ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"715"> tir, c'est ranger les cartes divisées par deux rangs de cartes, déterminés par l'ordre qu'elles avoient sur le moule ou sur les feuilles. Il y a entre la place d'une carte sur la feuille & sa place dans le rang, une correspondance telle que dans cette distribution; toutes les cartes de la même espece, tous les rois, toutes les dames, tous les valets, &c. tombent ensemble: alors on dit qu'elles sont par sortes. Mises par sortes, on les trie. Trier, c'est mettre les blanches avec les blanches, les moins blanches ensemble, & ôter les taches, qu'on appelle le bro, comme nous avons dit. On distingue quatre lots de cartes relativement à leur degré de finesse: celles du premier lot s'appellent la fleur; celles du second, les premieres; celles du troisieme, les secondes; celles du quatrieme & du cinquieme, les triards ou fonds.

Quand on a distribué chaque sorte relativement à sa qualité ou son degré de finesse, on fait la couche, où l'on forme autant de sortes de jeu qu'on a de différens lots; ensuite on range & on complette les jeux, ce qui s'appelle faire la boutée. on finit par plier les jeux dans les enveloppes; ce qu'on exécute de maniere que les jeux de fleur se trouvent au - dessus du sixain, afin que si l'acheteur veut examiner ce qu'on lui vend, il tombe nécessairement sur un beau jeu.

On prépare les enveloppes exactement comme les cartes, avec un moule qui porte l'enseigne du Cartier. Mais il y a à l'extrémité de ce moule une petite cavité qui reçoit exactement une piece amovible, sur laquelle on a gravé en lettres le nom de la sorte de jeu que l'enveloppe doit contenir, comme piquet, si c'est du piquet; médiateur ou comete, si c'est médiateur ou comete: cette piece s'appelle bluteau. Comme il y a deux sortes d'enveloppes, l'une pour les sixains, l'autre pour les jeux, il y a plusieurs moules pour les enveloppes: ces moules ne different qu'en grandeur.

Les cartes se vendent au jeu, au sixain, & à la grosse. Les jeux se distinguent en jeux entiers, en jeux d'hombre, & jeux de piquet.

Les jeux entiers sont composés de cinquante - deux cartes; quatre rois, quatre dames, quatre valets, quatre dix, quatre neuf, quatre huit, quatre sept, quatre six, quatre cinq, quatre quatre, quatre trois, quatre deux, & quatre as.

Les jeux d'hombre sont composés de quarante cartes, les mêmes que ceux des jeux entiers, excepté les dix, les neuf, & les huit qui y manquent.

Les jeux de piquet sont de trente - deux; as, rois, dames, valets, dix, neuf, huit, & sept.

On distingue les cartes en deux couleurs principales, les rouges & les noires: les rouges représentent un coeur ou un losange; les noires un trefle ou un pique: elles sont toutes marquées depuis le roi jusqu'à l'as de coeur, trefle, carreau ou pique.

Celles qu'on appelle roi, sont couronnées & ont différens noms. Le roi de coeur s'appelle Charles; celui de carreau, César; celui de trefle, Alexandre; & celui de pique, David.

Les dames ont aussi leurs noms: la dame de coeur s'appelle Judith; celle de carreau, Rachel; celle de trefle, Argine; & celle de pique, Pallas.

Le valet de coeur se nomme Lahire; celui de carreau, Hector; celui de pique, Hogier; celui de trefle a le nom du Cartier.

Les dix portent dix points sur les trois rangées, quatre, deux, quatre; les neuf sur les trois rangées, quatre, un, quatre; les huit sur les trois rangées, trois, deux, trois; les sept sur les trois rangées, trois, un, trois; les six sur les deux rangées, trois, trois; les cinq sur les trois rangées, deux, un, deux; les quatre sur les deux rangées, deux, deux; les trois sur une rangée, ainsi que les deux: l'as est au milieu de la carte.

