ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS
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petite écrevisse de mer qu'on nomme chevrette ou
crevette. M. Deslandes en fit pêcher une grande quantité,
& les mit dans une baille pleine d'eau de mer;
au bout de douze à treize jours il vit huit ou dix petites
soles. Il répéta l'expérience plusieurs fois, toujours
avec le même succès; il mit ensuite des soles
dans uns baille; & quoiqu'elles frayassent, il n'y
parut point de petites soles.
Il a de plus trouvé, que quand on a nouvellement
pêché des chevrettes, on leur voit entre les piés
plusieurs petites vessies, inégales en grosseur & en
nombre, fortement collées à leur estomac par une
liqueur gluante. Ayant examiné ces vessies avec un
microscope,il y a vu une espece d'embryon qui avoit
l'air d'une sole; d'où il conclud que les oeufs de
sole, pour éclore, doivent s'attacher à des chevrettes.
M. Lyonnet n'a pas voulu disputer cette conclusion;
mais il lui semble avec raison que M. Deslandes auroit pu rendre son expérience plus sure, si
au - lieu de la grande quantité de chevretes qu'il a
mises dans sa baille, & parmi lesquelles il se seroit
aisément pu mêler quelques petites soles, sans qu'il
s'en fût apperçu, il se fût contenté de prendre quelques
chevrettes chargées des vessies dont il parle;
& qu'après avoir compté ces vessies, il eût mis chaque
chevrette à part dans un peu d'eau; si pour lors
en trouvant après quelques jours une petite sole
dans l'eau, il eût aussi trouvé une vessie de moins
à la chevrette placée dans le même vase, ç'auroit été
une preuve que la sole seroit née d'une vessie attachée
à la chevrette; mais encore n'auroit - ce pas
pas été une preuve que les oeufs de sole ont besoin
de ses insectes, & qu'ils ne pourroient éclore sans
cela.
Si les oeufs de celles qui avoient frayé dans la
baille sont demeurés stériles, & que les autres aient
produit des poissons, la raison de cette différence
peut bien avoir été, ou que les mâles n'ont pas fertilisé
le frai des premieres, & qu'ils auront rendu
fertile celui dont les oeufs se sont attachés aux chevrettes;
ou bien que ces oeufs ayant besoin d'agitation
pour éclore, les premiers n'ont pas eu dans la
baille l'agitation nécessaire qu'ils auroient reçue dans
la mer, tandis que les chevrettes par leur mouvement
auront procuré une agitation suffisante aux autres.
Toutes ces réflexions prouvent qu'on ne sauroit
être trop réservé à établir des faits sur des expériences
douteuses, & qu'on croit démonstratives.
(D. J.)
Sole
(Page 15:312)
Sole, s. f. (Marine.) c'est le fond des bâtimens qui
n'ont pas de quille, tels que la gribane, le bac, &c.
Soles
(Page 15:312)
Soles, (Marine.) pieces du fond d'un affut de
bord.
Sole
(Page 15:312)
Sole, s. f. (Architect.) c'est une grosse piece de
bois d'équarrissage, qui avec une autre piece qu'on
appelle la fourchette, fait la base d'une machine à élever des fardeaux qu'on nomme un engin. C'est sur
le milieu de la sole que pose le poinçon, & ses bras.
Les sonnettes, autre machine pour battre des pieux,
ont pareillement leur sole, de dessus laquelle s'élevent
les montans à coulisse & leurs bras. Les soles
font encore les deux pieces de bois posées en croix
sur un massif de pierre ou de maçonnerie, sur le milieu
desquelles est appuyé & arbouté l'arbre ou
poinçon qui porte la cage d'un moulin à vent, &
sur lequel il tourne. En général, toutes les pieces
de bois qui posent à terre pour soutenir quelque
construction, machine ou bâtiment, & sur lesquelles
on les éleve, s'appellent des soles. (D. J.)
Soles
(Page 15:312)
Soles, s. f. pl. (Maçonn.) ce sont les jettées du
plâtre au panier, que les maçons font avec la truelle
pour former les enduits. (D. J.)
