ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"775"> de fusibilité du plomb sait qu'il perce très - aisement les creusets dans lesquels on le traite dans les fourneaux.

Lorsque le plomb a été mis dans l'état d'une chaux, on peut lui rendre sa forme métallique, ou réduire cette chaux, en lui joignant une matiere inflammable quelconque, telle que de la poudre de charbon, de la limaille de fer, du suif, du flux noir, &c.

Le plomb se dissout à l'air; il y perd son éclat & se ronge peu à peu; il s'y réduit en une poudre grisâtre; la même chose lui arrive dans l'eau. Si on fait bouillir ce métal dans de l'huile, il se fait une effervescence, & l'huile le dissout; cette dissolution fe fait plus promptement, si au lieu de plomb on prend de la litharge ou du minium, ou quelque autre chaux de ce metal; par ce moyen l'huile prend une consistence épaisse, qui sert de base à tous les emplâtres de la Pharmacie. Cette huile est aussi d'un grand usage dans la peinture, où l'on emploie de l'huile de lin épaissie par l'ébullition avec la litharge.

Le plomb se dissout dans le vinaigre. Si on fait bouillir du vinaigre, & que l'on y jette de la litharge, elle s'y dissout avec esservescence, & il se précipite une poudre blanche, qui est un sel insoluble, & suivant M. Rouelle, demande 800 parties d'eau pour être mis en dissolution. Si on filtre la liqueur qui surnage à cette poudre, & qu'on la fasse évaporer, on aura un sel en crystaux que l'on appelle sucre de Saturne.

Des lames de plomb exposées à la vapeur acide du vin aigri que l'on a mis sur des grappes de raisin, se convertissent en une poudre blanche que l'on nomme ceruse. Les peintres sont usage de cette substance qui est un vrai seul neutre; mais cette couleur est sujette à varier avec le tems, & à se gâter.

Si l'on verse de l'alkali fixe sur une dissolution de sucre de saturne, il se sera un précipité que l'on nomme magistere de saturne.

C'est sur la facilité avec laquelle le plomb se dissout dans l'acide du vin, qu'est fondé le secret funeste que mettent en pratique un grand nombre de marchands de vin pour adoucir les vins qu'ilsvoyent tirer à l'aigre; souvent ils remédient à cet inconvénient en y mettant de la litharge. De plus les cabaretiers distribuent ordinairement le vin dans des vaisseaux l'un étain allié avec beaucoup de plomb; ils font aussi doubler d'une lame de plomb les comptoirs sur lesquels ils mesurent leur vin; par ce moyen ils distribuent au peuple un poison lent, qui peu à peu détruit entierement sa santé. Ces sortes de pratiques devroient être rigoureusement défendues; & les contrevenans mériteroient d'être traités comme des empoisonneurs publics contre qui le gouvernement ne sauroit sévir avec assez de rigueur. En Allemagne, & surtout sur les bords du Rhin où il croît des vins assez acides, il y a peine de mort contre ceux qui adoucissent & falsisient les vins avec du plomb & de la litharge. En effet le plomb, surtout quandil est dissout, est un poison très - vif, & aucunes de ses préparations ne peuvent être prises innocemment; elles occasionnent des coliques très - dangereuses & très - doulourenses, des tremblemens dans les nerfs, & souvent la mort. Pour reconnoître si du vin a été falfifié par du plomb ou par de la litharge, on n'a qu'à y verser quelques gouttes de la dissolution du foie de soufre arsénical, ou ce qu'on appelle de l'encre de sympathie. C'est une liqueur faite avec une partie d'orpiment & deux parties de chaux vive sur lesquels on verse cinq ou six parties d'eau bouillante. Voyez Orpiment. Pour peu qu'on verse de cette liqueur dans du vin qui a été frelaté avec de la litharge ou du plomb, il deviendra noir; s'il n'en contient point, il restera rouge, & ne fera que se troubler.

