ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS
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multitude des faux oracles que vous avez prononcés
vous & vos semblables, qu'ils démontrent eux - mêmes
le peu de cas qu'on en doit faire. Vous
faites passer un million de mensonges malheureux,
à la faveur de sept ou huit autres qui vous ont
réussi. En supposant que vous agissez au hasard,
vous avez conjecturé tant de fois, que s'il y avoit
à s'étonner de quelque chose, ce seroit peut - être
de ce que vous n'avez pas rencontré plus souvent.
En un mot, vous qui prévoyez tout ce qui doit arriver
à la Sicile, comment n'avez - vous pas prévû
ce qui vous arrive à vous - même aujourd'hui? Ignoriez - vous que je devois vous traverser dans votre
dessein? Ne deviez - vous pas, pour faire valoir votre
art, prévenir le roi, que telle personne, qui
seroit présente, chercheroit à vous troubler? Puisqu'enfin votre science vous découvre si le roi doit
triompher de ses ennemis, dites - nous auparavant
s'il ajoûtera foi à vos oracles ».
Quoique l'Astrologie judiciaire ait été solidement
combattue tant par Barclay, que par d'autres auteurs
célebres, qui en ont démontré la vanité; on ne peut
pas dire qu'ils ayent entierement déraciné cette ridicule
prévention; elle regne encore, & particulierement
en Italie. On a vû sur la sin du sieclè dernier,
un Italien envoyer au pape Innocent XI. une prédiction,
en maniere d'horoscope, sur Vienne alors assiegée
par les Turcs, & qui fut très - bien reçûe. De nos
jours le comte de Boulainvilliers, homme d'ailleurs
de beaucoup d'esprit, étoit infatué de l'Astrologie judiciaire, sur laquelle il a écrit très - sérieusement. (G)
Tacite au VIe. livre de ses Annales, ch. xxj. rapporte
que Tibere, dans le tems qu'il étoit exilé à Rhodes, sous le regne d'Auguste, se plaisoit à contulter
les devins sur le haut d'un rocher fort élevé au bord
de la mer; & que si les réponses du devin donnoient
lieu à ce prince de le soupconner d'ignorance ou de
fourberie, il le faisoit à l'instant précipiter dans la
mer par un esclave. Un jour ayant contulté dans ce
même lieu un certain Thrasyllus fort habile dans cet
art, & ce devin lui ayant promis l'empire, & toutes
sortes de prospérités: Puijque tu es si habile, lui dit
Tibere, pourrois - tu me dire combien il te riste de tems
à vivre? Thrasyllus, qui se douta apparemment du
motif de cette question, examina, ou fit semblant
d'examiner, sans s'émouvoir, l'aspect & la position
des astres au moment de sa naissance: bientôt apres,
il laissa voir au prince une surprise qui ne tarda pas
à être suivie de frayeur; & il s'écria, qu'autant qu'il
en pouvoit juger, il étoit à cette heure même menacé d'un
grand peril. Tibere, charmé de cette réponse, l'embrassa,
le rassûra, le regarda dans la suite comme un
oracle, & le mit au nombre de ses amis.
On trouve dans ce même historien, l'un des plus
grands génies qui furent jamais, deux passages qui
font voir que quand un préjuge est général, les meilleurs
esprits ne peuvent s'empêcher de lui sacrifier,
mais ne le font pourtant qu'avec plus ou moins de
restriction, &, pour ainsi dire, avec une sorte de répugnance.
Le premier de ces passages se lit dans le
livre VI. ch. xxij. où après avoir fait des réflexions
sur les différens sentimens des philosophes au sujet de
l'Astrologie, il ajoûte ces paroles: Coeterum plerisque
mortalium non eximitur, quin primo cujusque ortu ventura
destinentur: sed quoedam secus quam dicta sint cadere,
fallaciis ignara dicentium; ita corrumpi fidem artis,
cujus proeclara documenta, & antiqua oetas & nostra
tulerit. Ce qu'on peut traduire ainsi:
« il ne paroît
pas douteux, que tout ce qui doit nous arriver ne
soit marqué dès le premier moment de notre naissance: mais l'ignorance des devins les induit quelquefois
en erreur dans les prédictions qu'ils nous
font; & par - là elle decrédite en quelque maniere
un art, dont la réalité est clairement prouvée par
l'expérience de notre siecle, & par celle des siecles
précédens ».
