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Schwenfeld en avoit ébauché le plan, Weigel l'avoit
perfectionné, & Jacques Bohm, cordonnier de
Silésie, l'avoit répandue dans sa patrie. C'etoient des
hommes entêtés de la théologie mystique, qui ont
outré l'idée de l'union de l'ame avec Dieu, prétendent
que c'étoit une unité réelle, & une identité
physique de l'ame transmuée en Dieu & en Jesus - Christ. Ensorte que l'on pouvoit dire, selon eux,
dans un sens propre & sans métaphore,
Cet auteur définit le Piétisme, un assemblage de systêmes d'Anabaptistes, de Schwenfeldiens, de Weigeliens, de Ralhmaniens, de Labadistes & de Quakers, qui sous prétexte d'une nouvelle réforme, & dans l'espérance de tems plus favorables, abandonnent la confession d'Ausbourg, admettent à leur communion toutes sortes de sectes, particuliérement des Calvinistes, & sont parfaitement indifférens en matiere de religion.
Il leur reproche encore de croire, avec les Donatistes, que l'effet des sacremens dépend de la piété & de la vertu du ministre; que les créatures sont des émanations de la substance divine; que l'état de grace est une possession réelle des attributs divins; qu'on peut être uni à Dieu quoique l'on nie la divinité de Jesus - Christ; que toute erreur est innocente, pourvu qu'elle soit accompagnée de sincérité; que la grace prévenante est naturelle; que la volonté commence l'ouvrage du salut; que l'on peut avoir de la foi sans aucun secours surnaturel; que tout amour de la créature est un péché; qu'un chrétien peut éviter tous les péchés, & qu'on peut jouir dès ce monde du royaume de Dieu. Manipulus observationum antipietisticarum.
M. Chambers observe que toutes ces accusations ne sont pas également fondées, & que quelquesunes mêmes font exagérées; qu'il y a des Piétistes de différentes sortes, dont les uns sont dans des illusions grossieres, & poussent le fanatisme jusqu'à détruire une grande partie des vérités chrétiennes; que d'autres sont simplement visionnaires, & de bonnes gens, qui, choqués de la froideur & des formalités des autres églises, & enchantés de la dévotion ordinaire des Piétistes, sont attachés à leur parti sans donner dans la grossiéreté de leurs erreurs.
Mais on ne sauroit les disculper d'avoir fait schisme avec les Luthériens: car en 1661, Thesphile Broschbandt & Henri Muller, l'un diacre de l'eglise de Rostok au duché de Mékelbourg, & l'autre docteur de l'université de cette ville, invectiverent contre le reste des cérémonies romaines que les Lutheriens ont conservées, autels, baptisteres, chants ecclésiastiques, prédications, même tout selon eux devoit être aboli; & c'est ainsi qu'en userent Spenber & Jean Horts, qui retrancherent tout l'appareil des cérémonies dans les églises dont ils étoient pasteurs, & convertirent le service qui se faisoit dans les prêches, en assemblées particulieres dans les maisons où ils expliquoient l'Ecriture à leur mode, & qu'on nomma pour cela colleges de la parole de Dieu, collegia philobiblica. Leur secte d'abord répandue en
On place l'origine de cette secte plus pieuse qu'éclairée chez les Luthériens d'Allenragne, vers le milieu du dernier siecle. Elle s'est formée par les exhortations de Philippe - Jacques Spéner, célébre Théologien Allemand. Il étoit né en Alsace, & mourut en 1705 à Berlin, où il étoit conseiller ecclésiastique, & un des principaux pasteurs.
Dans le tems qu'il demeuroit à Francfort, frappé de la décadence de la piété & des progrès de la corruption, il forma le dessein de ranimer la premiere, & de s'opposer à l'autre. Dans cette vue il établit en 1670 une assemblée ou collége de piété dans sa maison, d'où il la transporta dans une église avec la permission du magistrat. A cette assemblée étoient admises toutes sortes de personnes hommes & femmes, mais les femmes étoient séparées des hommes. M. Spéner commençoit l'exercice par un discours édifiant sur quelque passage de l'Écriture sainte, après quoi, il permettoit aux hommes qui étoient là, de dire leur sentiment sur le sujet qu'il avoit traité.
Il publia un ouvrage où il indiquoit les défauts qu'il croyoit remarquer dans l'église luthérienne, & les moyens d'y remédier. Mais en plusieurs endroits les assemblées qu'il forma, produisircnt parmi le peuple un mauvais effet, en lui inspirant une espece de fanatisme plutôt que la pure religion, ce qui excita les plaintes de la plûpart des théologiens, qui prétendoient que sous prétexte d'avancer la piété, on négligeoit la saine doctrine, & on donnoit occasion à des esprits séditieux de troubler la société & l'Eglise.
Ce fut à - peu - prés dans le même tems qu'il se forma à Leipsick un autre college de piété, semblable à celui de M. Spener, & qui fut nommé collegium philo - biblicum. Des amis de ce pasteur fonderent aussi dans la même ville des assemblées particulieres, destinées à expliquer en langue vulgaire divers livres de l'Ecriture - sainte, de la maniere la plus propre à inspirer la piété à leurs auditeurs. La faculté de Théologie autorisa ces assemblées où la foule étoit grande; néanmoins on en parla à la cour de Saxe comme d'assemblées suspectes, & cette cour les défendit en 1690. Il faut consulter sur ce sujetMosheim, institut. hist. christ. seculi xviij.
Ce fut ainsi que naquit le nom de Piétistes, qu'on a donné depuis à tous ceux qui ont voulu se distinguer par une plus grande austérité de moeurs, & par leur zele vrai ou apparent pour la piété.
Leurs assemblées causerent de grands mouvemens en Allemagne, & leur secte s'étendit dans la Suisse, & particulierement à Berne. Un nommé Vigler, du canton de Zurich, enseigna le premier la doctrine des Piétistes dans Berne en 1698. Il représentoit si vivement l'énormité dupéché, & la difficulté de se soustraire à la colere d'un Dieu justement irrité, qu'il jettoit ceux qui l'écoutoient dans d'extrèmes perplexités. Leurs excellences firent des enquêtes très - séveres sur la doctrine de ce prédicateur; mais elles trouverent plusieurs personnes de considération qui lui étoient sécretement attachées.
Il combattoit sur - tout l'opinion de ceux qui prétendoient
fonder le salut sur les oeuvres extérieures
de piété, les prieres, les aumônes; & il enseignoit
que l'unique voie pour obtenir le salut, consistoit
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