Dictionnaire de l'Académie Française,
6ème edition (1835)

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TAILLE-MER. s. m. T. de Marine. La partie inférieure de l'éperon d'un bâtiment, ainsi nommée parce qu'elle fend l'eau la première, lorsque le bâtiment avance.

TAILLER. v. a. Couper, retrancher d'une matière, en ôter avec le marteau, le ciseau, ou autre instrument, ce qu'il y a de superflu, pour lui donner une certaine forme, pour la rendre propre à tel ou tel usage. Tailler une pierre pour la faire servir à un bâtiment. Tailler un bloc de marbre pour en faire une colonne, une statue. Tailler une grotte dans le roc. Tailler des arbres pour les rendre plus beaux. Tailler des palissades. Tailler des arbres fruitiers, des arbres nains, dans le temps convenable, pour leur faire porter plus de fruit. Tailler la vigne dans sa saison. Tailler une plume à écrire. Tailler une pierre précieuse. Tailler un diamant.

TAILLER se dit aussi en parlant De certaines choses qui se coupent en plusieurs morceaux, en plusieurs pièces, soit avec le couteau, soit avec des ciseaux. Tailler des soupes. Tailler la soupe. Tailler des morceaux. Tailler du pain par morceaux. Tailler un habit, un manteau. Tailler des chemises. Tailler de l'ouvrage, de la besogne. Cet ouvrier taille bien. Tailler un habit en plein drap, etc.

Fig., Tailler en pièces une armée, un régiment, une compagnie, Les défaire entièrement.

Fig. et fam., Tailler des croupières à une troupe de gens de guerre, La mettre en fuite, la poursuivre.

Tailler des croupières à quelqu'un, Lui susciter des affaires, des embarras, lui donner bien de l'exercice.

Fig. et fam., Tailler de la besogne à quelqu'un, Lui donner beaucoup de choses à faire, ou Lui susciter bien des embarras. C'est un chicaneur, il m'a taillé bien de la besogne. Voilà bien des commissions, vous me taillez plus de besogne que je n'en puis faire.

Fig. et fam., Tailler les morceaux à quelqu'un, Lui limiter ce qu'il doit dépenser, ou Lui prescrire bien exactement ce qu'il doit faire. On nous a taillé nos morceaux bien courts, bien court, etc. Il lui a taillé ses morceaux.

Prov. et fig., Tailler et rogner, Disposer des choses à sa fantaisie. Il est le maître dans cette maison, il taille et rogne à son gré, comme il veut. Nous avons pris des arbitres; qu'ils taillent et qu'ils rognent comme il leur plaira.

Prov. et fig., Il peut tailler en plein drap, il a de quoi tailler en plein drap, Il a amplement et abondamment tout ce qui peut servir à l'exécution de son dessein. Il a taillé en plein drap, Il a été en pouvoir de faire tout ce qu'il a voulu.

TAILLER signifie absolument, Inciser, faire une incision au périnée ou au-dessus du pubis, pour extraire les calculs renfermés dans la vessie. Il a la pierre, on le menace de le tailler. Il a été taillé deux fois. Il a été taillé de la pierre. On lui broya la pierre dans la vessie au lieu de le tailler. Voyez LITHOTRITIE.

TAILLER en termes de Monnaie, Diviser un marc d'or ou d'argent en une certaine quantité de pièces de monnaie, suivant ce qui est ordonné par les règlements.

TAILLER se dit aussi neutralement, à certains Jeux de cartes, comme le pharaon, le vingt et un, etc., pour indiquer la fonction du joueur qu'on nomme banquier, lequel tient les cartes et joue seul contre tous les autres joueurs. Tailler à la bassette, au trente et quarante, etc. Qui veut tailler? Il a promis de tailler après souper.

TAILLÉ, ÉE. participe Cet homme est bien taillé, Il est bien fait, il a le corps bien proportionné.

Cote mal taillée, Arrêté de compte en gros, sans égard à ce qui peut appartenir à chacun à la rigueur. Ils étaient en contestation sur plusieurs sommes respectivement dues, ils ont fait une cote mal taillée.

Fam., C'est de la besogne toute taillée, se dit en parlant D'un ouvrage quelconque, dont les matériaux sont si bien préparés, qu'il n'y a plus qu'à en faire usage.

TAILLÉ en termes de Blason, se dit D'un écu lorsqu'il est partagé en deux parties égales par une ligne tirée de la gauche du chef à la droite de la pointe. Il porte taillé d'argent et de gueules.

TAILLERESSE. s. f. T. de Monnaie. Il se disait autrefois d'Ouvrières qui réduisaient les pièces au poids de l'ordonnance.

TAILLEUR. s. m. Celui qui taille. Tailleur d'habits. Tailleur de pierres. Tailleur d'arbres. Tailleur de diamants.

