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ATTAQUE (Page 1:825)
* ATTAQUE, en Médecine, se dit d'un accès ou d'un paroxysme.
Ainsi on dit ordinairement, attaque de goute,
attaque d'apoplexie. Cette attaque a été violente.
Voyez
Attaque (Page 1:825)
Attaque (Page 1:825)
Pour prendre le parti de brusquer le siége d'une place, il faut être assûré de la foiblesse de la garnison, ou que la place ne soit défendue que par les habitans, & que les défenses soient en mauvais état.
L'objet des ces sortes d'attaques est de s'emparer d'abord des dehors de la place, de s'y bien établir, & de faire ensuite des tranchées ou des couverts pour mettre les troupes à l'abri du feu des remparts, & continuer ensuite le progrès des attaques, pour s'emparer du corps de la place.
Lorsque cette attaque réussit, elle donne le moyen d'abréger beaucoup le siége: mais pour y parvenir, il faut nécessairement surprendre la place, attaquer vigoureusement l'ennemi dans son chemin couvert & ses autres dehors, & ne pas lui donner le tems de se reconnoître. En un mot il faut brusquer les attaques, c'est - à - dire, s'y porter avec la plus grande vivacité.
Il y a plusieurs circonstances où cette sorte d'attaque peut se tenter, comme lorsque la saison ne permet pas de faire un siége dans les formes; qu'on est informé que l'ennemi est à portée de venir en peu de tems au secours de la place, & qu'on n'est pas en état de lui résister; enfin, lorsqu'il est essentiel de s'en rendre maître très - promptement, & que la nature des fortifications & des troupes qui les défendent ne permettent pas de penser qu'elles soient en état de résister à une attaque vive & soûtenue.
Attaque d'emblée (Page 1:825)
Attaques de bastions (Page 1:825)
Les batteries établies sur le haut du glacis pour
battre en breche les faces des bastions, tirent sur la
partie des faces où doit être la breche, & elles tirent
toutes ensemble & en sappe, comme on le
pratique dans l'attaque de la demi - lune: & lorsqu'elles ont fait une breche suffisante pour qu'on
puisse monter à l'assaut sur un grand front, on conserve
une partie des pieces pour battre le haut de
la breche, & on en recule quelques - unes sur le derriere
de la platte - forme, qu'on dispose de maniere
qu'elles puissent battre l'ennemi lorsqu'il se présente
vers le haut de la breche. Tout cela se fait pendant
le travail des descentes du fossé & de son passage.
On se sert aussi des mines pour augmenter la breche,
même quelquefois pour la faire, & pour cet
effet on y attache le mineur.
Pour attacher le mineur lorsque le fossé est sec,
il faut qu'il y ait un logement d'établi proche l'ouverture
de la descente, pour le soûtenir en cas que
l'assiégé fasse quelque sortie sur le mineur. On lui
fait une entrée dans le revêtement avec le canon,
le plus près que l'on peut du fond du fossé, afin d'avoir
le dessous du terrein que l'ennemi occupe, &
des galeries qu'il peut avoir pratiquées dans l'intérieur
des terres du bastion. On peut avec le canon
faire un enfoncement de 5 ou 6 piés, pour que le
mineur y soit bientôt à couvert. Il s'occupe d'abord
à tirer les décombres du trou, pour pouvoir y placer
un ou deux de ses camarades, qui doivent lui
aider à déblayer les terres de la galerie.
Lorsque le fossé est sec, & que le terrein le permet,
le mineur le passe quelquefois par une galerie
soûterraine qui le conduit au pié du revêtement;
lorsque le fossé est plein d'eau, on n'attend pas toûjours
que le passage du fossé soit entierement achevé
pour attacher le mineur à la face du bastion. On
lui fait un enfoncement avec le canon, ainsi qu'on
vient de le dire, mais un peu au - dessus de la superficie
de l'eau du fossé, afin qu'il n'en soit pas incommodé
dans sa galerie, & on le fait passer avec un
petit bateau dans cet enfoncement. L'ennemi ne
néglige rien pour l'étouffer dans sa galerie. Lorsque le fossé est sec, il jette une quantité de différentes
compositions d'artifice vis - à - vis l'oeil de la mine;
cet artifice est ordinairement accompagné d'une
grêle de pierres, de bombes, de grenades, &c.
qui empêche qu'on n'aille au secours du mineur.
M. de Vauban dans son traité de la conduite des siéges,
propose de se servir de pompes pour éteindre ce
feu. On en a aujourd'hui de plus parfaites & de
plus aisées à servir, que de son tems, pour jetter
de l'eau dans l'endroit que l'on veut: mais il ne paroît
pas que l'on puisse toûjours avoir assez d'eau
dans les fossés secs pour faire joüer des pompes, &
que d'ailleurs il soit aisé de s'en servir sans trop se
découvrir à l'ennemi. Quoi qu'il en soit, lorsque
Le mineur ayant percé le revêtement, il fait
derriere de part & d'autre deux petites galeries de
12 à 14 piés, au bout desquelles il pratique de part
& d'autre deux fourneaux; savoir, l'un dans l'épaisseur
du revêtement, & l'autre enfoncé de 15
piés dans les terres du rempart. On donne un foyer
commun à ces quatre fourneaux, lesquels prennent
feu ensemble, & font une breche tres - large & très spacieuse.
Lorsqu'il y a des contre - mines pratiquées dans
les terres du rempart, & le long de son revêtement,
on fait ensorte de s'en emparer & d'en chasser les
mineurs. M. Goulon propose pour cela de faire sauter
deux fougaces dans les environs pour tâcher
de la crever; après quoi si l'on y est parvenu, il
veut qu'on y entre avec dix ou douze grenadiers,
& autant de soldats commandés par deux sergens;
qu'une partie de ces grenadiers ayent chacun 4 grenades,
& que les autres soient chargés de 4 ou 5
bombes, dont il n'y en ait que 3 de chargées, les
deux autres ayant néanmoins la fusée chargée comme
les trois premieres. Les deux sergens se doivent
jetter les premiers l'épée ou le pistolet à la main dans
la contre - mine, & être suivis des grenadiers. Si les
assiégés n'y paroissent pas pour défendre leur contre - mine, on y fait promptement un logement avec
des sacs à terre. Ce logement ne consiste qu'en
une bonne traverse qui bouche entierement la galerie
de la contre - mine du côté que l'ennemi y peut
venir. Si l'ennemi vient pour s'opposer à ce travail,
les grenadiers doivent leur jetter leurs trois
bombes chargées & se retirer promptement, de même
que leurs camarades, pour n'être point incommodés
de l'effet de ces bombes. La fumée qu'elles
font en crevant, & leur éclat, ne peuvent manquer
d'obliger l'ennemi d'abandonner la galerie pour
quelque tems: mais dès qu'elles ont fait tout leur
effet, les deux sergens & les grenadiers avec les
soldats dont ils sont accompagnés, rentrent promptement
dans la galerie, & ils travaillent avec diligençe
à leur traverse pour boucher la galerie. Si
l'ennemi veut encore interrompre leur ouvrage, ils
lui jettent les deux bombes non chargées, qui l'obligent
de se retirer bien promptement; & comme
l'effet n'en est point à craindre, ce que l'ennemi
ignore, on continue de travailler à perfectionner
la traverse: on y pratique même des ouvertures ou
creneaux pour tirer sur l'ennemi, en cas qu'il paroisse
dans la partie de la galerie opposée à la traverse.
Lorsqu'il n'y a point de galerie ou de contremine
derriere le revêtement du rempart, ou lorsqu'il y en a une, & qu'on ne peut y parvenir aisément,
le mineur ne doit rien négliger pour tâcher
de la découvrir, & il doit en même tems veiller
avec beaucoup d'attention, pour ne se point laisser
surprendre par les mineurs ennemis, qui viennent
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On peut aussi crever la galerie de l'ennemi,
lorsque l'on n'en est pas fort éloigné, avec plusieurs
bombes que l'on introduit dans les terres du mineur
ennemi, & que l'on arrange de maniere qu'elles
fassent leur effet vers son côté. Les mineurs en
travaillant de part & d'autre pour aller à la découverte,
& se prévenir réciproquement, ont de grandes
sondes avec lesquelles ils sondent l'épaisseur
des terres, pour juger de la distance à laquelle ils
peuvent se trouver les uns des autres. Il faut être
alerte là - dessus, & lorsque le bout de la sonde paroît,
se disposer à remplir le trou qu'elle aura
sait, aussi - tôt qu'elle sera retirée, par le bout d'un
pistolet, qui étant introduit bien directement dans
ce trou, & tiré par un homme assûré, dit M. de
Vauban, ne peut guere manquer de tuer le mineur
ennemi. On doit faire suivre le premier coup
de pistolet de trois ou quatre autres; & ensuite nettoyer
le trou avec la sonde, pour empêcher que
le mineur ennemi ne le bouche de son côté. Il est
important de l'en empêcher, pour qu'il ne puisse
pas continuer son travail dans cet endroit, & qu'il
soit totalement obligé de l'abandonner.
Toutes ces chicanes & plusieurs autres qu'on
peut voir dans les mémoires de M. de Vauban, font
connoître que l'emploi de mineur demande non seulement
de l'adresse & de l'intelligence, mais
aussi beaucoup de courage pour parer & remédier
à tous les obstacles qu'il rencontre dans la conduite
des travaux dont il est chargé: il s'en pare assez ai<cb->
Pour s'assurer si l'on travaille dans la galerie,
le mineur se sert ordinairement d'un tambour sur
lequel on met quelque chose; l'ébranlement de la
terre y cause un certain trémoussement qui avertir
du travail qu'on fait dessous. Il prête aussi l'oreille
attentivement sur la terre: mais le trémoussement
du tambour est plus sûr. C'est un des avantages des
plus considérables des assiégés de pouvoir être maîtres
du dessous de leur terrein: ils peuvent arrêter
par - là les mineurs des assiégeans à chaque pas, &
leur faire payer chérement le terrein, qu'ils se trouvent
à la fin obligés de leur abandonner: je dis de
leur abandonner; parce que les assiégeans qui ont
beaucoup plus de monde que les assiégés, beaucoup
plus de poudre, & qui sont en état de pouvoir
réparer les pertes qu'ils font, soit en hommes
soit en munitions, doivent à la fin forcer les assiégés,
qui n'ont pas les mêmes avantages, de se rendre,
faute de pouvoir, pour ainsi dire, se renouveller
de la même maniere.
