ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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Ce qu'il y a de singulier dans ce nom, c'est qu'il est d'usage chez plusieurs nations d'Europe & d'Asie, & que sous differentes formes & en différens dialectes, il est par - tout l'expression d'une injure grossiere.

Le changement du b en u donne gaur, autre nom des Guebres; une inflexion legere dans les voyelles donne giaour chez les Tures qui ont fréquemment ce mot à la bouche, & qui le prodiguent particulierement en faveur des Juifs, des Chrétiens, des infideles, & de tous ceux qu'ils veulent outrager & insulter: le changement du g en k, donne kebre, qui est aussi d'usage; & celui du b en ph, produit kaphre & kasre, nom que plusieurs peuples d'Afrique ont reçû des Arabes leurs voisins, parce qu'ils ne suivent point la loi de Mahomet.

L'inverse & la méthathèse des radicaux de ce nom de gebr, qui dans l'hebreu sont gabar, gibor, giber, & geber, ont porté dans l'Europe par le canal des Phéniciens ou des Arabes espagnols, les expressions populaires de bogri, borgi, bougari, & bougeri, qui conservent encore l'idée du crime abominable dont les Guebres sont accuses par les Persans modernes; nos ayeux n'ont pas manqué de même d'en décorer les heretiques du douzieme siecle, & nos étymologistes ont savamment dérivé ces mots des Bulgares, à Bulgaris.

Les racines primitives de ces noms divers ne portent cependant point avec elles le mauvais sens que le préjugé leur attribue; gabar dans l'hébreu signifie être fort, être puissant, être valeureux, dominer: gibor & giber y sont des épithetes qui indiquent la force, le courage, la puissance, & l'empire. Geber désigne le maitre. le dominateur; & gebereth, la maitresse: d'où nos ancêtres ont formé berger & bergereth. Les Chaldéens dérivent aussi de cette source guberin, en latin gubernatores, & en françois gouverneurs. Les Orientaux anciens & modernes en ont tiré Gabriel, Kébrail, Kabir, Giaber, & Giafar, noms illustres d'archanges & de grands hommes.

Les dérives de gibor, de bogri, & de borgi, désignent encore chez les flamans, un bel homme, un homme puissant & de taille avantageuse; & nous exprimons le contraire par le diminutif rabougri: ce qui prouve que nos anciens ont connu le sens naturel & veritable de ces dénominations.

Si cependant elles sont devenues injurieuses pour la plupart, c'est par une allusion dont il faut ici chercher la source dans les légendes des premiers âges du monde; elles nous disent qu'il y a eu autre fois des hommes qui ont rendu leur nom celebre par leur puissance & leur grandeur; que ces hommes couvrirent la terre de leurs crimes & de leurs forfaits, & qu'ils furent à la fin extermines par le feu du ciel: cette race superbe est la même que celle des géants, que les Arabes nomment encore giabar, & au plurier giabaroun, potentes, & que les anciens ont appellé gibor & gibborim, ainsi qu'on le voit en plusieurs endroits de la bible. Nous devons donc présumer que c'est sous cet aspect particulier que le nom de gibor avec ses dialectes gebri, bogri, borgi, & leurs derivés, sont devenus chez tant de peuples différens des termes insultans; & que c'est de - là qu'est sortie l'application presque générale qu'on en a faite à tous ceux que la justice ou le fanatisme calomnieux ont accusés de ce même crime qui a fait tomber le feu du ciel sur la tête des puissans mais abominables gibborim. Article de M. Boulanger.

GUEDE (Page 7:981)

GUEDE, s. f. ou Pastel, drogue employée par les Teinturiers, pour teindre en bleu. Voyez Bleu & Teinture.