TAILLEUR employé absolument, signifie, Un tailleur d'habits, un artisan qui fait des habits. Tailleur pour homme. Tailleur pour femme. Bon tailleur. Mon tailleur ne me rapporte pas mon habit. Il doit à son tailleur. Maître tailleur. Garçon tailleur. La boutique d'un tailleur.

TAILLEUR en termes de Jeu, Celui qui taille dans une maison de jeu.

TAILLIS. adj. m. Il n'est usité que dans cette locution, Bois taillis, Un bois que l'on taille, que l'on coupe de temps en temps.

Il s'emploie plus ordinairement comme substantif. Un taillis. Un jeune taillis. Il met tant d'arpents de taillis en coupe tous les ans. Je poursuivis un lièvre sur la route, mais il gagna le taillis.

Prov. et fig., Gagner le taillis, S'enfuir et se mettre en sûreté.

TAILLOIR. s. m. Assiette de bois sur laquelle on taille, on coupe de la viande. Il est peu usité.

TAILLOIR en termes d'Architecture, La partie supérieure du chapiteau des colonnes, espèce de tablette carrée sur laquelle pose l'architrave.

TAILLON. s. m. Imposition de deniers, qui se levait anciennement de la même manière que la taille, et qui en était comme un supplément. Receveur général, receveur particulier du taillon. Le taillon était affecté au payement de la gendarmerie.

TAIN. s. m. Feuille ou lame fort mince, qui est formée d'un mélange d'étain et de vif-argent, et qu'on applique derrière des glaces pour en faire des miroirs. Le tain de ce miroir est gâté, taché.

TAIRE. v. a. (Je tais, tu tais, il tait; nous taisons, vous taisez, ils taisent. Je taisais. Je tus. J'ai tu. Je tairai. Je tairais. Tais, qu'il taise; taisons, taisez. Que je taise. Que je tusse. Taisant.) Ne dire pas. Il vous a bien dit telle chose, mais il vous en a tu beaucoup d'autres. C'est un homme sûr et qui ne dit jamais rien de ce qu'il faut taire. Il sait taire ce qu'il faut taire.

Il s'emploie souvent avec le pronom personnel, et signifie, Garder le silence, s'abstenir de parler. Après avoir dit cela, il se tut. Il y a temps de parler et temps de se taire. Tais-toi. Taisons-nous. Ordonnez-leur de se taire. Avec ellipse du pronom, Faites taire cet enfant, ce bavard.

Prov., Qui se tait, consent, Quand on ne dit mot sur quelque proposition, c'est une marque qu'on ne s'y oppose point. On dit plus ordinairement, Qui ne dit mot, consent.

Ne pouvoir se taire d'une chose, La publier partout, en parler sans cesse. Il ne peut se taire sur la grâce, de la grâce que vous lui avez faite. Je ne puis m'en taire.

Fig., Il a fait taire son ressentiment, Il l'a maîtrisé, il l'a oublié dans telle occasion. Ils ont fait taire les lois, Ils ont négligé ou empêché l'exécution des lois. On dit de même, En de telles circonstances, les affections doivent se taire, tous les ressentiments doivent se taire, etc.

TAIRE avec le pronom personnel, signifie quelquefois simplement, Ne point faire de bruit. En ce sens, il se dit Des animaux, et généralement De tout ce qui est capable de faire du bruit. Faites taire ces chiens. La mer et les vents se turent à la voix de JÉSUS-CHRIST. Cette dernière phrase est du style soutenu, ainsi que cette autre sur Alexandre, La terre se tut devant lui, c'est-à-dire, Se soumit.

Notre canon a fait taire celui des ennemis, Il a mis celui des ennemis hors d'état de continuer à tirer.

TU, UE. participe

TAISSON. s. m. Blaireau, quadrupède sauvage qui se terre. La chasse du taisson. Puant comme un taisson.

Il se dit, au Chili, d'Un poisson sans arête et fort délicat.

TALAPOIN. s. m. Prêtre idolâtre, dans certaines parties de l'Inde. Les talapoins sont des espèces de moines mendiants.

TALC. s. m. (Le C se prononce comme un K, même devant les consonnes.) Sorte de pierre qui se divise en feuillets transparents, et qui, étant cuite, produit un plâtre extrêmement fin.

TALED. s. m. Voile dont les juifs se couvrent la tête dans leurs synagogues.

TALENT. s. m. Certain poids d'or ou d'argent, qui était différent selon les divers pays où l'on s'en servait anciennement. Talent attique. Talent romain. Talent babylonien. Talent hébraïque. Talent d'or. Talent d'argent. Grand talent. Petit talent. Il porta tant de talents au trésor public. Le talent attique valait environ quatre mille neuf cent vingt francs, et pesait six mille drachmes.

TALENT signifie figurément, Don de la nature, disposition et aptitude naturelle pour certaines choses, capacité, habileté. Dieu lui a donné de grands talents. Un talent rare, particulier, extraordinaire. Un beau talent. Un heureux talent. Il n'est pas propre aux affaires, ce n'est pas son talent. Il a beaucoup de talent pour le barreau, pour la

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