ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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PALLADIUM (Page 11:790)

PALLADIUM, s. m. (Littérature.) le mot est grec, latin & françois. C'étoit une statue de Minerve, taillée dans la posture d'une personne qui marche. Elle tenoit une pique levée dans sa main droite, & avoit une quenouille dans sa main gauche; c'est la description qu'en fait Apollodore: Tzetzès & Eustathe, en parlent à - peu - près de même. On dit qu'elle étoit descendue du ciel près de la tente d'Ilus, dans le tems qu'il bâtissoit la forteresse d'Ilium, & que l'oracle, consulté sur cette statue, ordonna qu'on élevât un temple à Pallas dans la citadelle, & qu'on y gardât soigneusement cette statue; parce que la ville de Troyes seroit imprenable tant qu'elle conserveroit ce précieux dépôt. Aussi les Grecs instruits de cet oracle, se vanterent d'avoir enlevé le palladium; cependant Enée éveillé par un songe, dans lequel Hector lui conseilla de chercher un asyle, l'assurant qu'il seroit fondateur d'un grand empire, se rendit à la citadelle, prit le palladium & la déesse Vesta d'une main, & tenant de l'autre son cher Ascagne, il se sauva autravers des flammes jusqu'au bord de la mer. Là il s'embarqua avec ces tristes dépouilles, & aborda après mille traverses au port de Lavinie. Dès qu'il y fut arrivé, il y déposa dans un temple le palladium & le feu sacré; l'un & l'autre furent ensuite transportés à Albe, & finalement à Rome, où l'on établit les Vestales, pour garder avec soin des choses si précieuses. La ruine de Troyes sembloit être une bonne preuve de leur foiblesse; mais pour cacher au peuple l'impuissance du feu sacré & du palladium, on en défendit la vûe:

Nullique adspecta virorum Pallas in abstruso pignus memorabile templo.

Denis d'Halicarnasse confirme que les Grecs n'emporterent de Troyes qu'un faux palladium, fait par Dardanus sur le modele du véritable. Aussi les Romains étoient si persuadés qu'ils possédoient le vrai simulacre de Pallas, auquel ils attachoient le destin de Rome, que dans la crainte qu'on ne le leur enlevât, ils firent à l'exemple de Dardanus, plusieurs statues toutes semblables, qui furent déposées dans le temple de Vesta; & l'original fut caché dans un lieu qui n'étoit connu que des ministres du temple & des prêtresses. Clément d'Alexandrie a embrassé ce sentiment dans des recherches assez curieuses qu'il a mise au jour sur le palladium, & qu'il seroit trop long de transcrire ici.

Quoique les Romains se vantassent d'avoir la statue de Pallas tombée du ciel, & qu'ils la regardassent comme le gage de la durée de leur empire, fatale pignus imperii, plusieurs villes leur contestoient la gloire de posséder ce même palladium. La premiere étoit Liris, ancienne ville de la Lucanie, que Strabon croit avoir étéune colonie de Troyens, par la raison qu'on y voyoit la statue de la Minerve iliade, AHNA=N THN *ILI/ADA. Lavinie, Luccrie, Daulis, Argos, Sparte, & plusieurs autres villes, se glorifioient du même avantage; mais les Iliens le leur disputerent toujours. Ils prétendoient que le palladium n'avoit jamais été enlevé de Troyes; & que s'il étoit vrai qu'Enée pour le garantir de l'incendie, l'eût porté à Palaescepsis, il l'avoit bientôt après remis en sa place. Enfin lorsqu'on leur objectoit que suivant Homere, Diomede, & Ulysse l'avoient enlevé, ils répondoient que ces deux capitaines n'avoient trouvé dans le temple de Minerve qu'un faux palladium, qu'on avoit mis à la place du véritable, qui dès le commencement du siege de Troyes, avoit été caché dans un lieu inconnu.

Mais une chose fort curieuse sur le palladium, c'est le fait qui est rapporté par Appien d'Alexandrie, par Servius, par Julius Obsequens, & par S. Augustin, qui cite à ce sujet un passage de Tite - Live, qu'on ne trouve plus dans ce qui nous reste de ses ouvrages. Ce fait est que, sous le consulat de L. Sylla, & de L. Pompeius, Fimbria lieutenant de L. Valerius Flaccus, ayant pris & brûlé Ilion sans aucun respect pour ses dieux, on trouva dans les cendres du temple de Minerve, le palladium sain & entier; prodige dont les Iliens charmés conserverent long - tems le souvenir sur leurs médailles.

Le palladium étoit encore un lieu d'Athènes, où l'on jugeoit les meurtres fortuits & involontaires; le nombre des juges se montoit à cent. Tout le monde convient que Démophon y fut jugé le premier; mais on ignore pour quel crime. (D. J.)

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