ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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NAGER (Page 11:5)

NAGER, v. n. l'art ou l'action de nager consiste à soutenir le corps vers la surface de l'eau, & à s'avancer ou faire du chemin dans l'eau par le mouvement des bras & des jambes, &c. Voyez Animal.

L'homme est le seul des animaux qui apprenne à nager; beaucoup d'autres animaux nagent naturellement; mais un grand nombre d'animaux ne nagent point du tout.

Chez les anciens Grecs & Romains, l'art de nager faisoit une partie si essentielle de l'éducation de la jeunesse, qu'en parlant d'un homme ignorant, grossier, & mal élevé, ils avoient coutume de dire proverbialement, qu'il n'avoit appris ni à lire ni à nager.

A l'égard des poissons, c'est leur queue qui contribue le plus à les faire nager, & non pas leurs nageoires, comme on se l'imagine assez généralement; c'est pour cette raison que la nature leur a donné plus de force & plus de muscles dans cette partie que dans toutes les autres, tandis que nous remarquons le contraire dans tous les autres animaux, dont les parties motrices sont toujours les plus fortes, comme les cuisses dans l'homme, pour le faire marcher; les muscles pectoraux dans les oiseaux pour les faire voler, &c. Voyez Marche, Vol, &c.

La maniere dont les poissons s'avancent dans l'eau est parfaitement bien expliquée dans Borelli, de motu animal. part. I. chap. xxiij. ils ne se servent de leurs nageoires que pour tenir leurs corps en balance & en equilibre, & pour empêcher qn'il ne vacille en nageant. Voyez Nageoire & Queue.

M. Thevenot a publié un livre curieux intitulé, l'art de nager, démontré par figures. Et avant lui Everard Digby, anglois, & Nicolas Winman, allemand, avoient deja donné les regles de cet art. Thevenot n'a fait, pour ainsi dire, que copier ces deux auteurs; mais s'il se fût donné la peine de lire le traité de Borelli, avec la moitié de l'application qu'il a lu les deux autres, il n'auroit pas soutenu, comme il l'a fait, que l'homme nageroit naturellement, comme les autres animaux, s'il n'en étoit empêché par la peur qui augmente le danger.

Nous avons plusieurs expériences qui détruisent ce sentiment: en effet, que l'on jette dans l'eau quelque bête qui vient de naître, elle nagera; que l'on y jette un enfant qui ne puisse point encore être susceptible de peur, il ne nagera point; & il ira droit au fond. La raison en est que la structure & la configuration de la machine du corps humain sont très differentes de celles des bêtes brutes, & sur - tour, ce qui est fort extraordinaire, par rapport à la situation du centre de sa gravité. Dans l'homme c'est la tête qui est d'une pesanteur excessive, eu égard à la pesanteur du reste de son corps, ce qui vient de ce que sa tête est garnie d'une quantité considérable de cervelle, & que toute sa masse est composée d'os, & de parties charnues, sans qu'il y ait des cavités remplies de la seule substance de l'air: de sorte que [p. 6] la tête de l'homme s'enfonçant par sa propre gravité dans l'eau, cèlle - ci ne tarde gueres à remplir le nez & les oreilles, & que le fort ou le pesant emportant le foible ou le leger, l'homme se noie, & périt en peu de tems.

Mais dans les bêtes brutes, comme leur tête ne renferme que très - peu de cervelle, & que d'ailleurs il s'y trouve beaucoup de sinus, ou cavités pleines d'air, sa pesanteur n'est pas proportionnée au reste de leurs corps, de sorte qu'elles n'ont aucune peine à soutenir le nez au - dessus de l'eau, & que suivant les principes de la statique pouvant ainsi respirer librement, elles ne courent aucun risque de se noyer.

