Dictionnaire de l'Académie Française, 4ème edition (1762)

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Page 133

On dit proverbialement & figurément, que Les hommes ne se mesurent pas à l'aune, pour dire, qu'Il ne faut pas juger de leur mérite par leur taille.

On dit aussi proverbialement & figurément, Mesurer les autres à son aune, pour dire, Juger d'autrui par soi-même.

On dit aussi proverbialement & figurément, d'Une chose dont on a fait expérience à ses dépens, qu'On sait ce qu'en vaut l'aune.

TOUT DU LONG DE L'AUNE Façon de parler figurée & proverbiale, pour dire, Beaucoup, excessivement. Il a fait débauche, & il en a pris, il s'en est donné tout du long de l'aune. On l'a battu, il en a eu, on lui en a donné tout du long de l'aune. S'il perd son procès, il en aura tout du long de l'aune.

AUNE. s.m. Arbre de bois blanc, qui croît dans les lieux humides. Des tuyaux de bois d'aune. Des sabots d'aune.

AUNÉE. s.f. Ou Enula Campana Plante médicinale. Elle est du genre des Asters.

AUNER. v.a. Mesurer à l'aune. Auner une pièce de toile, une pièce de drap. Auner fidèlement. Auner mal.

AUNÉ, ÉE, participe .

AUNEUR. s.m. Officier établi pour avoir inspection sur l'aunage.

AVOCASSER. v.n. Faire la profession d'Avocat. Il y a tant d'années qu'il avocasse. Il est familier, & il ne se dit guère qu'en mauvaise part.

AVOCAT. s.m. Celui qui fait profession de défendre des causes en Justice. Avocat fameux, célèbre, éloquent. Savant Avocat. Avocat au Parlement. Avocat au Conseil. Plaider par Avocat.

On appelle Avocat Général, Un Magistrat qui plaide pour le Roi, & pour le public, dans une Cour supérieure: Et Avocat du Roi, Un Magistrat qui fait les mêmes fonctions dans les Tribunaux inférieurs.

On appelle Avocat Consultant, Un Avocat qui ne plaide plus, & qui donne seulement son avis & son conseil par écrit, sur les affaires litigieuses.

AVOCAT se dit figurément De celui qui intercède pour un autre, qui en soutient, qui en défend les intérêts auprès de quelqu'un. Vous avez un bon Avocat en sa personne. Je serai votre Avocat auprès de lui.

En ce sens, on dit aussi Avocate; & on appelle la sainte Vierge, l'Avocat des pécheurs.

AVOINE. s.f. Sorte de grain, qui sert ordinairement à la nourriture des chevaux. Avoine blanche. Avoine noire. Cette avoine est bonne, elle est fort pesante. Avoine légère. Un picotin d'avoine. Une mesure d'avoine. Cribler l'avoine. Donner l'avoine aux chevaux. Ce cheval mange bien l'avoine. Il a bien travaillé, on lui a fait gagner son avoine. Paille d'avoine. Balle d'avoine, de la balle d'avoine.

AVOINES, au pluriel se dit De l'avoine quand elle est encore sur terre. Les avoines sont belles. Voilà un bon temps pour les avoines. Faucher les avoines.

AVOIR. v.a. J'ai, tu as, il a; nous avons, vous avez, ils ont. J'avois. J'eus. J'ai eu. J'aurai. Aye, ayez. Que j'aye, que tu ayes, qu'il ait; que nous ayons, que vous ayez, qu'ils ayent. Que j'eusse. J'aurois. Que j'aye eu. Que j'eusse eu. Ayant. Ayant eu. Posséder de quelque manière que ce soit. Avoir du bien. Avoir une Charge. Avoir un Bénéfice. Avoir de l'argent. Avoir une maison à vendre, à louer. Avoir un cheval d'emprunt. Avoir le bien d'autrui.

En ce sens, on dit proverbialement, Il n'est rien tel que d'en avoir, pour dire, que Si on n'a du bien, on n'est point considéré dans le monde: Et d'Un homme avide & âpre à l'argent, qu'Il en veut avoir à quelque prix que ce soit.

AVOIR S'emploie aussi pour dire, Être le sujet d'une action, d'une passion, d'une impression, d'un mal, d'un sentiment, d'une habitude, &c. Avoir des pensées, des opinions. Avoir de l'amour. Avoir de la haine. Avoir de la douleur, de la honte, de la joie, du plaisir. Avoir faim. Avoir soif. Avoir patience. Avoir tort. Avoir raison. Avoir en horreur. Avoir en estime. Avoir quelque soupçon. Avoir de l'âge. Avoir l'âge de raison. Avoir l'honneur en recommandation. Avoir la crainte de Dieu devant les yeux. Avoir un procès. Avoir une querelle. Avoir la migraine. Avoir mal à la tête. Avoir la fièvre. Avoir le bras cassé. Avoir un coup d'épée.

On dit par menace à un homme, Vous en aurez, pour dire, Vous serez châtié, maltraité. Et par raillerie à un homme qui a reçu quelque coup, quelque disgrace, &c. Il en a. On dit aussi d'Une personne dont on espère se venger, qu'On l'aura, qu'on saura bien l'avoir.

On dit dans le discours familier, L'avoir beau, l'avoir belle, pour dire, Avoir une occasion favorable de faire quelque chose.

On dit aussi, Il a beau dire, il a beau faire, il a beau crier, pour dire, Quoi qu'il puisse dire, quoi qu'il puisse faire.

AVOIR Se met souvent avec la préposition à, devant un infinitif: Et alors il sert à marquer L'état, la disposition, la volonté où l'on est de faire ce que l'infinitif du verbe signifie. J'ai à faire une visite. J'ai à vous remercier. J'ai à parler à un tel. Il a à choisir. Il a plusieurs Bénéfices à donner. Il a beaucoup de choses à vous dire.

AVOIR S'emploie aussi à l'impersonnel dans le sens d'Être: Et alors il se joint toujours avec la particule y. Il y a un an. Il y a deux ans. Il y a beaucoup de gens. Il y a lieu de croire. Il y a sujet de craindre. [alt p. 93] Il n'y a personne. Il y avoit plus de mille personnes. Il n'y a rien qu'il étoit ici. Il n'y a rien que je ne fasse pour vous. Il n'y a rien à faire. Il y a tout à espérer.

AVOIR Est aussi verbe auxiliaire, & sert à former la plupart des prétérits des autres verbes. Avoir lu. Avoir écrit. J'ai donné. Il a plu toute la nuit. Nous en avons parlé ensemble. Vous avez été sages. Ils ont vécu. Il en auroit donné cent pistoles.

Il est aussi quelquefois auxiliaire de lui-même. J'ai eu raison. Il auroit eu tort de faire telle chose. Il auroit eu peur.

EU, EUE, participe Il n'est d'usage qu'étant joint à quelque autre temps du verbe Avoir. Les choses qu'il a eues. Le bien qu'il a eu. Sans lui j'aurois eu dîné de meilleure heure. On dit dans le discours familier, Dès qu'il a eu fait, pour

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