Pendant que le mineur travaille à la construction
de sa galerie, on agit pour ruiner entierement
toutes les défenses de l'ennemi, & pour le mettre
hors d'état de défendre sa breche & de la réparer:
pour cela on fait un feu continuel sur les breches,
qui empêche l'ennemi de s'y montrer, & de pouvoir
s'avancer pour regarder les travaux qui peuvent
se faire dans le sossé ou au pié des breches.
S'il y a une tenaille, on place des batteries dans les
places d'armes rentrantes du chemin couvert de
la demi - lune, qui couvrent la courtine du front attaqué,
qui puissent plonger dans la tenaille, & empêcher
que l'ennemi ne s'en serve pour incommoder
le passage du fossé. On peut aussi, pour lui imposer,
établir une batterie de pierriers dans le logement
le plus avancé de la gorge de la demi - lune:
cette batterie étant bien servie, rend le séjour de
la tenaille trop dangereux & trop incommode, pour
que l'ennemi y reste tranquillement, & qu'il y donne
toute l'attention nécessaire pour incommoder le
passage du fossé.
Quelquefois l'ennemi pratique des embrasures
biaisées dans la courtine, d'où il peut aussi tirer du
canon sur les logemens du chemin couvert, ce qui
incommode & ces logemens, & le commencement
de la descente du fossé. Les assiégés, au dernier
siége de Philisbourg, en avoient pratiqué de
semblables dans les deux courtines de l'attaque, ce
qui auroit fait perdre bien du monde, s'il avoit
fallu établir des batteries sur leur contrescarpe, &
faire le passage du fossé de la place.
Le moyen d'empêcher l'effet de ces batteries, est
de tâcher de les ruiner avec les bombes, & de faire
en sorte, lorsque le terrein le permet, d'enfiler la
courtine par le ricochet. On peut aussi placer une
batterie de quatre ou cinq pieces de canon sur le
haut de l'angle flanqué de la demi - lune: dans cette
position elle peut tirer directement sur la courtine,
& plonger vers la tenaille, & la poterne de
communication, par où l'ennemi communique dans
le fosse lorsqu'il est sec. Enfin on se sert de tous les
expédiens, & de tous les moyens que l'intelligence,
l'expérience & le génie peuvent donner, pour
se rendre supérieur à tout le feu de l'ennemi, pour
le faire taire, ou du moins pour que l'ennemi ne
puisse se montrer à aucunes de ses défenses, sans
y être exposé au feu des batteries & des logemens.
Nous n'avons point parlé jusqu'ici des flancs concaves
& à orillons: on sait que l'avantage de ces
flancs est principalement de conserver un canon
proche le revers de l'orillon, qui ne pouvant être
vû du chemin couvert opposé, ne peut être dé<pb->
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Supposons présentement que les passages des fossés
soient dans l'état de perfection nécessaire pour
qu'on puisse passer dessus; que le canon ou les mines
ayent donné aux breches toute la largeur qu'elles
doivent avoir, pour qu'on puisse y déboucher
sur un grand front: que les rampes soient adoucies,
& qu'on puisse y monter facilement pour parvenir
au haut de la breche. On peut s'y établir en
suivant l'un des deux moyens dont on parlera dans
l'article de la demi lune; savoir, en y faisant monter
quelques sappeurs, qui à la faveur du feu des
batteries & des logemens du chemin couvert, commencent
l'établissement du logement; ou en y montant
en corps de troupes, pour s'y établir de vive
force; ou ce qui est la même chose, en donnant
l'assaut au bastion.
Si l'ennemi n'a point pratiqué de retranchement
dans l'intérieur du bastion, il ne prendra guere le
parti de soûtenir un assaut qui l'exposeroit à être
emporté de vive force, à être pris prisonnier de
guerre, & qui exposeroit aussi la ville au pillage
du soldat.
Tout étant prêt pour lui donner l'assaut, il battra
la chamade, c'est à - dire, qu'il demandera à se
rendre à de certaines conditions: mais si les assiégeans
présument qu'ils se rendront maîtres de la
place par un assaut sans une grande perte, ils ne
voudront accorder que des conditions assez dures.
Plus les assiégés sont en état de se défendre, & plus
ils obtiennent des conditions avantageuses, mais
moins honorables pour eux. Le devoir des officiers
renfermés dans une place, est de la défendre autant
qu'il est possible, & de ne songer à se rendre
que lorsqu'il est absolument démontré qu'il y a impossibilité
de résister plus long - tems sans exposer
la place & la garnison à la discrétion de l'assiégeant.
Une défense vigoureuse se fait respecter
d'un ennemi généreux, & elle l'engage souvent à
accorder au gouverneur les honneurs de la guerre,
dûs à sa bravoure & à son intelligence.
Nous supposons ici que de bons retranchemens
pratiqués long - tems avant le siége, ou du moins
des son commencement, dans le centre ou à la
gorge des bastions, mettent l'assiégé en état de soûtenir
un assaut au corps de sa place, & qu'il se réserve
de capituler derriere ses retranchemens. Il
faut dans ce cas se résoudre d'emporter la breche
de vive force, & d'y faire un logement sur le haut,
apres en avoir chassé l'ennemi.
Lorsqu'on se propose de donner l'assaut aux bastions, on fait pendant le tems qu'on construit &
qu'on charge les mines, un amas considérable de
Lorsqu'on est préparé pour mettre le feu aux
mines, on commande tous les grenadiers de l'armée
pour monter l'assaut: on les fait soûtenir de
détachemens & de bataillons en assez grand nombre,
pour que l'ennemi ne puisse pas résister à leur
attaque. Ces troupes étant en état de donner, on
fait joüer les mines; & lorsque la poussiere est un
peu tombée, les grenadiers commandés pour marcher,
& pour monter les premiers, s'ébranlent
pour gagner le pié de la breche, où étant parvenus,
ils y montent la bayonnette au bout du fusil,
suivis de toutes les troupes qui doivent les soûtenir.
L'ennemi qui peut avoir conservé des fourneaux,
ne manquera pas de les faire sauter. Il fera
aussi tomber sur les assaillans tous les feux d'artifice
qu'il pourra imaginer, & il leur fera payer le
plus cher qu'il pourra, le terrein qu'il leur abandonnera
sur le haut de la breche: mais enfin il faudra
qu'il le leur abandonne; la supériorité des assiégeans
doit vaincre à la fin tous les obstacles des
assiégés. S'ils sont assez heureux pour résister à un
premier assaut, ils ne le seront pas pour résister à
un second, ou à un troisieme: ainsi il faudra qu'ils
prennent le parti de se retirer dans leurs retranchemens.
Aussi - tôt qu'ils auront été repoussés, & qu'ils
auront abandonné le haut de la breche, on fera
travailler en diligence au logement. Il consistera
d'abord en une espece d'arc de cercle, dont la convexité
sera tournée vers l'ennemi, s'il y a une breche
aux deux faces des deux bastions; autrement
on s'établira simplement au haut de la breche. On
donne l'assaut à toutes les breches ensemble; parlà
on partage la résistance de l'ennemi, & on la
rend moins considérable. Pendant toute la durée
de cette action, les batteries & les logemens font
le plus grand feu sur toutes les défenses de l'ennemi,
& dans tous les lieux où il est placé, & sur
lesquels on ne peut tirer sans incommoder les
troupes qui donnent sur les breches.
Le logement sur la breche étant bien établi, on
poussera des sappes à droite & à gauche vers le
centre du bastion. On fera monter du canon sur la
breche, pour battre le retranchement intérieur;
on passera son fossé, & on s'établira sur sa breche,
en pratiquant tout ce qu'on vient de dire pour les
bastions. Si ce premier retranchement étoit suivi
d'un second, l'ennemi apres avoir été forcé de l'abandonner,
se retireroit dans celui - ci pour capituler.
On l'attaqueroit encore comme dans le premier,
& enfin on le forceroit de se rendre. Il est
assez rare de voir des défenses poussées aussi loin
que nous avons supposé celle - ci: mais ce long détail
étoit nécessaire, pour donner une idée de ce
qu'il y auroit à faire, si l'ennemi vouloit pousser
la résistance jusqu'à la derniere extrémité.
Dans l'attaque des retranchemens intérieurs, outre
le canon, il faut y employer les bombes & les
pierriers. Les bombes y causent de grands ravages,
parce que les assiégés sont obligés de se tenir en
gros corps dans ces retranchemens, qui sont toûjours
assez petits; & par cette raison les pierriers
y sont d'un usage excellent par la grêle de pierres
qu'ils font tomber dans ces ouvrages, qui tuent &
estropient beaucoup de monde.»
Attaque (Page 1:828)
Attaque de flanc (Page 1:829)
Attaque de front (Page 1:829)
Attaque des lignes de circonvallation (Page 1:829)
Le plus difficile & le plus dangereux de cette attaque, c'est le comblement du fossé. On se sert pour cet effet de fascines; chaque soldat en porte une devant lui; ce qui sauve bien des coups de fusil avant qu'on arrive, sur - tout quand elles sont bien faites & composées de menu bois. Lorsqu'on est arrivé sur le bord du fossé, les soldats se les donnent de main en main pendant qu'on les passe par les armes. Il faut avoüer que cette méthode est fort incommode & sort meurtriere. M. le chevalier de Folard, qui fait cette observation, propose, pour conserver les troupes dans cette action, de faire plusieurs chassis de 7 à 8 piés de large sur 10 à 12 de longueur, suivant la largeur du fossé. Ces chassis doivent être composés de 3 ou 4 soiveaux de brin de sapin de 4 pouces de largeur sur 5 d'épaisseur, pour avoir plus de force pour soûtenir le poids des soldats qui passeront dessus, avec des travers bien emmortoises. On cloue dessus des planches de sapin. Pour mieux assûrer ces ponts, on peut pratiquer aux extrémités des grapins, qui s'enfoncent sur la berme ou sur le sascinage de, lignes.
