ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"925"> [p. 926] La quatrieme qui commence à Henri de Valois, forme une classe à part, parce que la couronne y a passé d'une maison à une autre, sans se fixer dans aucune.

La succession dans les quatre classes montre des singularités, dont quelques - unes méritent d'ètre connues.

L'an 750 les Polonois n'avoient pas encore examiné si une femme pouvoit commander à des hommes; il y avoit long - tems que l'Orient avoit décidé que la femme est née pour obéir. Venda regna pourtant & glorieusement; la loi ou l'usage salique de la France fut ensuite adopté par la Pologne; car les deux reines qu'on y a vûes depuis Venda, savoir, Hedwige en 1382 & Anne Jagellon en 1575, ne monterent sur le trône, qu'en acceptant les époux qu'on leur désigna pour les soutenir dans un poste si élevé. Anne Jagellon avoit soixante ans, lorsqu'elle fut élûe. Etienne Battori, qui l'épousa pour régner, pensa qu'une reine étoit toujours jeune.

Des siecles antérieurs avoient ouvert d'autres chemins à la souveraineté. En 804, les Polonois surent embarrassés pour le choix d'un maître; ils proposerent leur couronne à la course: pratique autrefois connue dans la Grece, & qui ne leur parut pas plus singuliere, que de la donner à la naissance. Un jeune homme nourri dans l'obscurité la gagna, & il prit le nom de Lesko II. Les chroniques du tems nous apprennent qu'il conserva sous la pourpre, la modestie & la douceur de sa premiere fortune; fier seulement & plein d'audace lorsqu'il avoit les armes à la main.

Presque tous les polonois soutiennent que leur royaume fut toujours électif: cette question les intéresse peu, puisqu'ils jouissent. Si on vouloit la décider par une suite de faits pendant six ou sept siecles, on la décideroit contre eux, en montrant que la couronne dans les deux premieres classes, a passé constamment des peres aux enfans; excepté dans les cas d'une entiere extinction de la maison regnante. Si les Polonois alors avoient pû choisir leurs princes, ils auroient pris parmi leurs palatins des sages tout decidés.

Les eût - on vu aller chercher un moine dans le fond d'un cloître, pour le porter sur le trône, uniquement parce qu'il étoit du sang de Piast? Ce fut Casimir I. fils d'un pere détesté, Miecislaw II. & d'une mere encore plus exécrable. Veuve & régente, elle avoit fui avec son sils; on le cher cha cinq ans après pour le couronner: la France l'avoit reçû. Les ambassadeurs polonois le trouverent sous le froc dans l'abbaye de Clugny, où il étoit profes & diacre. Cette vue les tint d'abord en suspens: ils craignirent que son ame ne fût flétrie sous la cendre & le cilice; mais faisant réflexion qu'il étoit du sang royal, & qu'un roi quelconque etoit préférable à l'interregne qui les désoloit, ils remplirent leur ambassade. Un obstacle arrêtoit; Casimir étoit lié par des vux & par les ordres sacrés; le pape Clément II. trancha le noeud, & le cénobite fut roi. Ce n'est qu'à la fin de la seconde classe, que le droit héréditaire périt pour faire place à l'élection.

Le gouvernement a eu aussi ses révolutions: il fut d'abord absolu entre les mains de Leck, peut - être trop: la nation sentit ses forces, & secoua le joug d'un seul; elle partagea l'autorité entre des vaivodes ou généraux d'armée, dans le dessein de l'affoiblir. Ces vaivodes assis sur les débris du trône, les rassemblerent pour en former douze, qui venant à se heurter les uns les autres, ébranlerent l'état jusque dans ses fondemens. Ce ne fut plus que révoltes, factions, oppression, violence. L'état dans ces terribles secousses, regretta le gouvernement d'un seul, sans trop penser à ce qu'il en avoit souffert: mais les plus sensés chercherent un homme qui sût regner sur un peuple libre, en écartant la licence. Cet homme se trouva dans la personne de Cracus, qui donna son nom à la ville de Cracovie, en la fondant au commencement du septieme siecle.

