ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"773"> très - imparfait, d'un blanc bleuâtre fort brillant, lorsqu'il a été fraîchement coupé, mais qui devient d'un gris mat lorsqu'il est resté long - tems exposé à l'air; il est très - mou, & si tendre, qu'on peut aisément le tailler; c'est après l'or, le mercure & la platine, le corps le plus pesant de la nature; il n'est ni sonore ni élastique; il s'étend aisément sous le marteau, mais ses parties ont très - peu de ténacité; il se fond avec beaucoup de promptitude à un feu médiocre, & sa surface se couvre d'une espece de crasse ou de chaux; il se vitrisie avec beaucoup de facilité, & il a la propriété de changer pareillement en verre les autres métaux, à l'exception de l'or & de l'argent; il change aussi en verre les terres & les pierres avec qui on le mêle; l'air, l'eau, les huiles, les sels, en un mot, tous les dissolvans agissent sur lui.

Le plomb se trouve en différens états dans le sein de la terre. Les Minéralogistes ne sont point encore d'accord, pour savoir s'il se trouve du plomb vierge ou natif dans la nature, c'est - à - dire, si l'on rencontre ce métal tout pur & sans être minéralisé. On trouve à Massel, en Silésie, des grains & des masses de plomb, ductiles & malléables; ces grains sont recouverts d'une substance blanche, semblable à de la céruse, mais on soupconne que ce plomb a été porté par accident dans l'endroit où on le rencontre.

Quant aux mines de plomb, elles sont très - communes, & très - universellement répandues dans toutes les parties du monde. On les trouve ordinairement par filons suivis, qui sont plus riches à mesure qu'ils s'enfoncent plus profondément en terre; cependant on en rencontre aussi par masses détachées. La mine de plomb la plus ordinaire, est;

1°. La galene; c'est une mine de plomb composée d'un assemblage de cubes qui ont la couleur brillante du métal qu'ils renferment lorsqu'il est fraîchement coupé. Ces cubes sont composés de lames ou de feuillets luisans, placés les uns sur les autres, & faciles à distinguer lorsque les cubes sont grands. En effet, ces cubes varient pour la grandeur, & quelquefois ils sont si petits, que l'oeil ne peut point distinguer leur figure. Il y a même des mines de plomb composées de particules si fines, qu'elles ressemblent à du fer ou à de l'acier dans l'endroit de la fracture. Dans d'auttes ces particules sont disposées, de maniere que la mine paroit striée, ou par aiguilles. Les cubes dont la galene est composée, sont quelquefois si abondans en plomb, qu'on peut les couper avec un couteau. Dans toutes ces mines, le plomb est minéralisé avec le souffre; il y en a qui sont si riches, qu'elles donnent jusqu à 50, 60, & même 75 livres de plomb par quintal, mais elles ne sont point toutes, à beaucoup près, si chargées de métal. Ces mines de plomb ou galenes, contiennent plus ou moins d'argent. On a observé que celles qui sont composées de gros cubes, sont moins riches en argent, que celles qui sont en petites particules déliées; les premieres n'en donnent guere qu'une ou deux onces d'argent par quintal, tandis que les dernieres en donnent souvent le double, & même davantage. Parmi les mines de plomb d'Europe, on ne connoît que celle de Villach en Esclavonie qui ne contienne point d'argent.

2°. De la mine de plomb, quin'affecte point de figure réguliere, sa couleur est souvent la même que celle du plomb pur, & quelquefois elle est si tendre, qu'on peut la couper avec un couteau. Cette mine est composée de plomb minéralisé avec du soufre & de l'arsenic; elle est quelquefois très - riche, au point que, selon M. de Justi, on en a trouvé dans les mines du Hartz, qui donnoit 82, & jusqu'à 84 livres de plomb au quintal. Les Allemands appellent cette mine pleyschweif.