Lorsqu'on veut se servir de ces ponts, il faut les faire monter dans le camp & les voiturer sur des chariots derriere les colonnes, à une certaine distance des retranchemens: apres quoi on les fait porter par des soldats commandés à cet esset, qui les jettent sur le fossé lorsque les troupes y sont arrivées, observant de les poser & placer à côté les uns des autres, de maniere qu'ils puissent se toucher. Vingt ponts construits de la sorte, suffisent pour le passage d'une colonne, & laisseront encore des espaces suffisans pour celui des grenadiers.
On peut encore se servir pour le comblement du fossé des lignes, d'un autre expédient qui exige moins de préparatifs. Il faut faire faire de grands sacs de grosse toile, de 8 prés de long, qu'on remplira des deux côtés, de paille, de feuilles d'arbres, ou de fumier, qui est encore meilleur à cause du feu. On roulera sur trois rangs paralleles, un nombre de ces balots à la tête & sur tout le front des colonnes, qu'on jettera dans le fossé, d'abord le premier rang, ensuite le second, & ainsi des autres, s'il en faut plusieurs. Deux ou trois de ces balots suffiront de reste pour combler le fossé, si on leur donne cinq piés de diametre: comme il peut rester quelques vuides entre ces balots, à cause de leur rondeur, on jettera quelques fascines dessus, que les soldats des premiers rangs des colonnes doivent porter. Cette méthode
Attaques (Page 1:829)
Regler les attaques d'une place, c'est déterminer le nombre qu'on en veut faire, & les côtés ou les fronts par lesquels on veut l'attaquer: c'est aussi fixer la forme & la figure des tranchées. Avoir les attaques d'une place, c'est avoir un plan sur lequel les tranchêes, les logemens, les batteries, &c. sont tracées.
Maximes ou principes qu'on doit observer dans l'attaque des places. I. Il faut s'approcher de la place sans en être découvert, directement, ou obliquement, ou par le flanc.
Si l'on faisoit les tranchées en allant directement à la place, par le plus court chemin, l'on y seroit en butte aux coups des ennemis postés sur les pieces de la fortification où la tranchée aboutiroit; & si l'on y alloit obliquement, pour sortir de la direction du feu de l'endroit où l'on veut aller, & que la tranchée sût vûe dans toute sa longueur par quelqu'autre piece de la fortification de la place, les soldats placés sur cette piece de fortification verroient le flanc de ceux de la tranchée, laquelle se trouvant ainsi enfilée par l'ennemi, ne garantiroit nullement du feu de la place, les soldats qui seroient dedans.
Or, comme l'objet des tranchées est de les en garantir, il faut donc qu'elles soient dirigées de maniere qu'elles ne soient ni en vûe, ni enfilées par l'ennemi d'aucun endroit.
II Il faut éviter de faire plus d'ouvrage qu'il n'en est besoin pour s'approcher de la place sans être vû, c'est - à - dire, qu'il faut s'en approcher par le chemin le plus court qu'il est possible de tenir, en se couvrant ou détournant des coups de l'ennemi.
III. Que toutes les parties des tranchées se soûtiennent réciproquement, & que celles qui sont les plus avancées ne soient éloignées de celles qui doivent les defendre, que de 120 ou 130 toises, c'est - à - dire, de la portée du fusil.
IV. Que les paralleles ou places d'armes les plus éloignees de la place ayent plus d'étendue que celles qui en sont plus proches, afin de prendre l'assiégé par le flanc, s'il vouloit attaquer ces dernieres paralleles.
V. Que la tranchée soit ouverte ou commencée le plus pres de la place qu'il est possible, sans trop s'exposer, afin d'accélérer & diminuer les travaux du siége.
VI. Observer de bien lier les attaques, c'est - à - dire, d'avoir soin qu'elles ayent des communications pour pouvoir se donner du secours réciproquement.
VII. Ne jamais avancer un ouvrage en avant, sans qu'il soit bien soûtenu; & pour cette raison, dans l'intervalle de la seconde & de la troisieme place d'armes, faire de part & d'autre de la tranchée des retours de 40 ou 50 toises paralleles aux places d'armes, & construits de la même maniere, qui servent à placer des soldats pour protéger les travaux que l'on fait pour parvenir à la troisieme place d'armes. Ces sortes de retours, dont l'usage est le même que celui des places d'armes, se nomment demi - places d'armes.
VIII. Observer de placer les batteries de canon sur le prolongement des pieces attaquées, afin qu'elles en arrêtent le feu; & que les travaux en étant protégés, avancent plus aisément & plus promptement.
IX. Embrasser par cette raison toûjours le front [p. 830]
X. Eviter avec soin d'attaquer par des lieux serrés, comme aussi par des angles rentrans, qui donneroient lieu à l'ennemi de croiser ses feux sur les attaques.
On attaque ordinairement les places du côté le plus foible: mais il n'est pas toûjours aisé de le remarquer. On a beau reconnoître une place de jour & de nuit, on ne voit pas ce qu'elle renferme: il faut donc tâcher d'en être instruit par quelqu'un à qui elle soit parfaitement connue. Il ne faut rien négliger pour prendre à cet égard tous les éclaircissemens possibles.
Il n'y a point de place qui n'ait son fort & son foible; à moins qu'elle ne soit réguliere & située au milieu d'une plaine, qui n'avantage en rien une partie plus que l'autre; telle qu'est le Neuf - Brisach. En ce cas il n'est plus question d'en résoudre les attaques que par rapport aux commodités; c'est - à - dire, par le côté le plus à portée du quartier du roi, du parc d'artillerie, & des lieux les plus propres à tirer des fascines, des gabions, &c. Comme il se trouve peu de places fortifiées régulierement, la diversité de leur fortification & du terrein sur lequel elles sont situées demande autant de différentes observations particulieres pour leur attaque.
Si la fortification d'une place a quelque côté sur un rocher de 25, 30, 40, 50, ou 60 piés de haut, que ce rocher soit sain & bien escarpé, nous la dirons inaccessible par ce côté; si ce rocher bat auprès d'une riviere d'eau courante ou dormante, ce sera encore pis: si quelque côté en plein terrein est bordé par une riviere qui ne soit pas guéable, & qui ne puisse être détournée; que cette riviere soit bordée du côté de la place d'une bonne fortification capable d'en défendre le passage; on pourra la dire inattaquable par ce côté: si son cours est accompagné de prairies basses & marécageuses en tout tems, elle le sera encore davantage.
Si la place est environnée en partie d'eau & de marais, qui ne se puissent déssecher, & en partie accessible par des terreins secs qui bordent ces marais; que ces avenues soient bien fortifiées, & qu'il y ait des pieces dans le marais qui ne soient pas abordables, & qui puissent voir de revers les attaques du terrein ferme qui les joint; ce ne doit pas être un lieu avantageux aux attaques, à cause de ces pieces inaccessibles, parce qu'il faut pouvoir embrasser ce que l'on attaque. Si la place est toute environnée de terres basses & de marais, comme il s'en trouve aux Pays - bas, & qu'elle ne soit abordable que par des chaussées; il faut, 1°. considérer si on ne peut point dessécher les marais, s'il n'y a point de tems dans l'année où ils se dessechent d'eux - mêmes, & en quelle saison; en un mot, si on ne peut pas les faire écouler & les mettre à sec.
2°. Si les chaussées sont droites ou tortues, enfilées en tout ou en partie de la place, & de quelle étendue est la partie qui ne l'est pas, & à quelle distance de la place; quelle en est la largeur, & si l'on peut y tournoyer une tranchée en la défilant.
3°. Si on peut asseoir des batteries au - dessus ou à côté sur quelque terrein moins bas que les autres, qui puissent croiser sur les parties attaquées de la place.
4°. Voir si les chaussées sont si fort enfilées qu'il n'y ait point de transversales un peu considérables, qui fassent front à la place d'assez près; & s'il n'y a point quelqu'endroit qui puisse faire un couvert considérable contre elle, en relevant une partie de leur épaisseur sur l'autre, & à quelle distance de la place elles se trouvent.
5°. Si des chaussées voisines l'une de l'autre aboutissent à la place, se joignent, & en quel endroit; &
6°. De quelle nature est le rempart de la place & de ses dehors: si elle a des chemins couverts, si les chaussées qui les abordent y sont jointes; & s'il n'y a point quelqu'avant - fossé plein d'eau courante ou dormante qui les sépare. Où cela se rencontre, nous concluons qu'il ne faut jamais attaquer par - là, pour peu qu'il y ait d'apparence d'approcher de la place par ailleurs, parce qu'on est presque toujours enfilé & continuellement écharpé du canon, sans moyen de s'en pouvoir défendre, ni de s'en rendre maître, ni embrasser les parties attaquées de la place.
A l'égard de la plaine; il faut 1°. examiner par où on peut embrasser les fronts de l'attaque; parce que ceux - là sont toûjours à préférer aux autres.
2°. La quantité de pieces à prendre avant de pouvoir attirer au corps de la place, leur qualité, & celle du terrein sur lequel elles sont situées.
3°. Si la place est bastionnée & revêtue.
4°. Si la fortification est réguliere ou à peu près équivalente.
5°. Si elle est couverte par quantité de dehors, quels & combien; parce qu'il faut s'attendre à autant d'affaires qu'il y aura de pieces à prendre.
6°. Si les chemins couverts sont bien faits, contreminés & pallissadés; si les glacis en sont roides, & non commandés des pieces supérieures de la place.
7°. S'il y a des avant - fossés, & de quelle nature.
8°. Si les fossés sont revêtus & profonds, secs ou pleins d'eau, & de quelle profondeur: si elle est dormante ou courante, & s'il y a des écluses, & la pente qu'il y peut avoir de l'entrée de l'eau à leur sortie.
9°. S'ils sont secs & quelle en est la profondeur, & si les bords en sont bas & non revêtus; au reste on doit compter que les plus mauvais de tous sont les fossés pleins d'eau quand elle est dormante.
