ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

RECHERCHE Accueil Mises en garde Documentation ATILF ARTFL Courriel

Previous page

PORTAIL (Page 13:133)

PORTAIL, s. m. (Archit.) c'est la saçade d'un grand bâtiment où est la principale porte; on l'entend néanmoins plus particulierement des églises. Cette partie est très - susceptible du bon goût de l'Architecture, mais les François y ont prodigué les colifichets, comme au portail des grands Jésuites de Paris; ou bien ils ont chargé mal - à - propos leurs portails de plusieurs ordres d'Architecture, comme par exemple, le portail de S. Gervais.

Nous avons de beaux intérieurs d'églises, tels que le dôme des Invalides & du Val - de - Grace, celui des chapelles de Fresne & de Versailles; mais nous n'avons point encore réussi à la composition des portails. Nos plus habiles architectes françois ont affecté d'élever plusieurs ordres d'architecture les uns au - dessus des autres dans la décoration de leurs portails. Cette ordonnance qui a passé comme en usage depuis la réputation du portail de S. Gervais, ne paroît pas naturelle; elle semble donner au - dehors de nos églises l'air d'un édifice ordinaire: car les différens ordres extérieurs ont coutume d'annoncer les différens étages de l'intérieur d'un bâtiment, ce qu'il est ridicule de supposer dans une église.

Outre cela, cette décoration est tout - à - fait contraire à tout ce que l'antiquité nous a laissé de modeles en ce genre. Un seul ordre colossal formant péristile, & couronné par un fronton du côté de l'entrée, est l'unique décoration qui puisse donner au frontispice d'un temple l'air noble & majestueux qui lui convient. C'est ainsi qu'étoient décorés les plus baux temples de la Grece & de l'Italie. C'est ainsi que Michel Ange & Palladio, les deux plus habiles architectes modernes, ont exécuté les différens portails qu'ils ont fait élever à Rome, à Venise & en d'autres lieux.

On pourroit objecter que la grande élévation des couvertures de nos églises oblige d'élever ainsi plusieurs ordres d'architecture, pour pouvoir les cacher; mais on répondra qu'il n'y a qu'à supprimer ces énormes charpentes, qui ne sont qu'un usage abusif sans aucune nécessité. La voûte plein - ceintre de la nef d'une église couverte de pierres à recouvrement, est le seul toît qui convienne au sanctuaire de la divinité. Ainsi étoient couverts les temples des anciens.

Enfin, il résulteroit d'un ordre colossal dans nos portails, qu'en le faisant regner à l'entour de nos églises, leur extérieur qui a coutume d'être si fort négligé, seroit décoré naturellement, & cacheroit les arcs - boutans qui font toujours à l'oeil un effet désagréable; & quoique par la même raison les croisées de la nef ne s'apperçussent pas en - dehors, l'intérieur de nos églises n'en seroit pas bien moins éclairé, comme on peut le remarquer dans celle de St. Pierre de Rome. (Le Chevalier de Jaucourt.)

Next page


The Project for American and French Research on the Treasury of the French Language (ARTFL) is a cooperative enterprise of Analyse et Traitement Informatique de la Langue Française (ATILF) of the Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), the Division of the Humanities, the Division of the Social Sciences, and Electronic Text Services (ETS) of the University of Chicago.

PhiloLogic Software, Copyright © 2001 The University of Chicago.