ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"248 - 2B"> d'un endroit, qu'on regle les différens degrés du feu. Voyez ce qu'on en a dit à l'article Feu.

Les Chimistes se sont un peu plus donné de peine pour regler les degrés du feu, que pour la construction des fourneaux; & cependant l'un & l'autre devoient aller ensemble.

Les anciens avoient distingué quatre degrés de feu; le premier étoit le bain de vapeur, le second l'eau bouillante, le troisieme la rougeur des métaux, & le quatrieme la fusion. Ils avoient fait encore une autre gradation, dont les distances étoient moindres: le premier degré étoit le bain de vapeur, le second l'eau bouillante, le troisieme le bain de cendres, le quatrieme le bain de sable, le cinquieme le bain de limaille, &c. Nous nous contentons de les exposer pour en montrer l'insuffisance.

Ils avoient encore distingué les premiers degrés de feu par le tact; mais cette méthode étoit extrèmement incommode, & n'alloit pas bien loin; d'ailleurs on sait en Physique qu'elle est très - incertaine.

Vanhelmont compte quatorze degrés du feu d'après l'intensité qu'il doit avoir dans son application, & l'augmentation exacte de cette intensite.

Le degré des bains de vapeur & marie sont les mêmes, & approchent beaucoup, selon la remarque de Czwelfer, de celui de l'eau bouillante, qui est le seul constant; ainsi il ne faut pas les donner dans toute leur étendue, si on veut qu'ils approchent, par exemple, de la chaleur animale.

Le bain de vapeur s'appelle encore bain de rosée; & le bain - marie a d'abord été nommé bain d'immersie ou de mer; &, par une corruption introduite par Basile Valentin, bain - marie, en l'honneur de la Vierge.

Les cendres, qui doivent être criblées, donnent un degré presque aussi fort que celui du sable, & s'échauffent plus lentement: mais comme il seroit à craindre qu'elles ne fissent casser le vaisseau en conséquence de l'humidité que prend leur sel, il les faut dessaler avant. Elles ne retiennent pas non plus la chaleur si long - tems que le sable, &c. par cette même raison qu'elles sont plus rares.

On peut donner le même degré de chaleur à une cornue au bain sec, comme nous l'avons vû en parlant du fourneau de Beccher, & peut - être plus fort qu'au bain de sable ou de limaille, par la raison que les particules ignées ne se dissipent point en l'air.

Il faut que le sable soit pur & criblé; s'il étoit mêlé de grosses pierres, il s'échaufferoit inégalement & casseroit les vaisseaux. Il doit aussi être sec; s'il étoit mouillé, il casseroit encore les vaisseaux, ou, s'il avoit le tems de se sécher, il formeroit des pelotes qui reviendroient au même que les pierres; & ainsi de la limaille & des cendres dans le même cas. Il faut que la capsule de ces bains soit couverte d'une autre pour éviter le contact de l'air froid.

D'autres ont évalué les degrés de feu par les différentes ouvertures des regîtres; d'autres au moyen du thermometre de mercure divisé en degrés très petits, comme on peut le voir par la chimie de Boerhaave. Cette méthode est assez exacte, & seroit préférable à toutes les autres; mais l'application de cet instrument est quelquefois très - difficile, d'autres fois tout - à fait impossible; car on peut à peine aller jusqu'au mercure bouillant; d'ailleurs on est sujet à en casser une prodigieuse quantité. Nous croyons cependant qu'on en peut faire usage, & que cet usage peut avoir son utilité dans les travaux qui ne demandent qu'un leger degré de chaleur. Vogel, d'après Boerhaave, divise le feu en cinq degrés: le premier est celui de la chaleur animale, & il s'étend depuis le trente - quatrieme jusqu'au quatre - vingt - quatorzieme degré du thermometre de Farhenheit; le second depuis le quatre - vingt - quatorzieme jus<cb-> qu'au deux - cen ts - douzieme degré de l'ébullition; le troisieme depuis le deux - cents. douzieme jusqu'au six centieme, & c'est celui de la combustion, & qui rend les vaisseaux d'un rouge obscur; le quatrieme degré depuis le six - centieme jusqu'à la fonte du fer; & le cinquieme celui des miroirs catoptriques & dioptriques. Telle est la preuve que nous avions à donner des difficultés de trouver les degrés du feu.