Les fossés qui sont secs, profonds & revêtus sont bons: mais les meilleurs sont ceux qui étant secs, peuvent être inondés, quand on le veut d'une grosse eau courante ou dormante: par ce qu'on peut les défendre secs, & ensuite les inonder, & y exciter des torrens qui en rendent le trajet impossible. Tels sont les fossés de Valenciennes du côté du Quesnoy, qui sont secs, mais dans lesquels on peut mettre telle quantité d'eau dormante ou courante qu'on voudra, sans qu'on le puisse empêcher. Tels sont encore les fossés de Landau, place moderne, dont le mérite n'est pas encore bien connu.
Les places qui ont de tels fossés avec des réservoirs d'eau qu'on ne peut ôter, sont très - difficiles à forcer, quand ceux qui les défendent, savent en faire usage.
Les fossés revêtus, dès qu'ils ont 10, 12, 15, 20 & 25 piés de profondeur, sont aussi fort bons; par ce que les bombes ni le canon ne peuvent rien contre ces revêtemens, & que l'on n'y peut entrer que par les descentes, c'est - à - dire, en défilant un à un, ou deux à deux au plus: ce qui est sujet à bien des inconvéniens; car on vous chicane par différentes sorties sur votre passage & vos logemens de mineurs: ce qui cause beaucoup de retardement & de perte, outre que quand il s'agit d'une attaque, on ne la peut soûtenir que foiblement; parce qu'il faut que tout passe par un trou ou deux, & toûjours en défilant avec beaucoup d'incommodité.
Il faut encore examiner si les fossés sont taillés dans le roc, si ce roc est continué & dur; car s'il est dur & mal aisé à miner, vous serez obligé de combler ces fossés jusqu'au rez du chemin couvert pour faire votre passage; ce qui est un long travail & difficile, sur - tout si le fossé est profond: car ces manoeuvres demandent beaucoup d'ordre & de tems, pendant le<pb-> [p. 831]
Après s'être instruit de la qualité des fortifications de la place que l'on doit attaquer, il en faut examiner les accès, & voir si quelque rideau, chemin creux ou inégalité du terrein, peut favoriser vos approches & vous épargner quelque bout de tranchée; s'il n'y a point de commandement qui puisse vous servir; si le terrein par où se doivent conduire les attaques est doux & aisé à renverser; s'il est dur & mêlé de pierres, cailloux & roquailles, ou de roches pelées, dans lequel on ne puisse que peu ou point s'enfoncer.
Toutes ces différences sont considérables; car si c'est un terrein aisé à manier, il sera facile d'y faire de bonnes tranchées en peu de tems, & on y court bien moins de risque. S'il est mêlé de pierres & de cailloux, il sera beaucoup plus difficile, & les éclats de canon y seront dangereux.
Si c'est un roc dur & pelé, dans lequel on ne puisse s'enfoncer, il faut compter d'y apporter toutes les terres & matériaux dont on aura besoin; de faire les trois quarts de la tranchée de fascines & de gabions, même de ballots de bourre & de laine, ce qui produit un long & mauvais travail, qui n'est jamais à l'épreuve du canon, & rarement du mousquet, & dont on ne vient à bout qu'avec du tems, du péril & beaucoup de dépense; c'est pourquoi il faut éviter tant que l'on peut, d'attaquer par de telles avenues.
Choix d'un front de place en terrein égal le plus favorable pour l'attaque. Il faut examiner & compter le nombre des pieces à prendre; car celui qui en aura le moins ou de plus mauvaises, doit être considéré comme le plus foible, si la qualité des fosiés ne s'y oppose point.
Il y a beaucoup de places situées sur des rivieres qui n'en occupent que l'un des côtés, ou si elles occupent l'autre, ce n'est que par des petits forts, ou des dehors peu considérables, avec lesquels on communique par un pont, ou par des bateaux au défaut de pont. Tel étoit autrefois Stenay, & tels sont encore Sedan, Mézieres, Charlemont, & Namur, sur la Meuse; Mets & Thionville, sur la Moselle; Huningue, Strasbourg & Philisbourg, sur le Rhin, & plusieurs autres.
Où cela se rencontre, il est plus avantageux d'attaquer le long des rivieres, au - dessus ou au - dessous, appuyant la droite ou la gauche sur un de leurs bords, & poussant une autre tranchée vis - à - vis, le long de l'autre bord, tendant à se rendre maître de ce dehors; ou bien on peut occuper une situation propre à placer des batteries de revers, sur le côté opposé aux grandes attaques.
Comme les batteries de cette petite attaque peuvent aussi voir le pont servant de communication de la place à ce dehors, les grandes attaques de leur côté en pourroient faire autant; moyennant quoi il seroit difficile que la place y pût communiquer longtems; d'où s'ensuivroit que pour peu que ce dehors fût pressé, l'ennemi l'abandonneroit, ou n'y feroit pas grande résistance, principalement s'il est petit, & peu contenant: mais ce ne seroit pas la même chose, si c'étoit une partie de la ville, ou quelque grand dehors, à peu près de la capacité de Wick, qui fait partie de la ville de Mastrick: tout cela mérite bien d'être démêlé, & qu'on y fasse de bonnes & sérieuses réflexions; car il est certain qu'on en peut tirer de grands avantages.
Après cela il faut encore avoir égard aux rivieres & ruisseaux qui traversent la ville, & aux marais & prairies qui accompagnent leur cours; car quand les terreins propres aux attaques aboutissent contre, ou les avoisinent de près, soit par la droite ou par la gauche, cela donne moyen, en prolongeant les places d'armes jusque sur les bords, de barrer les sorties de ce côté - là, & de mettre toute la cavalerie ensemble sur le côté des attaques qui n'est point favorisé de cet avantage; ce qui est un avantage considérable, parce que la cavalerie se trouvant en état de se pouvoir porter tout ensemble à l'action, elle doit produire un plus grand effet que quand elle est séparée en deux parties l'une de l'autre.
Outre ce que l'on vient de dire, il est bon encore de commander journellement un piquet de cavalerie & de dragons, dans les quartiers plus voisins des attaques, pour les pousser de ce côté - là, s'il arrivoit quelque sortie extraordinaire qui bouleversât la tranchée.
Pour conclusion, on doit toûjours chercher le foible des places, & les attaquer par - là par préférence aux autres endroits, à moins que quelque considération extraordinaire n'oblige d'en user autrement. Quand on a bien reconnu la place, on doit faire un petit recueil de ces remarques avec un plan, & le proposer au général & à celui qui commande l'artillerie, avec qui on doit agir de concert, & convenir après cela du nombre des attaques qu'on peut faire: cela dépend de la force de l'armée & de l'abondance des munitions.
Je ne crois pas qu'il soit avantageux de faire de fausses attaques, parce que l'ennemi s'appercevant de la fausseté des le troisieme ou quatrieme tour de la tranchée, il n'en fait plus de cas, & les méprise; ainsi c'est de la fatigue & de la dépense inutile.
L'on ne doit point faire non plus d'attaques séparées, à moins que la garnison ne soit très - foible, ou l'armée très - forte, parce qu'elles vous obligent à monter aussi fort à une seule qu à toutes les deux, & que la séparation les rend plus foibles & plus difficiles à servir.
Mais les attaques les meilleures & les plus faciles, sont les attaques doubles qui sont liées, parce qu'elles peuvent s'entre - secourir: elles sont plus aisées à servir, se concertent mieux & plus facilement pour tout ce qu'elles entreprennent, & ne laissent pas de faire diversion des forces de la garnison.
Il n'y a donc que dans certains cas extraordinaires & nécessités, pour lesquels je pourrois être d'avis de n'en faire qu'une, qui sont quand les fronts attaqués sont si étroits qu'il n'y a pas assez d'espace pour pouvoir développer deux attaques.
Il faut encore faire entrer dans la reconnoissance des places, celle des couverts pour l'établissement du petit parc, d'un petit hôpital, & d'un champ de bataille pour l'assemblée des troupes qui doivent monter à la tranchée, & des endroits les plus propres à placer les gardes de cavalerie.
Le petit parc se place en quelque lieu couvert, à la queue des tranchées de chaque attaque: il doit être garni d'une certaine quantité de poudre, de balles, grenades, meches, pierres - à - fusil, serpes, haches, blindes, martelets, outils, &c. pour les cas survenans & pressans, afin qu'on n'ait pas la peine de les aller chercher au grand pare quand on en a besoin.
Près de lui se range le petit hôpital, c'est - à - dire, les Chirurgiens & Aumôniers, avec des tentes, paillasses, matelats, & des remedes pour les premiers appareils des blessures. Outre cela, chaque bataillon mene avec soi ses Aumôniers, Chirurgiens majors, les Fraters, qui ne doivent point quitter la queue de leurs troupes.
A l'égard du champ de bataille pour l'assemblée [p. 832]
Quand il se trouve quelque ruisseau ou fontaine près de la queue des tranchées, ou sur le chemin, ce sont de grands secours pour les soldats de garde; c'est pourquoi il faut les garder, pour empêcher qu'on ne les gâte; & quand il seroit nécessaire d'en assûrer le chemin par un bout de tranchée fait exprès, on n'y doit pas hésiter.
On doit aussi examiner le chemin des troupes aux attaques, qu'il faut toûjours accommoder & régler par les endroits les plus secs & les plus couverts du canon.
Quand le quartier du Roi se trouve à portée des attaques, elles en sont plus commodes: mais cela ne doit point faire une sujétion considérable.
Il est bien plus important que le parc d'artillerie en soit le plus près qu'il est possible.
C'est encore une espece de nécessité de loger les ingénieurs, mineurs & sappeurs, le plus près des attaques que l'on peut, afin d'éviter les incommodités des éloignemens.
Les attaques étant donc résolues, on regle les gardes de la tranchée; savoir, l'infanterie sur le pié d'être du moins aussi forte que les trois quarts de la garnison, & la cavalerie d'un tiers plus nombreuse que celle de la place; de sorte que si la garnison étoit de quatre mille hommes d'infanterie, la garde de la tranchée doit être au moins de trois mille; & si la cavalerie de la place étoit de 400 chevaux, il faudroit que celle de la tranchée fût de 600.