Le pastel vient d'une graine semée tous les ans au printems, & qui produit une plante appellée en latin glastum satum. On cueille ordinairement quatre ou cinq fois les feuilles de cette plante tous les ans; il n'y a guere que les feuilles des deux ou trois premieres cueillettes dont on fasse quelque cas; & ce sont sur - tout les premieres qu'on estime le plus: lorsque les feuilles sont dans leur maturité, on les cueille, on les porte ensuite au moulin à pastel pour les mettre en pieces; on les laisse huit ou dix jours en tas, après quoi on en fait une espece de balle qu'on laisse sécher sur des claies.

Cela fait, on les broye & on les réduit en poudre; on les laisse ensuite sur le plancher, & on les arrose: c'est - là l'opération qu'on appelle coucher.

Lorsque le pastel s'est ensuite échauffe, & qu'il a fumé quelques jours, il devient entierement sec: c'est ce qu'on appelle blanchir.

Huit jours apres il est bon à employer par les Teinturiers.

Les anciens Bretons se servoient de pastel pour se colorer le corps.

Quelques uns prétendent que c'est de cette plante appellée glastum en latin, qu'est venu le nom de glass qui signifie wede dans les pays du nord; & d'autres prétendent que glas & glastum sont tirés de l'ancien breton, dans lequel glass signifioit la couleur bleue.

Le pastel bleu est le plus foncé de tous; il est d'une couleur fort approchante du noir, & sert de base à former différentes couleurs qui servent d'échelles aux Teinturiers pour former les différens degrés des pastels. Chambers.

GUELFE (Page 7:981)

GUELFE, s. m. (Hist. mod.) nom de la faction opposée à celle des Gibelins.

Les étymologies différentes, aussi puériles qu'incertaines du nom de ces deux factions, recueillies dans les Bellandistes, le dictionnaire de Trevoux & autres lexicographes, ne se retrouveront pas ici.

Nous nous contenterons de rappeller à la mémoire, que les Guelfes tenoient pour le pape & les Gibelins pour l'empereur; qu'après des dissensions qui sembloient passageres, la querelle de la couronne impériale & de la thiare s'échauffa violemment, divisa l'Italie au commencement du treizieme siecle, la remplit de carnage, de meurtres, d'assassinats, & produisit d'autres malheurs qui ont troublé le monde: mais il faut tâcher de les oublier & porter ses yeux sur la renaissance des Beaux - Arts qui succéderent à ces cruelles desolations. (D. J.)

GUELDRE (Page 7:981)

GUELDRE, (Duché de) Géog. contrée des Pays Bas qui a eu autrefois ses ducs particuliers, & qui est aujourd'hui partagée entre plusieurs souverains; de maniere pourtant que la partie la plus considérable fait une province qui est la premiere dans l'union des Provinces - Unies.

Le duché de Gueldre considéré dans toute son étendue, est borné au nord par le Zuydersée & par la province d'Overissel; au sud par le duché de Cleves, par l'électorat de Cologne, & par le duché de Juliers; à l'oüest par le Brabant, la Hollande, & par la province d'Utrecht; à l'est il touche par le comté de Zutphen, à l'évêché de Munster.

Cette étendue de pays a été habitée depuis Jules - César, par les Sicambres, par les Ménapiens, par les Mattiaques, & par les Ténétériens; les Romains en ont possédé une partie jusqu'à l'ancien bras du Rhin, & ils l'avoient jointe à la seconde Germanie; les Francs & les Frisons l'occuperent ensuite; & ceux - ci ayant été vaincus, tout ce pays fut uni au royaume d'Austrasie, qui fut lui - même joint à l'empire dans le douzieme siecle, sous le regne d'Othon le Grand. On sait comment il a passé depuis entre les mains de Charles - Quint & de Philippe II. & comment ce dernier en perdit la plus grande partie par la confédération qui se forma sous son regne en république indépendante. (D. J.)

Gueldre (Page 7:981)

Gueldre, (le haut quartier de) Géog. autrement [p. 982] dit le quartier de Ruremonde, qui faisoit anciennement une portion du duché de Gueldre. Cette portion étoit même encore demeurée aux Espagnols après l'érection de la république des Provinces - Unies; mais depuis le traité d'Utrecht, le haut quartier de Gueldre se trouve partagé entre trois souverains; le roi de Prusse a pour sa part la ville de Gueldres; la maison d'Autriche, Ruremonde & ses dépendances; & les États - Généraux y possedent la ville de Venlo avec sa banlieue, le fort de Stevenswert avec son territoire, & les petites villes de Nieustadt & d'Echt avec leurs préfectures. (D. J.)

