RECHERCHE | Accueil | Mises en garde | Documentation | ATILF | ARTFL | Courriel |
"713">
L'étresse triée formera l'ame de la carte. Le papier dont on fait les étresses vaut cinquante à cinquantedeux sous la rame. Quand l'étresse est préparée, on prend deux autres sortes de papiers: l'une appellée le cartier, qui ne sert qu'à l'usage dont il s'agit; il est sans marque; il pese vingt - deux liv. le paquet ou les deux rames, & vaut environ quinze francs la rame: l'autre, appellée le pau, qui vaut à peu - près trois livres douze sols la rame. Le papier d'étresse, le cartier, & le pau, sont à peu - près de la même grandeur, excepté le cartier; mais c'est un défaut: s'ils étoient bien égaux, il y auroit moins de déchet.
Ces papiers étant préparés, on mêle en blanc. Pour cette opération, on a un tas de cartier à droite, & un tas de pau à gauche. On prend d'abord une feuille de pau, on place dessus deux feuilles de cartier; puis sur celles - ci deux feuilles de pau; puis sur ces dernieres deux feuilles de cartier, & ainsi de suite jusqu'à la fin, qu'on termine ainsi qu'on a commencé, par une seule feuille de pau. Il faut observer que le nouveau tas est formé de maniere que les feuilles se débordent de deux en deux, comme quand on a mêlé la premiere fois pour faire les étresses; ce nouveau tas contient environ dix mains de papier.
Quand on a mêlé en blanc, on mêle en étresse; mêler en étresse, c'est entrelarder l'étresse dans le blanc: ce qui s'exécute ainsi. On enleve la premiere feuille de pau, on met dessus une étresse; sur cette étresse deux feuilles de cartier; sur les deux feuilles de cartier, une étresse; sur cette étresse, deux feuilles de pau, & ainsi de suite: d'où l'on voit évidemment que chaque étresse se trouve entre une feuille de cartier & une feuille de pau. Les feuilles de cartier, de pau, & les étresses, doivent se déborder dans le nouveau tas.
Après cette manoeuvre, on colle en ouvrage. Cette opération n'a rien de particulier; elle se fait comme le premier collage; & consiste à enfermer une étresse entre une feuille de pau & une feuille de cartier. Après avoir collé en ouvrage, on met en presse, on pique, on étend, & on abat, comme on a fait aux étresses, avec cette différence qu'on n'étend que deux des nouveaux feuillets à la fois; ces deux feuillets s'appellent un double: avec un peu d'attention on s'appercevra que les deux blancs ou feuilles de cartier sont appliquées l'une contre l'autre dans le double, & que les deux feuilles de pau sont en dehors; par ce moyen la dessiccation se fait sans que le papier perde de sa blancheur. Le cartier fait le dos de la carte, & le pau le dedans; le Cartier qui entend ses intérêts, conduira jusqu'ici pendant l'été sa matiere à mettre en cartes.
Lorsque les doubles sont préparés, on a proprement le carton dont la carte se fait; il ne s'agit plus que de couvrir les surfaces de ces doubles, ou de têtes ou de points. Les têtes, ce sont celles d'entre les cartes qui portent des figures humaines; toutes les autres s'appellent des points.
Pour cet effet, on a un moule de bois, tel qu'on
le voit,
On prend du papier de pau, on le déplie, on le
rompt, on le moitit; moitir, c'est tremper. Voyez
Pour mouler, on a devant soi ou à côté un tas de ce pau trempé; on a aussi du noir d'Espagne qu'on a fait pourrir dans de la colle. Plus il est resté longtems dans la colle, plus il est pourri, meilleur il est. Il y en a dont le pié a deux à trois ans. On a une
Le jaune n'est autre chose que de la graine d'Avignon qu'on fait bouillir, & à laquelle on mêle un peu d'alun pour la purifier; le gris, qu'un petit bleu d'indigo qu'on a dans un pot; le rouge, qu'un vermillon broyé & délayé avec un peu d'eau & de colle ou gomme; le bleu, qu'un indigo plus fort, délayé aussi avec de la gomme & de l'eau; le noir, que du noir de fumée.
On se sert pour appliquer ces couleurs, de différens patrons; le patron est fait d'un morceau d'imprimure. Les ouvriers entendent par une imprimure, une feuille de papier qu'on prépare de la maniere suivante: faites calciner des écailles d'huîtres ou des coques d'oeufs; broyez - les & les réduisez en poudre menue. Mêlez cette poudre avec de l'huile de lin, & de la gomme arabique, vous aurez une composition pâteuse & liquide, dont vous enduirez le papier. Vous donnerez six couches à chaque côté; ce qui rendra la feuille épaisse, à peu - près comme une piece de 24 sous.
