ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"232"> cilement par les saignées & les purgatifs, remedes fort usités; il faut dès qu'on observe ce pouls s'en abstenir scrupuleusement, sans quoi on risque, comme je l'ai observé très - souvent, d'occasionner des suppurations toujours fâcheuses, ou même d'attirer une mort plus sûre & plus prochaine.

Le pouls guttural est fort analogue au pectoral, il est développé, redoublé, fort comme tous les pouls supérieurs, il est moins mou, moins plein, souvent plus fréquent que le pouls pectoral, il annonce, lorsqu'il est simple, ce qui est rare, les excrétions critiques des glandes du gosier, les crachats épais & cuits, &c. souvent il est joint au pouls d'irritation, ou compliqué; plus souvent encore il est composé, uni au pouls pectoral ou nasal; il se confond quelquefois tellement avec eux, qu'il est bien difficile de l'en distinguer; du reste la méprise est sans conséquence, parce qu'il faut les mêmes secours, ou plutôt la même inaction dans cette crise que dans les autres; d'ailleurs on peut tirer de nouvelles lumieres qui décident le prognostic du siége de la maladie, des symptomes, &c.

Les narines étant l'émonctoire le plus ordinaire de la tête, on peut prendre le pouls nasal pour un signe général qui indique le transport des humeurs vers la tête, l'excrétion qui se fait le plus souvent dans les maladies aiguës par les vaisseaux du nez, est une évacuation sanguine; cette hémorragie n'est pas toujours critique, il est rare qu'elle termine une maladie & qu'elle la juge parfaitement. Le pouls nasal, même celui qu'on appelle simple, est presque toujours compliqué avec le pouls d'irritation. Il est redoublé comme le précédent, mais il est plus plein, plus dur, plus brusque, plus fort, & plus vîte. Solano appelle ce pouls dicrote, après Galien, & le regarde comme un signe certain d'une hémorrhagie critique par le nez; mais cette regle est un peu trop générale, il arrive quelquefois que la crise préparée ne peut s'exécuter, soit par la résistance des vaisseaux, soit par une détermination plus aisée vers quelque autre partie de la tête, & on voit survenir alors des surdités, des éresipeles au visage, des délires, quelquefois des assoupissemens. Le pouls vibré de Galien a beaucoup de rapport avec celui - ci; cet auteur a remarqué qu'il précédoit les hémorragies; mais il y a une autre excrétion du nez un peu plus rare, mais plus critique, c'est l'excrétion abondante de matieres muqueuses, comme purulentes, qui arrive à la fin de quelques maladies, & qui termine pour l'ordinaire les enchifrenemens, connus sous le nom vulgaire inexact de rhumes du cerveau; le pouls est alors plus critique, plus excréteur, il est moins dur, moins plein, le rebondissement se fait avec moins de force & de constance que dans le pouls de l'hémorrhagie. Les ouvrages cités de Solano, Nihell, Senac, Bordeu, & Michel, sont remplis d'observations qui démontrent combien le pouls nazal est propre à annoncer les hémorrhagies du nez; on trouvera les exceptions, les remarques particulieres & les observations relatives dans les recherches sur le pouls, ch. vij.

