ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"834"> le terrein oppose de difficultés & d'obsta cles. M. Goulon dans ses Mémoires, propose pour la descente du fossé pratiqué dans le roc, de s'enfoncer au bord le plus profondément qu'on peut. Il suppose un fossé creusé de 30 piés, & que les mineurs étant relevés souvent, puissent parvenir à s'enfoncer de 6 ou 7 piés en 7 ou 8 jours; après quoi il fait faire un fourneau à droite & un à gauche de cette espece de puits, disposés de maniere que l'effet s'en fasse dans le fossé. Avant que d'y mettre le feu, on doit jetter dans le fossé un amas de sacs à terre, de fascines, &c. pour commencer à le combler. Les fourneaux sautant après cela, les décombres qu'ils enlevent couvrent ces fascines & sacs à terre, & ils comblent une partie du fossé; en continuant ainsi d'en faire sauter, on parvient à faire une descente aisée dans le fossé.

Pour faire breche dans un rempart taillé dans le roc, le même M. Goulon propose de mettre sur le bord du fossé 7 ou 8 pieces de canon en batterie, pour battre en breche depuis le haut du rocher, jusqu'au haut du revêtement qui peut être construit dessus, afin que les débris de ce revêtement, & de la terre qui est derriere, fassent une pente assez douce, pour que l'on puisse monter à l'assaut. Si l'on veut rendre la breche plus large & plus praticable, on peut faire entrer le mineur dans les débris faits par le canon, & le faire travailler à la construction de plusieurs fourneaux qui en sautant, augmenteront l'ouverture de la brche.

De l'attaque des villes maritimes. Les villes maritimes qui ont un port, tombent assez dans le cas des autres villes, lorsque l'on peut bloquer leur port, & qu'on est maître de la mer, & en état d'empêcher que la place n'en soit secourue. Si la mer est libre, ou si l'on peut furtivement & à la dérobée faire entrer quelques vaisseaux dans le port, la place étant continuellement ravitaillée, sera en état de supporter un très - long siége. Ostende assiégée par les Espagnols, soûtint un siége de plus de trois ans; les secours qu'elle recevoit continuellement du côté de la mer, lui procurerent les moyens de faire cette longue résistance.

Ainsi on ne doit faire le siége de ces sortes de places, que lorsqu'on est en état d'empêcher que la mer n'apporte aucun secours à la ville.

Ce n'est pas assez pour y réussir d'avoir une nombreuse flotte devant le port, parce que pendant la nuit l'nnemi peut trouver le moyen de faire passer entre les vaisseaux de la flotte, de petites barques pleines de munitions. Le moyen le plus efficace d'empêcher ces sortes de petits secours, seroit de faire, si la situation le permettoit, une digue ou estocade, comme le cardinal de Richelieu en fit faire une, pour boucher entierement le port de la Rochelle. Mais outre qu'il y a peu de situations qui permettent de faire un pareil ouvrage, l'exécution en est si longue & si difficile, qu'on ne peut pas proposer ce moyen, comme pouvant être pratiqué dans l'attaque de toutes les villes maritimes. Ce qu'on peut faire au lieu de ce grand & pénible ouvrage, c'est de veiller avec soin sur les vaisseaux, pour empêcher autant qu'il est possible, qu'il n'entre aucune barque ou vaisseau dans le port de la ville: ce qui étant bien observé, toutes les attaques se font sur terre comme à l'ordinaire; le voisinage de la mer n'y fait aucun changement; au contraire, on peut de dessus les vaisseaux, canoner différens ouvrages de la ville, & favoriser l'avancement & le progrès des attaques.

On bombarde quelquefois les villes maritimes, sans avoir le dessein d'en faire le siége, qui pourroit souffrir trop de difficultés. On en use ainsi pour punir des villes dont on a lieu de se plaindre; c'est ainsi que le feu Roi en usa à l'égard d'Alger, Tripoly, Genes, &c.

Ces bombardemens se font avec des galiottes construites exprès pour placer les mortiers, & que pour cet effet on appelle galiottes à bombes. M. le chevalier Renau les imagina en 1680 pour bombarder Alger. Jusqu'à lui, dit M. de Fontenelle dans son éloge, il n'étoit tombé dans l'esprit de personne que des mortiers pussent n'être pas placés à terre, & se passèr d'une assiette solide. Cependant M. Renau proposa les galiottes, & elles eurent tout le succès qu'il s'étoit proposé. Les bombes qu'on tira de dessus ces galiottes, firent de si grands ravages dans la ville, qu'elles obligerent les Algériens de demander la paix. Attaque des places par M. le Blond ».

Attaques (Page 1:834)

Attaques des petites villes & châteaux. Ces sortes d'attaques se rencontrent assez souvent dans le cours de la guerre; elles ne méritent pas ordinairement toutes les attentions du siége royal; ce sont des postes dont on veut s'emparer, soit pour la sûreté des communications, ou pour éloigner les partis de l'ennemi. « La plûpart de ces petites villes & châteaux ne sont enfermées que de simples murailles non terrassées; il y a au plus quelques méchans fossés, assez faciles à passer, ou bien quelques petits ouvrages de terre fraisée & palissadée vis - à - vis les portes pour les couvrir, & les mettre à l'abri d'une premiere insulte.

