ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"218"> composent pas notre nature ou notre être, mais dont l'économie animale éprouve de grands effets, de grands changemens, de grandes altérations.

C'est, dans le livre de oculis, attribué à cet auteur, que l'on trouve qu'il y a sept choses naturelles, six non - naturelles & trois contre - nature. Les premieres sont les élémens, les tempéramens, les parties, les humeurs, les esprits, les facultés & les actions; ce sont celles qui concourent à former le physique de notre être: les secondes sont l'air que nous respirons, la matiere des alimens & de la boisson, le mouvement & le repos, le sommeil & la veille, ce que nous retenons dans notre corps & ce qui en sort, & enfin les affections de l'ame: ces choses qui sont celles dont il s'agit dans cet article, sont toutes celles dont on ne peut pas éviter l'usage ou les influences, & qui servent essentiellement à la conservation de la santé, lorsqu'elles sont bien disposées & que l'on en fait un bon usage; mais qui font un effet contraire lorsqu'elles sont mal disposées par elles - mêmes, ou qu'on n'en use pas bien, elles donnent alors naissance aux troisiemes des choses mentionnées qui sont dites contre - nature, & constituent les maladies, leurs causes & leurs symptômes.

Ces différentes choses font la matiere de la plus grande partie de la science de la Médecine: la Physiologie traite des choses naturelles; la Pathologie, des choses contre - nature & des mauvais effets que produisent les qualités vicieuses ou l'abus des choses non - naturelles; & les regles qui établissent leurs bonnes qualités, leur bon usage, font la principale matiere de l'Hygiene. Voyez l'hist. de la Méd. de Leclerc, part. III. liv. III. chap. iij. Voyez aussi les articles Physiologie, Pathologie & Hygiene.

Selon M. de Sauvage (Pathol. méthod. sect. 8.), Galien réduit à quatre les six choses non - naturelles; savoir, 1° ce qui peut être reçu dans le corps, comme le manger & le boire, l'air, les médicamens, les poisons, &c. 2° ce qui peut être retenu dans le corps d'une maniere nuisible, comme les excrémens, les mauvais levains des premieres voies, qu'on appelle saburre, les concrétions pierreuses, les matieres flatueuses, les vers, &c. 3° ce qui peut être appliqué à la surface du corps, comme l'air, les vêtemens, les bains, les morsures des animaux, les solutions de continuité faites par des corps étrangers, &c. 4° enfin les différentes actions du corps & de l'ame, ou ce qui en dérange l'exercice, le rend forcé, ou ce qui le suspend, le fait cesser entierement, comme le mouvement, le repos, le sommeil, la veille & les passions.

Les choses non naturelles, selon cette derniere division, sont désignées dans les institutions de Boerhaave §. 744. par les quatre mots latins qui suivent, savoir ingesta, retenta, applicata, gesta.

Pitcairn resserre encore davantage la matiere, & présente ces choses sous une idée plus simple en les réduisant à l'action des autres corps sur le nôtre, & à celle de notre propre corps ou de ses facultés sur lui - même; ainsi deux sortes d'actions qui affectent l'homme, l'une dont le principe lui est étranger, l'autre dont le principe se trouve dans l'économie animale.

Les corps étrangers qui sont susceptibles d'action sur l'homme, ou lui sont nécessaires, & tels même qu'il ne peut s'en passer, ou ils ne lui sont pas nécessaires, ni utiles, ensorte qu'il est même avantageux pour lui de n'en éprouver aucun effet; les premiers sont l'air, les alimens, les vêtemens; les autres sont les miasmes, les poisons, qui peuvent pénétrer, être portés dans les corps, les choses qui peuvent le frapper, le blesser, &c.

Les corps étrangers ne peuvent exercer quel<cb-> qu'action sur notre corps que par un principe méchanique, comme par leur masse, leur mouvement ou leur figure, ou par un principe physique, comme la force de cohésion, d'adhésion ou l'attraction, la dissolution, la fermentation, la putréfaction, c'est - à - dire que ces différentes forces operent sur les parties élémentaires, inlensibles, qui entrent dans la composition de nos solides ou de nos fluides.

Les actions de l'homme sur lui - même sont de deux especes; ou elles sont l'effet de la liberté lorsqu'elles sont déterminées par l'entendement & la volonté; ou elles sont l'effet de la nature, c'est à - dire authomatiques, lorsqu'elles sont produites comme machinalement par l'instinct & la cupidité. Voyez Volonté, Liberté, Nature, Instinct, Cupidité

La volonté & la cupidité sont toujours portées au bien, ou à ce qui paroît être un bien: la premiere tend toujours au bien intellectuel; la seconde au bien sensible, par conséquent à la conservation de la santé.