Sole
(Page 15:312)
Sole, s. f. (Agric.) c'est une certaine étendue de
champ sur laquelle on seme successivement par années,
des blés, puis des menus grains, & qu'on laisse
en jachere la troisieme année. On divise ordinairement
une terre en trois soles. (D. J.)
Soles
(Page 15:312)
Soles, s. f. pl. (Charpent.) On appelle ainsi toutes
les pieces de bois posées de plat, qui servent à faire
les empattemens des machines, comme des grues,
engins, &c. On les nomme racinaux, quand au - lieu
d'être plates, elles sont presque quarrées. Daviler.
(D. J.)
Sole
(Page 15:312)
Sole, s. f. (Comm.) place publique ou étape où
l'on étale les marchandises, & où on les met comme
en dépôt pour être vendues. Les marchands de vin
en gros sont tenus de mettre dans les soles de l'hôtel
de ville leurs vins, pour en payer le gros. Dictionn.
de commerce. (D. J.)
Sole
(Page 15:312)
Sole, (Maréchal.) On appelle ainsi le dessous du
pié du cheval. C'est une espece de corne beaucoup
plus tendre que l'autre qui l'environne, & qui à
cause de sa dureté, est appellée proprement la corne.
Un fer qui porte sur la sole, peut fouler un cheval,
le faire boîter, & lui meurtrir la chair qui la sépare
du petit pié.
Cheval dessolé est celui à qui on a ôté la sole sans
toucher à la corne du sabot. On ôte la sole pour plusieurs
accidens, & en moins d'un mois, elle peut être
entierement rétablie.
Sole
(Page 15:312)
Sole, (Vénerie.) Ce mot en terme de chasse, signifie
le milieu du dessous du pié des grandes bêtes. (D. J.)
Sole
(Page 15:312)
Sole ou Soulle, jeu de la, (Hist. mod.) Le jeu
de la sole ou de la soulle étoit en usage autrefois
dans le Berry, le Bourbonnois, la Picardie, & peut - être
ailleurs. Ce mot vient, selon M. du Cange, de
solea, une semelle de soulier, parce que c'étoit avec
la plante du pié que l'on poussoit l'instrument. On
jouoit à la sole dès le xiv. siecle en plusieurs endroits
du royaume. En certains pays, ce jeu s'appelloit la
soule, en d'autres, la chéole. On voit ce jeu désigné
dans les ordonnances de nos rois & dans les statuts
synodaux. L'instrument du jeu, s'il étoit gros, s'appelloit
soule, & soulette, s'il étoit petit, en basse Bretagne s'appelloit mellat en langue vulgaire du xv. siecle,
qui est le tems auquel Raoul évêque de Tréguier le défendit. Son statut est de l'an 1440, & on le
trouve au tom. IV. du thesaurus anecdotorum des PP.
Martenne & Durant. L'ordonnance de Charles VI.
qui parle de ce jeu auquelles paysans du Véxin s'exerçoient
devant la porte de l'abbaye de Notre - Dame
de Mortevert, le jour de carême - prenant, est de
l'an 1387. Une autre autre ordonnance du roi Charles V. qui est de l'an 1369, met ce jeu dans le rang
de ceux qui sont défendus, comme ne servant nullement
à dresser la jeunesse pour la guerre. La sole,
selon M. Ducange, étoit un ballon enflé de vent,
ou une boule de bois, & peut - être l'un & l'autre.
Dans un decret ou statut du châtelet de Paris de
l'an 1493, il en est encore parlé sous le nom du jeu
de la soule. On assure que les peuples de quelques villages
de l'archiprêtré d'Hériscon en Bourbonnois,
croyoient autrefois honorer Saint Jeant l'évangeliste
ou Saint - Ursin, en courant la sole; c'est - à - dire, que
cet exercice se faisoit dans l'une de ces paroisses
le 27 de Décembre, & dans une autre, le 29 du
même mois. Voyez M. Ducange & ses continuateurs
dans le glossarium medioe & infimoe latinitatis, aux mots
ludi, cheolare, mellat, &c. Le même M. Ducange,
dans sa viij. dissertation sur Joinville, & le mercure
de Mars 1735, où l'on trouve plusieurs réflexions
de M. Lebeuf, chanoine & souschantre d'Auxerre,
sur le même sujet. Supplément de Moréry.