On peut voir dans la physique soûterreine de Beccher, page 500. l'application des thermometres aux fourneaux.

Mais puisque les thermometres ne peuvent aller que jusqu'à un certain point, & que la plûpart des chimistes veulent avoir une connoissance des degrés du feu qui ne me paroît pas fort importante; car le degré de feu nécessaire à fondre de l'or, est celui où ce métal se fond: ne pourroit - on pas mettre en oeuvre la dilatation de certains corps iolides, du fer, du cuivre, par exemple? On en feroit passer une barre à - travers un fourneau, & on pourroit mesurer sa raréfaction ou son alongement, comme on le fait en Physique, au moyen d'une machine graduée; & dans les cas où l'on passeroit la fusion du fer, ne pourroit - on pas avoir recours à un cylindre de pierre apyre? Il est vrai que je propose ici des machines embarrassantes, & peut - être même impraticables; j'invite les savans à nous donner quelque chose de plus satisfaisant.

On ne connoît point encore les bornes du feu produit par les miroirs ardens, à cause de la difficulté de s'en servir. Voyez les Mém. de l'acad. des Sciences, les élém. de chim. de Boerhaave, page 121. & l'article Lentille de Tschirnaus. Avant M. Pott, on ne savoit pas que le feu ordinaire s'étendît au - delà de celui des fourneaux de verrerie ordinaires. Voyez ce que nous avons dit à la fin des fourneaux de fusion. On peut toutefois établir cette gradation entre les feux les plus violens, en commençant 1°. par le fourneau de M. Pott, au dessus duquel sont encore les feux; 2°. la lentille de Tschirnaus, connue sous le nom de lentille du palais royal; 3°. le miroir de Vilette, ou concave du jardin du Roi; & enfin 4°. celui du Briquet, qui est le plus vif de tous, puisqu'il scorifie le fer dans un instant presque indivisible.

Nous avons dit qu'il étoit difficile de conserver un thermometre de mercure en l'introduisant dans un fourneau; car il ne peut pas toûjours l'être dans le vaisseau, quoique cela fût mieux, & qu'on risquât qu'il ne s'y rompît. Nous avons aussi laissé penser que les progrès d'une opération étoient le meilleur thermometre sur lequel un artiste exercé pouvoit se régler. Mais dans le cas où il seroit possible d'employer cet instrument, ne pourroit - il pas se faire que la même opération précisément demandât un degré de feu différent, parce qu'elle se feroit dans un fourneau & un vaisseau plus ou moins épais, ou avec une quantité de matiere différente? Au reste, la connoissance de ces degrés de feu, n'est qu'une curiosité de plus, & n'est pas d'une grande utilité.

