ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS
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nos sens ni sous notre entendement livré à ses seules
lumieres, qu'elle n'est point évidente d'une évidence
d'objet, ni liée clairement & nécessairement avec
sa cause, enfin qu'elle ne tire sa source d'aucun argument
réel, ni d'aucune vérité clairement manifestée;
que néanmoins elle paroît vraie, non par évidence,
mais par une attestation de fait, non par elle - même,
mais par le témoignage qu'on en a porté: alors cette
proposition est censée de foi, & le consentement qu'on
y donne est une adhésion de confiance ou de foi.
L'évêque Pearson & la plúpart des théologiens
pensent que la croyance contenue dans le symbole,
est de cette derniere espece. Le docteur Barrow au
contraire soûtient qu'elle est de la premiere espece,
& que nous en croyons les articles d'après la persuasion
intime que nous avons de la vérité de chaque
proposition prise en elle - même, & non d'après les
motifs d'autorité, ajoûtant que nous sommes seulement
fondés sur des raisons propres à persuader les
différens points que nous suivons; c'est, dit - il, en ce
sens que le mot PISTE)NEIN, credere, est employé dans
l'Ecriture, & qu'il est dit que S. Thomas a cru parce
qu'il a vû: donc, conclut - il, dans cette occasion la
foi étoit fondée sur les sens. Ajoûtez que Jesus - Christ
lui - même ne demandoit point aux Juifs ni à ses disciples
de s'en fier uniquement à son propre témoignage
pour le connoître, mais de se servir de leurs
lumieres pour juger de ses oeuvres, afin d'appuyer
leur croyance sur leur raison. Ainsi S. Jacques dit,
que les démons croyent qu'il y a un Dieu; mais
comment le croyent - ils? Ils le connolssent par l'expérience
&, si l'on veut, par la sagacité de leur génie,
& non par révélation ou par témoignage. D'ailleuts la croyance de l'existence d'un Dieu ne peut être
fondée seulement sur l'autorité; car l'autorité humaine
seule ne peut en donner des preuves, & c'est l'autorité
divine qui est la principale base de cette croyance. Enfin on ne peut pas dire que la foi des premiers
Chrétiens ait été fondée purement sur l'autorité, car
elle l'étoit en partie sur les principes de la raison, &
en partie sur le témoignage des sens. Telle étoit la
connoissance qu'ils avoient de la sincérité & de la
pureté des moeurs du Sauveur, dont ils étoient convaincus
par sa conversation, par la sagesse & la majesté
de ses discours. Telle étoit l'opinion qu'ils en
pouvoient avoir, en considérant la sainteté de sa
doctrine, la grandeur de son pouvoir, l'éclat & la
force de ses miracles: toutes ces considérations
avoient leur poids aussi bien que son propre témoignage;
il semble même que Jesus - Christ ait insinué,
vû leurs dispositions à l'incrédulité, que son propre
témoignage étoit insuffisant, & pouvoit être révoqué
en doute. Les apôtres eux - mêmes employent ce
motif pour fonder la certitude du témoignage qu'ils
vont rendre de J. C. Quod audivimus, quod vidimus
oculis nostris, quod perspeximus, & manus nostroe contrectaverunt
de verbo vitoe... Quod vidimus & vidimus,
annuntiamus vobis. Joan. epist. I. c. j. v. 1. & 3. Ainsi
c'étoit en formant ce raisonnement que les premiers
Chrétiens croyoient à Jsus - Christ: celui dont les
paroles, les actions, le caractere, en un mot toute
la vie, sont si admirables, si conformes à ce qu'en
ont prédit les prophetes; celui - là, disoient - ils, ne
peut être accusé de faux, & nous pouvons nous fier
à ses paroles: or, continuoient - ils, nous savons par
expérience que Jesus est puissant en oeuvres & en
paroles, qu'il a fait un grand nombre de miracles
éclatans, &c. donc nous pouvons croire toutes les
vérités qu'il nous annonce. Tel est le système du docteur
Barrow.