L'acide nitreux agit aussi sur le plomb; mais il faut que cet acide soit étendu dans beaucoup d'eau; on fait chauffer le mélange; il se fait une légere effervescence; en faisant évaporer cette dissolution, on obtient des crystaux en pyramides tronquées. Ces crystaux distillés à grand feu dans les vaisseaux fermés font une détonation très - vive & très - dangereuse pour celui qui opere, comme Kunckel l'a éprouvé. Quelques chimistes ont prétendu que ce sel formé par la combinaison de l'acide nitreux & du plomb fournit un moyen de tirer le mercure de ce métal. Glauber fait cette mercurification, en joignant beaucoup de sel alkali & de la chaux vive à ce sel nitreux uni au plomb; il distille ensuite, & dit d'avoir obtenu de cette façon quelques gouttes de mercure coulant. M. Grosse de l'académie des Sciences a prétendu tirer le mercure du plomb par un autre moyen; mais M. Rouelle regarde avec raison son procédé comme suspect.

L'acide du sel marin versé sur du plomb divisé en petits morceaux le dissout avec effervescence, & il s'éleve beaucoup de vapeurs blanches. Si on met ce mêlange en distillation dans une cornue au bain de sable, l'acide du sel marin s'élévera, & entraînera avec lui le plomb, sous la forme d'une matiere épaisse que l'on appelle le plomb corné ou le beurre de saturne. C'est un vrai sel qui, si on le fait fondre, se change en une matiere semblable à de la corne.

En faisant bouillir du plomb dans de l'acide vitriolique, ce métal en sera dissout. On peut aussi combiner le plomb avec l'acide vitriolique d'une maniere plus simple, il n'y a pour cela qu'à verser cet acide sur du sel ou du sucre de saturne, il chassera l'acide du vinaigre, & s'unira en sa place avec le plomb.

Le plomb s'unittrès - aisément avec le mercure. C'est pour cette raison que quelques marchands se servent de plomb pour falsifier le mercure; si l'on joint du bismuth à cet amalgame, il devient plus fluide, au point de passer avec le mercure au - travers d'une peau de chamoi. Voyez Mercure. On sent que le mercure ainsi falsifié peut avoir des mauvaises qualités que le plomb lui communique.

Telles sont les propriétés que la Chimie découvre dans le plomb; de toutes ses qualités M. Rouelle en conclud avec beaucoup de vraissemblance que ce métal approche beaucoup de la nature des sels, par la facilité avec laquelle il se dissout, par sa fusibilité, par sa volatilité & par sa vitrification.

Plusieurs chimistes ont regardé le plomb comme de l'argent qui n'étoit point encore parvenu à maturité; ils se sont fondés sur l'affinité singuliere qui se trouve entre ces deux métaux; en effet il y a presque toujours de l'argent dans les mines de plomb; & d'ailleurs le plomb se charge dans la fusion de l'argent qui est joint à d'autres métaux; mais ce qui semble encore plus fortifier cette conjecture, c'est que toutes les fois qu'on passe du plomb à la coupelle, on en obtient de nouvel argent: phénomène qui est constaté par une infinité d'expériences.

Quant à l'idée de ceux qui prétendent que le plomb dont quelques édifices & quelques églises sont couverts, se convertit à la fin en argent, après avoir été long - tems exposé à l'air, elle n'est nullement fondée: ce qui peut y a voir donné lieu, c'est que dans les tems auxquels on a employé ce plomb, l'on ne savoit point dégager l'argent de ce métal avec autant d'exactitude qu'aujourd'hui, & l'on y laissoit celui qui y étoit contenu, soit parce qu'on ignoroit qu'il en contînt, soit parce qu'on ne savoit pas la maniere de l'en séparer.

