ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"230"> ladies, plus d'application à la pratique journaliere: toutes ces choses ne sont qu'indiquées, elles auroient dû être décidées. Ces défauts sans doute très - essentiels se trouvent suppléés dans un excellent ouvrage de M. Michel, médecin de Montpellier, qui a pour titre: nouvelles observations sur le pouls par rapport aux crises, à Paris, chez Debure 1757. Cet auteur, plus attentif a rendre hommage à la vérité, que soucieux des impressions fâcheuses que peut faire son éclat peu ménagé sur l'esprit de certaines gens qui ne sont pas accoutumés à la voir, propose avec cette noble fermeté que peut seule donner la conscience du vrai, ses observations, ses idées; il déduit ouvertement les conséquences qui en résultent, & démontre par des faits combien le système de pratique fondé sur la doctrine du pouls de M. Bordeu devient simple, solide & infiniment plus sûr que tous ceux qui ont été en vogue, ou qui y sont aujourd'hui; il fait sentir la différence extrème qui se tr uve entre une doctrine dictée par la nature même, & les différentes opinions que le caprice, la fantaisie ou la mode ont fait adopter. Nous allons maintenant exposer cette doctrine. Nous n'avons pas cru ces détails historiques déplacés. Lorsqu'il s'agit d'une découverte sur - tout précieuse à l'humanité, on ne sauroit être assez attentif à en bien fixer les auteurs, les dates, les époques & les progrès.

On ne doit pas s'attendre que dans cet exposé nous puissions nous asservir à l'ordre que nous avons suivi jusqu'ici; la collection des faits n'est que très - difficilement susceptible d'extraits; elle est souvent irréguliere, & ne sauroit se prêter à une distribution méthodique, différente en cela des systèmes qu'enfante l'imagination où toutes les idées se lient, s'enchaînent & se soutiennent mutuellement, où elles naissent les unes des autres avec plus ou moins d'ordre, de facilité & de vraissemblance, suivant le génie & l'habileté du compositeur. Rien n'arrête l'historien hardi, que les bornes de son imagination; l'observateur est asservi à la nature, il ne peut s'en écarter sans cesser dêtre vrai. Voyez Observateur. La doctrine de M. Bordeu est dans ce cas à l'égard du système de Galien; cet ancien médecin a établi d'idée la plûpart de ses différences. On les voit se multiplier en naissant successivement les unes des autres; les présages en sont déduits avec le même ordre. Dans la nouvelle doctrine les présages sont antérieurs & aux dénominations, & aux caracteres; ce sont eux qui les ont fixés, qui en sont l'origine & le fondement. Par exemple, un pouls n'est appellé pectoral, que lorsqu'on l'a vu plusieurs fois présent avant & pendant le cours des excrétions critiques de la poitrine. Ce n'est qu'après le même genre d'observations qu'on a décidé qu'il consistoit dans la mollesse, la plénitude, la dilatation, & une espece de rebondissement des pulsations. Ce que nous allons dire n'étant que l'extrait d'un grand nombre d'observations semblables, nous sommes obligés de parler, sous le même article, des différences & des présages qu'on tire par le pouls.

Différence & présage du pouls. L'auteur a retenu quelques différences observées par Galien & Solano qu'il a cependant rectifiées, il a découvert plusieurs caracteres qui leur avoient échappés, il s'est sur - tout appliqué à déterminer la valeur & la signification de ces modifications, ou qu'on n'avoit pas saisie avant lui, ou dont on n'avoit pas songé à tirer avantage, les regardant comme des variations bisarres & sans conséquence, & il est parvenu à ce point en comparant soigneusement, d'après une observation scrupuleuse, la marche, les phénomenes, & les évenemens des maladies livrées à elles - mêmes, ou traitées suivant les préceptes de l'art avec toutes les modifications critiques du pouls observées pendant les différens tems, les différens degrés, & les diverses tour<cb-> nures de ces maladies. Il a tâché d'éviter en évaluant les caracteres du pouls, cet inconvénient dans lequel sont tombés Galien & les modernes, de se servir des modifications vagues, indéterminées que l'on ne peut connoître sûrement sans les rapporter à quelque autre, même souvent fautive; il a fait ensorte que chaque observateur pût connoître les caracteres distinctifs de chaque pouls sans être obligé de faire aucune comparaison avec des objets peu connus, éloignés, ou mal déterminés. Il les a établis le plus souvent sur l'égalité & l'inégalité des pulsations, l'égalité & l'inégalité des intervalles qui se trouvent entre elles, modifications fort aisées à saisir sans que l'esprit soit distrait & fatigué à chercher des mesures pour les évaluer: il n'a pas pû s'empêcher d'employer quelquefois la mollesse, la grandeur, la dureté, la petitesse, modifications relatives que l'habitude sur - tout apprend à bien déterminer. Il en est de même de la fréquence & de la rareté qu'on peut connoître sans le secours d'un pendule ou d'un pulsiloge, chacun doit l'avoir au bout des doigts. Les observations de M. de Senac ne laissent rien à desirer sur cette partie, elles font connoître la plus grande & moindre fréquence dans l'état naturel & contre nature; le lecteur peut consulter le traité du coeur, ouvrage immortel de ce grand homme, nous conseillons sur - tout d'en voir la seconde édition, qui contiendra bien des choses relatives à la doctrine que nous exposons; nous regrettons beaucoup de ne pouvoir y puiser de nouvelles lumieres dans le tems que nous écrivons, elle est encore sous presse, l'auteur a déjà fait des observations qui confirment celles de Solano, & qui constatent la valeur du pouls dans la prédiction des crises. Il en a rendu compte dans une dissertation sur les crises. A Paris, chez Prault fils, 1752. M. Bordeu pour désigner les pouls qu'il a observés, s'est servi d'une nomenclature particuliere, qu'il a étendue même à ceux que Solano & Galien lui ont fournis, moins pour déguiser ou rapporter sous d'autres termes ce qui dans le fond se trouve dans d'autres ouvrages, que pour conserver une uniformité utile & nécessaire, il a tiré ces noms de l'anatomie, de la situation ou de l'usage des parties dont le pouls indique l'action excrétoire; ces dénominations sont d'autant plus appropriées qu'elles dénotent la marche de la nature dans chaque pouls.