Cependant lorsque la volonté ne distingue pas facilement un bien réel d'avec un bien apparent, il lui arrive souvent de se tromper & de donner la préférence au dernier, d'où s'ensuit souvent que les actions qu'elle produit nuisent à la santé, comme lorsqu'une jeune fille, pour se guérir des pâles - couleurs & se rendre la peau blanche, se détermine à manger du plâtre, des citions.

L'instinct qui semble diriger si sûrement les animaux en les portant à ce qui leur est utile, & les éloignant de ce qui peut leur être contraire, n'est pas un guide aussi infaillible pour l'homme, comme lorsqu'il est porté à boire dans le cas de l'hydropisie ascitique.

Ainsi ces considérations établissent la nécessité d'une science qui prescrive à l'entendement des regles, pour distinguer ce qui est utile ou ce qui est nuisible à l'économie animale, & qui, en secondant la nature, en soutienne ou en dirige les opérations relativement à ce qui convient à chaque individu, selon la circonstance où il se trouve à l'égard de la santé ou de la maladie: c'est par - là que se démontrent l'utilité & les avantages pour le genre humain d'un art qui, en prescrivant la maniere d'user des choses non - naturelles, fournit les préceptes & les moyens pour conserver la santé, pour prévenir ce qui peut l'altérer, pour la rétablir lorsqu'elle a éprouvé quelque altération, & pour prolonger la vie autant qu'il est possible en écartant, en corrigeant les causes qui peuvent l'abréger, la détruire avant son terme naturel; ensorte qu'elle ne finisse que conformément aux lois de la nature par les effets de la vieillesse la plus reculée, qui amene inévitablement la cessation du mouvement qui constitue la vie; par conséquent la mort qui n'est autre chose que cette cessation, & qui est, dans ce cas seul, véritablement naturelle. Voyez Médecine, Vie, Santé, Vieillesse, Mort .

Pour survivre à l'égard des choses non - naturelles, la division, l'ordre le plus connu, on va rapporter ici aussi sommairement qu'il se pourra, eu égard à l'abondance de la matiere, tout ce qui détermine les regles par rapport au bon & au mauvais effet, au bon & au mauvais usage de ces choses, selon qu'on les considere ordinairement dans les écoles, d'après l'expérience, l'observation & la raison.

Ainsi en comptant les choses non - naturelles au nombre de six, comme il a été dit ci devant, il se présente d'abord à traiter de l'air & de ses qualités par rapport à ses influences sur l'économie animale.

I. De l'air. L'usage de ce fluide que nous ne pouvons éviter de respirer dès que nous sommes nés, [p. 219] & dans lequel nous sommes toujours plongés, est continuel & comme l'aliment de la vie; ainsi il est d'une plus grande conséquence pour tout ce qui a rapport à la vie, qu'aucune autre des choses nonnaturelles: sa pesanteur, son élasticité, sa température, sa nature, à raison des corps étrangers qu'il contient, n'étant pas les mêmes dans les différentes parties de l'atmosphere; il s'ensuit que les animaux ne peuvent qu'en être différemment affectés, suivant la différence de ces qualités; il ne peut donc que contribuer beaucoup à la conservation de la santé, lorsqu'elles sont convenables; & lui nuire, l'altérer, la détruire inévitablement, lorsqu'elles sont contraires. Voyez Air, Athmosphere.

L'expérience de tous les tems & de tous les lieux a appris que l'air pur, autant qu'il peut l'être, serein, le plus constamment sec & tempéré, est le plus propre à procurer & à maintenir la vie saine, c'est - à - dire que pour cette disposition il doit être exempt ou purgé de toutes exhalaisons hétérogenes, corrompues, de tout mélange qui le rend trop pesant, trop humide, trop grossier; qu'il ne doit pas être ordinairement chargé de nuages, de brouillards pour qu'il soit bien exposé à l'action du soleil; qu'il ne doit être susceptible naturellement ni de trop de chaleur, ni de trop de froid, relativement à ce qui convient à l'économie animale (voyez Chaleur, Froid), mais d'une douce température peu variable, proportionnée à l'ordre des saisons.

Le mouvement, l'agitation de l'air, en quoi consistent les vents, servent beaucoup à le dépouiller de ses parties étrangeres: c'est pourquoi les lieux éleves, les montagnes qui sont exposées aux vents, sur tout à ceux qui viennent des pays méditerranés, sont les lieux où l'air est le plus pur, parce qu'il y est continuellement renouvellé; c'est la position des lieux qui décide lequel des vents principaux doit être regardé comme le plus salubre: en général celui qui a traversé de grands espaces de mer ou de grands amas d'eau, sur - tout des terreins marécageux, est toujours mal - sain à cause de l'humidité & souvent de la corruption dont il est chargé, & d'autant plus mal - sain qu'il est plus chaud. Hippocrate regardoit avec raison cette qualité de l'air comme une des causes des plus ordinaires des fievres putrides épidémiques & de la peste même, au - lieu que le froid joint à l'humidité ne produit que des maladies catarreuses.