C'est au Cartier à découper l'imprimure; ce qu'il
exécute pour les têtes avec une espece de canif: pour
cet effet, il prend une mauvaise feuille de carte toute
peinte, il applique cette feuille sur l'imprimure & l'y
fixe; il enleve avec sa pointe ou son canif toutes
les parties peintes de la même couleur, & de la
feuille & de l'imprimure: puis il ôte cette imprimure
& en substitue une autre sous la même feuille, &
enleve au canif tant de la feuille que de l'imprimure,
une autre couleur, & ainsi de suite autant qu'il
y a de couleurs. La feuille peinte qui sert à cette
operation, s'appelle faute. Voyez
Voilà pour la peinture des têtes. Quant à celle des points, les patrons ne sont pas découpés au canif, mais à l'emporte - piece. On a quatre emporte - pieces différens, pique, trefle, coeur, & carreau, dont on frappe les imprimures. Les bords de ces emporte - pieces sont tranchans & coupent la partie de l'imprimure sur laquelle ils sont appliqués; ces imprimures ainsi préparées servent à faire les points, comme celles des têtes ont servi à peindre les figures: il faut seulement observer pour les têtes, que la planche en étant divisée en quatre coupeaux, on passe le pinceau à quatre reprises. [p. 714]
Quand tous les papiers ou feuilles de pau sont peintes, comme nous venons de dire, il s'agit de les appliquer sur les doubles; pour cet effet, on les mêle en tas: une feuille peinte, un double; une feuille peinte, un double, & ainsi de suite: de maniere que le double soit toûjours enfermé entre deux feuilles peintes. On colle, on presse, on pique, on étend, comme ci - dessus. On abat, & l'on sépare les doubles, ainsi comme nous avons dit qu'on séparoit les étresses. Ce nouveau travail n'a rien de particulier; il fait seulement passer l'ouvrage un plus grand nombre de fois entre les mains de l'ouvrier.
Quand on a séparé, on prépare le chauffoir; le
chauffoir est tel qu'on le voit,
On allume du feu dans le chauffoir; on passe dans les crochets ou agraffes qu'on remarque autour du chauffoir, une caisse quarrée de bois qui sert à concentrer la chaleur; on place ensuite quatre feuilles en dedans de cette caisse quarrée, une contre chaque côté, puis on en pose une dessus les barres qui se croisent; on ne les laisse toutes dans cet état, que le tems de faire le tour du chauffoir. On les enleve en tournant, on y en substitue d'autres, & l'on continue cette manoeuvre jusqu'à ce qu'on ait épuisé l'ouvrage; cela s'appelle chauffer.
Au sortir du chauffoir, le lisseur prend son ouvrage & le savonne par - devant, c'est - à - dire du côté des figures. Savonner, c'est avec un assemblage de morceaux de chapeau cousus les uns sur les autres à l'épaisseur de deux pouces, & de la largeur de la feuille (assemblage qu'on appelle savonneur) emporter du savon, en le passant sur un pain de cette marchandise, & le transporter sur la feuille en la frottant seulement une fois. On savonne la carte pour faire couler dessus la pierre de la lissoire.
Quand la carte est savonnée, on la lisse. La lissoire
est un instrument composé d'une perche, dont on
voit une extrémité
Quand la carte est lissée par - devant, on la chausse, comme on a fait ci - dessus. Il faut observer que soit en chauffant, soit en réchauffant, c'est la couleur qui est tournée vers le feu. Le réchauffage se fait comme le chauffage. Après cette manoeuvre, on savonne la carte par - derriere, & on la lisse par - derriere.
Au sortir de la lisse, la carte va au ciseau pour être coupée. On commence par rogner la feuille. Rogner, c'est enlever avec le ciseau ce qui excede le trait du moule, des deux côtés qui forment l'angle supérieur à droite de la feuille. Pour suivre ce trait exactement, il est évident qu'il faut que la face colorée soit en - dessus, & puisse être apperçûe par le coupeur. Les traits du moule tracés autour des cartes, & qui, en formant pour ainsi dire les limites, en assûrent l'égalité, s'appellent les guides: c'est en effet ces traits qui guident le coupeur.
Le coupeur a son établi particulier. Il est représenté
dans la vignette,
Il s'ensuit de cette disposition, que pour peu que
l'ouvrier soit attentif à son ouvrage, il lui est impossible
de ne pas couper droit & de ne pas suivre les guides.
Quand il a rogné, il traverse. Traverser, c'est separer
les coupeaux, ou mettre la feuille en quatre parties
égales. Quand il a traversé, il ajuste: ajuster, c'est
examiner si les coupeaux sont de la même hauteur.
Pour cet effet, on les applique les uns contre les autres,
& on tire avec le doigt ceux qui débordent;
on repasse ceux - ci au ciseau. On doit s'appercevoir
que le ciseau est tenu toûjours à la même distance
de l'esto, & qu'il ne s'en peut ni éloigner, ni approcher.
On a planté en 3, 3, sur le milieu de l'esto, dans
une ligne parallele au tranchant de la lame immobile
du ciseau, deux épingles fortes. On pose le coupeau
à retoucher contre ces épingles en - dessous; on applique
bien son côté contre l'esto, & l'on enleve
avec le ciseau tout ce qui excede. Cet excédent est
nécessairement de trop, parce que la distance du ciseau
à l'esto est précisément de la hauteur de la carte. Quand on a repassé, on rompt. Rompre, c'est plier
un peu les coupeaux, & leur faire le dos un peu convexe.
Après avoir rompu les coupeaux, on les mene
au petit ciseau. Le petit ciseau est monté précisément
comme le grand; & il n'y a entre eux de différence
que la longueur & l'usage. Le grand sert à rogner les
feuilles & à les mettre en coupeaux; & le petit, à
mettre les coupeaux en cartes. On rogne, & l'on met
en coupeaux les feuilles les unes après les autres; &
les coupeaux en cartes, les uns après les autres.
Quand les coupeaux sont divisés, on assortit. Assor -
Next page
The Project for American and French Research on the Treasury of the French Language (ARTFL) is a cooperative enterprise of Analyse et Traitement Informatique de la Langue Française (ATILF) of the Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), the Division of the Humanities, the Division of the Social Sciences, and Electronic Text Services (ETS) of the University of Chicago.