SOLEA
(Page 15:312)
SOLEA, (Antiq. rom.) riche chaussure d'or &
de soie, avec une seule semelle de cuir. (D. J.)
SOLÉGISME
(Page 15:312)
SOLÉGISME, s. m. (Gram.) quelques grammai<pb->
[p. 313]
riens ont prétendu que ce mot, qui se dit en grec
SOLOIKISMOS2, est formé de ces mots, SO/D LO(GOU
AI)KISMO\S2, sani sermonis indigna corruptio, corruption
d'un langage sain. Mais cette origine, quoiqu'ingénieuse
& probable en soi, est démentie par l'histoire.
« Ce mot est formé de *SO/LOIKOI, qui signifie les habitans de la ville appellée *SO/LOI, comme *AGROIKOI,
les habitans de la campagne».
[La terminaison OIKOI
vient de O/IKOS2, domus; d'où OI)KEIW/, habito].
« De *SO/LOIKOI
on a fait SOLOIKI/STEIN, imiter les habitans de la ville
appellé *SO/LOI, comme de *AGRAKOI, A)GROIKI/ZEIN, imiter les gens de la campagne».
Voyez Imitatif.
« Il y avoit deux villes de ce nom, l'une en Cilicie, sur les bords du Cydnus, l'autre dans l'île de
Chypre. Ces deux villes, suivant un grand nombre
d'auteurs, avoient été fondées par Solon. La ville
qu'il avoit bâtie dans cette province, quitta dans
la suite le nom de son fondateur, pour prendre
celui de Pompée, qui l'avoit rétablie. A l'égard de
celle de l'île de Chypre, Plutarque nous a conservé
l'histoire de sa fondation. Solon étant passé
auprès d'un roi de Chypre, acquit bientôt tant
d'autorité sur son esprit, qu'il lui persuada d'abandonner
la ville où il faisoit son séjour: l'assiette en
étoit à la vérité fort avantageuse; mais le terrein
qui l'environnoit étoit ingrat & difficile. Le roi
suivit les avis de Solon, & bâtit dans une belle
plaine une nouvelle ville, aussi forte que la premiere,
dont elle n'étoit pas éloignée, mais beaucoup
plus grande & plus commode pour la subsistance
des habitans On accourut en foule de toutes
parts pour la peupler; & il y vint sur - tout un grand
nombre d'Athéniens, qui s'étant mêlés avec les anciens
habitans, perdirent dans leur commerce la
politesse de leur langage, & parlerent bientôt comme
des barbares: de - là le nom SO/LOIKOI, qui est leur
nom, fut substitué au mot BA/RBAROI, & SOLOIKI/ZEIN, à
BARBARI/ZEIN, qu'on employoit auparavant pour désigner
ceux qui parloient un mauvais langage ».
Mém.
de l'acad. royale des Inscr. & Belles - lettr. tom. V. Hist.
pag. 210.
Le nom de solécisme, dans son origine, fut donc
employé dans un sens général, pour désigner toute
espece de faute contre l'usage de la langue; & il étoit
d'abord synony me de barbarisme.
Mais le langage des sciences & des arts, guidé
par le même esprit que celui de la société générale,
ne souffre pas plus les mots purement synonymes:
ou il n'en conserve qu'un, ou il les différencie par
des idées distinctives ajoutées à l'idée commune
qui les rapproche. De - là la différence que les Grammairiens ont mise entre les deux mots, solécisme &
barbarisme, & que M. du Marsais a exposée avec netteté
au mot Barbarisme.
Théophraste & Chrysippe avoient fait chacun un
ouvrage intitulé *PERI\ SOLOIKISMIWN; ce qui prouve l'erreur
d'Aulu - Gelle, l. V. c. xx. qui prétend que les
écrivains grecs qui ont parlé purement le langage
attique, n'ont jamais employé ce mot, & qu'il ne l'a
vu dans aucun auteur de réputation. (B. E. R. M.)
SOLEIL
(Page 15:313)
SOLEIL s. m. en Astronomie, est le grand astre
qui éclaire le monde, & qui par sa présence constitue
le jour. Voyez Jour.