On a déja fait remarquer dans le cours de cet article, que le plomb étoit un poison très - violent. Il fait sentir ses mauvaises qualités non - seulement quand il est mis en dissolution dans quelque acide, mais encore sa vapeur est très - nuisible, comme on peut en juger par les maladies auxquelles sont exposés ceux [p. 776] quitravaillent ce métal. En effet les ouvriers qui travaillent dans les fonderies de plomb, sont sujets à des coliques spasmodiques très - violentes, & accompagnées de douleurs insupportables. Les Allemans nomment cette maladie huiten - katse, ce qui signifie le chat des fonderies. Les plombiers qui fondent du plomb, & les peintres qui emploient beaucoup de ceruse parmi leurs couleurs, sont sujets à la même maladie que l'on nomme en France colique des plombiers ou colique des peintres. Les Anglois nomment cette maladie millreek. En voici les symptomes; elle commence par une pesanteur sur l'estomach, & quelquefois par une colique vive dans les intestins; les malades sentent un goût douçâtre dans la bouche, leur pouls est foible, leurs jambes s'affoiblissent & sont comme engourdies, ils éprouvent des lassitudes par tout le corps; l'appétit se perd, les digestions se font mal; quelquefois il survient une diarrhée qui peut soulager le malade, pourvu qu'elle ne dure point trop long - tems. Si l'on ne remédie à ces premiers symptomes, le mal augmente; on sent une douleur fixe dans l'estomac & les intestins, surtout dans la partie inférieure de l'abdomen. On est fortement resserré, on sent ses entrailles comme déchirées, le pouls devient très - vif, la peau est brûlante, il survient un grand mal de tête accompagné d'un délire qui est suivi de tremblemens, de convulsions & d'une espece de fureur qui fait que les malades se dechirent & se mordent aux bras & aux mains; le pouls devient intermittent, & ils meurent dans une espece de coma ou d'apoplexie.

On attribue avec raison cette funeste maladie à la fumée du plomb que le teu en dégage; c'est une vraie chaux de plomb que les ouvriers respirent perpétuellement, & qui est portée dans l'estomac & les intestins, où elle ne trouve que trop d'acides propres à la dissoudre & à lui donner de l'activité. On assure que cette vapeur n'est pas moins funeste aux animaux. On dit que les oiseaux qui traversent la fumée des fonderies de plomb, tombent morts; les bestiaux & les troupeaux ne peuvent paître sans danger dans les prairies du voisinage sur lesquelles retombe cette sumée pernicieuse; les eaux mêmes des environs en sont empoisonnées, & les chiens qui en boivent ont des symptomes de la rage.

Pour se garantir d'une maladie si terrible, il faut surtout que les ouvriers qui s'occupent de ces travaux dangereux, s'abstiennent soigneusement de nourritures acides & vinaigrées, de salines, &c. ainsi que d'excès dans le vin & dans les liqueurs fortes. Il est à propos qu'ils ne travaillent jamais à jeun, qu'ils fassent usage de beurre, de laitage, & d'alimens gras.

Lorsqu'ils seront attaqués de cette maladie, il faudra sans délai leur faire prendre des vomitifs très violens pour évacuer les premieres voies. On pourra encore appaiser les coliques des intestins en leur appliquant des fomentations sur le ventre. Il reste quelquefois long - tems après la cure, des douleurs dans les jambes semblables à celles que causent les rhumatismes; on pourrales faire passer au moy en de l'exercice du cheval.

C'est vraisemblablement au plomb qu'il faut attribuer beaucoup de coliques & de maladies dont souvent on se trouve attaqué, sans en deviner la cause. En effet la plûpart de nos alimens sont préparés dans des casseroles de cuivre qui sont déja dangereuses par elles - mêmes. Voyez Cuivre. Pour se garantir de ces dangers, on les étame, c'est - à - dire, qu'on double le cuivre avec de l'étain, qui est communément s lsifié & mêlé avec une grande quantité de plomb. Les graisses, les sels, le vinaigre, &c. agissent sur ce plomb, & font qu'il s'en mêle une portion dans nos alimens. Le même danger subsiste pour les poteries de terre vernissées; en effet le vernis ou la couverte dont on les enduit par dedans & par dehors, est un véritable verre de plomb, sur lequel le vin, le vinaigre & les acides peuvent agir; par là on travaille peu à peu à se détruire. ( - )