S'il y avoit un moyen de corriger les avares, ce seroit de les instruire de la maniere dont les choses se fabriquent: ce détail pourroit les empêcher de regretter leur argent; & peut - être s'étonneroient - ils qu'on leur en demande si peu pour une marchandise qui a coûté tant de peine.

On a mis de grands impôts sur les cartes, ainsi que sur le tabac; cependant je ne pense pas que ceux même qui usent le plus de l'un, & qui se servent le plus des autres, ayent le courage de s'en plaindre. Qui eût jamais pensé que la fureur pour ces deux superfluités, pût s'accroître au point de former un jour deux branches importantes des fermes? Qu'on n'imagine pas que celle des cartes soit un si petit objet. Il y a tel Cartier qui fabrique jusqu'à deux cents jeux par jour.

Il y auroit un moyen de rendre cette ferme beaucoup plus importante: je le publie d'autant plus volontiers, qu'il ne seroit certainement à charge à personne; ce seroit de taxer le prix des cartes au - dessous de celui qu'elles ont. Qu'arriveroit - il de là? qu'il y auroit si peu de différence entre des cartes neuves & des cartes recoupées, qu'on se détermineroit aisément à n'employer que des premieres. Le Fermier & le Cartier y trouveroient leur compte tous deux: ce qui est évident; car les cartes se recoupent jusqu'à deux fois, & reparoissent par conséquent deux fois sur les tables. Si en diminuant le prix des cartes neuves, on parvenoit à diminuer de moé la distribution des vieilles cartes, celui qui fabrique & vend par jour deux cents jeux de cartes, qui par la recoupe tiennent lieu de six cents, en pourroit fabriquer & vendre trois cents. Le Cartier regagneroit sur le grand nombre des jeux vendus, ce qu'on lui auroit diminué sur chacun, & la ferme augmenteroit sans vexer personne.

Il est surprenant que nos François qui se piquent si fort de bon goût, & qui veulent le mieux jusque dans les plus petites choses, se soient contentés jusqu'à présent des figures maussades dont les cartes sont peintes: il est évident, par ce qui précede, qu'il n'en coûteroit rien de plus pour y représenter des sujets plus agréables. Cela ne prouve - t - il point qu'il n'est pas aussi commun qu'on le pense, de joüer ou par amusement, ou sans intérêt? pourvû qu'on tue le tems, ou qu'on gagne, on ne se soucie guere que ce soit avec des cartes bien ou mal peintes.

Carte (Page 2:715)

Carte, (Artificier.) ce mot signifie en général le carton dont se servent les Artificiers. Ils en désignent l'épaisseur par le nombre des feuilles de gros papier gris dont il est composé: ainsi on dit, de la carte en deux, trois, quatre, ou cinq, sans y ajoûter le mot de feuille, qui est sousentendu chez eux & chez les marchands qui les vendent.

On désigne les petites cartes en les appellant cartes à joüer; & le gros carton plus roide & moins propre au moulage, qui doit être flexible, s'appelle carte - lisse.

CARTEL (Page 2:715)

CARTEL, s. m. (Hist. mod.) lettre de défi, ou appel à un combat singulier, qui étoit fort en usage lorsqu'on décidoit des différends par les armes, & uniquement par elles, ainsi que certains procès. Voyez Combat, Duel, Champion , &c. (G)

Cartel (Page 2:715)

Cartel, (Commerce.) mesure de continence pour les grains, & qui est en usage à Rocroi, à Mezieres, & autres lieux où elle varie pour la grandeur & pour le poids.

Le cartel de froment pese à Rocroi trente - cinq livres poids de marc, celui de méteil trente - quatre, & celui de seigle trente - trois.

A Mezieres le cartel de froment pese trente livres, de méteil vingt - huit, de seigle vingt - six livres. [p. 716]

A Sedan le cartel de froment pese trente - neuf livres, celui de méteil une livre de moins; le cartel de seigle, trente - sept, & celui d'avoine trente - cinq livres.