Pour juger & connoitre les différentes especes de pouls, pour déterminer combien leur état est contre nature, il faut établir un pouls qui serve de point fixe & de mesure constante; ce pouls naturel se trouve chez un très - petit nombre d'adultes jouissant d'une santé robuste & bien constitués de tout point; on l'observe chez eux égal, mollet, souple, libre, point fréquent, point lent, sans paroître faire aucune sorte d'effort, ses pulsations se ressemblent parfaitement, elles sont à des distances parfaitement égales. Les altérations que la machine éprouve par le sommeil, les veilles, la digestion, les passions, quelque effort, quelque légere douleur, &c. se transmettent aussitôt au pouls & en troublent l'harmonie; les âges apportent aussi beaucoup de différence dans le pouls; dans les enfans & les vieillards il s'éloigne également de ce milieu. Celui des premiers est vif, serré, précipité; à mesure qu'ils grandissent leur pouls se dilate, se ralentit, acquiert du corps & de l'aisance, jusqu'à ce qu'il soit parvenu à ce degré de maturité & de consistance qui caractérise le pouls des adultes; dès que cet âge est passé, le pouls en perd les qualités, il devient moins souple, moins vigoureux, moins libre, il se durcit, se resserre, s'embarrasse, s'éteint. Le pouls naturel des femmes est en général plus vif, plus rapproché de celui des enfans & de la jeunesse que celui des hommes, il a ses degrés particuliers, sa jeunesse, son âge moyen & sa vieillesse; du - reste, [p. 231] il varie suivant les différentes situations où elles se trouvent, même dans l'état de santé; les tempéramens font varier le pouls, ils consistent dans une espece de dérangement habituel non maladif, très nécessaire dans tel âge, tel sexe, tel tempérament, & de façon que les variations du pouls occasionnées parlà sont très - naturelles; & si dans tous ces cas le pouls prenoit le caractere de celui des adultes, il seroit contre nature & un très - mauvais signe: n'auroit - on pas bien lieu de craindre pour la constitution d'un enfant, par exemple, dont le pouls seroit aussi formé que celui d'un adulte?

Les dérangemens du pouls sont beaucoup plus sensibles dans les maladies, & sur - tout dans les aiguës ou fébriles; ces maladies sont analogues au travail de la digestion, ou de quelque excrétion difficile, ne sont autre chose qu'un effort plus considérable de la nature, c'est - à - dire du sang & des vaisseaux, pour rappeller ou suppléer une évacuation suspendue ou dérangée, & dépurer le sang qui a été altéré. On peut y distinguer trois tems tres - bien connus par les anciens sous le nom de crudité, de coction, & de crise, qui répondent à ceux que l'auteur appelle d'irritation, de coction, & d'excrétion. Ces trois tems sont très - distincts dans les maladies simples, ils sont plus ou moins longs, & se confondent diversement dans les maladies graves & compliquées. Le premier tems n'est, pour ainsi - dire, que l'appareil de tous les symptomes essentiels dans lesquels toutes les forces du corps se concentrent & se rassemblent, il est marqué par un état de spasme & d'irritation; le pouls est constamment alors vif, serré, convulsif, non critique, dur, sec, & pressé; on appelle ce pouls, pouls d'irritation, nerveux, convulsif, non critique, &c. Cette révolution a sa crue, sa gradation jusqu'à l'établissement complet de la maladie; alors commence une seconde révolution qui n'est que la détermina tion des forces, ou le méchanisme qui sert à préparer la crise, les forces concentrées commencent à se développer, les humeurs sont alterées & rendues propres à être séparées; les organes qui doivent y servir éprouvent un changement remarquable; dans ces circonstances le pouls se dilate, se developpe sensiblement, il devient plus plein, plus sort & plus libre, mais sans aucune détermination particuliere & susceptible de les recevoir toutes indifféremment; on l'appelle simplement pouls développé. Cette révolution dure jusqu'au troisieme tems où les humeurs préparées & les organes bien disposés obéissent au dernier effort qui fait la crise, détermine les excrétions & finit la maladie; le pouls prend alors un caractere particulier qui varie suivant le couloir par lequel se doit faire l'excrétion critique.

