ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"669"> nature que la premiere; c'est l'usage qui doit l'autoriser & la faire connoître.

Il y aura peut être des articles de cette convention qui auroient pû être plus généraux, plus analogues à d'autres articles antécédens, plus aisés à saisir, plus faciles & plus simples à exécuter. Qu'importe? Vous devez vous conformer aux décisions de l'usage, quelque capricieuses & quelque inconséquentes qu'elles puissent vous paroître. Vous pouvez, sans contredit, proposer vos projets en réforme, sur - tout si vous avez soin en en démontrant les avantages, de ménager néanmoins avec respect l'autorité de l'usage national, & de soumettre vos idées à ce qu'il lui plaira d'en ordonner: tout ce qui est raisonné & qui peut étendre la sphere des idées, soit en en proposant de neuves, soit en donnant aux anciennes des combinaisons nouvelles, doit être regardé comme louable & reçu avec reconnoissance.

Mais si l'empressement de voir votre systeme éxécuté, vous fait abandonner l'orthographe usuelle pour la vôtre; je crains bien que vous ne couriez les risques d'être censuré par le grand nombre. Vous imitez celui qui viendroit vous parler une langue que vous n'entendriez pas, sous prétexte qu'elle est plus parfaite que celle que vous entendez. Que feriez - vous? Vous ririez d'abord; puis vous lui diriez qu'une langue que vous n'entendez pas n'a pour vous nulle perfection, parce que rien n'est parfait, qu'autant qu'il remplit bien sa destination. Appliquez - vous cette réponse; c'est la même chose en fait d'orthographe; c'est pour les yeux un système de signes représentatifs de la parole, & ce système ne peut avoir pour la nation qu'il concerne aucune perfection, qu'autant qu'il sera autorisé & connu par l'usage national, parce que la perfection des signes dépend de la connoissance de leur signification.

Nul particulier ne doit se flatter d'operer subitement une révolution dans les choses qui intéressent toute une grande société, sur tout si ces choses ont une existence permanente; & il ne doit pas plus se promettre d'altérer le cours des variations des choses dont l'existence est passagere & dépendante de la multitude. Or, l'expression de la pensee par la voix est nécessairement variable, parce qu'elle est passagere, & que par - là elle fixe moins les traces sensibles qu'elle peut mettre dans l'imagination: verba volant. Au contraire, l'expression de la parole par l'écriture est permanente, parce qu'elle offre aux yeux une image durable, que l'on se représente aussi souvent & aussi long - tems qu'on le juge à - propos, & qui par conséquent fait dans l'imagination des traces plus profondes; & scripta manent. C'est donc une prétention chimérique, que de vouloir mener l'écriture parallelement avec la parole; c'est vouloir pervertir la nature des choses, donner de la mobilité à celles qui sont essentiellement permanentes, & de la stabilité à celles qui sont essentiellement changeantes & variables.

Devons - nous nous plaindre de l'incompatibilité des natures des deux choses qui ont d'ailleurs entr'elles d'autres relations si intimes? Applaudissons-nous au contraire, des avantages réels qui en résultent. Si l'orthographe est moins sujette que la voix à subir des changemens de forme, elle devient parlà même dépositaire & témoin de l'ancienne prononciation des mots; elle facilite ainsi la connoissance des étymologies, dont on a demontré ailleurs l'importance. Voyez Étymologie.

« Ainsi, dit M. le Président de Brosses, lors même qu'on ne retrouve plus rien dans le son, on retrouve tout dans la figure avec un peu d'examen. .... Exemple. Si je dis que le mot françois sceau vient du latin sigillum, l'identité de signification me porte d'abord à croire que je dis vrai; l'oreille au contraire, me doit faire juger que je dis faux, n'y ayant aucune ressemblance entre le son so que nous prononçons & le latin sigillum. Entre ces deux juges qui sont d'opinion contraire, je sais que le premier est le meilleur que je puisse avoir en pareille matiere, pourvû qu'il soit appuyé d'ailleurs; car il ne prouveroit rien seul. Consultons donc la figure, & sachant que l'ancienne terminaison françoise en el a été récemment changée en eau dans plusieurs termes, que l'on disoit scel, au lieu de sceau, & que cette terminaison ancienne s'est même conservée dans les composés du mot que j'examine, puisque l'on dit contre scel & non pas contre sceau; je retrouve alors dans le latin & dans le françois la même suite de consonnes ou d'articulation: sgl en latin, sel en françois, prouvent que les mêmes organes ont agi dans le même ordre en formant les deux mots: par où je vois que j'ai eu raison de déférer à l'identité du sens, plutôt qu'à la contrariété des sons ».

