ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

RECHERCHE Accueil Mises en garde Documentation ATILF ARTFL Courriel

Previous page

"663"> voient les orphies ou éguillettes attroupées, ils lancent leurs dards, & en prennent quelquefois plusieurs d'un seul coup; comme le bateau devire doucement, la manoeuvre de la pêche n'effarouche point les poissons. Dans les pêches heureuses, on en prend jusqu'à 12 à 1500 dans une nuit. Pour cet effet, il faut que l'obscurité soit grande & le tems très - calme, deux conditions requises pour toutes les pêches au feu. Cette manoeuvre est la même que la pêche au farillon, expliquée à ce mot, & représentée dans nos Planches.

ORPHIQUE, vie (Page 11:663)

ORPHIQUE, vie, (Littér.) O)RFIKO\S2 BI/OS2, sorte de vie pure, religieuse, & dont une des pratiques consistoit à ne point manger la chair des animaux.

Orphée, dit Eschyle dans Aristophane, nous a montré les cérémonies, & nous a enseigné à nous abstenir de tout meurtre. Horace exprime la même idée encore plus élégamment:

Sylvestres homines sacer interpresque deorum Coedibus & victu foedo deterruit Orpheus.

« Le divin Orphée, l'interprete des dieux, détourna les hommes du meurtre, & leur fit quitter le genre de vie brutal qu'ils menoient ». Il composa des hymnes en l honneur des dieux, & apprit aux mortels les cérémonies de la religion. Les poëtes furent les premiers prêtres, les premiers philosophes, & les premiers législateurs.

Platon, après avoir raisonné dans le VI. livre de ses lois, de la brutalité de plusieurs peuples, & de l'usage que quelques - uns avoient encore d'immoler des hommes, ajoute que les anciens Grecs tout au contraire n'auroient pas osé tuer un boeuf; & qu'alors on ne sacrifioit point d'animaux aux dieux. Les gâteaux, dit - il, les fruits trempés dans le miel, & telles autres offrandes pures étoient ce qu'on leur présentoit. On s'abstenoit de la chair, & c'eût été un acte impie que d'en manger, ou de souiller de sang les autels. Alors se forma parmi nous, continue - t - il, une sorte de vie, nommée vie orphique, où l'usage des choses inanimées étoit libre & permis, au lieu que l'usage de celles qui avoient eu vie, étoit défendu.

Cette pratique d'austérité mérite le nom d'orphique, & parce qu'Orphée en étoit l'instituteur, & parce que le même Orphée, le plus ancien des sages, pouvoit avoir donné son nom à tous ceux qui faisoient profession de vertu & de lettres. C'est ce que l'on voit clairement dans un passage d'Euripide; car Thésée, à - peu - près contemporain d'Orphée, reprochant à son fils Hippolite le peu de rapport qu'il y a entre l'action infame dont il le croit coupable, & l'austere sagesse dont ce jeune homme faisoit profession: « Voilà donc cet homme, lui dit - il, qui est en commerce avec les dieux, comme un personnage d'éminente vertu: voilà cet exemple de tempérance, & d'une conduite irreprochable. N'espere pas m'imposer plus long - tems par ce vain éclat, ni que j'attribue aux dieux un commerce qui seroit une preuve de leur folie. Trompe nous, si tu peux, maintenant par ton affectation de ne rien manger qui ait eu vie; & soumis à ton Orphée, joue l'inspiré, & te remplis de la fumée du vain savoir, puisque te voilà pris dans le crime ».

On trouve dans ce passage les trois points qui constituoient la vie orphique, savoir la religion, l'abstinence de ce qui avoit eu vie, & la science.

Les livres d'Orphée, qui justifioient sa science, sont cités par tous les anciens auteurs. Euripide, dans un choeur de son Alceste, après avoir dit que la nécessité est insurmontable, ajoute que les livres d'Orphée n'indiquent aucun remede contre ce mal. C'est de l'étude de ces livres & de leur intelligence, autant que de l'attachement pour la chasse & pour la déesse qui y préside, dont Thésée veut parler lorsqu'il reproche à Hippolite son prétendu commerce avec les dieux.

