ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS
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PICA
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PICA, s. m. (Medec. pratiq.) ce mot désigne
une maladie dont le caractere distinctif est un degout
extrême pour les bons alimens, & un appetit violent
pour des choses absurdes, nuisibles, nullement alimenteuses. Les étymologistes prétendent qu'on lui a donné
ce nom qui dans le sens naturel signifie pie, parce
que comme cet oiseau est fort varié dans ses paroles
& son plumage, de même l'appétit dépravé de cette
espece de malade s'étend à plusieurs différentes choses,
& se diversifie à l'infini; n'auroit - on pas pu trouver
un rapport plus sensible & plus frappant entre
cet oiseau remarquable par son babil, & les personnes
du sexe, qui sont les sujets ordinaires de cette maladie?
est - ce un pareil rapport qui auroit autorisé cette
dénomination? ou plutôt ne seroit - ce pas parce que
la pie, comme l'ont écrit quelques naturalistes, se
plaît à manger des petites boules de terre? On voit
aussi que le mot grec, par lequel on exprime cette
maladie, KIDA, ou, suivant la dialecte attique, KIT>K,
est le nom de la pie; quelques auteurs, comme il s'en
trouve souvent, préférant aux explications naturelles
les sens les plus recherchés, ont tâché de trouver au
mot KISSA une autre étymologie, ils l'ont dérivé de
KISSOS2, qui veut dire lierre, établissant la comparaison
entre la maladie dont il s'agit & cette plante parasite,
sur le nombre & la variété des circonvolutions
& détours qu'elle fait à l'aide des autres corps
qui lui servent d'appui: quoi qu'il en soit de la justesse
de ces étymologies & de ces commentaires, laissons
cette discussion de mots pour passer à l'examen des
chose.
L'objet de l'appétit des personnes attaquées du
pica est extrèmement varié; il n'y arien de si absurde
qu'on ne les ait vû quelquefois desirer avec passion,
la craie, la chaux, le mortier, le plâtre, la poussiere,
les cendres, le charbon, la boue, le dessous des souliers,
le cuir pourri, les excrémens même, le poivre, le sel,
la cannelle, le vinaigre, la poix, le coton, &c. & autres
choses semblables, sont souvent recherchées par
ces malades avec le dernier empressement. Il y a
une observation rapportée par M. Nathanael Fairfax,
Act. philosoph. anglic. num. 29. cap. v. §. 5. d'une fille
qui avoit un goût particulier pour l'air qui sortoit des
soufflets; elle étoit continuellement occupée à faire
jouer les soufflets, & avaloit avec un plaisir délicieux
l'air qui en étoit exprimé. Cette maladie est très - ordinaire aux jeunes filles, elle peut même passer pour
une de ces affections qui leur sont propres. Quoiqu'il
y ait quelques observations rapportées par Riviere
Rhodius & Schenkius qui prouvent que les hommes
n'en sont pas tout - à - fait exemts, ces faits sont très rares
& souvent peu constatés, il en est de même des
prétentions de Reiselius & de Primerose, & des histoires
qu'ils rapportent, d'où il résulteroit que des
maris ont été attaqués de cette maladie lorsque leurs
femmes étoient enceintes, ou s'étoient exposés aux
causes qui la produisent ordinairement, ou, pour
mieux dire, ces histoires sont évidemment fausses,
& ces prétentions ridicules; il ne manqueroit plus
pour porter le dernier coup à l'état de mari, que de
lui faire partager les maladies de sa femme, & de le
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charger des peines de ses dérangemens après l'avoir
rendu responsable de sa sagesse, en le couvrant de ridicule
& de honte lorsqu elle en manque. On assûre
aussi que les animaux sont sujets au pica; Schenkius
dit l'avoir observé dans des chats, centur. 4. observ.
45. On en voit aussi des exemples dans les chiens &
les cochons, rapportés dans les actes philosophiques
anglois, vol. I. p. 741. Les pigeons, sans en être attaqués,
mangent souvent du petit gravier du sable,
béquetent les murs, & les autruches dévorent du
fer, d'autres oiseaux avalent des cailloux, mais c'est
plutôt pour aider leur digestion naturelle que par
maladie.
