Dictionnaire de l'Académie Française,
6ème edition (1835)

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Ce tonneau de vin s'en va, Le vin qui est dans ce tonneau s'écoule, s'enfuit. Tout le vin s'en ira par là, si on n'y prend garde. La fumée s'en va par la chambre. Si l'on ne bouche bien cette fiole, tout l'esprit-de-vin s'en ira.

Il se dit pareillement De tout ce qui cesse d'être dans un sujet, ou qui commence à se passer, à s'effacer. On ne croit pas que sa fièvre s'en aille sitôt. Son mal s'en va peu à peu. Son rhumatisme s'en est allé par les sueurs. Sa beauté s'en va. L'éclat de son teint commence à s'en aller.

Il se dit également De tout ce qui se dissipe, se consume, s'use en quelque manière que ce soit. Tout son argent s'en va en procès. Tout son temps s'en est allé à cette affaire. Voilà un habit qui s'en va.

Il se dit de même en parlant Du déclin de la vie, des approches de la mort. Les jeunes gens viennent, et les vieillards s'en vont. Cet homme est bien mal, il s'en va, il s'en ira avec les feuilles. Ce malade s'en va. On dit dans le même sens, Cet homme s'en va mourir, s'en va mourant.

Fam., Faire en aller (avec ellipse du pronom personnel), Faire que quelqu'un ou quelque chose s'en aille. Faire en aller tout le monde. Un secret pour faire en aller les punaises, les rousseurs, la fièvre. Une pierre pour faire en aller les taches.

Fam., Cette chose s'en va faite, Elle est sur le point d'être achevée. La messe s'en va dite. Le carême s'en va fini.

Il s'en va onze heures, il s'en va midi, etc., Il est bien près de onze heures, de midi, etc.

Aux Jeux de cartes, S'en aller d'une carte, Se défaire d'une carte, la jouer. Allez-vous-en de votre carreau. Je m'en suis allé de mon roi de pique. S'en aller des plus hautes cartes.

Au Jeu de trictrac, S'en aller, Annoncer que le coup est fini, et qu'on va en commencer un autre.

ALLER s'emploie dans diverses phrases proverbiales et familières.

C'est un las d'aller, se dit D'un homme mou, paresseux et lâche.

Fig., Aller son chemin, Poursuivre son entreprise, ne se pas détourner de la conduite qu'on a commencé à tenir. Aller son petit bonhomme de chemin, Vaquer à ses affaires, poursuivre ses entreprises tout doucement et sans éclat. Aller son grand chemin, N'entendre point de finesse à ce qu'on fait, à ce qu'on dit. Aller le droit chemin, Procéder avec sincérité, sans nulle tromperie.

Fig., Il ne faut pas aller par quatre chemins, Il faut s'expliquer franchement, il ne faut pas chercher tant de détours.

Aller vite en besogne, Agir avec précipitation. N'allez pas si vite en besogne.

Fig., Aller aux nues, Avoir un succès éclatant. Cette tragédie, cette comédie est allée aux nues.

À force de mal aller, tout ira bien, Il faut espérer qu'après beaucoup de malheurs et de disgrâces, il arrivera quelque changement heureux.

Fig., On va bien loin depuis qu'on est las, Il ne faut pas se rebuter, se décourager dans les affaires.

Fig., Tant va la cruche à l'eau qu'enfin elle se casse, Une action hasardeuse, souvent répétée, finit par devenir funeste.

Tous chemins vont à Rome, Divers chemins mènent au même endroit; et, figurément, Divers moyens conduisent à la même fin.

Fig., Les premiers vont devant, Les plus diligents ont toujours de l'avantage.

Fig., Il va comme on le mène, Il n'est pas capable de prendre une résolution de lui-même. On l'a bien hâté d'aller, On lui a fait une rude réprimande.

Fig., Il s'en est allé comme il est venu, Il n'a rien fait de ce qu'il voulait ou devait faire.

Cela va tout seul, La chose est aisée, elle n'offre point, elle ne souffre point de difficulté. Cela va comme il plaît à Dieu, C'est une affaire négligée, mal menée, dont on ne prend aucun soin. Tout va à la débandade, Tout va en désordre.

Cela va sans dire, C'est une chose tellement certaine, incontestable, ou tellement claire, naturelle, qu'il est inutile d'en parler, de la dire, de l'expliquer. On dit, dans le même sens, Il va sans dire que...

Fig., Tout s'en est allé en fumée, On n'a pas réussi.

Fig., Tout y va, la paille et le blé, On n'y a rien épargné.

N'y pas aller de main morte, Frapper rudement; et, au figuré, Mettre de la rudesse, de la violence dans une discussion verbale ou par écrit.

Y aller rondement, y aller de franc jeu, Parler, agir sans détour, franchement, loyalement.