A Montmidi le cartel de froment pese quarantehuit livres & demie; de méteil, quarante - sept; d'avoine, cinquante livres. Toutes les livres dont nous venons de parler, doivent être prises poids de marc. Dictionnaire du Commerce. (G)

CARTELADE (Page 2:716)

CARTELADE, s. f. (Commerce.) mesure en longueur dont on se sert dans l'arpentage des terres en plusieurs endroits de la Guienne; elle est environ de 1080 toises.

CARTELLES (Page 2:716)

CARTELLES, s. f. (Commerce de bois.) petites planches de l'épaisseur de deux, trois, quatre, cinq pouces, dans lesquelles on débite les bois qui sont à l'usage des Tabletiers, Ebenistes, Armuriers, &c.

CARTERON (Page 2:716)

CARTERON, s. m. (terme de Tisseran.) c'est une lame de bois d'un pouce de largeur, plate & d'environ cinq piés de longueur, qui se place derriere les verges. Cette barre passe entre les fils de la chaîne, qui se croisent sur elle, c'est - à - dire, qui passent deux dessus & deux dessous; son usage est de contenir les fils de la chaîne, & les empêcher de se mêler.

CARTÉSIANISME (Page 2:716)

CARTÉSIANISME, s. m. Philosophie de Descartes, ainsi appellée du nom Latin Cartesius de son auteur. René Descartes naquit le 31 Mars 1596 à la Haye, petite ville de la Touraine, de Joachim Descartes, conseiller au parlement de Bretagne, & de Jeanne Brochard, fille du lieutenant général de Poitiers. On lui donna le surnom de du Perron, petite seigneurie située dans le Poitou, qui entra ensuite dans son partage après la mort de son pere.

La délicatesse de son tempérament, & les infirmités fréquentes qu'il eut à soûtenir pendant son enfance, firent appréhender qu'il n'eût le sort de sa mere, qui étoit morte peu de tems après être accouchée de lui: mais il les surmonta, & vit sa santé se fortifier à mesure qu'il avança en âge.

Lorsqu'il eut huit ans, son pere lui trouvant des dispositions heureuses pour l'étude, & une forte passion pour s'instruire, l'envoya au collége de la Fleche. Il s'y appliqua pendant cinq ans & demi aux humanités; & durant ce tems, il fit de grands progrès dans la connoissance des langues Greque & Latine, & acquit un goût pour la Poësie, qu'il conserva jusqu'à la fin de sa vie.

Il passa ensuite à la Philosophie, à laquelle il donna toute son attention, mais qui étoit alors dans un état trop imparfait, pour pouvoir lui plaire. Les Mathématiques auxquelles il consacra la derniere année de son séjour à la Fleche, le dédommagerent des dégoûts que lui avoient causés la Philosophie. Elles eurent pour lui des charmes inconnus, & il profita avec empressement des moyens qu'on lui fournit, pour s'enfoncer dans cette étude aussi profondément qu'il pouvoit le souhaiter. Le recteur du collége lui avoit permis de demeurer long - tems au lit, tant à cause de la délicatesse de sa santé, que parce qu'il remarquoit en lui un esprit porté naturellement à la méditation. Descartes, qui à son réveil, trouvoit toutes les forces de son esprit recueillies, & tous ses sens rassis par le repos de la nuit, profitoit de ces conjonctures favorables pour méditer. Cette pratique lui tourna tellement en habitude, qu'il s'en fit une maniere d'etudier pour toute sa vie; & l'on peut dire que c'est aux matinées qu'il passoit dans son lit, que nous sommes redevables de ce que son génie a produit de plus important dans la Philosophie & dans les Mathématiques.

Son pere, qui avoit fait prendre à son aîné le parti de la robe, sembloit destiner le jeune du Perron à celui de la guerre: mais sa grande jeunesse & la foiblesse de son tempérament ne lui permettant pas de l'exposer si - tôt aux travaux de ce métier pénible, il l'envoya à Paris, après qu'il eut sini le cours de ses études.