Plomb (Page 12:776)

Plomb, (Pharmac. & Mat. médic.) la premiere considération médicale sur ce métal doit se déduire d'une de ses propriétés chimistes; savoir, de sa dissolubilité par les acides, par les all alis & par les huiles, voyez Plomb, Chimie; en sorte que toutes les substances salines, à l'exception des sels parfaitement neutres, & les substances huileuses qui ont été enfermées dans des vaisseaux de plomb, doivent toujours être soupçonnées contenir quelques particules de ce métal. Cependant il ne faudroit pas en inférer que l'eau de fontaine ou de riviere qu'on garde dans des reservoirs de plomb, ou qui coulent à - travers des conduits de ce métal pour servir aux usages économiques, soit altérée par cette imprégnation; car l'eau commune ne contient aucun acide, aucun alkali salin nud; & en supposant même qu'elle fùt chargée d'un pareil menstrue, la croûte de terre seleniteuse quine tarderoit pas à se former dans l'intérieur de ces conduits ou reservoirs, préserveroit l'eau contre un pareil accident.

Les sels parfaitement neutres qu'on prépare dans des chaudieres de plomb, comme l'alun, dont la préparation est la même dans presque tous les pays, la cuite du sel marin qui se fait au feu artificiel sur les côtes de la Bretagne & autres contrées maritimes, ou l'air est humide & le ciel ordinairement nébuleux, les sels d'Ebsum & de Seidlitz, tous ces sels, dis - je, parfaitement neutres n'empruntent aucune qualité mal - faisante de ces chaudieres de plomb, n'en détachent & n'en entraînent rien.

Les différens produits du plomb employés le plus communément en Médecine, sont la chaux jaunâtre de plomb ou massicot, la chaux rouge ou minium, la chaux à - demi vitrifiée ou la litarge, qu'on divise mal - à - propos en litarge d'or & litarge d'argent, attendu que la premiere n'est pas un produit de l'affinage de l'or, ni la seconde un produit constant de l'affinage de l'argent, & qu'enfin elles ne different point essentiellement entr'elles; le verre de plomb, les sels neutres préparés avec les acides végétaux & le plomb, le sel imparfait qui provient de l'acide du vinaigre, & qu'on appelle céruse, ou suivant quelques auteurs, & comme on le trouve dans la pharmacopée de Paris, plomb blanc, dénomination équivoque, puisqu'elle désigne ordinairement l'étain; le sel neutre parfait, autrement appellé sucre ou sel de Saturne, qu'on retire des acides végétaux quelconques fermentes, & dont la propriété spéciale, de même que celle du sel formé du plomb & de l'acide nitreux, est d'avoir une saveur douce singuliere, suivie d'un arriere goût austere - stiptique; les magisteres ou précipités de ces divers sels, un baume résultant d'une dissolution dans les huile éthérées du plomb, soit dans son integrité, soit calciné, ou du sucre de Saturne, enfin différentes chaux de plomb unies par une véritable mixtion à des huiles grasses, fournissent à la Médecine des emplâtres simples, & les bases de plusieurs emplâtres composés: on peut mettre encore au nombre des médicamens retirés du plomb, le blanc rhasis, qui est un composé de cire & d'huile par expression, & de céruse, & le nutritum commun, qui se prépare avec du vinaigre de Saturne & l'huile d'olive.

Les remedes qu'on tire du plomb pour les employer à l'extérieur, sont vantés par les vertus suivantes: ceux qui sont sous forme de poudre, entr'autres le minium & la céruse, & les emplâtres préparés avec ces dernieres substances, ont une vertu dessicative, vulnéraire, discussive, absorbante; l'acide ou le sucre de Saturne, soit en lotion, soit employé dans les onguens, a une qualité repercursive, tonique, ra<pb->

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