Gueldre (Page 7:982)

Gueldre, (la province de) Gueldria, (Géog.) démembrement de l'ancien duché de Gueldre qui forme présentement une des sept Provinces - Unies; elle tient même le premier rang dans la république des Provinces - Unies, quoiqu'elle ne soit ni la plus riche ni la plus puissante; elle consiste en trois quartiers qui sont Nimegue, Zutphen, & Arnheim, ou le Veluve. Chaque quartier forme un étatparticulier dont la jurisdiction & les droits ne sont ni confondus ni partagés avec ceux des autres quartiers. Voyez Basnage, descript. historiq. des Provinces - Unies. (D. J.)

Gueldres (Page 7:982)

Gueldres, (Géog.) petite ville forte des Pays - Bas, au duché de même nom, cédée au roi de Prusse par le traité d'Utrecht; elle est dans des marais sur la Niers, à deux lieues nord - est de Venlo. Ce n'est donc pas la Gelduba mentionnée dans l'itinéraire d'Antonin, & dans Pline, liv. XIX. ch. v. car la ville de Gueldres est à quatre lieues du Rhin, & Gelduba étoit sur ce fleuve, castellum rheno impositum, dit Pline. Long. 23. 56. latit. 5. 30. (D. J.)

GUELLES (Page 7:982)

GUELLES, terme de Blason, qu'on a dit autrefois pour gueules; couleur rouge appellée ainsi de la gueule des animaux.

GUÉONIM, ou GÉHONIM (Page 7:982)

GUÉONIM, ou GÉHONIM, (Théolog.) mot hébreu qui signifie excellent; c'est le titre qu'ont pris certains rabbins qui demeuroient dans le territoire de Babylone, comme M. Simon l'a remarqué dans son supplément aux cérémonies des Juifs: il observe en même tems que les Arabes s'étant rendus les maîtres de ce pays là, & ayant détruit les écoles des Juifs, les Guéonims se retirerent en Europe & principalement en Espagne ou R. Isaac Alfe vivoit sur la fin des tems où les Guéonims ont été en crédit, fit un excellent recueil des décisions de la gémare qui est une glose du talmud, sans s'arrêter aux questions & aux disputes inutiles: Buxtorf, dans sa bibliotheque des rabbins, a parlé fort au long de cet ouvrage.

Il y a grande apparence que ces Guéonims ou Géhonims sont les mêmes que ceux que d'autres auteurs appellent Gaons. Voyez Gaons. (G)

GUÊPE (Page 7:982)

GUÊPE, s. f. vespa; mouche qui a beaucoup de rapport avec l'abeille, mais qui en differe par des caracteres très - marqués: le plus apparent au premier coup - d'oeil, est le filet, par lequel le ventre de la guêpe tient au corcelet; ce filet est plus ou moins long dans les différentes especes de guêpes, tandis qu'on ne le voit pas dans les abeilles. On peut aussi distinguer aisément les guêpes par leurs couleurs jaunes & noires qui forment des taches & des raies. Elles n'ont point de trompe, mais leur lévre supétieure est plus grande & plus longue que l'inférieure, & sert en quelque façon de trompe pour détacher les alimens & les porter à la bouche: il y a aussi deux dents, une de chaque côté de la tête, qui se touchent en - devant par leur extrémité, & qui broyent les corps que la lévre supérieure ne pourroit pas entamer. Enfin les guêpes sont différentes de toutes les autres mouches à quatre ailes, en ce que les ailes supérieures pssent fort étroites, & sont pliées en deux, suivant leur longueur, lorsque l'insecte est en repos, mais elles se déplient lorsqu'il vole. On a observé au - dessus de l'origine de chacune de ces ailes, une partie écailleuse qui empêche que la mouche ne les rende inutiles en les élevant trop haut.