On peut ajouter à ces pouls supérieurs, un pouls qui leur est fort analogue, & qu'il est bien difficile de ne pas confondre avec eux, à - moins d'une attention particuliere & d'une grande habitude, c'est le pouls qui annonce la sueur critique; en même tems qu'il indique le transport des humeurs vers la peau, il dénote une sorte d'effort vers les parties supérieures, comme on peut s'appercevoir à la rougeur de la face, qui précede si ordinairement la sueur, que les anciens l'avoient mise au nombre des signes qui dénotent cette crise. Ce pouls a été observé par Galien, & décrit, comme nous avons vu, sous le nom de pouls ondulant, ondosus; il a été conservé dans les écrits des médecins dans la possession d'annoncer les sueurs critiques, sans qu'on s'avisât de constater & d'étendre cette vérité, ou de la restreindre & de la détruire par des observations. Solano a vérifié le fait, peut - être sans se douter que Galien l'eût observé; il l'a trouvé conforme à la vérité; il a retenu à - peu - près le caractere de ce pouls, qu'il nomme inciduus; il ajoute que les pulsations molles, souples, développées, s'élevent au - dessus les unes des autres, de façon que la premiere est moins élevée que la seconde, celle - ci moins que la troisicme, & de même jusqu'à la quatrieme. C'est, suivant Solano, le terme de cette gradation; il n'a jamais observé plus de quatre pulsations consécutives de cette sorte. Galien & sur - tout Struthius, un de ses commentateurs, parlent clairement de cette élévation. Ainsi Solano n'a rien donné de neuf sur ce point. M. Bordeu regarde le pouls ondulant comme plus analogue au pectoral, & il arrive en effet souvent que les malades suent & crachent en même tems, & que le pouls de la sueur soit composé du pectoral; il ne nie cependant pas qu'on ne trouve cette ondulation dans le pouls de la sueur; il a aussi observé cette élévation graduée, de même que la souplesse, le développement, la plénitude des pulsations, & sur - tout plus de mollesse & de dilatation dans la pulsation la plus élevée. Quand ce pouls paroît, on peut prédire sûrement une sueur critique, c'est - à - dire une sueur qui soulage le malade, qui diminue la violence des symptomes, si elle ne fait pas cesser entierement la maladie, ce qui est rare. Souvent les sueurs sont symptomatiques, mais alors il y a une roideur, une tension & une sécheresse considérables dans l'artere, ainsi qu'un sautillement & une inégalité dans les distances des pulsations: on remarque le pouls de la sueur critique dans l'éruption favorable de la rougeole & de la petite vérole, excepté qu'il n'a pas tout - à - fait le même degré de mollesse. Les observations qui font voir la justesse des prédictions fondées sur cet état du pouls, donnent en même tems un nouveau poids à la division lumineuse de Galien, des crises extérieures & intérieures, & aux caracteres du pouls relatifs; elles peuvent aussi guider le praticien chancelant & embarrassé, à distinguer une sueur symptomatique qu'il faut, ou qu'on peut arrêter, d'avec une sueur critique qu'on doit favoriser, & dont le dérangement seroit funeste au malade. L'état du pouls est une boussole assurée dans ce cas: on en voit un exemple frappant dans les fievres intermittentes; les sueurs qui terminent les accès ne sont point indicatoires; le pouls qui les précede n'est point critique. Combien de médecins privés de la lumiere de ce flambeau, pensant suivre & seconder la nature, donnent aveuglément des remedes actifs sudorifiques, inutiles ou pernicieux! Dans les derniers accès le pouls prend manifestement un caractere critique, & annonce la terminaison de la maladie d'autant plus heureuse, qu'elle est plus naturelle.

Les organes excréteurs sont en grand nombre au - dessous du diaphragme: on y trouve l'estomac, les intestins, le foie, les reins, les vaisseaux hémorrhoïdaux, & la matrice dans les femmes. L'effet général de la nature vers quelqu'un de ces émunctoires, est manifesté par le pouls inférieur; mais l'effort critique de chaque viscere en particulier, modifie diversement le pouls: les différences qui naissent de ces modifications sont difficiles à saisir, parce qu'il n'est pas rare d'observer les excrétions critiques partagées entre plusieurs organes inférieurs.