Autrefois nos auteurs croyoient que pour bien faire le siége d'une place, il falloit que l'armée assiégeante fût dix fois plus forte que la garnison; c'est - à - dire, que si celle - ci étoit de 1000 hommes, l'armée devoit être de 10000; que si elle étoit de 2000, l'assiégeante devoit être de 20000; & si elle étoit de 3000, il falloit que l'armée, à peu de chose près, fût de 30000 hommes, selon leur estimation: en quoi ils n'avoient pas grand tort; & si l'on examine bien toutes les manoeuvres à quoi les troupes sont obligées pendant un siége, on n'en seroit pas surpris: car il faut tous les jours monter & descendre la tranchée; fournir aux travailleurs de jour & de nuit, à la garde des lignes, à celle des camps particuliers & des généraux, à l'escorte des convois & des fourrages; faire des fascines; aller au commandement, au pain, à la guerre, &c. de sorte que les troupes sont toûjours en mouvement, quelque grosse que soit une armée: ce qui étoit bien plus fatiguant autrefois qu'à présent, parce que les sieges duroient le double & le triple de ce qu'ils durent aujourd'hui, & qu'on y faisoit de bien plus grandes pertes. On n'y regarde plus de si près; & on n'hésite pas d'attaquer une place à six ou sept contre un; parce que les attaques d'aujourd'hui sont bien plus savantes qu'elles n'étoient autrefois. Attaque des places par M. le maréchal de Vauban.
Comme les fortifications particulieres & les différens accès des places en font varier le fort & le foible de plusieurs manieres, il faudroit autant de regles qu'il y a de places, si on vouloit entrer dans le détail de toutes les attaques des places: on se contentera donc de parler des situations les plus générales;
Attaque d'une place entourée de marais. Une place entourée de marais de tous côtés, & qui n'est accessible que par des chaussées pratiquées dans des marais, est dans un terrein très - peu favorable pour en former le siége.
Ce que l'on peut faire d'abord, est de travailler à dessécher le marais, si l'on peut y trouver quelqu'écoulement; & de faire ensorte de détourner les eaux qui y entrent: c'est ce que l'on peut faire assez aisément dans un pays plat ou uni: s'il s'y trouve de l'impossibilité, il faut prendre le parti d'aborder la place par les chaussées, en les élargissant, autant qu'il est possible, & en pratiquant des espaces pour l'emplacement des batteries.
Si la situation d'un tel terrein ne permet pas d'y construire des paralleles ou places d'armes à l'ordinaire, ces ouvrages y sont aussi moins utiles que dans un terrein d'un accès facile & praticable, parce que l'ennemi ne peut sortir de sa place en force pour tomber sur les travailleurs.
Les chaussées qui abordent la place peuvent être fort peu élevées, & seulement au - dessus du niveau des eaux du marais, ou bien elles peuvent avoir une élévation de deux ou trois piés au - dessus: si elles sont de la premiere espece, elles ne donneront point la terre nécessaire à la construction de la tranchée; & dans ce cas on est dans la nécessité de la faire de fascines, de sacs à laine, à terre, &c. si elles sont de la seconde espece, elles pourront fournir assez de terre pour la tranchée, en observant de la faire un peu plus large, afin d'avoir plus de terre pour en former le parapet, sans être obligé de creuser jusqu'au niveau de l'eau.
Il y a une chose qui mérite grande attention dans
ces chaussées; c'est d'observer si elles sont enfilées
de la place, auquel cas il est très - difficile de s'établir
dessus, & de faire aucun retour ou zig - zag, parce
qu'ils se trouveroient tous enfilés. Il est bien difficile
de remédier à un aussi grand inconvénient. Ajoûtons à cela, que s'il ne se rencontre dans ces chaussées
aucun endroit où l'on puisse placer des batteries
à ricochet, le siége sera très - difficile à former.
Si les marais impraticables rendent, pour ainsi
dire, les places qui en sont entourées hors des atteintes
d'un siége, il faut convenir aussi que de telles
places sont dans une fort mauvaise situation
pour la santé de la garnison & celle dès habitans.
Mais il y a très - peu de places qui soient totalement
entourées de marais: il y a presque toûjours quelque
côté qui offre un terrein plus favorable aux
approches; & alors quand on en forme le siége,
on évite autant que l'on peut l'attaque du côté des
marais. Quoique les autres fronts soient ordinairement
plus forts, on ne laisse pas de prendre le parti
d'attaquer la place de leur côté, parce que la facilité
des approches dédommage amplement de l'augmentation
des ouvrages qu'il faut prendre pour
s'en rendre le maître. Lorsque les marais sont véritablement
impraticables, la place n'a pas besoin d'être
aussi exactement fortifiée de leur côté que des
autres qui sont plus accessibles: mais il arrive quelquefois
que des marais crûs impraticables, ne le
sont pas véritablement; & alors si on en étoit instruit
bien exactement, on profiteroit de la sécurité
de l'ennemi à leur égard, pour attaquer la place par
leur côté, & s'en rendre maître avec bien moins
de tems & de perte. C'est à ceux qui sont chargés
de ces sortes d'entreprises, de bien faire reconnoître
les lieux avant que de se déterminer sur le choix
des attaques. Il y a d'ailleurs des marais qui sont impraticables
dans un tems, & qui ne le sont pas dans
un autre, sur - tout après une grande secheresse. Il
peut se trouver des paysans des environs de la place
qui en soient instruits; on ne doit rien négliger pour
être exactement informé du sol & de la nature de
ces marais. On sent bien que le tems le plus propre
& le plus favorable pour former des siéges en
terrein marécageux, est au commencement de l'automne,
lorsque les chaleurs de l'été l'ont en partie »
De l'attaque d'une place située le long d'une grande
riviere.
On conduit leurs attaques à l'ordinaire du côté
qui paroît le plus favorable, & on les dispose de
maniere qu'on puisse placer des batteries de l'autre
côté de la riviere, ou dans les îles qu'elle peut former
vis - à - vis la place, qui protegent l'avancement
des tranchées, & qui même quelquefois peuvent
battre en breche le front auquel on dirige les attaques. C'est ainsi que M. le maréchal de Vauban en
usa au siége du vieux Brisack en 1703. Une batterie
qu'il établit dans une des îles que le Rhin fait
vis - à - vis de cette ville nommée l'île des Cadets, d'où
l'on découvroit un bastion qui étoit le long du
Rhin, & que l'on pouvoit battre en breche par le
pié, accéléra beaucoup la prise de cette place, qui
se rendit le quatorzieme jour de l'ouverture de la
tranchée.
Au siége de Kell, en 1733, on plaça aussi des
batteries dans les îles du Rhin, qui firent breche à
l'ouvrage à corne de l'attaque, & à la face du bastion
de ce fort placé derriere l'ouvrage à corne.
Ces batteries battoient à ricochet la face & le chemin
couvert de ce bastion, dont la branche de l'ouvrage
à corne du côté du Rhin tiroit sa défense;
ce qui aida beaucoup à avancer la tranchée entre
c>te branche & le Rhin, & accéléra la capitulation
de ce fort.
Au siége de Philisbourg, en 1734, on s'empara
d'abord de l'ouvrage qui étoit vis - à - vis de la ville,
de l'autre côte du Rhin, & l'on y établit des bat<cb->
Lorsqu'il y a un pont sur la riviere vis - à - vis de la
ville, il est ordinairement couvert, ou par un ouvrage
à corne, ou par une demi - lune, &c. & commeil
est important de s'emparer de cet ouvrage, on peut
pour y parvenir aisément, placer des batteries vers
le bord de la riviere, qui puissent ruiner le pont ou
le couper, au moyen dequoi la communication de
l'ouvrage dont il s'agit, ne pouvant plus se faire
que difficilement avec la ville, l'ennemi se trouve
dans la nécessité de l'abandonner.
Une observation très - importante dans le siége
des villes placées le long des rivieres, c'est de savoir
à peu - près le tems où elles sont sujettes à se déborder,
& quelle est l'étendue de l'inondation la
plus grande, afin de mettre non - seulement les tranchées
à l'abri de tout accident à cet égard, mais
encore de placer le parc d'artillerie en lieu sûr, &
où l'inondation ne puisse pas s'étendre, & gâter les »
De l'attaque des places situées sur des hauteurs.
Dans des situations pareilles, on voit s'il n'y a
pas quelque hauteur dans les environs dont on puisse
se servir pour y établir des batteries à ricochet. S'il
n'est pas possible d'en trouver, il faut battre les défenses
par des batteries directes, & faire ensorte
d'en chasser l'ennemi par les bombes qu'il faut jetter
continuellement dans les ouvrages. A l'égard de
la disposition des tranchées & des paralleles, elle
doit suivre la figure du terrein, & l'on doit les arranger
du mieux qu'il est possible, pour qu'elles
produisent les effets auxquels elles sont destinées
dans les terreins unis.
Il faut observer ici que les lieux fort élevés, qui ne
peuvent être battus que par des batteries construites
dans des lieux bas, sont, pour ainsi dire, à l'abri du
ricochet; parce que le ricochet ne peut porter le
boulet que jusqu'à une certaine hauteur, comme
de 12 ou 15 toises. Dans de plus grandes élévations,
il faut pointer le canon si haut que l'affut ne le peut
soûtenir. Et si pour le moins fatiguer on diminue
la charge, il en arrive que le boulet n'a pas assez
de force pour aller jusqu'au lieu où il est destiné.
Il faut encore observer que lorsque l'on a des
tranchées à faire dans des terreins élevés, il faut
autant qu'il est possible, gagner d'abord le haut du
terrein pour y conduire la tranchée; parce qu'autrement
la supériorité du lieu donneroit non - seulement beaucoup d'avantage à l'ennemi pour faire
des sorties sur les tranchées construites dans le bas
du terrein, mais encore pour plonger dans ces tranchées;
ce qui en rendroit le séjour très - dangereux.
