on
attache autour des reins. L'usage en est ancien. Chez
les Juifs, Dieu ordonna au grand - prêtre d'en porter
une. Les Juifs étoient ceints lorsqu'ils célebroient la
pâque, suivant l'ordre qu'ils en avoient reçû. Dès
ce tems la ceinture servoit aussi de bourse. L'amplitude des habits Grecs & Romains en rendit l'usage
nécessaire chez ces peuples. Ceux qui disputoient
dans les jeux olympiques se ceignoient: mais vers la
trente - quatrieme olympiade la ceinture leur fut inter<pb->
[p. 799]
dite, & ils se dépouillerent pour courir. La défense
de porter la ceinture, fut quelquefois chez les anciens
une tache d'ignominie & la punition de quelque faute;
d'où il s'ensuit que cette partie du vêtement marquoit
quelque dignité parmi eux. La ceinture n'étoit
pas moins à l'usage des femmes que des hommes;
elles s'en servoient soit pour relever leurs robes, soit
pour en fixer les plis. Il y avoit de la grace à soûtenir
à la hauteur de la main le lais du côté droit, ce
qui laissoit le bas de la jambe découvert; & une négligence
outrée à n'avoir point de ceinture & à laisser
tomber sa tunique; de - là les expressions Latines discincti, altè cincti, pour désigner un homme indolent
ou alerte. Mecene ayant témoigné peu d'inquiétude
sur les derniers devoirs de la vie, persuadé que la
nature prend soin elle - même de notre sépulture, Seneque dit de lui, alte cinctum dixisse putes, vous croiriez
que celui qui a dit ce mot portoit sa ceinture bien haut.
Gardez - vous, dit Sylla en parlant de César, d'un
homme dont la ceinture est trop lâche. Il y avoit chez
les Celtes une ceinture qui servoit, pour ainsi dire,
de mesure publique de la taille parmi les hommes.
Comme l'état veilloit à ce qu'ils fussent alertes, il
punissoit ceux qui ne pouvoient la porter. L'usage
des ceintures a été fort commun dans nos contrées:
mais les hommes ayant cessé de s'habiller en long, &
pris le juste - au - corps & le manteau court, l'usage
s'en est restraint peu - à - peu aux premiers magistrats,
aux gens d'église, aux religieux, & aux femmes. Encore les femmes n'en portent - elles presque plus, aujourd'hui, que les paniers & les robes lâches sont devenues
communes, malgré les ecclésiastiques, qui se
recrierent beaucoup contre cette mode, qui laissant
aux femmes, à ce qu'ils croyoient, la liberté de
cacher les suites de leurs fautes, prognostiquoit un accroissement
de dissolution. Nous avons jadis attaché,
ainsi que les anciens, une marque d'infamie à la privation
de la ceinture. Les banqueroutiers & autres
débiteurs insolvables étoient contraints de la quitter.
La raison de cet usage est que nos ancêtres attachant
à leur ceinture une bourse, des clefs, &c. la ceinture
étoit un symbole d'état ou de condition, dont la
privation de cette partie du vêtement indiquoit
qu'on étoit déchû. L'histoire rapporte que la veuve
de Philippe premier duc de Bourgogne, renonça
au droit qu'elle avoit à sa succession, en quittant sa
ceinture sur le tombeau du duc. Voy. Investiture.
La distinction des étoffes & des habits subsista en
France jusqu'au commencement du xv. siecle. On a
un arrêt du parlement de 1420, qui défend aux femmes
prostituées la robe à collet renversé, la queue,
les boutonnieres, & la ceinture dorée: mais les femmes
galantes ne se soûmirent pas long - tems à cette
défense; l'uniformité de leur habillement les confondit
bientôt avec les femmes sages; & la privation ou
l'usage de la ceinture n'étant plus une marque de distinction,
on fit le proverbe, bonne renommée vaut
mieux que ceinture dorée.
L'usage des ceintures parmi nous n'étant point passé,
mais seulement restreint, comme nous l'avons
dit, nous avons une communauté de Ceinturiers.
Les Ceinturiers s'appelloient autrefois Courroyers.
Voyez Ceinturiers.
Ceinture de virginité
(Page 2:799)
Ceinture de virginité des anciens: c'étoit la
coûtume chez les Grecs & les Romains, que le mari
dénoüoit la ceinture de sa femme le premier soir de
ses nôces.
Homere, liv. XI. de son Odyssée, appelle cette
ceinture PARQENI/HN ZWNH\N, ceinture virginale.
Festus rapporte qu'elle étoit de laine de brebis,
& que le mari la délioit lorsqu'il étoit dans le lit
avec sa femme. Il ajoûte qu'elle étoit noüée d'un
noeud singulier, qu'on appelloit le noeud d'Hercule,
& que le mari le défaisoit comme un présage qui lui
promettoit autant d'enfans qu'Hercule en avoit laissé
en mourant.