On met ordinairement le soleil au nombre des planetes;
mais on devroit plutôt le mettre au nombre
des étoiles fixes. Voyez Étoile, Planete.
Suivant l'hypothèse de Copernic, qui est à - présent généralement reçue, & qui même est appuyée
par des démonstrations, le soleil est le centre du système
des planetes & des cometes; autour duquel
toutes les planetes & les cometes, & entr'autres
notre terre, font leurs révolutions en des tems diffé<cb->
rens, suivant leurs différentes distances du soleil.
Voyez l'article Planete.
La grande distance de la terre au soleil est l'unique
cause qui nous empêche d'en appercevoir la
sphéricité, ce qui n'est pas fort étonnant, puisque
nous ne voyons pas même celle de la lune, qui est
beaucoup moins éloignée de nous: au lieu d'appercevoir
leur surface sphérique, nous jugeons au contraire
l'un & l'autre planes ou comme des disques,
au milieu desquels nous nous imaginons un point qui,
quoique réellement dans leur superficie, n'en est pas
moins regardé comme le centre de l'astre, n'étant
que celui de la surface ou du disque apparent.
Quoique le soleil soit déchargé de ce mouvement
prodigieux que les anciens s'imaginoient qu'il faisoit
tous les jours autour de la terre, il n'est point cependant
parfaitement en repos.
Il paroît évidemment, par les apparences de ses
taches, qu'il a un mouvement de rotation autour de
son axe, semblable à celui de la terre qui mesure le
jour naturel, mais seulement plus lent. On apperçoit
quelques - unes de ces taches au bord du disque du
soleil, & quelques jours après on les voit sur le bord
opposé; d'où après un délai de quatorze jours, elles
reparoissent à la place où on les avoit vues d'abord,
& recommencent leurs cours; elles finissent ainsi
tout leur circuit en 27 jours de tems: d'où on conclut
que ce tems est celui de la rotation du soleil sur
son axe. Ces taches se meuvent d'occident en orient;
on en infere que le mouvement du soleil se fait d'occident
en orient. Pour ce qui regarde les différentes
apparences des taches du soleil, leur cause, &c. voyez
Taches.
Outre ce mouvement du soleil autour de son axe,
cet axe en a encore d'autres, mais moins sensibles,
suivant M. Newton. Car, selon ce philosophe, les
planetes pesent vers le soleil & le soleil vers les planetes;
de sorte que si le soleil, qui est considérablement
plus gros que toutes les planetes prises ensemble,
attire les planetes à lui, les planetes doivent
aussi attirer le soleil & le déranger du lieu qu'il occupe;
il est vrai que ce dérangement n'est pas fort
considérable, mais il l'est assez pour produire quelques
inégalités dans le mouvement des planetes. Car
comme dans toutes observations astronomiques on
suppose le soleil immobile & fixe au foyer des orbites
des planetes, il est évident que les dérangemens que
l'action des planetes causent au soleil, étant rapportés
à ces mêmes planetes, doivent empêcher qu'elles
n'observent constamment & exactement la même loi
dans leurs mouvemens apparens autour de cet axe.
A l'égard du mouvement annuel que le soleil paroît
avoir autour de la terre, les Astronomes font
voir facilement que c'est le mouvement annuel de la
terre qui occasionne cette apparence.
Un observateur qui seroit dans le soleil, verroit la
terre se mouvoir d'occident en orient, par la même
raison que nous voyons le soleil se mouvoir d'orient
en occident; & tous les phénomenes qui résultent
de ce mouvement annuel dans quelque corps que ce
puisse être, paroîtront les mêmes de l'un comme de
l'autre.
Soit par exemple S, (Plan. d'astron. fig. 39.) représentant
le soleil, ABCD l'orbite de la terre, qui
en fait le tour en allant d'occident en orient dans
l'espace d'un an. Un observateur placé en S voyant la
terre en A, la rapportera au point > qui est dans la
sphere des étoiles: quand elle arrivera en B, l'observateur
la verra comme si elle étoit au point 69:
quand elle sera en C, il la verra au point >, &c. jusqu'à ce qu'après avoir fait tout son circuit, elle reparoîtra
en >. Ainsi il lui semblera que la terre aura
décrit l'écliptique, & passé successivemennt de signe
en signe.
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