Les places situées sur des hauteurs sont quelquefois
entourées d'un terrein, sur la superficie duquel
il n'y a presque point de terre. Les tranchées y sont
extraordinairement difficiles, & il faut nécessairement
les construire de sacs à laine, de sacs à terre,
& autres choses qu'on apporte pour suppléer à la
terre que le terrein ne fournit point. Il se trouve
aussi que la plûpart de ces places sont construites
sur le roc, & alors l'établissement du mineur y est
bien long & bien difficile. On examine dans ce cas
s'il n'y a pas de veines dans le roc par lesquelles il
puisse être percé plus facilement.
Il faut dans ces situations s'armer de patience,
& vaincre par la continuité du travail tout ce que
[p. 834]
Pour faire breche dans un rempart taillé dans le
roc, le même M. Goulon propose de mettre sur le
bord du fossé 7 ou 8 pieces de canon en batterie,
pour battre en breche depuis le haut du rocher,
jusqu'au haut du revêtement qui peut être construit
dessus, afin que les débris de ce revêtement, & de
la terre qui est derriere, fassent une pente assez
douce, pour que l'on puisse monter à l'assaut. Si
l'on veut rendre la breche plus large & plus praticable,
on peut faire entrer le mineur dans les débris
faits par le canon, & le faire travailler à la
construction de plusieurs fourneaux qui en sautant,
augmenteront l'ouverture de la br>che.
De l'attaque des villes maritimes. Les villes maritimes
qui ont un port, tombent assez dans le cas des
autres villes, lorsque l'on peut bloquer leur port,
& qu'on est maître de la mer, & en état d'empêcher
que la place n'en soit secourue. Si la mer est
libre, ou si l'on peut furtivement & à la dérobée
faire entrer quelques vaisseaux dans le port, la
place étant continuellement ravitaillée, sera en
état de supporter un très - long siége. Ostende assiégée
par les Espagnols, soûtint un siége de plus de
trois ans; les secours qu'elle recevoit continuellement
du côté de la mer, lui procurerent les moyens
de faire cette longue résistance.
Ainsi on ne doit faire le siége de ces sortes de places, que lorsqu'on est en état d'empêcher que la
mer n'apporte aucun secours à la ville.
Ce n'est pas assez pour y réussir d'avoir une nombreuse
flotte devant le port, parce que pendant la
nuit l'>nnemi peut trouver le moyen de faire passer
entre les vaisseaux de la flotte, de petites barques
pleines de munitions. Le moyen le plus efficace
d'empêcher ces sortes de petits secours, seroit de
faire, si la situation le permettoit, une digue ou
estocade, comme le cardinal de Richelieu en fit faire
une, pour boucher entierement le port de la Rochelle. Mais outre qu'il y a peu de situations qui
permettent de faire un pareil ouvrage, l'exécution
en est si longue & si difficile, qu'on ne peut pas
proposer ce moyen, comme pouvant être pratiqué
dans l'attaque de toutes les villes maritimes.
Ce qu'on peut faire au lieu de ce grand & pénible
ouvrage, c'est de veiller avec soin sur les vaisseaux,
pour empêcher autant qu'il est possible, qu'il n'entre
aucune barque ou vaisseau dans le port de la
ville: ce qui étant bien observé, toutes les attaques
se font sur terre comme à l'ordinaire; le voisinage
de la mer n'y fait aucun changement; au contraire,
on peut de dessus les vaisseaux, canoner différens
ouvrages de la ville, & favoriser l'avancement
& le progrès des attaques.
On bombarde quelquefois les villes maritimes,
sans avoir le dessein d'en faire le siége, qui pourroit
souffrir trop de difficultés. On en use ainsi pour punir
des villes dont on a lieu de se plaindre; c'est
Ces bombardemens se font avec des galiottes
construites exprès pour placer les mortiers, & que
pour cet effet on appelle galiottes à bombes. M. le
chevalier Renau les imagina en 1680 pour bombarder
Alger. Jusqu'à lui, dit M. de Fontenelle dans
son éloge, il n'étoit tombé dans l'esprit de personne que
des mortiers pussent n'être pas placés à terre, & se passèr
d'une assiette solide. Cependant M. Renau proposa
les galiottes, & elles eurent tout le succès qu'il s'étoit
proposé. Les bombes qu'on tira de dessus ces
galiottes, firent de si grands ravages dans la ville,
qu'elles obligerent les Algériens de demander la
paix. Attaque des places par M. le Blond ».
Attaques (Page 1:834)
Quelque foibles que soient les murailles de ces
endroits, ce seroit s'exposer à une perte évidente
que d'aller en plein jour se présenter devant, &
chercher à les franchir, pour pénétrer dans la ville
ou dans le château.
Si ceux qui sont dedans sont gens de résolution
& de courage, ils sentiront bien toute la difficulté
qu'il y a d'ouvrir leurs murailles, & de passer dessus,
ou de rompre leurs portes, pour se procurer
une entrée dans la place.
Il faut donc pour attaquer ces petits endroits, être
en état de faire breche aux murailles; & pour cet
effet, il faut faire mener avec soi quelques petites
pieces de canon d'un transport facile, de même
que deux mortiers de 7 ou 8 pouces de diametre,
& s'arranger pour arriver à la fin du jour auprès des
lieux qu'on veut attaquer, & y faire pendant la nuit
une espece d'épaulement, pour couvrir les troupes,
& faire servir le canon à couvert, & les mortiers;
en faire usage dès la pointe du jour sur l'ennemi,
c'est le moyen de les reduire promptement,
& sans grande perte.
Mais si l'on n'est pas à portée d'avoir du canon,
le parti qui paroît le plus sûr & le plus facile, supposant
qu'on connoisse bien le lieu qu'on veut attaquer, c'est de s'en emparer par l'escalade. On peut
faire semblant d'attaquer d'un côté pour y attirer
l'attention des troupes, & appliquer des échelles
de l'autre, pour franchir la muraille, & pénétrer
dans la ville. Supposant que l'escalade ait réussi,
ceux qui sont entrés dans la ville, doivent d'abord
aller aux portes pour les ouvrir & faire entrer le
reste des troupes; après quoi, il faut aller charger
par derriere les soldats de la ville qui se défendent
contre la fausse attaque; se rendre maître de tout ce
qui peut assûrer la prise du lieu, & forcer ainsi ceux
qui le défendent à se rendre.
On peut dans ces sortes d'attaques se servir utilement
de pétard: il est encore d'un usage excellent
pour rompre les portes, & donner le moyen de pénétrer
dans les lieux dont on veut s'emparer. Il
faut autant qu'il est possible, user de surprise dans
ces attaques, pour les faire heureusement & avec
peu de perte. On trouve dans les mémoires de M.
de Feuquieres différens exemples de postes semblables
à ceux dont il s'agit ici, qu'il a forcés; on peut
[p. 835]
Il y a un moyen sûr de chasser l'ennemi des petits
postes qu'il ne veut pas abandonner, & où il
est difficile de le forcer; c'est d'y mettre le feu. Ce
moyen est un peu violent: mais la guerre le permet;
& on le doit employer lorsqu'on y trouve la
conservation des troupes que l'on a sous ses ordres.
Quelle que soit la nature des petits lieux que l'on
attaque, si l'on ne peut pas s'en emparer par surprise,
& que l'on soit obligé de les attaquer de vive
sorce, il faut disposer des fusiliers pour tirer continuellement
sur les lieux où l'ennemi est place, &
aux créneaux qu'il peut avoir pratiqués dans ses murailles;
faire rompre les portes par le petard, ou a
coups de haches; & pour la sûreté dé ceux qui font
cette dangereuse operation, faire le plus grand feu
par tout ou l'ennemi peut se montrer. La porte étant
rompue, s'il y a des barricades derriere, il faut les
forcer, en les attaquant brusquement, & sans donner
le tems à l'ennemi de se reconnoitre, & le prendre
prisonnier de guerre, lorsqu'il s'est defendu jusqu'à la derniere extrémité, & qu'il ne lui est plus
possible de prolonger sa defense. Attaque des places»,
Attaque (Page 1:835)
Pour donner encore plus de facilité à monter sur
la breche & la rendre plus praticable, on y fait aller
quelques mineurs, ou un sergent & quelques
grenadiers, qui, avec des crocs, applanissent la
breche. Le feu des logemens & des batteries, empêche
l'ennemi de se montrer sur ses défenses pour
tirer sur les travailleurs; ou du moins si l'ennemi
tire, il ne peut le faire qu'avec beaucoup de circonspection,
ce qui rend son feu bien moins dangereux.
Si l'ennemi a pratiqué des galeries le long de la
face de la demi - lune, & vis - à - vis les breches, les
mineurs peuvent aller à leur découverte pour les
boucher, ou couper, ou en chasser l'ennemi; s'ils
ne les trouvent point, ils peuvent faire sauter différens
petits fourneaux, qui étant répétés plusieurs
fois, ne manqueront pas de causer du desordre
dans les galeries de l'ennemi & dans ses fourneaux.
Tout étant prêt pour travailler au logement
de la demi - lune, c'est - à - dire, pour s'établir sur la
breche, les matériaux à portée d'y être transportés
aisement & promptement, les batteries & les
logemens du chemin couvert en état de faire grand
feu; on convient d'un signal avec les commandans
des batteries & ceux des logemens, pour les aver<cb->
On continue la même manoeuvre jusqu'à ce que
le logement soit en état de défense, c'est - à - dire, de
contenir des troupes en état d'en imposer à l'ennemi> & de résister aux attaques qu'il peut faire au
logement. L'ennemi, avant que de quitter totalement
la demi - lune, fait sauter les fourneaux qu'il y
a preparés. Apres qu'ils ont fait leur effet, on se loge
dans leur e>cavation, ou du moins on y pratique
de petits couverts pour y tenir quelques sappeurs,
& l'on se sert de ces couverts pour avancer
les logemens de l'intérieur de l'ouvrage.
Le logement de la pointe se fait en espece de petit
arc, dont la concavité est tournée du côté de la
place. De chacune de ses extrémités part un logement
qui regne le long des faces de la demi - lune sur
le terre - plein de son rempart, au pié de son parapet.