Mais quel que soit le vent qui regne, il est toujours plus sain que le calme des airs qui dure considérablement; car il peut devenir très - nuisible & même pestilentiel par cette seale cause, sur - tout encore s'il est chaud & humide.

En effet l'air modérement froid est toujours préférable à l'air chaud; celui - ci relâche les fibres, affoiblit le mouvement osciilatoire des vaisseaux, engourdit la circulation, le cours des humeurs, les dissout, les dissipe par une trop grande transpiration: au - lieu que l'air froid en condensant les corps raffermit les solides de l'animal, le rend plus vigoureux, plus agile, favorise l'élaboration de ses fluides, & fortifie à tous égards le tempérament. C'est ce qu'on observe par rapport aux peuples du nord comparés à ceux du midi, qui sont d'une compléxion plus molle, plus délicate, à proportion qu'on approche davantage de l'équateur: au - lieu que dans les pays septentrionaux on jouit en général d'une vie plus saine & plus longue, & qu'il est fort commun d'y voir des hommes très - robustes, même dans l'âge le plus avancé, & d'y trouver des gens qui vivent plus de cent ans. Voyez Chaleur, Froid, Vieillesse .

Il est aussi très - avantageux, pour la santé, que l'air ne soit pas d'une température trop variable; que la chaleur & le froid dominent constamment, chacun dans sa saison respective; que l'on ne soit pas exposé à passet continuellement de l'un à l'autre, à en avoir un mélange habituel dans toutes les saisons; que la sérénité du ciel se soutienne longtems de suite, & que, s'il devient pluvieux, ce soit aussi pour quelque tems, afin que les différentes impressions que les corps animés en reçoivent soient durables, & que les alternatives du chaud, du froid, du sec & de l'humide, ne soient pas trop promptes, trop répétées; parce que cette inégalite trop marquée cause des altérations nuisibles dans l'économie animale, sur tout relativement à la transpiration insensible. Voyez Transpiration.

Plus l'air est pesant, plus il est favorable à la santé, sur - tout s'il est en même tems plutôt froid que chaud; il est plus élastique; il augmente la force des vaisseaux, sur - tout dans les poumons qu'il dilate plus parfaitement, & il rend ainsi la respiration plus libre. On ne doit cependant pas juger de la pe anteur de l'air par le sentiment d'affaistement que l'on éprouve dans les tems couverts, nébuleux, pluvieux, avec un vent chaud, où tout le monde se plaint de se sentir appesanti, accablé; c'est alors que l'air est le plus léger, il soutient moins les va sseaux contre l'effort des humeurs, ce qui produit les effets qui viennent d'être rapportés: l'air est au contraire plus pesant à proportion qu'il est plus serein, & qu'il se soutient long - tems dans cet état. La pesanteur de l'air est très - rarement excessive par cause naturelle; cette qualité est par consequent très rarement au point de nuire à la santé, au lieu que sa légéreté, en favorisant trop la dilatation des vaisseaux dans toute l'habitude du corps & dans les poumons principalement, peut donner lieu à ce qu'il se fasse des engorgemens qui causent de grands embarras, de grands désordres dans la circulation du sang & dans le cours de toutes les humeurs.

On juge des différens changemens qui se font dans les qualités de l'air, par le moyen des différens instrumens que l'art a appropriés à cet effet: on observe les différens degrés de chaleur & du froid par l'inspection du thermometre, ceux du different poids de l'air par celle du barometre, & la sécheresse ou l humidité qui y dominent, par le moyen de l'hygrometre. Voyez Thermometre, Barometre, Hygrometre

On observe constamment qu'il n'est aucun tems de l'année, où les qualités de l'air soient plus variables, que dans l'automne & au commencement du printems: c'est ce qui rend ces saisons si sujettes à produire des maladies. Cependant, comme le printems est la saison la plus tempérée, ele est aussi a cet égard la plus avantageuse pour la santé: puisque c'est le tems de l'année ou les animaux sont le plus vigoureux & le plus propres à la géneration: ce qui convient principalement au mois de Mai; le mois de Septembre approche beaucoup d'avoir les mêmes avantages.

Mais il faut avoir attention dans le printems de ne pas se presser de prendre des habits légers, & dans l'automne de ne pas tarder à les quitter pour se couvrir davantage. Selon l'observation de Sydenham, la plûpart des maladies catarreuses inflammatoires qui sont com nes dans ces saisons, ne doivent être attribuées qu'au changement d'habits, ou à l'usage trop continué de ceux qui ne tiennent pas les corps assez défendus contre le froid de l'air & l'inconstance de sa température: c'est ce qui fait dire à Horace à ce sujet:

Matutina parùm cautos soepè frigora mardent.

On ne peut être trop attentif dans les tems froids à se tenir la tête sur - tout, l'estomac & les piés chau<pb->

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