ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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NTOUPI (Page 11:274)

NTOUPI, s. m. (Hist. ecclés.) nom que les Grecs donnent aux excommuniés après leur mort, parce que leurs corps, disent - ils, ne pourrissent point en terre, mais s'enslent & résonnent comme un tambour quand on les roule. On dit que l'on vit une preuve de cette vérité sous le regne de Mahomet II. empereur des Turcs; car ce sultan ayant entendu parler de la force des excommunications dans l'église greque, envoya dire à Maxime, patriarche de Constantinople, qu'il eût à trouver le cadavre d'un homme excommunié & mort depuis long - tems, pour connoître en quel état il seroit. Le patriarche fut d'abord surpris, & communiqua cet ordre à son clergé qui ne fut pas moins embarrassé. A la fin les plus anciens se ressouvinrent que sous le pontificat de Gennadius il y avoit une trés - belle femme veuve [p. 275] qui osa publier une calomnie contre ce patriarche, tâchant de persuader au peuple qu'il avoit voulu la corrompre, & que ce prélat ayant assemblé son clergé, fut contraint de l'excommunier; qu'ensuite cette femme étoit morte au bout de quarante jours, & que son corps ayant été retiré de terre long - tems après, pour voir l'effet de l'excommunication, il fut trouvé entier, & fut inhumé une seconde fois. Maxime s'informa du lieu de sa sépulture; & après l'avoir trouvé, en fit avertir le sultan qui y envoya des officiers, en présence desquels on ouvrit le tombeau où le cadavre parut entier, mais noir & enflé comme un ballon. Ces officiers ayant fait leur rapport, Mahomet en fut extrèmement étonné, & députa des bachas qui vinrent trouver le patriarche, visiterent le corps, & le firent transporter dans une chapelle de l'église de Pammacharista, dont ils scellerent la porte avec le cachet du prince. Peu de jours après, les bachas, suivant l'ordre qu'ils en eurent du sultan, retirerent le cercueil de la chapelle, & le présenterent au patriarche pour lever l'excommunication, & connoître l'effet de cette cérémonie qui remettoit les corps dans l'état ordinaire des autres cadavres. Le patriarche ayant dit la liturg e, c'est - à - dire les prieres prescrites en cette occasion, commença à lire tout haut une bulle d'absolution pour les péchés de cette femme, & en attendit l'effet avec des larmes de zele & des aspirations à Dieu. Les Grecs disent qu'il se fit alors un miracle, dont une foule incroyable de gens furent témoins; car à mesure que le patriarche récitoit la bulle, on entendoit un bruit sourd des nerfs & des os qui craqueroient en se relâchant & en quittant leur situation naturelle. Les bachas, pour donner lieu à la dissolution entiere du corps, remirent le cercueil dans la chapelle qu'ils fermerent & scellerent avec le sceau du sultan. Quelques jours après ils y firent leur derniere visite; & ayant vû que le corps se réduisoit en poudre, ils en porterent les nouvelles à Mahomet, qui plein d'étonnement, ne put s'empêcher de dire que la religion chrétienne étoit admirable.

Il ne faut pas confondre les ntoupis don. nous venons de parler, avec les broucolacas ou faux ressuscités, qui font encore beaucoup de bruit parmi les Grecs. A leur dire, les broucolacas sont aussi des cadavres de personnes excommuniées; mais au lieu que les ntoupis sont seulement incorruptibles jusqu'à ce qu'on ait levé la sentence d'excommunication, les broucolacas sont animés par le démon qui se sert de leurs organes, les fait parler, marcher, boire & manger. Les Grecs disent que, pour ôter ce pouvoir au démon, il faut prendre le coeur du broucolacas, le mettre en pieces, & l'enterrer une seconde fois. Guillet, Hist. du regne de Mahomet II.

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