Le jeune Descartes s'y livra d'abord aux plaisirs, & conçut une passion d'autant plus forte pour le jeu, qu'il y étoit heureux. Mais il s'en desabusa bientôt, tant par les bons avis du P. Mersenne, qu'il avoit connu à la Fleche, que par ses propres réflexions. Il songea alors à se remettre à l'étude, qu'il avoit abandonnée depuis sa sortie du collége; & se retirant pour cet effet de tout commerce oisif, il se logea dans une maison écartée du faubourg S. German, sans avertir ses amis du lieu de sa retraite. Il y demeura une partie de l'année 1614, & les deux suivantes presque entieres, sans en sortir, & sans voir personne.

Ayant ainsi repris le goût de l'étude, il se livra entierement à celle des Mathématiques, auxquelles il voulut donner ce grand loisir qu'il s'étoit procuré; & il cultiva particulierement la Géométrie & l'Analyse des anciens, qu'il avoit déjà approfondie d collége.

Lorsqu'il se vit âgé de 21 ans, il crut qu'il étoit tems de songer à se mettre dans le service; il se rendit pour cela en Hollande, afin d'y porter les armes sous le prince Maurice. Quoiqu'il choisît cette école, qui étoit la plus brillante qu'il y eût alors par le grand nombre de héros qui se formerent sous ce grand capitaine, il n'avoit pas dessein de devenir grand guerrier; il ne vouloit être que spectateur des rôlles qui se jouent sur ce grand théatre, & étudier seulement les moeurs des hommes qui y paroissent. Ce fut pour cette raison, qu'il ne voulut point d'emploi, & qu'il s'entretint toûjours à ses dépens, quoique pour garder la forme, il eût reçû une fois la paye.

Comme on joüissoit alors de la treve, Descartes passa tout ce tems en garnison à Breda: mais il n'y demeura pas oisif. Un problème qu'il y résolut avec beaucoup de facilité, le fit connoître à Isaac Beeckman, principal du collégé de Dordrecht, lequel se trouvoit à Breda, & par son moyen à plusieurs savans du pays.

Il y travailla aussi à plusieurs ouvrages, dont le seul qui ait été imprimé, est son Traité de la Musique. Il le composa en Latin, suivant l'habitude qu'il avoit de concevoir & d'écrire en cette langue. Après avoir fait quelques autres campagnes sous différens généraux, il se dégoûta du métier de la guerre, & y renonça avant la fin de la campagne de 1621.

Il avoit remis à la fin de ses voyages à se déterminer sur le choix d'un état: mais, toutes réflexions faites, il jugea qu'il étoit plus à propos pour lui de ne s'assujettir à aucun emploi, & de demeurer maître de lui - même.

Après beaucoup d'autres voyages qu'il fit dans différens pays, la reine Christine de Suede, à qui il avoit envoyé son Traité des passions, lui fit faire au commencement de l'année 1649, de grandes instances pour l'engager à se rendre à sa cour. Quelque répugnance qu'il se sentît pour ce nouveau voyage, il ne pût s'empêcher de se rendre aux desirs de cette princesse, & il partit sur un vaisseau qu'elle lui avoit envoyé. Il arriva à Stockolm au commencement du mois d'Octobre, & alla loger à l'hôtel de M. Chanut, ambassadeur de France, son ami, qui étoit alors absent.

La reine, qu'il alla voir le lendemain, le reçut avec une distinction qui fut remarquée par toute la cour, & qui contribua peut - être à augmenter la jalousie de quelques savans auxquels son arrivée avoit paru redoutable. Elle prit dans une seconde visite des mesures avec lui, pour apprendre sa Philosophie de sa propre bouche; & jugeant qu'elle auroit besoin de tout son esprit & de toute son application pour y réussir, elle choisit la premiere heure d'après

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