Il y a plusieurs especes de guêpes; les unes habitent sous terre, & les autres en plein air: les premieres sont les plus communes: on les a nommées guêpes soûterreines, à cause que leurs nids sont dans la terre, & guêpes domestiques, parce qu'elles entrent dans les maisons & qu'on les voit manger dans les plats que l'on sert sur les tables. Ces guêpes vivent plusieurs ensemble comme les abeilles. Il y a des guêpes mâles & des guêpes femelles, mais la plûpart n'ont point de sexe, c'est pourquoi on leur donne le nom de mulets: on les appelle aussi guêpes ouvrieres, parce qu'elles travaillent à la construction du nid, & qu'elles y apportent des alimens. Les guêpes mâles, femelles, & mulets d'un même nid viennent d'une seule mere, qui est fécondée dans l'automne, & qui après avoir passé l'hyver dans quelque lieu abrité, se trouve au printems en état de faire sa ponte.

Cette guêpe creuse un trou dans un lieu où la terre est facile à remuer, & où il n'y a point de pierres: c'est ordinairement dans un pré, dans un champ, ou sur les bords d'un grand - chemin. Quoique seule, elle déplace une assez grande quantité de terre pour former une cavité où elle puisse construire le commencement d'un guêpier, c'est - à - dire d'un nid qui doit contenir un très - grand nombre de guêpes. Voyez Guêpier. Elle commence l'enveloppe du guêpier sur les parois supérieures de la cavité, & y attache le premier gâteau. A mesure qu'elle acheve un alvéole, & même avant qu'il soit achevé, elle y pond un oeuf, qui est blanc, transparent, de figure oblongue, & plus gros à l'un des bouts qu'à l'autre; un de ces oeufs est collé au fond de chaque alvéole, pendant qu'elle en construit de nouveaux & qu'elle y dépose des oeufs. Ceux qui ont été pondus les premiers, éclosent au bout de huit jours; il en sort des vers que la mere nourrit; elle va dans la campagne chercher des alimens pour les vers, & la matiere qu'elle employe pour la construction du guêpier. Les vers avancent la tête hors de leurs alveoles, & ouvrent la bouche pour recevoir la nourriture que la mere leur apporte. Lorsqu'ils sont devenus assez gros pour remplir les alvéoles, ils en ferment l'ouverture avec un couvercle de soie, qu'ils filent comme les vers à soie, & ils en tapissent les parois de l'alvéole. Après quelques jours de repos ils se transforment en nymphes. L'Insecte reste dans cet état pendant huit ou neuf jours, ensuite il se dépouille de son enveloppe, il ronge les bords du couvercle de l'alvéole, le pousse en - dehors, & paroît enfin sous la forme de mouche.

Dès que les guêpes sortent des alvéoles, elles aident la mere à nourrir les vers, & à construire le guêpier, tandis qu'elle continue sa ponte. Tous les premiers oeufs ne produisent que des mulets; & lorsqu'il y en a un assez grand nombre pour multiplier les alvéoles, pour soigner les vers, & pour apporter la nourriture, la mere ne sort plus du guêpier, elle pond continuellement. Après qu'il y a plusieurs milliers de mulets éclos, elle commence à pondre des oeufs de mâles & de femelles. Elle dépose ces oeufs dans des alvéoles qui ne se trouvent que dans les quatre ou cinq derniers gâteaux du guêpier, & qui sont plus grands que ceux qui renferment les oeufs des mulets. Les guêpes femelles sont plus grandes que les mâles, & les mulets plus petits; ceuxci sont de deux grandeurs différentes, de même que les mâies. Les mulets ont un aiguillon qui cause plus de douleur que celui des abeilles; les femelles ont aussi un aiguillon, & il est plus long & plus gros que celui des mulets; les mâles n'en ont point. Lorsqu'il

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