Ce raisonnement étymologique me paroît d'autant mieux fondé & d'autant plus propre à devenir universel, que l'on doit regarder les articulations comme la partie essentielle des langues, & les consonnes comme la partie essentielle de leur orthographe. Une articulation differe d'une autre par un mouvement différent du même organe, ou par le mouvement d'un autre organe; cela est distinct & distinctif: mais un son differe à - peine d'un autre, parce que c'est toûjours une simple émission de l'air par l'ouverture de la bouche, variée à la - vérité selon les circonstances; mais ces variations sont si peu marquées, qu'elles ne peuvent opérer que des distinctions fort légeres. De là le mot de wachter dans son glossatre germanique: praf. ad Germ. §. X. not. k. linguas à dialectis sic distinguo, ut differentia linguarum sit à consonantibus, dialectorum a vocalibus. De - là aussi l'ancienne maniere d'ecrire des Hebreux, des Chaldéens, des Syriens, des Samaritains, qui ne peignoient guere que les consonnes, & qui sembloient ainsi abandonner au gré du lecteur le choix des sons & des voyelles; ce qui a occasionné le système des points massorétiques, & depuis, le système beaucoup plus simple de Masclef.

On pourroit augmenter cet article de plusieurs autres observations aussi concluantes pour l'orthographe usuelle & contre le néographisme: mais il juffit, ce me semble, en renvoyant aux articles Néographe & Néographisme, d'avertir que l'on peut trouver de fort bonnes choses sur cette matiere dans les grammaires françoises de M. l'abbé Régnier & du pere Buffier. Le premier rapporte historiquement les efforts successifs des néographes françois pendant deux siecles, & met dans un si grand jour l'inutilité, le ridicule & les inconvéniens de leurs systemes, que l'on sent bien qu'il n'y a de sûr & de raisonnable que celui de l'orthographe usuelle: traité de l'orthogr. pag. 71. Le second discute, avec une impartialite louable & avec beaucoup de justesse, les raisons pour & contre les droits de l'usage en fait d'orthographe; & en permettant aux novateurs de courir tous les risques du néographisme, il indique avec assez de circonspection les cas où les écrivains sages peuvent abandonner l'usage ancien, pour se conrormer à un autre plus approchant de la prononciation: n°. 185, 209.

Le traité dogmatique de l'orthographe peut se diviser en deux parties: la lexicographie, dont l'office est de fixer les caracteres élémentaires & prosodiques qui doivent représenter les mots considérés dans leur état primitif, & avant qu'ils entrent dans l'ensemble de l'élocution; & la logographie, dont l'office est de déterminer les caracteres élémentaires qui [p. 670] doivent marquer les relations des mots dans l'ensemble de l'énonciation, & les ponctuations qui doivent désigner les différens degrés de la dépendance mutuelle des sens particuliers, nécessaires à l'intégrité d'un discours. Voyez Grammaire.

Si l'on trouvoit la chose plus commode, on pourroit diviser ce même traité en trois parties: la premiere exposeroit l'usage des caracteres élémentaires ou des lettres, tant par rapport à la partie principale du matériel des mots, que par rapport aux variations qu'y introduisent les diverses relations qu'ils peuvent avoir dans la phrase; la seconde expliqueroit l'usage des caracteres prosodiques; & la troisieme établiroit les principes si délicats, mais si sensibles de la ponctuation.

La premiere de ces deux formes me paroît plus propre à faciliter le coup d'oeil philosophique sur l'empire grammatical: c'est comme la carte de la région orthographique, réduite à la même échelle que celle de la région orthologique; c'est pourquoi l'on en a fait usage dans le tableau général que l'on a donné de la Grammaire en son lieu.

La seconde forme me semble en effet plus convenable pour le détail des principes de l'orthographe; les divisions en sont plus distinctes, & le danger des redites ou de la confusion y est moins à craindre. C'est une carte détaillée; on peut en changer l'échelle: il n'est pas question ici de voir les relations extérieures de cette région, il ne s'agit que d'en connoître les relations intérieures.

L'Encyclopédie ne doit se charger d'aucun détail propre à quelque langue que ce soit en particulier, fût - ce même à la nôtre. Ainsi l'on ne doit pas s'attendre à trouver ici un traité de l'orthographe françoise. Cependant on peut trouver dans les différens volumes de cet ouvrage les principaux matériaux qui doivent y entrer.

Sur les lettres, on peut consulter les articles Alphabet, Caracteres, Lettres, Voyelles, Consonnes, Initial , & sur - tout les articles de chaque lettre en particulier. Ajoutez - y ce qui peut se trouver de relatif à l'orthographe sous les mots Genre, Nombre, Personne , &c.

Sur les caracteres prosodiques, on peut consulter les articles Accent, Apostrophe, Cédille, Division , & sur - tout Prosodique.

Sur les ponctuations, comme la chose est commune à toutes les langues, on trouvera à l'article Ponctuation tout ce qui peut convenir à cette partie. (B. E. R. M.)

ORTHOGRAPHIE (Page 11:670)

ORTHOGRAPHIE, s. f. (Perspect.) se dit de l'art de représenter la partie antérieure d'un objet, comme la façade d'un bâtiment, en marquant les hauteurs & les élévations de chaque partie par des lignes perpendiculaires au tableau.