En effet, l'art de nager, qui ne s'acquiert que par l'expérience & par l'exercice, consiste principalement dans l'adresse de tenir la tête hors de l'eau, de sorte que le nez & la bouche étant en liberté l'homme respire à son aise, le mouvement & l'extension de ses piés & de ses mains lui suffisent pour le soutenir vers la surface de l'eau, & il s'en sert comme de rames pour conduire son corps. Il suffit même qu'il fasse le plus petit mouvement, car le corps de l'homme est à - peu - près de la même pesanteur qu'un égal volume d'eau, d'où il s'ensuit par les principes de l'hydrostatique que le corps de l'homme est déja presque de lui - même en équilibre avec l'eau, & qu'il ne faut que peu de forces pour le soutenir.

M. Bazin, correspondant de l'académie royale des Sciences de Paris, a fait imprimer il y a quelques années à Strasbourg un petit ouvrage dans lequel il examine pourquoi les bêtes nagent naturellement, & pourquoi au contraire l'homme est obligé d'en chercher les moyens. Il en donne des raisons prises dans la différente structure du corps de l'homme & de celui des animaux, mais ces raisons sont différentes de celles que nous avons apportées ci - dessus. Selon lui les bêtes nagent naturèllement parce que le mouvement naturel qu'elles font pour sortir de l'eau quand elles y sont jettées, est un mouvement propre par lui - même à les y soutenir: en effet, un animal à quatre piés qui nage est dans la même situation, & fait les mêmes mouvemens que quand il marche sur la terre ferme. Il n'en est pas de même de l'homme; l'effort qu'il feroit pour marcher dans l'eau, en conservant la même situation que quand il marche naturellement, ne serviroit qu'à le faire enfoncer, ainsi l'art de nager ne lui peut être naturcl.

Nager (Page 11:6)

Nager, l'action de nager, (Médecine.) il y a peu de maladiés chroniques dans lesquelles la nage soit bienfaisante, aussi l'ordonne - t - on rarement; on prend cet exercice seulement en été; il maigrit les personnes pléthoriques, facilite la transpiration, échauffe, attenue, & rend ceux qui y sont accoutumés moins sensibles aux injures de l'air, la nage ou le bain dans la mer est salutaire à ceux qui sont attaqués d'hydropisie, de gales, de maladies inflammatoires, d'exanthemes, d'élephanthiasis, de fluxion sur les jambes, ou sur quelqu'autre partie du corps.

La nage, soit dans l'eau douce, soit dans l'eau salée, qui est trop fraîche, porte à la tête; & si on y demeure trop longtems, sa fraicheur attaque les nerfs.

La nage dans l'eau naturellement chaude peut être aussi prejudiciable, cependant bien des gens s'y expotent sans en être endommagés.

La nage se faisoit anciennement en se précautionnant & le preparant contre tous les accidens, soit par les onctions, soit par les frictions, & en se précipuant de quelque lieu élevé. Oribase, liv. VI. ch.xxvij.

La nage a les mêmes avantages les & mêmes inconveniens que le bain, ainsi on peut la considérer comme un exercice; car on s'y donne de grands mouvemens qui sont fort salutaires. Voyez Gymnase & Gymnastique. Quant à son avantage comme bain, voyez Bain. C'est la meilleure façon de se laver & nettoyer le corps quand on peut la supporter.

Nager à sec (Page 11:6)

Nager à sec, (Maréchall.) opération que les Maréchaux ont inventée pour les chevaux qui ont eu un effort d'épaule; elle consiste à attacher la jambe saine en faisant joindre le pié au coude, au moyen d'une longe qu'ils passent par - dessous le garot, & dans cet état ils contraignent le cheval à marcher à trois jambes, & par conséquent à faire de nouveaux efforts sur la jambe malade, sous prétexte que par ce moyen il s'échauffe l'épaule, & qu'ainsi les remedes pénetrent plus avant les pores étant plus ouverts; mais il est aisé de voir que cet expédient ne fait qu'irriter la partie, augmenter la douleur, & rendre par conséquent le mal plus considérable qu'il n'étoit.

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