En un mot, Orphée fut une espece de réformateur, qui, à l'aide de la poésie & de la musique, ayant adouci des hommes féroces, donna naissance à une secte distinguée par son attachement à l'étude de la religion, & par une austérité de vie, dont la pratique éloignant les hommes des plaisirs sensuels, si funestes à la vertu, les portoit à une haute perfection. Témoin l'Hippolite d'Euripide, qui, libre de toute passion, aima mieux perdre la vie, que de manquer au secret qu'il avoit promis.

Il fait lui - même au commencement de la piece une peinture charmante de la vie orphique sous l'allégorie d'une prairie, conservée contre tout ce qui peut en altérer la fraîcheur, dans laquelle il vient de cueillir la couronne qu'il offre à Diane. « Recevez, lui dit - il, de ma main, déesse respectable, la couronne de fleurs que j'ai cueillie dans une prairie, où la fraîcheur de l'herbe n'a jamais été livrée à l'avidité des troupeaux, ni au tranchant d'une faux sacrilege; la seule abeille en suce les fleurs, que la Pudeur elle - même prend soin d'arroser d'une eau toujours pure. Ceux en qui la tempérance est un don du ciel, ont seuls le droit d'en cueillir: l'accès en est défendu aux méchans. Ornez - en vos beaux cheveux, & soyez propice à la main pleine d'innocence qui vous l'offre. Seul entre les mortels, j'ai l'avantage de vivre avec vous, de vous entendre & de vous répondre. Quoique privé de votre vûe, accordez - moi, grande déesse, de terminer ma carriere comme je l'ai commencée »!

Il la termina en effet par une action de vertu, & fit voir en sa personne ce que la justice peut sur une ame, qui ayant reçu de la naissance de grandes dispositions au bien, les a nourries par la pratique d'un vie pure, qu'on appelloit alors & qu'on a appellé depuis la vie orphique. (D. J.)

Orphiques (Page 11:663)

Orphiques, adject. (Littérat.) surnom des orgies de Bacchus; il leur fut donné, les uns disent en memoire de ce qu'Orphée avoit perdu la vie dans la célébration des orgies, d'autres parce qu'il avoit introduit dans la Grece la pratique de ces fêtes singulieres dont l'Egypte étoit le berceau. (D. J.)

ORPHITIEN (Page 11:663)

ORPHITIEN, senatus consulte, (Jurisprud.) voyez au mot Senatus consulte.

ORPIMENT ou ORPIN (Page 11:663)

ORPIMENT ou ORPIN, (Hist. nat. Minéralog.) en latin auripigmentum, sandaracha, risigallum, realgar, arsenicum flavum, arsenicum rubrum, &c. substance minérale d'un jaune plus ou moins vif, en feuillets luisans comme ceux du talc, composé d'arsenic, & d'une quantité tantôt plus tantôt moins grande de soufre, qui lui donne la couleur, soit d'un jaune de citron, soit d'un jaune orangé, soit d'un rouge vif comme le cinnabre que l'on y remarque. L'orpiment naturel est un minéral très - rare, cependant on le trouve soit en masses, soit en petites venules, soit attaché à la surface des fentes des mines en Hongrie, en Turquie, à Kremnitz, à Neusol & Coronsay.

Quelques auteurs ont confondu l'orpiment, dont on vient de donner la description avec l'arsenic jaune, ou l'orpiment factice, qui est un produit de l'art, comme nous le ferons voir dans cet article, mais il differe de ce dernier par la beauté de sa couleur & même par son tissu; celui de l'orpiment naturel est communément par lames ou feuillets, tandis que l'orpiment factice n'a jamais ce tissu. Aussi les Peintres donnent - ils la préférence à l'orpiment natu<pb-> [p. 664] rel, ils s'en servent pour peindre; en le mêlant avec de l'indigo, ils en font du verd.