Les jeunes filles aux quelles cette maladie est familiere,
commencent souvent d'assez bonne heure à s'y
adonner, l'exemple, les invitations de leurs amies,
quelquefois l'envie de devenir pâles, un dérangement
d'estomac, peut - être aussi d'esprit, sont les premieres
causes de cette passion; des - lors l'appétit ordinaire
cesse, les alimens qu'elles aimoient autrefois
leur paroissent insipides, mauvais; elles deviennent
tristes, réveuses, mélancoliques, fuient la compagnie,
se dérobent aux yeux de tout le monde pour
aller en cachete satis faire leur appétit dépravé; elles
mangent les choses les plus absurdes, les plus sales,
les plus dégoûtantes avec un plaisir infini, les choses
absolument insipides flattent délicieusement leur
goût; ce plaisir est bientôt une passion violente, une
sureur qu'elles sont forcées de satisfaire, malgré tout
ce que la raison peut leur inspirer pour les en détourner;
la privation de l'objet qu'elles appetent si
vivement, les jette dans un chagrin cuisant, dans une
noire mélancolie, & quelquefois même les rend malades;
si au contraire elles la satisfont librement, leur
estomac se derange de plus en plus, toutes ses fonctions
se font mal & difficilement; il survient des anxiétés,
des nausées, des rots, des gonflemens, douleurs,
pesanteurs, ardeurs d'estomac, vomissement,
constipation; la langueur s'empare de leurs membres,
les roses disparoissent de dessus leur visage, la pâle
blancheur du lis ou une pâleur jaunâtre prend leur
place, leurs yeux perdent leur vivacité & leur éclat,
voyez Pales couleurs, & leur téte panchee languissamment
& sans force, ne se soutient qu'avec
peine sur le col; fatiguées au moindre mouvement
qu'elles font, elles sentent un malaise; lorsqu'clles
sont obligées de faire quelque pas, & sur - tout si elles
montont, alors elles sont essoufflées, ont de la peine
à respirer, & éprouvent des palpitations violentes:
on dit alors qu'elles ont les pales couleurs, ou qu'elles
sont oppilées. Voyez
Pales couleurs, Oppiiation
. Cette maladie ne tarde pas à déranger
l'excrétion menstruelle, si son dérangement n'a pas
précédé & produit le pica, comme il arrive souvent,
à - moins qu'il ne survienne avant l'éruption des regles.
On a beaucoup disputé sur la cause & le siege de
cette maladie; les uns ont prétendu que son siege
étoit dans l'estomac, & ne dépendoit que de l'accumulation
de mauvais sucs; les autres l'ont regardée
comme une maladie de la tête, & en ont fait une espece
d'affection mélancolique. Parmi les premiers,
les uns ont cru avec Aphrodisée que les mauvais sucs
qui se ramassoient dans l'estomac étoient de la même
nature que les alimens, ou que les choses qui étoient
l'objet de l'appétit, & que c'étoit en vertu de ce
rapport, de cette sympathie qu'on les appétoit; ils se
sondoient sur ce que tous les sucs étant viciés, ils
devoient exciter l'appétit de mauvais alimens, comme
l'estomac sain ou les sucs bons fort desirer des
alimens de même nature: 2° ceux qui sont d'un tempérament
bilieux ne voient en songe que des incendies;
les pituiteux ont toujours devant les yeux de
l'eau, des débordemens, &c. il en doit être de même
des sucs d'une telle espece déterminée, ils doivent
frapper l'imagination d'une telle façon, & lui représenter
les alimens analogues; les sucs acides, faire
desirer les fruits aigrelets; les sucs brûlés, du charbon,
&c. & par conséquent en faire naître l'appétit.
Les autres pensent avec Avicenne que les sucs de
l'estomac sont d'une nature contraire, & que cette
contrariété est la cause du pica, alors ces prétendus
alimens sont l'effet des remedes; il ne leur manque
pas de raison pour étayer & confirmer leur sentiment.
1° L'appétit des choses analogues au suc de
l'estomac ne devroit jamais se rassasier, & devroit
au contraire toujours augmenter, parce que ces sucs
recevroient toujours plus de force & d'activité de la
part des choses qui seroient prises en guise d'aliment;
ce qui n'arrive pas. 2° Est - il probable que les sucs
puissent s'altérer au point d'être comme dubois pourri,
de la boue, du plomb, &c? 4° Il n'est pas plus
naturel que l'estomac se porte vers des choses dont
il regorge. 4° Dans la soit & la faim, les objets desires
sont propres à faire cesser l'état forcé du gosier
& de l'estomac, parce qu'ils lui sont contraires, &c.