Ce mot vient du grec O)RQO/S2, droit, & GRA/FW, je décris, parce que dans l'orthographie chaque chose se marque par des lignes tirées perpendiculairement, ou plutôt parce que toutes les lignes horisontales y sont droites & paralleles, & non obliques comme dans la perspective. Chambers. (E)

Orthographie (Page 11:670)

Orthographie, en Architecture, est le plan ou le dessein d'un bâtiment, qui en montre toutes les parties dans leurs véritables proportions.

Il y a orthographie externe & orthographie interne.

L'orthographie externe, qu'on appelle aussi élévation, est le dessein de la face ou du frontispice d'un bâtiment, lequel présente son principal mur, avec ses ouvertures, son toît, ses ornemens, & tout ce qu'on peut appercevoir étant placé vis - à - vis du bâtiment.

L'orthographie interne, qu'on appelle aussi coupe ou section, est le plan ou le dessein d'un bâtiment, tel qu'il paroîtroit si toute la partie du frontispice étoit ôtée; c'est proprement ce qu'on appelle le plan, ou, en terme de l'art, l'ichnographie. Voyez Ichnographie.

Pour décrire l'orthographie externe d'un bâtiment, tirez une ligne A B pour base (Pl. Persp. fig. 13.), & à l'un des bouts élevez la perpendiculaire A D. Sur A B, marquez les largeurs & les intervalles des portes, des fenêtres, &c. sur la ligne droite A D, marquez la hauteur des principales parties visibles dans la face du bâtiment, par exemple, les portes, les fenêtres, le toît, les cheminées, &c. & appliquez la regle à chaque point de division. Les intersections communes des lignes droites, paralleles aux lignes A B & A D, détermineront l'orthographie externe du bâtiment. Pour décrire l'orthographie interne, on procédera de la même maniere. L'intérieur de la figure 13. représente l'orthographie interne, ou ichnographie, qu'on appelle autrement plan; & les chiffres qu'on y voit expriment la longueur & la largeur des différentes pieces. Ces longueurs & largeurs sont rapportées sur les lignes A B, A D, par des lignes ponctuées. Voyez Perspective. Chambers.

Orthographie (Page 11:670)

Orthographie, en terme de Fortification, est le dessein de la coupe d'un ouvrage, faite verticalement ou du haut en - bas. Il sert à faire connoître les hauteurs, les largeurs des ouvrages, l'épaisseur des murs, la profondeur des fossés, &c. Voyez Profil. (Q)

ORTHOGRAPHIQUE (Page 11:670)

ORTHOGRAPHIQUE, (Ast.) projection orthographique de la sphere, est la représentation des différens points de la surface de la sphere, sur un plan qui la coupe par son milieu, en supposant l'oeil à une distance infinie, & dans une ligne verticale au plan qui sépare les deux hémispheres; c'est - à - dire, en supposant que chaque point de la surface de la sphere se projette sur le plan dont il s'agit par une ligne perpendiculaire à ce plan.

On appelle cette projection, orthographique, parce que les lignes de projection, menées des points de la surface sphérique sur le plan de projection, tombent toutes au - dedans de ce même plan, & que toutes ces lignes font avec le plan de projection des angles droits: car le mot orthographique vient des deux mots grecs, O)RQO/S2, droit, & GRA/FW, je décris. Voyez Projection.

Orthographique (Page 11:670)

Orthographique, adj. (Perspect.) se dit de tout ce qui a rapport à l'orthographie; ainsi on dit représentation orthographique, projection orthographique, c'est - à - dire, celle qui se fait par des lignes menées de l'objet perpendiculairement au tableau. Voyez Orthographie & Projection.

ORTHOLOGIE (Page 11:670)

ORTHOLOGIE, s. f. Ce mot est l'un de ceux que l'on a cru devoir risquer dans le prospectus général que l'on a donné de la Grammaire, sous le mot Grammaire: on y a expliqué celui - ci par son étymologie, pour justifier le sens qu'on y a attaché.

La Grammaire considere la parole dans deux états, ou comme prononcée ou comme écrite: voilà un motif bien naturel de diviser en deux classes le corps entier des observations grammaticales. Toutes celles qui concernent la parole prononcée sont de la premiere classe, à laquelle on peut donner le nom d'Orthologie, parce que c'est elle qui apprend tout ce qui appartient à l'art de parler. Toutes celles qui regardent la parole écrite sont de la seconde classe, qui est de tout tems appellée Orthographe, parce que c'est elle qui apprend l'art d'écrire.

On peut voir (art. Grammaire) les premieres divisions de l'Orthologie, & en suivant les renvois qui y sont indiqués, descendre à toutes les sous - divisions. Mais ce qu'on a dit dn traité de l'Ortographe (art. Orthographe), on peut le dire ici de l'Orthologie. La maniere de la traiter qui a été exposée dans le prospectus général de la Grammaire, étoit plus

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