Accords fondamentaux. M. Rousseau en a
donné la liste au mot Accord, sur lequel il ne faut
pas manquer de consulter l'errata du premier vol. imprimé
à la tête du second. Sans rien répéter de ce
qu'il a dit à cet article, nous y ajoûterons qu'il n'y a
proprement que trois sortes d'accords fondamentaux;
accord parfait, accord de sixte, accord de septieme.
Accord parfait. Il est de deux sortes, majeur ou
mineur, selon que la tierce est majeure ou mineure.
L'accord majeur est donné immédiatement ou presque
immédiatement par la nature; immédiatement,
quand il renferme la douzieme & la dix - septieme;
presque immédiatement, quand il ne renferme que
la tierce & la quinte, qui en sont les octaves ou repliques.
Voyez Octave & Replique. Quand cet
accord est exactement conforme à celui que la nature
donne, c'est - à - dire quand il renferme le son
principal, la douzieme & la dix septieme majeure,
alors il produit l'effet le plus frappant dont il soit
susceptible; comme dans le choeur l'amour triomphe
de Pigmalion. L'accord mineur, quoiqu'il ne soit pas
donne immédiatement par la nature, & qu'il paroisse
plûtôt l'ouvrage de l'art, est cependant tort
agréable, & souvent même plus propre que le majeur
à certaines expressions, comme celle ce la tendresse,
de la tristesse, &c.
Accord de sixte. Il y en a de trois sortes. Les deux
premiers s'appellent accords de sixte ajoutée; ils se
pratiquent sur la sous - dominante du ton. Voy. Sousdominante. La sixte y est toûjours majeure. & la
tierce majeure ou mmeure, selon que le mode est
majeur ou mineur. Ces deux accords ne different
donc que par leur tierce. Ainsi dans le ton majeur d'ut,
on pratique sur la sous - dominante fa l'accord fa la
ut ré, dont la tierce est majeure & sa sixte majeure;
& dans le ton mineur de la, on pratique sur la sous-dominante
ré l'accord ré fa la si, dont la tierce est
mineure, la sixte étant toûjours majeure.
Outre ces deux accords, il y en a un autre qui
produit en plusieurs occasions un très - bon effet, &
qui est pratiqué sur - tout par les Italiens. On l'appelle
accord de sixte superflu:, ou de sixte italienne.
Il est composé d'une tierce majeure, d'une quarte
superflue ou triton, & d'une tierce majeure, en cette
sorte fa la si ré #. Ce n'est pas proprement un accord
de sixte; car du fa au re diese, il y a une vraie
septieme; mais l'usage l'a ainsi nommé, en désignant
seulement la sixte par l'épithete de superflue. Voyez
Supirflu & Intervalle. Il paroit très - difficile
de déterminer d'une façon bien nette & bien convaincante
l'origine de cet accord: en effet comment
assigner d'une maniere satisfaisante l'origine d'un accord
fondamental qui renterme tant de dissonances,
fa si, fa ré #, la si, la ré #, & qui pourtant n'en est
pas moins employé avec succes, comme l'oreille
peut en juger? Ce qu'on peut imaginer de plus plausible
là dessus ne l'est guere. Voyez Sixte super -
flue. On peut regarder cet accord comme renversé
de si ré # fa la, qui n'est autre chose que l'accord
si ré fa la, usité dans la basse fondamentale, en
conséquence du double emploi (Voyez Double
Emploi), & dont on a rendu la tierce majeure
pour produire l'impression du mode de mi par sa
note sensible ré #; ensorte que l'on a pour ainsi dire
à - la - fois l'impression imparfaite de deux modes, de
celui de la par le double emploi, & de celui de mi
par la note ré # substitué au ré? Mais pourquoi se
permet - on de rendre majeure la tierce de si à ré?
Sur quelles raisons cette transformation est - elle appuyée,
sur tout lorsqu'elle produit deux dissonances
de plus? D'ailleurs, si on en croit M. Rousseau
au mot accord, l'accord fondamental fa la si ré # ne
se renverse point: peut - on donc le regarder comme
renversé de si ré # fa la? Je m'en rapporte sur cette
question à des lumieres supérieures aux miennes.
On pourroit peut - être dire aussi que l'accord si
ré # fa la n'est autre chose que l'accord de dominante
tonique si ré # fa # la, dans le mode de mi,
accord dont on a rendu le fa naturel. Cette origine
me paroît encore plus forcée que la précédente.
Mais soit qu'on assigne à cet accord une origine,
soit qu'on ne lui en assigne point, il est certain qu'on
doit le regarder comme un accord fondamental, puisqu'il n'a point de basse fondamentale: ainsi M. Rousseau, au mot Accord, a eu très - grande raison de
placer parmi les accords fondamentaux, cet accord
de sixte superflue, dont les autres auteurs françois
n'avoient point fait mention, au moins que je sache,
& dont j'avoue que j'ignorois l'existence, quand je
composai mes élémens de >sique, quoique M.
Rousseau en eût déjà parlé. M. de Bethizy, dans un
ouvrage sur la théorie & la pratique de la Musique,
publié en 1754, dit qu'il ne se souvient point que
M. Rameau ait parle de cet accord dans ses ouvrages,
quoiqu'il l'ait employé quelquefois, par exemple
dans un choeur du premier acte de Castor & Pollux. M. de Bethizy donne des exemples de l'empioi
de cet accord dans la basse continue; mais il laisse
en blanc l'accord qui lui répond dans la basse fondamentale.
Accords de septieme. Il y a plusieurs sortes d'accords
de septieme fondamentaux. Le premier est formé
d'une tierce majeure & de deux tierces mineures,
comme sol si ré fa; il se pratique sur la dominante
des tons majeurs & mineurs. Voyez
Dominante, Mode, Harmonie
, &c. Le second est
formé d'une tierce mineure, d'une tierce majeure
& d'une tierce mineure, comme ré fa la ut; il se
pratique sur la seconde note des tons majeurs: sur
quoi voyez l'article Double Emploi. Le troisieme
est formé de deux tierces mineures & d'une tierce
majeure, comme si ré fa la; il se pratique sur la seconde
note des tons mineurs: sur quoi voyez aussz
Double Emploi. Le quatrieme est forme d'une
tierce majeure, d'une tierce mineure & d'une tierce
majeure, comme ut mi sol si; il se pratique sur une
tonique ou autre note, rendue par - là dominante
imparfaite. Le cinquieme est appellé accord de septieme
diminuée; il est formé de trois tierces mineures,
sol # si ré fa, il se pratique sur la note sensible
des tons mincurs. Cet accord n'est qu'improprement
accord de septieme; car du sol # au si il n'y
a qu'une sixte. Cependant l'usage lui a donné le nom
de septieme, en y ajoûtant l'epithete de diminuée.
Voyez Diminué & Intervalle. On peut, avec
M. Rameau, regarder cet accord comme dérivé de
l'accord de la dominante du mode mineur, réuni à
celui de la sous - dominante. Voyez mes Elémens de
Musique, & la suite de cet article. Mais qu'il soit
dérivé ou non de ces deux accords, il est certain
qu'il a lieu dans la basse fondamentale, suivant M.
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