3°. La mine de plomb crystalisée; elle est ou verte, ou blanche; elle forme des groupes de crystaux oblongs, & prismatiques comme des sels; c'est l'arsenic qui met le plomb dans l'état où il est dans ces sortes de mines; elles contiennent une grande quantité de ce métal, & quelquefois jusqu'à 70 & 80 livres par quintal. M. de Justi croit que cette mine est une espece de sucre de saturne naturel, c'est - à - dire un plomb qui a été dissout par un acide, & crystallisé à la maniere des sels. Il conjecture que quelques - unes de ces mines ont pu aussi se former comme le plomb corné, c'est - à - dire, par une dissolution de plomb précipitée par le sel marin. Quoi qu'il en soit de ce sentiment, la mine de plomb crystallisée verte, est d'un verd plus ou moins vif, ses crystaux sont tantôt des prismes très - bien formés, tantôt ils sont moins apparens, & ressemblent à la mousse fine qui s'attache au pié des arbres; quelquefois elle est poreuse & remplie de creux commeune scorie. Cette mine est communément accompagnée d'une terre rougeâtre ou jaune, semblable à de l'ochre. A l'égard de la mine de plomb crystallisée blanche, elle est aussi formée par un assemblage de prismes blancs & luisans comme le gypse strié, ou comme l'asbeste. On trouve quelquefois ces crystaux blancs, mêlés avec les crystaux verds dont on vient de parler. Ces deux sortes de mines de plomb sont assez rares, & plus propres à orner les cabinets des curieux, qu'à être traitées pour en tirer le métal. Cependant on en trouve à Zschoppau & à Freyberg en Saxe, ainsi que dans quelques mines de Boheme & du Hartz. Quant à la mine de plomb verte, il y en a une grande quantité dans les mines du Brisgau, qui sont à peu de distance de Fribourg. Les Directeurs vendent cette mine aux potiers - de - terre, qui ne font que l'écraser pour en vernisser leurs poteries.

4°. La mine de plomb spathique; c'est une mine de plomb composée de lames ou de feuillets opaques, comme le spath, à qui elle ressemble beaucoup. Cependant elle en differe, en ce qu'elle ne fait point effervescence avec l'eau forte, comme fait le spath, qui est une pierre calcaire. Cette mine est ou blanche ou grise, ou jaunâtre; elle varie pour la figure & l'arrangement de ses feuillets; elle est plus pesante que le spath ordinaire.

5°. La terre de plomb, que l'on pourroit appeller céruse fossile. Elle ressemble à de la craie ou à de la marne; il y en a de blanche, de jaune, & de rouge; ces couleurs sont dûes vraissemblablement à de l'ochre avec qui cette terre est mêlée; on peut la reconnoître à son poids. Ces sortes de terres sont prodigieusement rares; on en a cependant trouvé à Johann - Georgen - Stadt en Misnie, ainsi qu'en Pologne & dans la basse Autriche. M. de Justi conjecture qu'elles ont été précipitées des eaux qui tenoient le plomb en dissolution par un sel alkali, vû que ces terres font effervescence avec les acides, mais cela pourroit venir des autres terres avec qui elles sont mêlées. Il paroit certain qu'elles ont été charriées & transportées par des eaux.

Outre cela la mine de plomb cubique ou la galene se trouve mêlée avec presque toutes les mines des autres métaux, dans lesquelles on voit souvent très sensiblement que la premiere est répandue. Quant aux pierres qui lu servent de matrice ou de miniere, c'est tantôt du quartz, tantôt du spath. Lazare Ercker parle d'un grais qui contenoit du plomb, ce qui paroit fort extraordinaire; peut - être étoit - ce une pierre de la nature du spath composée de petits grains.