L'autre passage se trouve dans le IV. liv. des annales,
ch. lviij.
« Tibere étant sorti de Rome, dit Tacite, les Astrologues prédirent qu'il n'y reviendroit
jamais. Cette prédiction occasionna la perte de plusieurs
citoyens, qui en conclurrent que ce prince
n'avoit plus que > de tems à vivre, & qui furent
assez imprudens pour le publier. Car ils ne pouvoient
se douter qu'en effet Tibere vivroit encore
onze ans sans rentrer dans Rome, & dans une espece
d'exil volontaire. Mais au bout de ce tems,
ajoûte l'historien, on apperçut les limites étroites,
qui, dans la science des devins, séparoient l'art de la
chimere; & combien de nuages y obscurcissoient
la vérité: car la prédiction qu'ils firent que Tibere
ne reviendroit point à Rome, n'étoit pas faite au
hasard & sans fondement, puisque l'évenement la
vérifia: mais tout le reste leur sut caché, & ils ne
pûrent prévoir que ce prince parviendroit à une
extrème vieillesse sans rentrer dans la ville, quoiqu'il dût souvent s'en approcher de fort près ».
Mox
patuit breve confinium artis & falsi; veraque quàm obscuris
tegerentur. Nain in urbem non venturum, haud sorte
dictum: coeterorum nescii egere, cum propinquo rure aut
littore, & soepe moenia urbis ads>dens, extremam senectam
compleverit. Il me semble voir dans ce passage un
grand génie qui lutte contre le préjugé de son tems,
& qui pourtant ne sauroit totalement s'en défaire.
(O)
ASTROLOGIQUE
ASTROLOGIQUE, adj. se dit de tout ce qui a
rapport à l'Astrologie. Voyez Astrologie.
ASTROLOGUE
ASTROLOGUE, adj. pris subst. se dit d'une personne
adonnée à l'Astrologie, ou à la divination par
le moyen des astres. Les Astrologues étoient autrefois
fort communs; les plus grands hommes même
paroissent avoir cru à l'Astrologie, tels que M. de
Thou & plusieurs autres. Aujourd'hui le nom d'Astrologue est devenu si ridicule, qu'à peine le plus bas
peuple ajoûte - t - il quelque foi aux prédictions de nos
almanachs. Voyez Astrologie. (O)
ASTRONOME
ASTRONOME, adj. pris subst. se dit d'une personne
versée dans l'Astronomie. Le peuple confond
quelquefois Astrologue avec Astronome: mais le premier
s'occupe d'une science chimérique, & le second
d'une science très - belle & tres - utile. Dans le tems que
l'Astrologie judiciaire étoit à la mode, il n'y avoit
presque point d'Astronome qui ne fût Astrologue. Aujourd hui il n'y a plus que des Astronomes, & point
d'Astrologues, ou plûtôt les Astrologues sont très méprisés.
Voyez les plus célebres Astronomes à l'article
Astronomie. (O)
ASTRONOMIE
ASTRONOMIE, Astronomia, s. f. composé de
A'>H\R, étoile, & de NO>MO>, regle, loi. L'Astronomie est la
connoissance du ciel & des phénomenes célestes.
V. Ciel. L'Astronomie est, à proprement parler, une
partie des Mathématiques mixtes, qui nous apprend à
connoître les corps célestes, leurs grandeurs, mouvemens,
distances, périodes, éclipses, &c. Voyez Mathématiques.
Il y en a qui prennent le terme Astronomie dans un
sens beaucoup plus étendu: ils entendent par - là la
connoissance de l'univers & des lois primitives de la
nature. Selon cette acception, l'Astronomie seroit plûtôt
une branche de la Physique, que des Mathématiques. Voyez
Physique, Système, Nature
Les auteurs varient sur l'invention de l'Astronomie:
on l'attribue à différentes personnes; différentes na
tions s'en font honneur, & on la place dans différens
siecles. A s'en rapporter aux anciens historiens, il paroît
que des rois inventerent & cultiverent les premiers
cette science: Belus, roi d'Assyrie, Atlas, roi
de Mauritanie, & Uranus, qui régnoit sur les peuples
qui habitoient les bords de l'océan atlantique, pas<pb->
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