L'orpiment étoit le seul arsenic que connussent les anciens, il ne paroît point qu'ils eussent connoissance de l'arsenic que nous connoissons dans différens états. Comme à l'article Arsenic dans le pre. mier volume de cet ouvrage on n'a donné qu'une description très - incomplete de cette substance, nous allons tâcher d'y suppléer & d'entrer dans quelques détails sur une des substances les plus importantes du regne minéral.

L'arsenic est un demi - métal d'un gris luisant, àpeu près comme le fer, mais composé d'un amas de lames ou de feuillets. Il perd son éclat & se noircit à l'air, il se dissout dans tous les dissolvans & les liqueurs, il entre en fusion dans le feu, & il s'y dissipe sous la forme d'une fumée blanche, épaisse, accompagnée d'une odeur d'ail très - forte, c'est surtout à cette odeur que l'on peut reconnoître sa présence: c'est un poison très - violent.

On voit par ces propriétés de l'arsenic qu'il est un vrai protée, qui à de certains égards, approche de la nature des sels, tandis que par d'autres il a des caracteres qui conviennent aux métaux & aux demi - métaux, c'est ce qu'on verra encore plus clairement par les détails que nous donnerons de ses effets. M. Brandt, savant chimiste suédois, est le premier qui a fait voir que l'arsenic étoit un demi-métal; avant lui on ne savoit point dans quel rang on devoit le placer. Voyez Acta litteraria Upsaliensia anni 1733.

L'arsenic se trouve sous différentes formes dans le sein de la terre. 1°. Il se trouve tout pur, c'est ce qu'on nomme arsenic natif; alors il n'est combiné avec aucune autre substance du genre minéral; on le reconnoît à sa couleur grise, à la fumée blanche qu'il répand dans le feu, & à son odeur d'ail: cet arsenic exposé au feu se sublime entierement sans laisser aucun résidu. On le trouve aussi tout pur sous la forme d'un crystal blanc & transparent, semblable à du verre blanc; enfin on le trouve encore tout pur sous la forme d'une poudre blanche ou d'une farine.

2°. L'arsenic se trouve combiné avec du soufre, & alors il est ou jaune citron, ou d'un jaune orangé, ou d'un rouge quelquefois aussi vif que celui d'un rubis; alors on le nomme arsenic jaune, orpiment, risigallum; sa couleur plus ou moins rouge vient du plus ou du moins de soufre avec lequel il est combiné. On a trouvé que l'arsenic d'un jaune de citron pouvoit contenir un dixieme de soufre, & que l'arsenic rouge en contenoit un cinquieme. Wallerius donne le nom d'orpiment à de l'arsenic jaune, renfermé dans une pierre talqueuse ou par feuillets comme le mica; il paroît que cela ne change point la nature de cette mine.

3°. L'arsenic se trouve dans une pierre noire, mêlée de bitume, que l'on nomme pierre arsenicale, il paroît qu'il y est tout pur, puisque cette pierre cassée est luisante comme du plomb fraîchement coupé. Les Allemands l'appellent fliegen stein, pierre aux mouches, parce qu'on la pulvérise, on la mêle avec de l'eau & du sucre, & on la met sur une assiette, & ces insectes vont en manger, ce qui les fait périr. C'est à cette mine d'arsenic que l'on donne quelquefois le nom de cobalt écailleux ou cobalt testacè, parce qu'elle a la forme d'écailles. En général il faut observer que les mineurs d'Allemagne, peu exacts dans leurs dénominations, donnent le nom de cobalt à presque toutes les mines d'arsenic.

4°. L'arsenic se trouve dans la pyrite blanche, que les Saxons nomment mispikkel ou pyrite arsenicale. Cette mine est composée d'un assemblage de lames ou de feuillets blancs comme de l'étain ou de l'argent. L'arsenic y est combiné avec le fer & le soufre.