Les poëtes donnent à Venus une espece de ceinture appellée cestus, à laquelle ils attribuent le pouvoir
d'inspirer de l'amour. Voyez Ceste. (G)
Ceinture de virginité
(Page 2:799)
* Ceinture de virginité des modernes; elle n'a
rien de commun avec celle des anciens. Chez les anciens
l'époux ôtoit à sa femme la ceinture virginale la
premiere nuit de ses nôces; & chez les modernes
c'est un présent qu'un mari jaloux lui fait quelquefois
dès le lendemain. Cette ceinture est composée
de deux lames de fer très - fléxibles, assemblées en
croix: ces lames sont couvertes de velours. L'une
de ces lames fait le tour du corps au - dessus des reins;
l'autre passe entre les cuisses, & son extrémité vient
rencontrer les deux extrémités de la premiere lame;
elles sont toutes trois tenues réunies par un cadenat,
dont le mari seul a le secret. V. Cadenat. La lame
qui passe entre les cuisses est percée de maniere à
assûrer un mari de la sagesse de sa femme, sans géner
les autres fonctions naturelles. On dit que cet
instrument si infame, si injurieux au sexe, a pris
naissance en Italie; c'est peut - être une calomnie:
ce qu'il y a de certain, c'est que l'Italie n'est pas le
seul pays où l'on en ait fait usage.
Chrétien de la ceinture. Molaraekkel, dixime calife
de la famille des Abassides, ordonna l'an 235
de l'hégyre, de Jesus - Christ 856, aux Juifs & aux
Chrétiens de porter une grande ceinture de cuir pour
marquer leur profession, ce qu'ils pratiquent encore
aujourd'hui dans tout l'orient. Depuis ce tems - là les
Chrétiens d'Asie, & sur - tout ceux de Syrie & de la
Mésopotamie, qui sont presque tous Nestoriens ou
Jacobites, sont appellés Chrétiens de la ceinture. (G)
Ceinture de la reine
(Page 2:799)
Ceinture de la reine, (Hist. mod.) ancien
impôr ou taxe qu'on leve à Paris de trois ans en trois
ans, sur le pié de trois deniers pour chaque muid de
vin, & de six pour chaque queue, pour l'entretien
de la maison de la reine. On l'a depuis augmenté &
mis sur quelques autres denrées ou provisions, comme
le charbon, &c. On l'appelloit aussi la taille du
pain & du vin, comme il paroît par des registres de la
chambre des comptes. Vigenere suppose que le nom
de ceinture a été donné à cet impôt, parce qu'autrefois
la ceinture servoit de bourse. Mais il ajoûte qu'on
levoit il y a deux mille ans, en Perse, une pareille
taxe & sous le même nom, & cite pour le prouver
l'Alcibiade de Platon, Cicéron, & Athenée.
Il y a en Angleterre, pour la même destination,
un impôt à - peu - près semblable, qu'on appelle aurum
reginoe, or de la reine, (queen - gold); c'étoit originairement
un don qui se faisoit librement & sans être
exigible. On en a fait depuis une dette, au payement
de laquelle les particuliers sont contraints. (H)
Ceinture de vif argent
(Page 2:799)
Ceinture de vif argent, terme de Medecine;
c'est une espece de ceinture couverte & remplie de
mercure. Voyez Mercure.
Elle est de cuir, de linge, de drap, de coton, ou
d'autre étoffe, qui enveloppe du mercure préparé
ou éteint avec la salive d'une personne à jeun, de la
graisse ou autre matiere, qui en amortit la trop grande
vivacité. On l'attache en forme de topique autour
des reins, quelquefois avec succès, quelquefois aussi
au préjudice du malade; car elle est souvent dangereuse
aux personnes qui sont d'un tempérament foible
ou sujettes aux convulsions: on s'en sert pour
guérir la gale, pour tuer la vermine, &c. (N)
Ceinture
(Page 2:799)
Ceinture du four, en terme de Boulanger, & d'autres
ouvriers; c'est le tour intérieur du four, ou la partie
du mur qui le forme, & sur laquelle la voute est
appuyée.
Ceinture
(Page 2:799)
Ceinture ou Peignon; voyez Peignon & Corderie.
[p. 800]
Next page
The Project for American and French Research on the Treasury of the
French Language (ARTFL) is a cooperative enterprise of Analyse et
Traitement Informatique de la Langue Française (ATILF) of the
Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), the Division
of the Humanities, the Division of the Social Sciences, and Electronic
Text Services (ETS) of the University of Chicago.
PhiloLogic Software, Copyright © 2001 The University of Chicago.