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Il est donc vrai qu'à mesure qu'on avance en âge, les os, les cartilages, les membranes, la chair, & toutes les fibres du corps acquierent de la sécheresse & de la solidité: toutes les parties se retirent, tous les mouvemens deviennent plus lents, plus difficiles; la circulation des fluides se fait avec moins de liberté, la transpiration diminue, la digestion des alimens devient lente & laborieuse, les sucs nourriciers sont moins abondans, & ne pouvant être reçus dans la plûpart des fibres devenues trop solides, ils ne servent plus à la nutrition. Ainsi la seve de l'homme manque aux lieux qu'elle arrosoit.
La vieillesse arrive encore nécessairement par la dégénération des fluides contenus dans le corps humain, & dont l'influence sur son économie n'est pas une vérité douteuse; ces liqueurs n'étant que des parties passives & divisées ne font qu'obéir à l'impulsion des solides, dont leur mouvement, leur qualité, & même leur quantité dépendent, Dans la vieillesse, le calibre des vaisseaux se resserre, les filtres secrétoires s'obsiruent, le sang, la lymphe & les autres humeurs doivent par conséquent s'épaissir, s'altérer, s'extravaser, & produire tous les vices des liqueurs qui menent à la destruction. Telles sont les causes du dépérissement naturel de la machine. Les muscles perdent leur ressort, la tête vacille, la main tremble, les jambes chancellent; l'ouie, la vue, l'odorat s'affoiblissent, & le toucher même s'émousse.
Impitoyablement flétrie, reconnoissez - vous dans cet état cette beauté ravissante à qui tous les coeurs adressoient autrefois leurs - voeux? Triste à l'aspect d'un sang glacé dans ses veines, comme les poëtes peignent les nayades dans le cours arrêté de leurs eaux! Combien d'autres raisons de gémir pour celle chez qui la beauté est le seul présent des dieux! Une tête grise a succédé à ces cheveux d'un noir de geais, naturellement bouclés, qui tantôt flottoient sur des épaules d'albâtre, & tantôt se jouoient sur une belle gorge qui n'est plus. Ces yeux qui disoient tant de choses sont ternes & muets. Le corail de ces levres a changé de couleur; sa bouche est dépouillée de son plus bel ornement; aucune trace de cette taille légere, si bien proportionnée, & de ce teint qui le disputoit aux lis & aux roses; cette peau si douce, si fine & si blanche n'offre aux regards qu'une foule d'écailles, de plis & de replis tortueux. Hélas, tout chez elle s'est changé en rides presque effrayantes! le cerveau affaissé sur lui - même ne laisse passer que lentement ces rayons d'intelligence & de génie qui causoient votre admiration! Telle est la décrépitude du dernier âge.
Cependant que ce triste hiver n'alarme point ceux
dont la vie s'est passée dans la culture de l'esprit, dans
la bienfaisance & dans la pratique de la vertu! Leurs
cheveux blancs sont respectables. Leurs écrits, leurs
belles actions le sont encore davantage. C'est à ces
gens - là, si rares sur la terre, que la brillante & florissante
jeunesse doit des égards, des hommages &
des autels. (Le chevalier
La longue habitude tient la vieillesse comme enchaînée; elle n'a plus de ressources contre ses dé<cb->
On doit cependant se consoler des rides qui viennent sur le visage, puisqu'elles sont l'effet inévitable de notre existence. Dans l'adversité, les peines de l'esprit & les travaux du corps font vieillir les hommes avant le tems. Dans la prospérité, les délices d'une vie molle & volùptueuse les usent encore davantage. Ce n'est qu'une vie sobre, modérée, simple, laborieusê, exempte de passions brutales, qui peut retenir dans nos membres quelques avantages de la jeunesse, lesquels, sans ces précautions, s'envolent promptement sur les aîles du tems.
C'est une belle chose qu'une vieillesse étayée sur la
vertu. Castricius ne voulant point permettre qu'on
donnât des ôtages au consul Cnéius Carbon, celui - ci
crut l'intimider, en lui disant qu'il avoit plusieurs
epées; & moi plusieurs années, répondit Castricius.
Une pareille réponse a été faite par Solon à Pisistrate,
par Confidius à Jules César, & par Cesellius aux
triumvirs. Ils ont tous voulu faire voir, en parlant
ainsi, que quelques années de vie qu'on avoit encore
à parcourir ne valoient pas la peine de faire naufrage
au port. (Le chevalier
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