Quelque foibles que soient les murailles de ces endroits, ce seroit s'exposer à une perte évidente que d'aller en plein jour se présenter devant, & chercher à les franchir, pour pénétrer dans la ville ou dans le château.

Si ceux qui sont dedans sont gens de résolution & de courage, ils sentiront bien toute la difficulté qu'il y a d'ouvrir leurs murailles, & de passer dessus, ou de rompre leurs portes, pour se procurer une entrée dans la place.

Il faut donc pour attaquer ces petits endroits, être en état de faire breche aux murailles; & pour cet effet, il faut faire mener avec soi quelques petites pieces de canon d'un transport facile, de même que deux mortiers de 7 ou 8 pouces de diametre, & s'arranger pour arriver à la fin du jour auprès des lieux qu'on veut attaquer, & y faire pendant la nuit une espece d'épaulement, pour couvrir les troupes, & faire servir le canon à couvert, & les mortiers; en faire usage dès la pointe du jour sur l'ennemi, c'est le moyen de les reduire promptement, & sans grande perte.

Mais si l'on n'est pas à portée d'avoir du canon, le parti qui paroît le plus sûr & le plus facile, supposant qu'on connoisse bien le lieu qu'on veut attaquer, c'est de s'en emparer par l'escalade. On peut faire semblant d'attaquer d'un côté pour y attirer l'attention des troupes, & appliquer des échelles de l'autre, pour franchir la muraille, & pénétrer dans la ville. Supposant que l'escalade ait réussi, ceux qui sont entrés dans la ville, doivent d'abord aller aux portes pour les ouvrir & faire entrer le reste des troupes; après quoi, il faut aller charger par derriere les soldats de la ville qui se défendent contre la fausse attaque; se rendre maître de tout ce qui peut assûrer la prise du lieu, & forcer ainsi ceux qui le défendent à se rendre.

On peut dans ces sortes d'attaques se servir utilement de pétard: il est encore d'un usage excellent pour rompre les portes, & donner le moyen de pénétrer dans les lieux dont on veut s'emparer. Il faut autant qu'il est possible, user de surprise dans ces attaques, pour les faire heureusement & avec peu de perte. On trouve dans les mémoires de M. de Feuquieres différens exemples de postes semblables à ceux dont il s'agit ici, qu'il a forcés; on peut [p. 835] se servir de la méthode qu'il a observée, pour en user de même dans les cas semblables. Nous ne les rapportons pas ici, parce qu'il est bon que les jeunes officiers lisent ces mémoires, qui partent d'un homme consommé dans toutes les parties de la guerre, & qui avoit bien mis à profit les leçons des excellens généraux sous lesquels il avoit servi.

Il y a un moyen sûr de chasser l'ennemi des petits postes qu'il ne veut pas abandonner, & où il est difficile de le forcer; c'est d'y mettre le feu. Ce moyen est un peu violent: mais la guerre le permet; & on le doit employer lorsqu'on y trouve la conservation des troupes que l'on a sous ses ordres. Quelle que soit la nature des petits lieux que l'on attaque, si l'on ne peut pas s'en emparer par surprise, & que l'on soit obligé de les attaquer de vive sorce, il faut disposer des fusiliers pour tirer continuellement sur les lieux où l'ennemi est place, & aux créneaux qu'il peut avoir pratiqués dans ses murailles; faire rompre les portes par le petard, ou a coups de haches; & pour la sûreté dé ceux qui font cette dangereuse operation, faire le plus grand feu par tout ou l'ennemi peut se montrer. La porte étant rompue, s'il y a des barricades derriere, il faut les forcer, en les attaquant brusquement, & sans donner le tems à l'ennemi de se reconnoitre, & le prendre prisonnier de guerre, lorsqu'il s'est defendu jusqu'à la derniere extrémité, & qu'il ne lui est plus possible de prolonger sa defense. Attaque des places», par M. le Blond.

Attaque (Page 1:835)

Attaque de la demi - lune; c'est, dans l'Art militaire, l'action par laquelle on tâche de s'emparer de cet ouvrage.

« Pour cela, le passage du fossé étant fait de part & d'autre des faces de la demi - lune, & la breche ayant une étendue de 15 ou 16 toises vers le milieu des faces, on se prepare à monter à l'assaut. On fait à cet effet un grand amas de matériaux dans tous les logemens des environs: on travaille à rendre la breche pratiquable, en adoucissant on talud; on y tire du canon pour faire tomber les parties du revêtement qui se soûtiennent encoe. On peut aussi se servir utilement de bombes tirées de but - enblanc; elles s'enterrent aisement dans les terres de la breche, déjà labourées & ébranlées par le canon; & en crevant dans ces terres. elles y font, pour ainsi - dire, l'effet de petits fourneaux ou fougaces: par ce moyen le soldat monte plus facilement à la breche.