A l'égard du traitement des mines de plomb, on commence par les piler & les laver; celles qui sont pures peuvent être portées au fourneau de fusion sans avoir été grillées; d'autres, sur - tout celles qui sont arsénicales & chargées de beaucoup de soufre, [p. 774] ou mêlées de substances étrangeres, exigent d'être grillées, & même quelquefois à plusieurs reprises, avant que d'être mises en fusion. Lorsque les mines de plomb ont été ainsi préparées, on les porte au fourneau de fusion. Ce fourneau est plus étroit que ceux qui servent à la fonte des mines de cuivre; on le dispose à l'ordinaire en le garnissant d'une brasque, c'est - à - dire d'un enduit de terre & de charbon pilés. Il en essentiel que ce fourneau soit construit de pierres solides & qui résistent au feu, parce que le plomb vitrifie aisément toutes les pierres. On échauffe pendant quelques heures le fourneau avec des charbons, pour achever de secher l'enduit dont il a été revêtu intérieurement. On arrange la tuyere de maniere qu'elle dirige le vent des soufflets horisontalement. Les choses ainsi disposées, on commence par charger le fourneau avec du charbon, ensuite on met alternativement des couches de minerai & de charbon; on y joint des scories fraîches des dernieres opérations, de la litharge, de la chaux de plomb, & des crasses qui ont été produites dans les fusions précédentes. Quand le fourneau est rempli, on l'allume & l'on fond durant neuf heures la premiere fois, & ensuite pendant six heures pour les fontes subséquentes; au bout de ce tems on laisse couler la matiere fondue par l'oeil du fourneau, c'est - à - dire par une ouverture qui est au bas de la partie antérieure du fourneau, & que l'on a tenue bouchée avec de la glaise pendant la fonte; cette matiere fondue est reçue dans le bassin concave qui est au pié du fourneau, & cette matiere est ce qu'on appelle la matte de plomb; c'est un mélange de plomb, de soufre, d'arsenic, d'argent, &c. en un mot de toutes les substances qui étoient contenues dans la mine qui a été fondue, & que le grillage n'a point pû entierement débarrasser. On prend une portion de cette matte pour en faire l'essai en petit, afin de s'assurer de ce qu'elle contient. A Freyberg on fait trente - six fontes en une semaine. Les différentes mattes qui résultent de ces fontes se grillent de nouveau, pour achever d'en dégager le soufre & l'arsenic; on est obligé pour cela de les faire passer par trois ou quatre feux de grillage différens, après quoi on les remet de nouveau en fusion dans un fourneau semblable au premier

On donne alors de l'inclinaison à la tuyere qui dirige le vent du soufflet. On joint à ces mattes grillées de la nouvelle mine de plomb grillée, des scories chargées de plomb, de la litharge & des crasses, &c. & l'on procede à une nouvelle fonte en faisant des couches alternatives de différentes matieres avec du charbon; on laisse fondre le tout pendant quinze heures la premiere fois, & pendant huit heures seulement pour les fontes suivantes. Au bout de ce tems on laisse couler le plomb fondu dans le bassin qui est au - bas du fourneau. On referme l'oeil ou le trou aussitôt qu'on s'apperçoit qu'il se forme de la matte ou du laitier au - dessus du plomb qui a coulé; on enleve cette substance avec un crochet de fer; pour - lors on verse le plomb fondu qui est chargé d'argent, & que l'on nomme plomb d'oeuvre, dans des bassines de fer enduites d'un mélange de glaise & de charbon; alors l'essay eur prend des échantillons de ce plomb d'uvre pour en faire l'essai & pour savoir combien il contient d'argent. Pour enrichir encore davantage ce plomb d'oeuvre, on le remet de nouveau en fonte au fourneau à manche; on y joint des mattes de plomb grillées, des scories encore chargées de métal, & des scories vitrifiées ou du laitier, de la litharge, &c. & on fait fondre ce mélange de la maniere qui a été décrite en dernier lieu. Lorsque le plomb est suffisamment enrichi, c'est - à - dire chargé d'argent, on le sépare au fourneau de grande coupelle, où l'on réduit le plomb en litharge, & l'argent reste pur & dégagé de toute substance étrangere. Voyez Coupelle Comme par cette opération le plomb a perdu sa forme métallique, on est obligé de le faire fondre de nouveau par les charbons dans le fourneau de fusion, par ce moyen la litharge qui s'étoit faite dans l'opération de la grande coupelle se réduit en plomb; mais comme ce métal n'est point parfaitement pur, vû qu'il s'est chargé des substances métalliques qui étoient jointes à l'argent qui a été coupellé, on le refond de nouveau. Cette fonte se fait à l'air libre dans un foyer entouré de murs peu élevés; on y forme des lits avec des fagots, & l'on y jette le plomb qui se fond suffisamment & va couler dans le bassin destiné à le recevoir; c'est dans ce bassin qu'on le puise avec des cuilleres de fer, & on le verse dans des moules de fer, pour lui donner la forme de masses ou de saumons qui sont alors propres au débit. Voilà la maniere dont se traite le plomb à Freyberg en Misnie. La facilité avec laquelle le feu dissipe ce métal est cause qu'il souffre du déchet dans chaque opération par laquelle il passe; cette perte est inévitable, c'est à l'intelligence du métallurgiste à faire ensorte que cette perte soit la moindre qu'il est possible.