ALLER se prend substantivement dans quelques locutions. Au long aller petit fardeau pèse, Il n'y a point de charge si légère qui ne devienne pénible à la longue. Cet homme a eu l'aller pour le venir, Il n'a rien fait de ce qu'il prétendait faire où il est allé, il a fait un voyage inutile.

Le pis aller, Le pis qu'il puisse arriver, le moindre avantage qu'on puisse avoir. S'il ne réussit pas dans sa nouvelle carrière, son pis aller sera de rentrer dans celle qu'il a quittée. Si vous ne trouvez mieux, je serai votre pis aller. Appelez-vous cela un pis aller? Vous ne risquez rien, vous avez un bon pis aller.

Au pis aller, se dit adverbialement Du plus grand mal ou du moindre avantage qui puisse résulter de quelque chose. Au pis aller, il en sera quitte pour une amende.

ALLÉ, ÉE. participe

ALLEU. s. m. T. de Jurispr. féodale. Il n'est guère usité que dans la locution, Franc-alleu, Fonds de terre, soit noble, soit roturier, qui est exempt de tous droits seigneuriaux. Toutes ces terres étaient des francs-alleux. On dit de même, Tenir, posséder une terre en franc-alleu.

ALLIACÉ, ÉE. adj. Qui tient de l'ail. Une odeur alliacée.

ALLIAGE. s. m. Combinaison d'un métal avec un ou plusieurs autres métaux. Les monnayeurs doivent faire l'alliage selon les lois et règlements. Faire un alliage. Le bronze, le tombac, le cuivre jaune, sont des alliages.

Il se dit, quelquefois, Des métaux mêmes que l'on combine avec un métal plus précieux. L'argent et le cuivre servent d'alliage à l'or. De l'or sans alliage.

Il s'emploie aussi figurément. Il y a peu de vertus humaines sans quelque alliage.

ALLIAIRE. s. f. T. de Botan. Plante de la famille des Crucifères, qui a une odeur d'ail, et qui croît par toute la France dans les lieux ombragés.

ALLIANCE. s. f. Union par mariage. Il a fait une grande alliance, une alliance honorable en mariant sa fille à un tel. Ces deux familles sont unies par plusieurs alliances.

Il se dit également de L'union, de la confédération qui se fait entre deux ou plusieurs États pour leurs intérêts communs. Ce peuple avait une ancienne alliance avec la France. Acte d'alliance. Traité d'alliance. Alliance offensive et défensive. Faire alliance avec un peuple. Contracter, conclure une alliance. L'alliance qui existe entre ces deux souverains. Ils ont formé une alliance redoutable. Renouveler une alliance. Rompre une alliance. Briguer l'alliance d'un prince, d'une nation. On dit de même que Deux partis font alliance, ont contracté une alliance, etc.

ALLIANCE se dit aussi d'Une affinité spirituelle. Voyez AFFINITÉ.

Ancienne alliance, L'alliance que Dieu contracta avec Abraham et ses descendants; et, Nouvelle alliance, L'alliance que Dieu a contractée, par la rédemption, avec tous ceux qui croiraient en JÉSUS-CHRIST. L'ancienne alliance a duré depuis la vocation d'Abraham jusqu'à la venue du Messie. La nouvelle alliance dure depuis la venue du Messie, et durera jusqu'à la consommation des siècles.

Arche d'alliance. Voyez ARCHE.

ALLIANCE se dit encore figurément de L'union et du mélange de plusieurs choses différentes, opposées, disparates. Faire une alliance du sacré et du profane, du vice et de la vertu. Une alliance de mots. L'hémistiche, Il aspire à descendre, offre une heureuse alliance de mots.

ALLIANCE se dit aussi d'Une bague d'or ou d'argent composée de deux cercles réunis. Une alliance de mariage. Acheter une alliance. Porter au doigt une alliance.

ALLIER. v. a. Mêler, combiner, incorporer ensemble. Allier l'or avec l'argent. On le joint quelquefois avec le pronom personnel. Ces deux métaux ne s'allient point, ne peuvent s'allier ensemble.

Il s'emploie figurément, et signifie, Unir, joindre ensemble des choses différentes, opposées, disparates. Allier la force à la prudence. Allier les plaisirs avec les devoirs. Il sait allier l'esprit du monde avec celui de la religion. Ce poëte a l'art d'allier les mots qui semblent le moins faits pour être unis. Avec le pronom personnel: Ces deux qualités ne peuvent s'allier, ne s'allient que difficilement. Ces mots ne s'allient pas l'un avec l'autre. Etc.

Il signifie particulièrement, Joindre par mariage. Allier une maison, une famille à une autre. Dans cette acception, il est plus ordinairement employé avec le pronom personnel. Il s'est allié en bon lieu. Il veut se bien allier. S'allier à une bonne famille, avec une bonne famille. Ces deux familles se sont alliées.

Il se dit aussi en parlant Des princes,

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