De l'aliment du feu. Les différentes matieres combustibles avec lesquelles on entretient le feu dans les fourneaux ont été mentionnées à l'article Feu. Cet élément est le principal instrument des Chimistes, comme il l'est de la nature; ils ne font rien que par le feu; aussi ont - ils pris le titre vrai & sublime de philosophes par le feu. Les Romains avoient fait une divinité de certains fours. Voyez les fastes d'Ovide. Si les Chimistes eussent été moins philosophes, ils auroient peut - être fait le même honneur à leurs fourneaux; mais ils les ont imités à bien plus juste titre en déïfiant le feu, leur agent universel. Le feu s'entretient dans les fourneaux, non - seulement de la pâture qu'on lui donne, mais encore de ce que l'air [p. 248 - 3] nécessaire à son mouvement lui porte. Le concours de l'air est nécessaire pour l'embrasement, comme tout le monde sait, & comme le seul Stahl l'a bien expliqué dans ses trecenta, & autres ouvrages: ensorte qu'on pourroit définir le feu une matiere qui fait effervescence avec l'air, & qui tire sa force du mouvement qui nait de ce melange. Mais l'air n'anime pas seulement le feu par ses parties propres, il augmente encore son aliment par les corps qu'il y porte. Tels sont le feu élementaire qui est peut être nécessaire pour le rendre fluide; l'acide sulphueux volatil qui s'y trouve (Voyez Stahl, trecenta); la transpiration des animaux, les sels volatils, les luiles, les semences, les poussieres, les odeurs, l'eau, les sels, & peut - être des minéraux & des métaux. Boerhaave. Il ne fait done pas jouer le seu des fourneaux par sa simple qualité de vapeur élastique; peut - être même produit il ce phénomene plus par l'eau qu'il contient, que par lui - même, soit que cette eau agisse directement comme un corps mu, ou indirectement en le condensant; ce qui est prouvé par l'action de l'air qu'on tire d'un endroit frais, comme de la une ou d'une cave, par le moyen d'une trompe.

Il y a un choix à faire dans le charbon; les plus durs & les plus sonans doivent être préférés: ils conservent la chaleur plus long - tems, & la donnent plus vive. Ceux qui sont faits de bois plus durs que le chene, valent encore mieux. Tels sont ceux de gayac, par exemple, qui rendent un son clair, & sot très - compactes & pesans. Les plus mauvais de tous sont ceux de tilleul & de sapin; ils sont mous, brulent vîte, & donnent peu de chaleur. On doit rejetter les fumerons ou charbons mal cuits, parce que la suie ou l'humidité acido - huileuse qu'ils exhalent, peut nuire aux opérations ou l'on ne peut pas employer le bois; cet inconvénient a fait quelquefois tomber en apoplevie le fameux distillateur Glauber. Les charbons doivent être tenus dans un sieu sec; ceux qui ont pris de l'humidité pétillent & s'ecartent de toutes parts en conséquence de l'explosion que leur cause l'humidité dont ils sont impregnés, explosion qui brise souvent les vaisseaux.

Le charbon de terre donne une chaleur plus vive & plus durable; mais il donne de mauvaises exhalaisons, même quo qu'on l'ait calciné. Barner, Stahl.

La tourbe qui est composée de pedicules & de racines de plantes entrelacées & impregnées d'une terre bitumineuse, conserve aussi le feu assez longtems, & elle donne une flamme claire: mais elle donne encore des exhalaisons nuisibles. Quand on en veut chausser un fourneau, on en prend un morceau, on le fait flamber dans le feu, & on l'éteint dans l'eau: quand on en veut allumer d'autres morceaux, on met celui - ci dans le feu; il s'embrase promptement, & sert à mettre le feu aux autres. Stahl, fand. page 46.

Tout le monde sait quel est le meilleur bois pour l'usage, & de quelle grosseur il doit être pour ce qu'on en veut faire.

L'huile & l'esprit - de - vin sont très - commodes, en ce qu'ils fournissent en abrége un aliment qui entretient long - tems le feu, quand il le faut doux sans doute: mais Vogel y trouve cet inconvénient, que l'esprit - de - vin est trop cher, & que l'huile donne un charbon qui retombe aisément & souvent sur les meches, s'allume tout - d'un - coup & occasionne une explosion; il dit encore que quelquefois elles sont éteintes par le charbon ou le champignon qu'elles forment; ensorte qu'outre la dépense on court du danger, si l'explosion se fait quand on en est près. Mais je ne crois pas qu'on doive se laisser aller à ces craintes: en premier lieu, on ne seroit pas au même prix avec le charbon ce qu'on fera avec l'huile; si cet aliment coute beaucoup, c'est qu'il faut qu'il brûle long - tems; il a raison au sujet de l'esprit - devin, il est beaucoup plus cher & dure moins que l'huile: en second lieu, si les lampes ont fait beaucoup de charbon, c'est qu'il en a mal arrangé les meches, & qu'il a brûlé de l'huile très - épaisie. Quand le lumignon d'une lampe est bien sait (voyez Leutmann), on peut le laisser brûler quatre h y toucher: de toutes les huiles qu'on br plus mauvaise, sans contredit, pour la poitrine, est celle de navette; cette huile contient un alkali volatil qui échappe au - moins en partie à la deslagration, ou qui s'eleve de la lampe échauffée.