Pour donner encore plus de facilité à monter sur la breche & la rendre plus praticable, on y fait aller quelques mineurs, ou un sergent & quelques grenadiers, qui, avec des crocs, applanissent la breche. Le feu des logemens & des batteries, empêche l'ennemi de se montrer sur ses défenses pour tirer sur les travailleurs; ou du moins si l'ennemi tire, il ne peut le faire qu'avec beaucoup de circonspection, ce qui rend son feu bien moins dangereux.

Si l'ennemi a pratiqué des galeries le long de la face de la demi - lune, & vis - à - vis les breches, les mineurs peuvent aller à leur découverte pour les boucher, ou couper, ou en chasser l'ennemi; s'ils ne les trouvent point, ils peuvent faire sauter différens petits fourneaux, qui étant répétés plusieurs fois, ne manqueront pas de causer du desordre dans les galeries de l'ennemi & dans ses fourneaux. Tout étant prêt pour travailler au logement de la demi - lune, c'est - à - dire, pour s'établir sur la breche, les matériaux à portée d'y être transportés aisement & promptement, les batteries & les logemens du chemin couvert en état de faire grand feu; on convient d'un signal avec les commandans des batteries & ceux des logemens, pour les aver<cb-> tir de faire feu, & pour les avertir de le faire cesser quand il en est besoin. C'est ordinairement un drapeau qu'on éleve dans le premier cas, & qu'on abbaisse dans le second. Tout cela arrangé, & la breche rendue praticable, comme nous l'avons dit, on fait avancer deux ou trois sappeurs vers le commencement de la rupture d'une des faces du côté de la gorge de la demi - lune, & vers le haut de la breche. Il se trouve ordinairement des especes de petits couverts ou enfoncemens dans ces endroits, où les sappeurs commencent à travailler, à se loger, & à préparer un logement pour quelques autres sappeurs. Lorsqu'il y a de la place pour les recevoir, on les y fait monter, & ils étendent insensiblement le logement sur tout le haut de la breche, où ils font vers la pointe un logement qu'on appelle assez ordinairement un nid de pie. Pendant qu'ils travaillent, le feu de la batterie & des logemens demeure tranquille: mais quand l'ennemi vient sur ces sappeurs pour détruire leurs logemens, ils se retirent avec promptitude; & alors le drapeau étant élevé, on fait feu sur l'ennemi avec la plus grande vivacité, pour lui faire abandonner le haut de la breche. Lorsqu'il en est chassé, on baisse le drapeau, le feu cesse, & les sappeurs vont rétablir tout le desordre qui a été fait dans leur logement, & travaillent à le rendre plus solide & plus étendu. Si l'ennemi revient pour les chasser, ils se retirent, & l'on fait joüer les batteries & le feu des logemens, qui l'obligent à quitter la breche; apres quoi on le fait cesser, & les sappeurs retournent à leur travail.

On continue la même manoeuvre jusqu'à ce que le logement soit en état de défense, c'est - à - dire, de contenir des troupes en état d'en imposer à l'ennemi & de résister aux attaques qu'il peut faire au logement. L'ennemi, avant que de quitter totalement la demi - lune, fait sauter les fourneaux qu'il y a preparés. Apres qu'ils ont fait leur effet, on se loge dans leur ecavation, ou du moins on y pratique de petits couverts pour y tenir quelques sappeurs, & l'on se sert de ces couverts pour avancer les logemens de l'intérieur de l'ouvrage.

Le logement de la pointe se fait en espece de petit arc, dont la concavité est tournée du côté de la place. De chacune de ses extrémités part un logement qui regne le long des faces de la demi - lune sur le terre - plein de son rempart, au pié de son parapet. Ce logement est très - enfoncé dans les terres du rempart, afin que les soldats y soient plus à couvert du feu de la place; on y fait aussi pour le garantir de l'enfilade, des traverses, comme dans le logement du haut du glacis. On fait encore dans l'interieur de la demi - lune, des logemens qui en traversent toute la largeur. Ils servent à découvrir la communication de la tenaille à la place, & par conséquent à la rendre plus difficile, & à contenir des troupes en nombre suffisant pour résister à l'ennemi, s'il avoit dessein de revenir dans la demi - lune, & de la reprendre.

Si la demi - lune n'étoit point révêtue, & qu'elle fût simplement fraisée & palissadée, on en feroit l'attaque de la même maniere que si elle l'étoit; c'est - à - dire, qu'on disposeroit des batteries comme on vient de l'enseigner; & pour ce qui concerne la breche, il ne s'agiroit que de ruiner la fraise, les palissades & la haie vive de la berme, s'il y en a une vis - à - vis l'endroit par lequel on veut entrer dans la demi - lune; s'y introduire ensuite, & faire les logemens tout comme dans les demi - lunes revêtues.

Tout ce que l'on vient de marquer pour la prise de la demi - lune, ne se fait que lorsqu'on veut s'en emparer par la sappe, & avec la pelle & la pioche:

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