L'extinction de sa postérité dès la premiere génération, remit le sceptre entre les mains de la nation, qui ne sachant à qui le confier, recourut aux vaivodes qu'elle avoit proscrits. Ceux - ci comblerent les desordres des premiers; & cette aristocratie mal constituée ne montra que du trouble & de la foiblesse.

Au milieu de cette confusion, un homme sans nom & sans crédit, pensoit à sauver sa patrie: il attira les Hongrois dans un défilé où ils périrent presque tous. Pr?émillas (c'est ainsi qu'on le nommoit) devint en un jour l'idole du peuple; & ce peuple sauvage qui ne connoissoit encore d'autres titres à la couronne que les vertus, la placa sur la tête de son libérateur, qui la soutint avec autant de bonheur que de gloire, sous le nom de Lesko I. dans le huitieme siecle.

Ce rétablissement du pouvoir absolu ne dura pas long - tems, sans éprouver une nouvelle secousse. Popiel II. le quatrieme duc depuis Przémislas, mérita par ses crimes d'être le dernier de sa race; l'anarchie succéda, & les concurrens au trone s'assemblerent à Kruswic, bourgade dans la Cujavie. Un habitant du lieu les reçut dans une maison rustique, leur servit un repas frugal, leur montra un jugement sain, un coeur droit & compatissant, des lumieres au - dessus de sa condition, une ame ferme, un amour de la patrie, que ces furieux ne connoissoient pas. Des ambitieux qui desesperent de commander, aiment mieux se soumettre à un tiers qui n'a rien disputé, que d'obéir à un rival. Ils se déterminerent pour la vertu; & par - là ils reparerent en quelque sorte tous les maux qu'ils avoient saits pour parvenir au trone; Piast regna donc au neuvieme siecle.

Les princes de sa maison, en se succédant les uns aux autres, affermissoient leur autorité; elle parut même devenir plus absolue entre les mains de Boleslas I. dans le dixieme siecle. Jusqu'à lui les souverains de Pologne, n'avoient eu que le titre de duc: deux puissances se disputoient alors le pouvoir de faire des rois, l'empereur, & le pape. A examiner l'indépendance des nations les unes des autres, ce n'est qu'à elles - mêmes à titrer leurs chefs. Le pape échoua dans sa prétention: ce fut l'empereur Othon III. qui touche des vertus de Boleslas, le revétit de la royauté, en traversant la Pologne.

On n'auroit jamais cru qu'avec cet instrument du pouvoir arbitraire (un diplome de royauté, donné par un étranger), le premier roi de Pologne eût jetré les premieres semences du gouvernement républicain. Cependant ce héros, après avoir eu l'honneur de se signaler par des conquêtes, & la gloire bien plus grande d'en gémir, semblable à Servius Tullius, eut le courage de borner lui - même son pouvoir, en établissant un conseil de douze sénateurs, qui pût l'empêcher d'être injuste.

La nation qui avoit toujours obéi en regardant du côté de la liberté, en apperçut avec plaisir la premiere image: ce conseil pouvoit devenir un senat. Nous avons vu que dès les commencemens elle avoit quitté le gouvernement d'un seul pour se consier à douze vaivodes. Cette idée passagere de république ne l'avoit jamais abandonnée; & quoique ses princes, après son retour à sa premiere constitution, se succédassent les uns aux autres par le droit du sang, elle restoit toujours persuadée qu'il étoit des cas où elle pouvoit reprendre sa couronne. Elle essaya son pouvoir sur Miecislaw III. prince cruel, fourbe, avare, inventeur de nouveaux impôts: elle le déposa. Ces dépositions se renouvellerent plus d'une fois; Uladislas Laskonogi, Uladislas Loketek, se vi<pb->

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