Mais en conclure que notre foi doit avoir le même
fondement, c'est une conséquence visiblement
dangereuse; car par rapport à nous la chose est fort
différente. La mineure de cet argument qui étoit
évidente pour les premiers Chrétiens, d'une évidence de fait, n'est évidente parmi nous que d'une évidence de témoignage & d'autorité, c'est - à - dire que
nous nous y confions par les histoires qui sont passées
jusqu'à nous, qui sont confirmées par une tradition
si constante & appuyées de circonstances si
miraculeuses, que l'on n'en voit aucunes si fortes
dans aucune matiere de fait. Or, cela est suffisant
pour fonder une certitude qui rende notre croyance
raisonnable. Les objets de la foi en eux - mêmes, ses
mysteres qui sont l'objet de notre croyance, ne sont
pas évidens; mais les motifs de crédibilité le sont.
Il y a une très - grande différence entre cette proposition,
ce que l'on doit croire est évident, & celle - ci, il
est évident qu'on doit croire telle chose. la premiere suppose
essentiellement une évidence d'objet; & la seconde
ne suppose nécessairement qu'une évidence de témoignage,
soit que ce témoignage établisse une chose
claire en elle - même, soit qu'il dépose en faveur d'une
chose incompréhensible. Pour avoir une croyance
parfaite, il est nécessaire d'avoir une pleine évidence de la certitude du témoignage des hommes, ou de
l'infaillibilité du témoignage de Dieu & du fait de la
révélation. Or nous avons sur la premiere, c'est - à - dire sur le témoignage des apôtres, une certitude
au - dessus de toute certitude historique; & sur la seconde,
nous avons toutes les preuves de raison &
d'autorité qu'on peut desirer: ce n'est pas à dire pour
cela que notre croyance soit fondée sur la raison, celle - ci y prépare les voies; mais en dernier ressort,
elle est appuyée sur l'autorité humaine & sur la véracité
de Dieu. Voyez Véracité. De - là il s'ensuit
qu'en matiere de croyance, ce n'est point - la raison
seule qu'on doit écouter, mais aussi qu'on n'en doit
point exclure l'usage dans la discussion des points de
croyance; il ne s'agit que de la regler & de la soûmettre
à l'autorite, sur - tout quant aux objets qui surpassent
sa portée, tels que sont les mysteres. Pour la dis
cussion des faits, l'usage de la raison est très - permis;
car rien n'empêche qu'on ne soit persuadé d'un fait
par son évidence, & qu'on ne le croye en même
tems par le motif de l'autorité. (G)
CROZET
CROZET, (Géog. mod.) petite ville de France
dans le Forès, sur les frontieres du Bourbonnois.
CRU
CRU
CRU, s. m. (Gramm.) c'est le produit d'un fonds
de terre qui nous appartient. C'est en ce sens que
l'on dit, ce vin est de mon cru.
Cru est aussi synonyme à accroissement; & l'on dit
en ce sens, voilà le cru de l'année.
Cru à cru
Cru à cru, Manége.) Monter à cru, voyez Monter. Un homme armé à cru. Botté à cru, c'est - à - dire
sans bas sur la peau. (V)
Cru, Crudité
Cru, Crudité, se dit en Peinture, de la lumiere &
des couleurs d'un tableau: de la lumiere, c'est lorsque
les grands clairs sont trop près des grands bruns;
des couleurs, c'est lorsqu'elles sont trop entieres &
trop fortes. On dit, il faut diminuer ces lumieres, ces
ombres sont trop crues, font des crudités: il faut rompre
les couleurs de ces draperies, de ce ciel, qui sont trop
crues, qui font des crudités. De Piles. (R)
Cru
Cru, (Chasse.) c'est le milieu du buisson où la perdrix
se retire quelquefois pour éviter la poursuite
des chiens. On l'appelle aussi le creux du buisson.
CRUAUTÉ
CRUAUTÉ, s. f. (Morale.) passion féroce qui
renferme en elle la rigueur, la dureté pour les autres,
l'incommisération, la vengeance, le plaisir de
faire du mal par insensibilité de coeur, ou par le plaisir
de voir souffrir.
Ce vice détestable provient de la lâcheté, de la
tyrannie, de la férocité du naturel, de la vûe des
horreurs des combats & des guerres civiles, de celle
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