Ce logement est très - enfoncé dans les terres du
rempart, afin que les soldats y soient plus à couvert
du feu de la place; on y fait aussi pour le garantir
de l'enfilade, des traverses, comme dans le
logement du haut du glacis. On fait encore dans
l'interieur de la demi - lune, des logemens qui en traversent
toute la largeur. Ils servent à découvrir la
communication de la tenaille à la place, & par conséquent
à la rendre plus difficile, & à contenir des
troupes en nombre suffisant pour résister à l'ennemi,
s'il avoit dessein de revenir dans la demi - lune,
& de la reprendre.
Si la demi - lune n'étoit point révêtue, & qu'elle
fût simplement fraisée & palissadée, on en feroit
l'attaque de la même maniere que si elle l'étoit;
c'est - à - dire, qu'on disposeroit des batteries comme
on vient de l'enseigner; & pour ce qui concerne
la breche, il ne s'agiroit que de ruiner la fraise,
les palissades & la haie vive de la berme, s'il y en
a une vis - à - vis l'endroit par lequel on veut entrer
dans la demi - lune; s'y introduire ensuite, & faire
les logemens tout comme dans les demi - lunes revêtues.
Tout ce que l'on vient de marquer pour la prise
de la demi - lune, ne se fait que lorsqu'on veut s'en
emparer par la sappe, & avec la pelle & la pioche:
[p. 836]
Si - tôt que l'on est maître du haut de la breche,
on y fait un logement fort à la hâte, avec des gabions
& des fascines; & pendant qu'on le fait, &
même pendant qu'on charge l'ennemi, & qu'on
l'oblige d'abandonner le haut de la breche, on détache
quelques soldats pour tâcher de découvrir
les mines que l'ennemi doit avoir faites dans l'intérieur
du rempart de la demi - lune, & en arracher ou
couper le saucisson. Si l'on ne peut pas réussir à
les trouver, il ne faut s'avancer qu'avec circonspection,
& ne pas se tenir tous ensemble, pour que
la mine fasse un effet moins considérable. Souvent
l'ennemi laisse travailler au logement sans trop s'y
opposer, parce qu'il ne se fait qu'avec une très grande
perte de monde, les travailleurs & les troupes
étant pendant le tems de sa construction absolument
en butte à tout le feu de la place, qui est
bien servi, & que la proximité rend très - dangereux: mais lorsque le logement commence à prendre
forme, l'ennemi fait sauter ses mines, & il revient
ensuite dans la demi - lune, pour essayer de la
reprendre à la faveur du desordre que les mines ne
peuvent manquer d'avoir causé parmi les troupes
qui y étoient établies. Alors il faut revenir sur lui
avec des troupes qui doivent être à portée de donner
du secours à celles de la demi - lune, & s'établir
dans les excavations des mines; & enfin rendre le
logement solide, le garnir d'un assez grand nombre
de soldats, pour être en état de résister à tous les
nouveaux efforts de l'ennemi.
Cet ouvrage ne peut guere être ainsi disputé que
lorsque la demi - lune > un réduit, parce que le réduit
donne une retraite aux soldats de la place qui défendent
la demi - lune, & qu'il met à portée de tomber
aisément dans la demi - lune: car s'il n'y en a point
& que l'ennemi soit chassé de la demi - lune, il ne
peut plus guere tenter d'y revenir, sur - tout si la
communication de la place avec la demi - lune est
v>e des batteries & des logemens du chemin couvert: car si le fossé est plein d'eau, cette communication
ne pourra se faire qu'avec des bateaux,
qu'on peut voir aisément du chemin couvert, &
qu'on peut renverser avec le canon des batteries;
& si le fossé est sec, & qu'il y ait une caponiere,
la communication, quoique plus sûre, n'est pourtant
pas sans danger, à cause du feu qu'on y peut
plonger des logemens du chemin couvert, ensorte
qu'il est assez difficile que l'ennemi y puisse faire
passer assez brusquement un corps de troupes suffisant
pour rentrer dans la demi - lune & s'en emparer;
il lui manque d'ailleurs de la place pour s'assembler
& tomber tout d'un coup avec un gros corps sur les
logemens de la demi - lune.
Il y auroit seulement un cas où il pourroit le
faire; savoir, lorsqu'on a pratiqué dans l'angle de
la gorge de la demi - lune un espace à peu - près de
la grandeur des places d'armes du chemin couvert;
cet espace ne peut être vû du chemin couvert, ni
de ses logemens, & il y a ordinairement des degrés
pour monter du fond du fossé dans la demi -
Le tems le plus favorable pour l'attaque de la
demi - lune, de vive force, est la nuit; le feu de l'ennemi
en est bien moins sûr qu'il ne le seroit le jour ».
Attaque (Page 1:836)
Lorsque la troisieme parallele, ou place d'armes, est solidement établie au pié du glacis, & qu'on veut s'emparer du chemin couvert par la sappe, on s'avance en zig - zag par une sappe sur les arrêtes des angles saillans du chemin couvert attaqué; & comme il est alors fort difficile de se parer de l'enfilade, on s'enfonce le plus profondément qu'on peut, ou bien l'on fait de fréquentes traverses. On arrive aussi quelquefois à l'angle saillant du glacis par une tranchée directe qui se construit ainsi.
Deux sappeurs poussent devant eux, le long de l'arrête
du glacis, un gabion farci ou un mantelet. Ils font
une sappe de chaque côté de cette arrête. Ils en font
le fossé beaucoup plus profond qu'à l'ordinaire, pour
s'y couvrir plus sûrement du feu de la place. Cette
sappe qui chemine ainsi des deux côtés en même tems,
se nomme double sappe. Elle a un parapet de chaque
côté, & des traverses dans le milieu, de distance en
distance. Voyez
Ces cavaliers bien établis, il est aisé de pousser la tranchée directe jusqu'à l'angle saillant du chemin couvert, & d'établir à la pointe de cet angle & sur le haut du glacis, un petit logement en arc de cercle, dont le feu peut obliger l'ennemi d'abandonner la place d'armes qui est en cet endroit. On étend ensuite ce logement de part & d'autre des branches du chemin couvert, en s'enfonçant dans la partie supérieure ou la crête du glacis, à la distance de trois toises du côté intérieur du chemin couvert, afin que cette épaisseur lui serve de parapet à l'épreuve du canon.
L'opération que l'on vient de décrire pour parvenir de la troisieme parallele à l'angle saillant du chemin couvert, se fait en même tems sur tous les angles saillans du front attaqué. Ainsi l'ennemi se trouve obligé de les abandonner à peu - près dans le même tems. Le logement se continue ensuite de part & d'autre de ces angles vers les places d'armes rentrantes du chemin couvert.
On oblige l'ennemi d'abandonner ces places d'armes par des batteries de pierriers qu'on construit vis - à - vis, & qui joignent les logemens des deux branches du chemin couvert, qui forment les angles rentrans. Ces batteries étant construites, elles font pleuvoir une grêle de cailloux dans les places d'armes, qui ne permettent pas à l'ennemi de s'y soûtenir. On avance toûjours pendant ce tems - là le logement des branches vers la place d'armes; & lorsque l'ennemi l'a abandonné, on continue le logement du glacis tout autour des faces de la place d'armes. On fait un autre logement dans la place d'armes qui communique avec celui de ses faces. Il s'étend à peu - près circulairement le long des demi - gorges des places d'armes. [p. 837]
Ce logement bien établi & dans son état de perfection, empêche l'ennemi de revenir dans le chemin couvert pour essayer de le reprendre.
Tous ces logemens se font avec des gabions & des fascines. On remplit les gabions de terre; on met des fascines dessus, & l'on recouvre le tout de terre.
Sans les mines il seroit bien difficile à l'ennemi
de retarder les travaux dont nous venons de donner
le détail; parce que les ricochets le désolent
entierement, & qu'ils labourent toutes ses défenses,
ensorte qu'il n'a aucun lieu où il puisse s'en
mettre à l'abri: mais il peut s'en dédommager dans
les travaux soûterreins, où ses mineurs peuvent
aller, pour ainsi dire, en sûreté, tandis que ceux
de l'assiégeant, qui n'ont pas la même connoissance
du terrein, ne peuvent aller qu'à tâtons, & que
c'est une espece de hasard, s'ils peuvent parvenir
à trouver les galeries de l'ennemi, & les ruiner.
Si l'on est instruit que le glacis de la place soit contreminé,
on ne doit pas douter que l'ennemi ne
profite de ces contremines, pour pousser des rameaux
en avant dans la campagne; & alors pour
éviter autant que faire se peut, le mal qu'il peut
faire avec ses fourneaux, on creuse des puits dans
la troisieme parallele, auxquels on donne, si le terrein
le permet, 18 ou 20 piés de profondeur, afin
de gagner le dessous des galeries de l'assiégé; & du
fond de ces puits on mene des galeries, que l'on
dirige vers le chemin couvert pour chercher celles de
l'ennemi. On sonde les terres avec une longue aiguille
de fer, pour tâcher de trouver ces galeries.
Si l'on se trouve dessus, on y fera une ouverture,
par laquelle on jettera quelques bombes dedans qui
en feront deserter l'ennemi, & qui ruineront sa
galerie. Si au contraire on se trouve dessous, on la
fera sauter avec un petit sourneau: mais si on ne
peut parvenir à découvrir aucunes galeries de
l'ennemi, en ce cas il faut prendre le parti de faire
de petits rameaux à droite & à gauche, au bout
desquels on fera de petits fourneaux qui ébranleront les terres des environs, & qui ne pourront
guere manquer de ruiner les galeries & les fourneaux
de l'assiégé.
Quelque attention que l'on puisse avoir en pareil
cas, on ne peut présumer d'empêcher totalement
l'ennemi de se servir des fourneaux qu'il a
placés sous le glacis: mais à mesure qu'il les fait
sauter, on fait passer des travailleurs, qui font
promptement un logement dans l'entonnoir de la
mine, & qui s'y établissent solidement. On peut
dans de certaines situations de terrein, gâter les
mines des assiégés, en faisant couler quelque ruisseau
dans ses galeries; il ne s'agit pour cela que
de creuser des puits dans les environs, & y faire
couler le ruisseau. On se servit de cet expédient au
siége de Turin, en 1706, & on rendit inutile par
là un grand nombre de mines des assiégés.