On pourroit encore ajouter à cela que les personnes
bilieuses desirent avec ardeur le, fruits acides, opposés
à la nature & à l'action de la bile. 2° Que les personnes
attaquées du pica sont bien moins incommodées
de l'usage des choses absurdes & nuisibles quelque
immoderé qu'il soit, qu'elles ne le seroient si elles
n'avoient pas cette maladie, si elles ne s'y portoient
pas avec cette fureur. 3° Enfin qu'il est rare qu'on
souhaite passionnément une chose dont la jouissance
n'est pas un besoin, un bien, en même tems qu'elle
est un plaisir. Toutes ces raisons donnent beaucoup
de vraissemblance à ce sentiment; les experiences
& les observations de M. Reaumur lui donnent encore
un nouveau poids. Cet illustre académicien dit
avoir trouvé une analogie entre les sucs digestifs de
ces malades & les choses qu'ils mangeoient, & cette
analogie etoit telle que ces choses se dissolvoient très facilement
dans leurs sucs, ainsi que celles qui aimoient
la craie, la chaux, &c. avoient des sucs légerement
acides qui dissolvoient très - bien tous les absorbans,
alkalis, &c. Ces expériences n'ont pas été
poussées assez loin, & ne sont pas assez générales
pour avoir la force de la démonstration; mais cette
opinion peut toujours passer pour une hypothese ingénieuse,
bien fondée & très - vraissemblable. Mais,
demandera - t - on, n'y a - t - il point de vice d'imagination,
de délire? Ceux dont nous venons d'exposer le
sentiment, prétendent qu'il n'y a point de dérangement
de raison, qu'il n'y a qu'une dépravation de
cupidité, & qu'ainsi on ne doit pas plus regarder le
pica comme délire, que la faim canine, que l'érotomanie,
le satyriasis, cas où les besoins naturels sont
simplement portés à un trop haut degré & dépravés.
Cependant on ne pourra guere s'empêcher de regarder
le pica comme une espece de délire, si l'on
fait attention. 2° Qu'on peut délirer & raisonner
très - bien. 2° Que le délire n'exclud pas les motifs
des actions qu'on fait, qu'il est même très - vraissemblable que la plûpart des délires ne consistent que
dans des fausses apperceptions, & qu'étant supposées
vraies, comme elles le paroissent au foux, toutes leurs
actions faites en conséquence sont raisonnables; un
homme qui regarde tous les assistans comme ses ennemis,
comme des gens qui veulent l'assassiner, s'emporte
contre eux en injures & en coups quand il peut,
y a - t - il rien de plus naturel? 3° On pourra bien dire
qu'une fille mange de la craie, de la chaux, de la
terre, parce qu'elle a de l'acide dans l'estomac; mais
expliquera - t - on par - là cette ardeur à se cacher, cette
passion violente qui subsiste long - tems après que
tous les acides seront détruits? Et pourquoi tous les
enfans qui sont si fort tourmentés par l'acide, n'ont<pb->
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ils pas le pica, &c? Comment expliquera - t - on d'ailleurs
l'appétit du coton, du plemb, de la poix, de
l'air, des excremens, &c? y a - t - il des sues propres à
les digérer? y a - t - il un vice dans ces humeurs qui
exige ces corps pour remede & dont le vice en puisse
être corrigé? 4° N'est - il pas naturel de regarder cette
assection comme dépendante de la même cause que
la passion de compter les carreaux, les vîtres, les solives
d'une chambre, de se plaire à la vûe de certains
objets laids, sales ou déshonnêtes, de rechercher
avec fureur quelque odeur désagréable, comme celle
des vieux livres pourris, d'une chandelle, d'une lampe
mal éteinte, & même des exerémens? Ces symptômes
familiers, de même que le pica aux chlorotiques,
annoncent évidemment & de l'aveu d> tout le
monde un délire mélancolique, & l'on ne s'avite pas
de leur attribuer de l'efficacité pour la guérison du
dérangement qui en est la cause. Voyez Pales coulfurs. 5° Parcourons les causes qui produisent ordinairement
le pica, nous verrons presque toujours un
vice dans l'excretion menstruelle, ou des chagrins,
des inquiétudes, des passions vives retenues, des
desirs violens étouffés, des besoins naturels, pressans,
non satisfats par vertu, par crainte & par pudeur;
quelles autres causes sont plus propres à deranger
l'estomac & l'imagination? Nous pourrions
ajouter bien d'autres preuves qui se tirent de l'état
de ces malades, de leur maniere d'agir, de se comporter,
&c. qu'on peut voir tous les jours, & qu'on
auroit de la peine à décrire: chacun peut là - dessus
prendre les éclaircissemens convenables, les occasions
en sont malheureusement assez fréquentes.