Généralités sur le jeu de l'air & du feu, & sur son aliment dans les fourneaux. On chauffe pour l'ordinaire les grands fourneaux de décoctions, ou servant à la courge, au grand alembic de cuivre de quelques ples de diametre; enfin ces fourneaux que nous avons dit ressembler à notre fig. 3. excepté qu'ils sont un peu moins élevés à - proportion; on les chauffe, dis - je, avec le bois, pour épargner la dépense. Ils ont un tuyau de poêle pour la sortie de la sumée: mais s'ils sont mal construits, c. a d. si le cendrier & le foyer ne sont distingues que par leur grille, qui ne laisse entrevoir au - dehors qu'une seule & même porte, comme on le voit dans quantité de laboratoires, & par notre fig. 84. tirée de la Pl. III. de Lémery, ou il y en a deux l'un contre l'autre; la fumée sujette à sortir par la porte du cendrier, sans qu'on puisse l'en empêcher, à moins que le tuyau qui dérive la fumee ne soit bien fait & bien exposé, & encore y a - t - il des tems ou il fume. Il faut donc que ces deux portes soient éloignées l'une de l'autre, sinon comme dans notre fig. 3. au - moins à - peu - près autant: on peut la citer comme un exemple de ces sortes de fourneaux, au - moins quant au fond; car les autres n'ont besoin ni d'échanerure ni de dôme. Il s'ensuit donc nécessairement que le fourneau de décoction aura une grille, & ils n'en ont pas tous; ce qui est un détaut; & cette grille est nécessaire pour remédier à l'inconvénient en question. Par - là la bouche du foyer étant exactement termée avec une briqué qui aura l'épaisseur de la paroi du fourneau, & lutce, s'il est nécessaire, la fumée sera obligée d'enfiler son tuyau de poêle, ou de descendre dans le cendrier; & elle ne peut pas s'échapper par ailleurs: car on suppose que le fourneau n'ait pas de crevasses, & que la cucurbite de cuivre soit bien lutée tout - autour. Mais la fumée ne pourra descendre dans le cendrier, qu'elle ne passe à - travers la flamme; & elle n'a pas le tems de faire ce trajet, qu'elle est toute consumée & qu'on n'en voit rien; car on n'a jamais vû de fumée sortir du cendrier, pourvû toutefois que la grille soit bien garnie de braise. Ce phenomene qui existe particulierement dans le poêle sans sumée, & qui est le principe de sa construction, pourroit être appliqué aux poêles ordinaires; nous en parlerons encore dans la suite. On auroit plus de chaleur avec la même quantité de bois, sur - tout si on y joignoit la disposition du poêle à l'italienne, imité de ceux de Keslar & des ventouses de Gauger, quant au tuyau seulement, & non quant à la circonvolution de la flamme: on y a, dis - je, plus de chaleur, parce que la fumée s'y brule; ce qui est autant de perdu pour l'aliment du feu; & il n'en faut pas nettoyer le tuyau si souvent.

Que la fumée devienne la pâture du feu toutes les fois qu'elle est soûmise au mouvement de ce principe, c'est ce que nous n'entreprenons point de prouver ici: on peut voir les articles Fumée, Huile, & Phlogistique : au reste il est aisé de comprendre que la suie n'est qu'une fumée concrete, & l'on ne sait que trop qu'elle est capable de brûler. Nous nous bornons donc à parler des cas où la chose arrive. La fumée du four du boulanger n'est plus humide, plus

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