La crise propre ou du - moins apparente de l'estomac, est le vomissement; la crise naturelle seroit de pousser vers le pilore les humeurs qui se ramassent dans sa cavité; mais on ne sait pas quand elle a lieu, & les caracteres du pouls qui la précede. Le vomissement est quelquefois critique dans les maladies, rarement il termine tout - à - fait les maladies; plus [p. 233] souvent il ne les juge qu'incomplettement. Solano dit n'avoir jamais observé de crise simple par le vomissement, sans la diarrhée: cette remarque assez généralement vraie, souffre des exceptions dans quelques cas particuliers, sur - tout dans les indigestions. Solano regarde comme signe certain de cette crise, une tension considérable de l'artere jointe à l'intermittence; mais ce pouls a dû être nécessairement composé, puisqu'il se faisoit deux évacuations, l'une par les intestins, & l'autre par l'estomac. Le pouls simple du vomissement, ou stomachal, est, suivant M. Bordeu, le moins développé de tous les pouls critiques, & le moins inégal de tous les pouls insérieurs; l'artere semble se roidir & frémir sous le doigt; elle est souvent assez saillante; les pulsations sont fréquentes, & leurs intervalles sont assez égaux. Ce pouls s'observe principalement au commencement des maladies: il indique un état de gêne, de spasme; & en effet l'action par laquelle l'estomac produit cette crise, n'est point naturelle; c'est une véritable convulsion de l'estomac, un renversement de son mouvement naturel. La présence de ce pouls dans tous les tems de la maladie, favorise l'effet de l'émétique, & peut servir d'indication certaine pour le placer. Lorsque le vomissement naturel ou l'effet de quelque remede est passé, le pouls quitte cet état convulsif, & se développe; si l'on observe ce changement heureux après l'exhibition de l'émétique, c'est une preuve qu'il a été donné fort - à - propos; si au contraire le pouls se concentre, devient plus convulsif, plus serré, c'est un signe fâcheux qui montre que le pouls n'étoit pas excréteur lors de l'application de ce remede; remarques essentielles dont le praticien peut à chaque instant reconnoître l'importance.

Les intestins, organe considérable par son étendue & son influence sur l'économie animale, sont le foyer très - ordinaire des causes de maladie, & le siége familier des excrétions critiques; ces excrétions qu'on appelle diarrhée, dévoiement, &c. peuvent être naturelles ou excitées par l'art: l'une & l'autre a ses avantages. Le pouls qui précede le dévoiement spontané critique, ouvrage de la nature victorieuse, est connu sous le nom de pouls intestinal, voici ses caracteres déterminés par M. Bordeu, d'après un grand nombre d'observations. « Il est beaucoup plus développé que le pouls du vomissement: ses pulsations sont assez fortes, comme arrondies, & sur - tout inégales tant dans leur force que dans leurs intervalles. Après deux ou trois pulsations assez égales & assez élevées, il en paroît deux ou trois moins développées, plus promptes, plus rapprochées, & comme subintrantes. De - là résulte une espece de sautillement plus ou moins régulier; aux irrégularités de ce pouls se joignent souvent des intermittences très - remarquables; il n'est jamais aussi plein, aussi développé que le pouls supérieur; il n'a point nécessairement d'ordre marqué dans ses intermittences, c'est au contraire par son désordre qu'il serend reconnoissable ». Cette inégalité du pouls à l'approche des déjections bilieuses, n'avoit pas échappe à Galien, comme nous l'avons remarqué; il avoit aussi observé que dans toutes les crises intérieures le pouls étoit rentrant; la petitesse du pouls avoit frappé Avicenne; Solano n'avoit fait attention qu'à l'intermittence du pouls, qu'il regarde comme un signe assuré de diarrhée critique: il a raison en ce point avec les précautions qu'il prend, mais il se trompe en ce qu'il n'a pas assez vû, car il y a bien des diarrhées critiques qui ne précedent point l'intermittence, mais seulement l'irrégularité du pouls. Les purgatifs, remedes propres à exciter au défaut de la nature les évacuations du ventre, ont été par différens auteurs trop employés & trop négligés; chacun alléguoit pour appuyer son sentiment, des raisons spécieuses, & saisoit valoir les fautes du parti contraire; & chacun croyoit avoir raison, parce que tous les deux avoient tort; ils manquoient l'un & l'autre d'une regle sûre, d'une indication invariable, pour employer les purgatifs ou s'en abstenir. Le pouls devenant intestinal, peut dans les maladies aiguës indiquer le tems le plus propre à administrer ces remedes, en dénotant une disposition des intestins qui favorise leur action; mais en même tems ce pouls contr'indique les purgatifs forts qui ne manqueroient pas d'exciter dans ces circonstances des superpurgations. Ainsi, en consultant ce signe, on ne sera plus asservi à cette maxime empirique & quelquefois pernicieuse de purger indictinctement un jour & l'autre non. On distinguera avec Hippocrate, certains tems auxquels il est à - propos de purger, & d'autres où il faut s'abstenir de purgatifs efficaces: on verra la raison d'une observation importante faite par plusieurs praticiens, que des purgatifs forts donnés dans certains jours de la maladie, n'opéroient aucun effet, tandis que d'autres jours des legers eccoprotiques procuroient des selles abondantes.