Les femmes enceintes sont sujettes à une dépravation
d'appétit fort singuliere, & qui est fort analogue
au pica; les auteurs qui ne se piquent pas d'une
exactitude scrupuleuse confondent ordinairement ces
deux affections qui sont cependant différentes; celle
qui est propre aux femmes enceintes s'appelle en latin
& en françois malacia, nom dérivé du grec MALABW, je mollis; quelques auteurs l'ont attribué à
l'état de mollesse, ou de relâchement des femmes enceintes;
ce qui constitue le malacia, est un goût particulier
pour une seule espece d'aliment à l'exclusion de
toute autre; mais cet aliment n'est pas nécessairement
& par lui - même mauvais, absurde, il est toujours nutritif;
ce sont, par exemple, des fruits d'une telle
espece, du riz, des poulets, des anchois, des harengs;
il n'y a que l'aliment pour qui l'on s'est déterminé
qui plaise, qui ait un goût délicieux, qui se
digere facilement; les autres rebutent, déplaisent,
pesent sur l'estomac: & quoiqu'il y ait de ces alimens
dont on dût d'abord s'ennuyer, ou dont on pût être
incommodé à la longue, comme des harengs, des
anchois; cependant on ne s'en dégoûte point, & on
n'en ressent aucun mauvais effet. Cet appétit déterminé
commence à se déclarer pour l'ordinaire vers
le quarantieme jour de la grossesse, & cesse à la fin
du troisieme mois ou au commencement du quatrieme.
Il me paroît qu'on doit distinguer cette affection
des envies des femmes enceintes, par lesquelles elles
desirent la possession de quelque objet, un joyau, un
fruit, un mets particulier, elles sont satisfaites dès
qu'elles l'ont obtenu; & si elles ne peuvent pas l'avoir,
ou n'osent pas le demander, elles en sont incommodées,
risquent de se blesser, & on prétend
que l'enfant en porte la marque. Voyez Envie, Tache, &c.
Le pica est une maladie très - sérieuse; elle est ordinairement
ou la suite & l'effet de quelque obstruction
du dérangement du flux menstruel, ou l'avantcourcur
& la cause de ces maladies, elle affoiblit
toujours le tempérament, gâtè l'estomac, & prépare
pour la suite une source inépuisable & féconde d'incommodité;
ainsi les filles qui n'en meurent pas,
restent long - tems languissantes, maladives, dans une
espece de convalescence disscile. Cette maladie est
plus ou moins dangereuse, suivant la qualité des objets
de l'appétit, suivant la violence de la pastion &
l'intensite des symptomes qui s'y joignent. Il est évident qu'un usage & un usage immoderé du poivre,
du sel, des epiceries peut faire plus de ravages que
ce même usage limité, ou que l'usage des terreux,
de la craie, &c. Fernel a vu survenir un ulcere à la
matrice, dont la malade mourut, à l'appetit déréglé
du poivre trop abondamment satisfait; le danger est
bien plus grand, si le plomb & ses préparations sont
l'objet de l'appetit; personne n'gnore les funelles
accidens, la terrible colique qu'occasionne ce mé
tal pris intérieurement par lui - même, ou par les parties
hetérogenes véneneuses dont il est altere. Voyez
Plomb, Colique des Peinires
. Tulpius rapp>
l'observation d'une jeune sille, qui mangeoit avec
avidite de petites lames de plomb bien divisées; elle
tomba en peu de tems dans une maladie affreuse à
laquelle elle saccomba; sa langue étoit seche, ses hypocondres
ressetres, la rate obstruce, l'estomac douloureux,
le ventre constipe; sans cesse tourmentee
par des sussocations de matrice, par des défaillances
fréquentes, elle ne put trouver du soulagement dan,
aucun remede, Nicol. Tulp. observ. medicar. lib. IV.