Lorsque la mine de plomb se trouve jointe avec de la mine de cuivre assez riche en métal pour qu'on veuille le retirer, le plomb uni avec l'argent se séparera du cuivre par la liquation. Si la mine de cuivre ne contenoit point de plomb par elle - même, on seroit obligé de lui en joindre, afin qu'il se charge de l'argent qui peut y être contenu. Voyez Liquation & Rafraichir. Voyez nos Pl. de Métallurgie.

Examinons actuellement les propriétés que les expériences chimiques font découvrir dans le plomb. Ce métal se fond très - promptement & avant que d'avoir rougi; il n'y a que l'étain qui entre en fusion plus promptement que lui; il se calcine avec beaucoup de facilité, pour cet effet on n'a qu'à le faire fondre, il se formera perpétuellement une pellicule grise à sa surace, qui se reproduit aussi - tôt qu'on l'a enlevée; c'est une vraie chaux de plomb, mais elle n'est que foiblement privée de son phlogistique; cette chaux est sous la forme d'une poudre grise, si on l'expose à un feu plus violent elle devient d'un beau jaune, & forme la couleur que les Peintres nomment massicot. Si on calcine cette chaux au feu de reverbere, elle devient d'un rouge très - vif tirant un peu sur le jaune; c'est ce qu'on appelle le minium ou le vermillon.

Le plomb mis dans un creuset avec partie égale de soufre, se réduit en une poudre noire, que l'on nomme plomb brûlé, plumbum ustum. Par cette opération le plomb loin d'être réduit en chaux, comme quelques - uns se l'imaginent, devient plus difficile à calciner, car alors ce métal est dans le même état que la matte qui résulte de la premiere fonte des mines de ce métal.

En faisant fondre de la chaux de plomb dans un creuset à grand feu, on obtient une matiere semblable à du verre d'une couleur jaune par écailles, & qui a peu de liaison, c'est ce qu'on nomme de la litharge; on obtient aussi cette matiere par l'opération de la coupelle.

Si on mêle trois parties de chaux de plomb avec une partie de sable ou de caillou calciné & pulvérisé, & qu'on mette ce mélange en fusion dans un creuset, on aura un verre jaune & transparent, que l'on appelle verre de plomb. Le plomb est un des plus puissans fondans de la Chimie; non - seulement il entre très - aisément en fusion lui - même, mais encore il vitrisie & fait entrer en fusion les autres substances auxquelles on le joint; c'est à cause de cette propriété du plomb qu'on le fait entrer dans les couvertes ou les émaux dont on couvre les poteries & la fayance. Voyez Fayance & Poterie. Mais la gran<pb->

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