5°. L'arsenic se trouve dans une mine que les Allemands appellent kupfernikkel, qui est d'un rouge semblable à celui du cuivre, & que l'on doit nommer mine d'arsenic d'un rouge cuivreux.

6°. Il se trouve mêlé ou combiné avec de la terre que l'on nomme terre arsenicale; on peut la reconnoître à la fumée qu'elle répand dans le feu & à son odeur d'ail.

Voilà les principales mines de l'arsenic; mais outre cela, il se trouve dans un nombre infini de mines des autres métaux, & sur - tout dans les mines d'argent, dans les mines de cuivre, dans les mines de plomb, de fer & d'étain; il joue aussi bien que le soufre le principal rôle dans la minéralisation des métaux, c'est - à - dire qu'il leur fait prendre des formes tout - à - fait étrangeres. C'est ainsi que l'arsenic combiné avec de l'argent le change en crystaux rouges & transparens, que l'on nomme mine d'argent rouge. Il fait prendre à l'étain une forme cry stallisée, voyez Etain; il change le plomb en crystaux blancs & verds, voyez Plomb, d'où l'on voit que l'arsenic a la propriété de s'unir très intimement avec les substances métalliques, desquelles on a beaucoup de peine de le dégager par le grillage & par les travaux de la Métallurgie. Voyez Mine, Minéralisation, Métallurgie

L'arsenic est très - volatil, & il s'éleve très - facilement sous la forme de vapeurs dans les souterreins des mines; c'est à lui que sont dûes en partie les effets funestes des exhalaisons minérales. Voyez cet article. Toutes ces propriétés de l'arsenic l'ont fait regarder comme un générateur des métaux & comme un mercure coagulé. Le célebre Henckel dit avoir obtenu de l'argent en traitant un mélange de craie & d'arsenic. Les Alchimistes ont cherché la pierre philosophale dans cette substance, & lui ont attribué des vertus tout - à - fait extraordinaires.

Pour séparer l'arsenic des substances auxquelles il est joint dans le sein de la terre, on calcine ces substances dans un fourneau de réverbere, que Kunckel a décrit le premier, & la fumée qui s'en éleve est reçue dans une cheminée horisontale, qui est faite de planches & soutenue par des piliers: cette cheminée a quelquefois plusieurs centaines de piés de longueur, on en peut voir la représentation dans celle des Planches de Minéralogie & de Métallurgie, qui représente le grillage du cobalt; A B représente la perspective du fourneau, G montre sa coupe. Par la calcination, l'arsenic se dégage sous la forme d'une fumée blanche épaisse; cette fumée est reçue dans la cheminée C D, ou dans le boyau horisontal, aux parois duquel elle s'attache & se condense sous la forme d'une farine légere, que des ouvriers vont balayer & ramasser lorsqu'il s'y en est accumulé une certaine quantité. Ces ouvriers entrent dans la cheminée par des portes marquées E E E, que l'on tient fermées dans le tems que la fumée arsenicale est reçue: H montre la coupe de cette cheminée; les ouvriers ont la précaution de se mettre un linge devant le nez & la bouche lorsqu'ils vont balayer cette poudre arsenicale, qui est une poison très - subtile.

Quand on a recueilli l'arsenic qui s'étoit amassé dans la cheminée qui vient d'être décrite, on porte cette poudre dans un autre attelier représenté au bas de la même Planche. Là on a un fourneau, que l'on verra dans cette Planche aux lettres A & B; C C C sont des capsules de tôle ou de fer, dans lesquelles on met l'arsenic en poudre, on place au - dessus de ces capsules ou écuelles des tuyaux de tôle ou de fer mince battu, marqués D D D; on

Next page


The Project for American and French Research on the Treasury of the French Language (ARTFL) is a cooperative enterprise of Analyse et Traitement Informatique de la Langue Française (ATILF) of the Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), the Division of the Humanities, the Division of the Social Sciences, and Electronic Text Services (ETS) of the University of Chicago.

PhiloLogic Software, Copyright © 2001 The University of Chicago.