Ce qui redouble souvent la difficulte de la guérison,
c'est que ces malades cachent aussi long - tems qu'il
leur est possible leur état, & on ne le découvre que
tard, qu'après que le mal est invétéré & rendu plus
opiniâtre; d'ailleur, lors - même qu'on s'en apperçoit
& qu'on veut y remedier, les malades sont pou
dociles, elles ne veulent pas se priver du plaisir de
satisfaire à leur passion, souvent elles ne le peuvent
pas; & si elles rencontrent des medecins imprudens
par trop de sévérite, qui leur defende tout usage des
mets pour lesquels elles sont passionnées, & des parens
trop rigides & trop scrupuleusement attentifs à
observer l'ordonnance du médecin, elles deviennent
tristes, mélancoliques & sérieusement malades. Le
malacia n'est pas une maladie, il n'y a point de danger
à laisser suivre aux femmes enceintes leur caprice,
il y en auroit à les en empêcher; elles n'en
éprouvent pour l'ordinaire aucune incommodité, ni
elles, ni l'enfant qu'elles portent; cependant lorsque
les alimens pour lesquels elle s'est déterminée
sont d'un mauvais caractere, trop sales, trop épicés,
que ce sont des poissons, par exemple, desséches &
endurcis par le sel & la fumée, il est certain que le
chyle qui s'en forme ne sauroit être bien bon; on
doit, autant qu'on peut, faire ensorte par lesavis,
les invitations, que la femme en use sobrement, il
faut aussi pour cela lui présenter des mets agréables,
d'une nature opposée qui puisse modérer & contrebalancer
l'action des autres, on les mêle pour cela
souvent ensemble.
Quand on se propose de guérir une fille attaquée
du pica, il est tres - important de s'attirer sa confiance,
de lui faire approuver & desirer le soin qu'on
va prendre de sa santé; on peut réussir en cela, en
la plaignant, en compâtissant à ses peines, en se
prêtant à ses goûts, à sa passion; on ne la désaprouve
pas, on se garde bien d'en faire un crime & de
la défendre; on assure au contraire que c'est une
maladie indépendante de la volonté, qui même pent
être bien lorsqu'elle est modérée; on se contente
d'en faire voir les inconvéniens, on insiste - sur tout
sur les atteintes que la beauté pourroit en recevoir.
On touche rarement cette corde sans succès; il est
facile de prouver combien cet appétit déreglé fait
du tort à un joli visage, on a toujours quelques
exemples connus à citer; on peut engager par - là
les malades à se modérer dans l'usage de ces choses
absurdes, à en diminuer tous les jours la quantité,
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à saire quelques remedes; on promet une prompte
gnérison, le retour de la sante, de la beaute & de
l'ombonpoint; on peut aussi en s'insinuant adroitement
dans l'esprit de ces jeunes & timides malides,
en slattant ainsi leurs desirs, s'instruire de la cause
qui a déterminé la maladie & des corps qui en sont
l'objet; choses qu'elles s'obstinent d'autant plus à cacher
qu'elles sont plus ridicules & qu'il est cependant
très - important que le médecin sache. N'est - il pas
bien naturel qu'elles resusent d'avouer que leur appétit
les porte violemment à manger du cuir pourri,
par exemple, des matieres sécales? & quand la
cause de cette maladie se trouve être une envie de
se marier, qu'il leur est défendu de faire paroître
& encore plus de satisfaire; quelle peine ne doit - il
pas leur en couter pour rompre le silence? Cependant de quelle utilite ces sortes d'aveux ne sont - ils
pas pour le médecin? Utilite au resle qui resiue sur
la malade. Lorsqu'on est instruit de la cause du mal,
on y apporte le remede convenable: dans l'exemple
proposé, on n'a point de secours plus approprié
que le mariage, il remplit, en guérissant, ces trois
grandes conditions si difficiles a réunir, citò tutô &
jueunde. Voyez Mariage. Lorsque la maladie est l'effet
d'une suppresi on ou d'un derangement dans l'excretien
menstruelle, il faut avoir recours aux emmenagogues
variés suivant les cas. Voyez Regles,
Suppression, (maladie de la). Cependant on doit
engager la malade à user des mets succulents & de
facile digestion, l'estomac affoibli se fortifie par les
stomachiques amers, aloétiques; on distrait & on
récrée l'esprit triste & rêveur par les promenades,
les parties de plaisir, les compagnies agréables, les
spectacles, la musique, les concerts, &c. parmi les
reinedes intérieurs, il faut choisir ceux qui sont les
plus appropries à l'espece de dérangement d'ostomac
qu'a occasionne l'abus des alimens ou des
corps qui étoient l'objet des délires mélancoliques;
il faut oppoter aux spiritueux aromatiques, à l'alkali
caustique, les legers apéritifs délayans, &c.
aux terreux, invisqueans, les toniques, les martiaux,
les forts aperuifs; & si quelque maladie comme les
obstructions de visceres, les pâles - couleurs y
sont survenues, alors il faut diriget & varier le traitement
en conséquence. Voyez Obstruction,
Pales - Couliurs, &c. (b)
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