Le pouls d'irritation n'est point par conséquent un mauvais signe au commencement des maladies, c'en est un caractere essentiel, mais il ne doit pas durer trop long - tems; tant qu'il persiste il ne se fait aucune excrétion salutaire, il accompagne la maladie jusqu'à la fin, quand elle a une issue peu favorable ou qu'elle laisse après elle des convalescences pénibles. Il est entretenu dans cet état par la gravité de la maladie, la variété, la violence & l'anomalie des symptomes, & plus souvent encore par l'inopportunité des remedes; ce pouls a peu de variétés, ou pour mieux dire, elles ne sont pas encore connues ou détaillées; le pouls développé a toujours à - peu - près les mêmes caracteres; il peut être plus ou moins décidé; il est toujours de bon augure.

Le pouls critique est toujours accompagné & précédé du pouls développé, il emporte & fait cesser son indifférentisme, il n'est proprement que ce pouls auquel la modification critique est sur - ajoutée. Ce pouls paroît sur la fin des maladies; sa présence indique la fin du combat, la victoire de la nature, & la déroute des ennemis, pour me servir des termes allégoriques mais expressifs des anciens, il manifeste à l'observateur éclairé le couloir que la nature affecte, qu'elle choisit pour l'excrétion des mauvaises humeurs; mais comme il y a différens couloirs, il y a de même différens pouls critiques; l'auteur, d'après Hippocrate, établit une division des maladies par rapport à leur siége au - dessous ou au - dessus du diaphragme; outre les symptomes qui distinguent très - clairement ces maladies, il a observé des différences très - marquées entre le pouls des maladies dans lesquelles les évacuations critiques se font par les organes situés au - dessous du diaphragme, & celui des maladies dont les excrétions se font par des organes placés au - dessus. De cette observation lumineuse est née cette division générale du poals critique en supérteur & inférieur. Leurs noms indiquent leur signification; le pouls supérieur est sur - tout remarquable par une reduplication précipitée dans les pulsations; cette reduplication ne paroît être que le fond d'une seule pulsation partagée en deux tems & en deux pulsations. On pourroit comparer cette dilatation qui se fait par un double effort, à l'effet d'un piston qui pousseroit une liqueur dans un cylindre élastique, de maniere que le second jet n'attendît pas que le premier se fût répandu dans le vaisseau. On a appellé aussi en conséquence ce pouls, rebondissant & redoublé; c'est proprement le dicrote de Galien. Le caractere principal du pouls inférieur se tire de l'irrégularité des pulsations qui sont inégales entre elles, en plénitude, en dilatation, & en force, & qui se succedent à des intervalles plus ou moins inégaux, quelquefois elles forment des intermittences parfaites.

Comme il y a plusieurs organes sujets aux évacuations critiques, au - dessus & au - dessous du diaphragme, il y a aussi plusieurs especes de pouls, supérieurs & inférieurs, qui ont tous, outre le caractere général propre à leur classe, des caracteres particuliers qui les distinguent les uns des autres; cette multiplicité d'organes donne lieu à d'autres divisions; car il peut se faire qu'un seul organe travaille à l'excrétion, alors le pouls n'est modifié que par ce seul effort, & il est critique simple, si la maladie se juge par différentes excrétions, l'action simultanée des différens organes qui y concourent fera autant d'impression sur le pouls; les caracteres propres à chaque couloir combinés, forment le pouls qu'on appelle critique composé, qu'il ne faut pas confondre avec le pouls compliqué qu'on observe lorsque la crise n'est point parfaite & qu'elle est contrariée par l'état d'irritation subsistant; alors le pouls est critique & non critique en même tems.

Trois principaux couloirs situés au - dessus du diaphragme servent aux excrétions critiques; les poumons, la gorge, & le nez; on compte aussi autant de pouls superieurs critiques simples relatifs à chacun de ces couloirs, savoir le pouls pectoral, guttural & nasal.

Les caracteres distinctifs du pouls pectoral simple bien décidé sont les suivans: « il est mol, plein, dilaté, ses pulsations sont égales, on sent dans chacune une espece d'ondulation, c'est - à - dire que la dilatation de l'artere se fait en deux fois, mais avec une aisance, une mollesse, & une douce force d'oscillation qui ne permet pas de confondre cette espece de pouls avec les autres ». On observe pour l'ordinaire ce pouls à la fin des fluxions de poitrine, des pleurésies, &c. lorsque la nature n'a point été gênée ou détournée; l'expectoration est la crise la plus ordinaire, la plus sûre dans les maladies, elle arrive aussi quelquefois dans d'autres où la poitrine ne paroît du - tout point affectée; ce couloir est plus général qu'on ne pense communément; il est d'une extrème importance de faire faire attention au pouls qui indique cette crise, parce qu'elle se dérange fa<pb->

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