ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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l'univers. Les Egyptiens de moindre condition, au lieu de pyramides, faisoient creuser pour leurs tombeaux, de ces caves qu'on découvre tous les jours, & dans lesquelles on trouve des momies.

Si l'on cherche la raison de la figure qu'on donna aux pyramides, on trouvera sans peine qu'elles furent bâties de la sorte, parce que de toutes les figures qu'on peut donner aux édifices, celle - là est la plus durable, le haut ne chargeant point le bas, & la pluie qui ruine ordinairement les autres bâtimens, ne pouvant nuire à des pyramides, parce qu'elle ne s'y arrête pas. Peut - être aussi qu'ils ont voulu par - là représenter quelques - uns de leurs dieux; car alors les Egyptiens représentoient leurs divinités par des colomnes & par des obélisques. Ainsi nous voyons dans Clément Alexandrin, que Callirhoé, prêtresse de Junon, mit au haut de la figure de sa déesse, des couronnes & des guirlandes; car dans ce tems - là les statues des dieux avoient la figure de colomnes ou d'obélisques. Pausanias dit que dans la ville de Corinthe, Jupiter Melichius étoit représenté par une pyramide, & Diane par une colomne.

Les autres nations ont quelquefois imité ces ouvrages des Egyptiens, & ont dressé des pyramides pour leurs sépulcres. Sur ce passage de Virgile,

Fuit ingens monte sub alto Regis Dercenni terreno ex aggere bustum Antiqui Laurentis opacâque ilice tectum. Servius remarque qu'anciennement les personnes de condition se faisoient enterrer sous des montagnes, & qu'ils ordonnoient qu'on dressât sur leurs sépulcres des colomnes & des pyramides.

Le lieu où sont les pyramides, dit le P. Vansleb, qui fit le voyage d'Egypte en 1672, est un cimetiere, & sans doute un cimetiere de Memphis; car tous les historiens arabes nous apprennent que cette ville étoit bâtie dans l'endroit où sont les pyramides, & vis - à - vis le vieux Caire.

Toutes ces pyramides ont une ouverture qui donne passage dans une allée basse fort longue, & qui conduit à une chambre, où les anciens Egyptiens mettoient les corps de ceux pour lesquels les pyramides étoient faites. Si l'on ne voit pas ces ouvertures dans toutes les pyramides, cela vient de ce qu'elles sont bouchées par le sable que le vent y a apporté Sur quelques - unes on trouve des caracteres hiéroglyphiques assez bien conservés.

Toutes les pyramides étoient posées avec beaucoup de régularité. Chacune des trois grandes, qui subsistent encore, sont placées à la tête d'autres plus petites, que l'on ne peut néanmoins connoître que difficilement, parce qu'elles sont couvertes de sable; toutes sont construites sur un rocher uni, caché sous du sable blanc; & il y a quelque apparence que les pierres dont on les a bâties, ont été tirées sur le lieu même; aucune de ces pyramides n'est égale, ni parfaitement quarrée. Toutes ont deux côtés plus longs que les deux autres.

Dans toutes les pyramides, il y a des puits profonds, quarrés & taillés dans le roc. Il y a aussi de ces puits dans les grottes qui sont au voisinage des pyramides; ces grottes sont creusées au côté d'une roche en assez mauvais ordre, & sans symmétrie pardehors, mais fort égales & bien proportionnées pardedans. Le puits est le lieu où les Egyptiens mettoient les corps de ceux pour qui la grotte avoit été faite. Les murailles de quelques - unes ont des figures hiéroglyphiques, taillées aussi dans le roc, les unes plus grandes, les autres plus petites. Les trois principales pyramides connues des voyageurs sont à environ neuf milles du Caire.

La plus belle de toutes est située sur le haut d'une roche, dans le désert de sable d'Afrique, à un quart de lieue de distance, vers l'ouest des plaines d'Egypte. Cette roche s'éleve environ cent piés au - dessus du niveau de ces plaines, mais avec une rampe aisée, & facile à monter: elle contribue en quelque chose à la beauté & à la majesté de l'ouvrage; & sa dureté fait un fondement proportionné à la masse de ce grand édifice.

Pour pouvoir visiter cette pyramide en - dedans, il faut ôter le sable qui en bouche l'entrée; car le vent y en pousse continuellement avec violence une si grande quantité, qu'on ne voit ordinairement que le haut de cette ouverture; il faut même, avant que de venir à cette porte, monter sur une petite colline, qui est vis - à - vis, tout auprès de la pyramide, & qui sans doute s'y est élevée du sable que le vent y a poussé, & qui ne pouvant être porté plus loin à cause de la pyramide qui l'arrêtoit, s'y est entassé de la sorte. Il faut aussi monter seize marches, avant que d'arriver à l'entrée de l'ouverture qui est du côté du nord.

On prétend qu'autrefois on la fermoit après y avoir porté le corps mort, & que pour cet effet, il y avoit une pierre taillée si juste, que lorsqu'on l'y avoit remise, on ne la pouvoit discerner d'avec les autres pierres, mais qu'un bacha la fit emporter, afin qu'on n'eût plus le moyen de fermer la pyramide. Quoi qu'il en soit, cette entrée est quarrée, & elle a la même hauteur & la même largeur depuis le commencement jusqu'à la fin. La hauteur est d'environ trois piés & demi, & la largeur quelque chose de moins. La pierre qui est au - dessus en travers, a près de douze piés de longueur, & dix - huit piés de largeur. Le long de ce chemin, on trouve une grande chambre longue de dix - huit piés, & large de douze; sa voûte est en dos - d'âne.

Quand on est venu jusqu'au bout de ce premier chemin, on rencontre une autre allée pareille, qui va un peu en montant; elle est de la même largeur, mais si peu élevée, principalement dans l'endroit où ces deux chemins aboutissent, qu'il faut se coucher sur le ventre, & s'y glisser en avançant les deux mains, dans l'une desquelles on tient une chandelle allumée, pour s'éclairer dans cette obscurité. Les personnes qui ont de l'embonpoint, ne doivent pas se hasarder à y passer, puisque les plus maigres y parviennent avec assez de peine.

Quelques voyageurs racontent que ce passage a plus de cent piés de longueur, & que les pierres qui le couvrent, & qui font une espece de voute, ont vingt - cinq à trente paumes. Mais la fatigue que l'on essuie, & la poussiere qui étouffe presque, ne permettent guere d'observer ces dimensions.

Au commencement de ce chemin qui va en montant, on rencontre à main droite un grand trou, où l'on peut aller quelque tems en se courbant; à la fin on éprouve de la résistance: ce qui fait croire que ce n'a jamais été un passage, mais que cette ouverture s'est faite par la longueur du tems. Après qu'on s'est glissé par ce passage étroit, on arrive à une espace où l'on peut se reposer, & l'on trouve deux autres chemins, dont l'un descend, & l'autre monte à l'entrée du premier; il y a un puits, qui à ce qu'on dit, conduit dans une grotte à la distance de 67 piés, après quoi on trouve un chemin creusé dans le roc, plein de sable & d'ordures. Lorsqu'on est revenu de ce premier chemin qui est à main droite, on entre à gauche dans un second qui a 27 toises de long. Il y a des trous à chaque pas pour y mettre les piés.

Les curieux qui vont visiter les pyramides, doivent être obligés à ceux qui ont fait ces trous: sans cela il seroit impossible de monter au haut, & il faut encore être allerte pour en venir à bout, à l'aide du banc de pierre qu'on tient ferme d'une main, pendant que l'autre est occupée à tenir la chandelle. Ou<pb->

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