La fonction particuliere du foie est la secrétion de la bile, & son excrétion par les conduits hépato - cystiques & cholidoques dans la vésicule du fiel & des intestins. On ne sait pas assez que les dérangemens dans la secrétion de cette humeur sont les causes d'un grand nombre de maladies, sur - tout des maladies de la peau, des érésipelles périodiques, des ophtalmies palpebrales, &c. Les icteres sont, de l'aveu de tout le monde, dépendans de cette cause, & ces maladies ne peuvent se guérir que par le rétablissement de cette fonction. Combien aussi de fievres ardentes, de sievres tierces bilieuses, se terminent heureusement par des évacuations critiques de bile? L'engorgement du foie, l'altération de ses fonctions se manifestent clairement sur le pouls. Les ictériques out assez constamment un pouls particulier remarquable par sa constriction, son resserrement, son obscurité; ce pouls devient plus marqué, & se développe un peu lorsqu'il se fait quelque mouvement critique dans le foie; ce pouls, comme les Chinois l'ont remarqué, est beaucoup plus sensible du côté droit que du côté gauche, remarque qui ne doit point être négligée. Ce pouls n'a ni dureté ni roideur; il est inégal, & cette inégalité consiste en ce que deux ou trois pulsations inégales entr'elles succedent à deux ou trois pulsations parfaitement égales & naturelles. Ce pouls pour être bien suivi, demande un observateur qui ait le tact fin & habitué: il est souvent composé avec l'intestinal; l'indication sûre qui naît de sa présence, est de favoriser cette crise par de bons apéritifs amers, résineux, hépatiques, fondans, & des purgatifs cholagogues, l'aloës, le savon, la rhubarbe, la scammonée, &c.

Les reins sont des especes de filtres qui laissent passer les urines sans presque aucun effort de leur part dans l'état de santé; mais lorsque les maladies se terminent par un flux critique d'urine, que les anciens ont appellé perirrhie, l'action des reins devient plus sensible: il n'est pas rare même alors de voir les reins douloureux; & cette action & la tendance générale des humeurs, & l'effort de toute la machine, se peignent sur le pouls, & se manifestent par les caracteres suivans: ce pouls, qu'on pourroit appeller rénal ou urinaire, a beaucoup de rapport au pouls intestinal: il a comme lui ses pulsations inégales; mais il y a dans cette inégalité une sorte de régularité qui manque au pouls intestinal; les pulsations vont en diminuant jusqu'à se perdre sous le doigt; leur diminution est graduée, & elles suivent aussi la même gradation, le même ordre en remontant. Les pulsations qui se font dans ces intervalles sont plus développées, assez égales, & un peu sautillantes; enfin il semble, & cela est très - remarquable, que ce pouls soit l'inverse de celui de la sueur. On voit par - là que c'est le

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