L'ennemi doit avoir disposé des fourneaux pour
empêcher le logement du haut du glacis; ils doivent
être placés à quatre ou cinq toises de la palissade
du chemin couvert, afin qu'en sautant, ils ne
causent point de dommage à cette palissade, &
qu'ils se trouvent à peu - près sous le logement que
l'assiégeant fait sur le haut du glacis. Lorsqu'il y a
mis le feu, on s'établit dans leur entonnoir; l'assié<cb->
On ne peut donner que des principes généraux sur
ces sortes de chicanes. Elles dépendent du terrein
plus ou moins favorable, & ensuite de la capacité
& de l'intelligence de ceux qui attaquent, & de
ceux qui défendent la place.
Nous avons supposé avant que de parler des mines,
en traitant du logement sur le haut du glacis,
que le feu des cavaliers de tranchée, celui des batteries
de canon & de bombes à ricochet, avoit
obligé l'ennemi de quitter le chemin couvert: mais
si malgré tous ces feux il s'obstine à demeurer dans
les places d'armes, & derriere les traverses, voici
comment on pourra parvenir à l'en chasser totalement,
& à faire sur le haut du glacis le logement
dont nous avons déjà parlé.
Soit que l'ennemi ait fait sauter un fourneau
vers l'angle saillant de son chemin couvert, ou que
l'assiégé ait fait sauter vers ces endroits une partie
des palissades; si - tôt que le fourneau aura joüé, on
fera passer des travailleurs dans son entonnoir, qui
s'y couvriront promptement, & qui ensuite étendront le logement dans le chemin couvert de part &
d'autre des côtés de son angle saillant.
On communiquera la tranchée double, ou la
double sappe de l'arrête du glacis avec ce logement,
pour être plus en état de le soûtenir, s'il en
est besoin, & pour pouvoir communiquer plus sûrement
avec lui. Une des grandes attentions qu'il
faut avoir dans ce logement, c'est d'en bien couvrir
les extrémités, c'est - à dire, de s'y bien traverser
pour se couvrir des feux des autres parties
du chemin couvert, où l'ennemi se tient encore.
Lorsque ce logement sera parvenu auprès des
premieres traverses du chemin couvert, si l'ennemi
est encore derriere, comme il ne peut y être qu'en
très - petit nombre, eu égard à l'espace qu'il y a,
on l'en fera chasser par une compagnie de grenadiers,
qui tomberont brusquement sur lui; après
quoi on fera chercher dans la partie qu'ils auront
abandonnée, l'ouverture ou le saucisson de la mine;
& si on la trouve, comme il y a apparence, on
l'arrachera, & on rendra par là la mine inutile. On
pourra aussi faire passer quelques travailleurs dans
le passage de la traverse: ils y feront un logement
qui sera un des plus sûrs de ceux que l'on peut faire
dans cette proximité de l'ennemi. On percera ensuite
une entrée dans le chemin couvert vis - à - vis ces
traverses; on la prolongera jusque vers le bord du
fossé, en se couvrant de la traverse; après quoi on
fera partir une sappe de chacune des extrémités
de ce passage, c'est - à - dire, environ du bord de la
contrescarpe> lesquels suivront à peu - près l'arrondissement
de cette contrescarpe, vers le mi ieu de
laquelle elles se rencontreront. On enfoncera beaucoup
ce logement, afin qu'il ne cause point d'obstacle
à celui du haut du glacis; & l'on fera ensorte
de laisser devant lui jusqu'au bord du fossé, une
épaisseur de terre suffisante pour résister au canon
des flancs & de la courtine. On blinde ce logement
pour y être à couvert des grenades. Il est d'une
grande utilité pour donner des découvertes dans le
fossé.
On continuera pendant le tems qu'on travaillera
à ce logement dans l'intérieur du chemin couvert,
le logement du haut du glacis, jusqu'aux places
[p. 838]
De l'attaque de vive force du chemin couvert.
Il se trouve des circonstancés qui obligent de
pr>ndre quelquefois le parti d'attaquer aussi le chemin couvert: comme lorsque l'on ne peut pas établir des batteries à ricochets pour battre ses branches,
de même que les faces des pieces de fortification
du front de l'attaque; ou qu'on présume
que l'ennemi n'est pas en état de résister à une attaque de la sorte; ou enfin qu'on croit ne devoir
rien négliger pour s'emparer quelques jours plûtôt
du chemin couvert: en ce cas on prend le parti de
faire cette attaque. Voici en peu de mots comment
on s'y conduit.
Lorsqu'on a pris le parti d'attaquer le chemin couvert de vive force, on fait ensorte que la troisieme
parallele avance ou empiete fur le glacis: plus
elle sera avancée, & plus l'attaque se fera avantageusement.
On fait des banquettes tout le long de
cette parallele en forme de degrés jusqu'au haut
de son parapet, a>in que le soldat puisse passer aisément
par - dessus, pour aller à l'attaque du chemin
couvert.
On fait un amas considérable de matériaux sur
le revers de cette ligne, & dans la ligne même,
comme d'outils, de gabions, de fascines, de sacs à
terre, &c. afin que rien ne manque pour faire
promptement le logement, après avoir chassé l'ennemi
du chemin couvert. On commande un plus
grand nombre de compagnies de grenadiers qu'à
l'ordinaire, on les place le long de la troisieme parallele,
sur quatre ou six de hauteur; & les travailleurs
sont derriere eux, sur les revers de cette parallele,
munis de leurs outils, de gabions, sascines,
&c. On a soin que tous les autres postes de la tranchée
soient plus garnis de troupes qu'à l'ordinaire,
afin de fournir du secours à la tête, s'il en est besoin,
& qu'ils fassent feu sur les défenses de l'ennemi,
qu'ils peuvent découvrir: les grenadiers sont
aussi armés de haches pour rompre les palissades
du chemin couvert.
On donne ordre aux batteries de canon, de mortiers,
& de pierriers, de se tenir en état de seconder
l'attaque de tout leur feu; on convient d'un
signal pour que toutes les troupes qui doivent commencer
l'attaque, s'ébranlent en même tems, &
tombent toutes ensemble sur l'ennemi.
Ce signal consiste en une certaine quantité de
coups de canon, ou un certain nombre de bombes
qu'on doit tirer de suite; & l'on doit se mettre en
mouvement au dernier coup, ou à la derniere
bombe.
Le signal étant donné, toutes les troupes de la
troisieme parallele s'ébranlent en même tems, &
elles passent brusquement par - dessus son parapet:
elles vont à grands pas au chemin couvert, & elles
entrent dedans; soit par ses barrieres, soit par les
ouvertures que les grenadiers y font en rompant
les palissades à coups de hache. Lorsquelles y ont
pénétré, elles chargent l'ennemi avec beaucoup
Pendant cette opération, toutes les batteries de
la tranchée ne cessent de tirer aux défenses de la
place, pour y tenir l'ennemi en inquiétude, & diminuer
autant que l'on peut l'activité de son feu
sur les travailleurs & sur le logement.
Lorsque les troupes qui ont fait l'attaque, sont
parvenues à chasser l'ennemi de son chemin couvert,
ou de quelqu'une de ses places d'armes (car souvent
on ne peut dans une premiere attaque y établir qu'un ou deux logemens aux angles saillans)
elles se retirent derriere le logement, où elles restent
le genou en terre, jusqu'à ce qu'il soit en état
de les couvrir. Quelquefois l'ennemi que l'on
croyoit avoir chassé du chemin couvert, revient à
la charge, & il oblige de recommencer l'attaque &
le logement qu'il culbute, en tombant inopinément
dessus. Cette attaque se peut recommencer plusieurs
fois, & être fort disputée, lorsque l'on a affaire à
une f>te garnison; en ce cas il faut payer de bravoure,
& se roidir contre les difficultés de l'ennemi.
Lorsqu'il est prêt d'abandonner la partie, il faut.
mettre le feu à ses mines; on s'établit aussi - tôt qu'elles
ont joüé, dans les entonnoirs, comme nous l'avons
déjà dit, en parlant de cette attaque par la sappé: enfin on s'oppose à toutes ses chicanes, autant
que l'on peut, & si l'on est repoussé dans une premiere
attaque, on s'arrange pour la recommencer le
lendemain ou le sur - lendemain, & l'on tâche de
prendre encore plus de précautions que la premiere
fois pour réussir dans l'entreprise.
Avant de commencer cette attaque, on canonne
pendant plusieurs heures avec vivacité le chemin
couvert, pour tâcher d'en rompre les palissades, &
labourer la partie supérieure de son glacis, afin d'avoir
plus de facilité à y pénétrer & à faire le logement.
On laisse après cela, le tems nécessaire aux
pieces pour qu'elles refroidissent, c'est - à - dire environ
une heure, & l'on commence l'attaque comme
nous l'avons dit, pendant laquelle l'artillerie
agit continuellement.
Il faut convenir que cette sorte d'attaque est extrèmement
meurtriere. Les assiégeans sont obligés
d'aller pendant presque toute la largeur du glacis à
découvert, exposés à tout le feu de la place. Ils sont
obligés d'attaquer des gens cachés derriere des
palissades, qu'il faut rompre à coups de hâches pour
parvenir jusqu'à eux. Il faut combattre long - tems
avec un desavantage évident; & lorsqu'à force de
valeur on a chassé l'ennemi, on se trouve exposé
à tout le feu des remparts, qui est servi alors avec
la plus grande vivacité. On est aussi exposé aux
mines que l'ennemi fait sau>r pour déranger le logement,
mettre du desordre & de la confusion parmi
les troupes; ce qui leur donne la facilité de revenir
sur elles, & de les harceler encore de nouveau.
Il s'en faut beaucoup que la premiere mé<pb->
[p. 839]
Le tems le plus favorable pour cette attaque, est
la nuit; on est moins vû de la place, & par conséquent
son feu est moins dangereux: cependant il
y a des généraux qui la font faire de jour. Il n'y a
rien de réglé là - dessus; ils sont les maîtres de prendre
le parti qu'ils croyent le meilleur, suivant les
circonstances des tems & des lieux. Attaque des places»
Attaque (Page 1:839)
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