ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"828"> monté par les batteries qui y sont placées. Si on pouvoit garantir ce canon des bombes, il est certain qu'il produiroit un très - grand avantage aux assiégés: mais il n'est pas possible de le présumer; ainsi son avantage devient aujourd'hui moins considérable qu'il ne l'étoit lorsque M. de Vauban s'en est servi: alors on ne faisoit pas dans les siéges une aussi grande consommation de bombes qu'on en fait à présent. Le flanc concave à orillon ne changeroit rien aujourd'hui dans la disposition de l'attaque; on auroit seulement attention de faire tomber plusieurs bombes sur l'orillon, & sur la partie du flanc qui y joint immédiatement; & ces bombes ruineroient indubitablement l'embrasure cachée & protégée de l'orillon. Un avantage dont il faut cependant convenir, qu'ont encore aujourd'hui les flancs concaves, c'est de ne pouvoir pas être enfilés par le ricochet. Les flancs droits le peuvent être des batteries placées dans les places d'armes rentrantes du chemin couvert, vis - à - vis les faces des bastions: mais les flancs concaves par leur disposition en sont à l'abri.

Supposons présentement que les passages des fossés soient dans l'état de perfection nécessaire pour qu'on puisse passer dessus; que le canon ou les mines ayent donné aux breches toute la largeur qu'elles doivent avoir, pour qu'on puisse y déboucher sur un grand front: que les rampes soient adoucies, & qu'on puisse y monter facilement pour parvenir au haut de la breche. On peut s'y établir en suivant l'un des deux moyens dont on parlera dans l'article de la demi lune; savoir, en y faisant monter quelques sappeurs, qui à la faveur du feu des batteries & des logemens du chemin couvert, commencent l'établissement du logement; ou en y montant en corps de troupes, pour s'y établir de vive force; ou ce qui est la même chose, en donnant l'assaut au bastion.

Si l'ennemi n'a point pratiqué de retranchement dans l'intérieur du bastion, il ne prendra guere le parti de soûtenir un assaut qui l'exposeroit à être emporté de vive force, à être pris prisonnier de guerre, & qui exposeroit aussi la ville au pillage du soldat.

Tout étant prêt pour lui donner l'assaut, il battra la chamade, c'est à - dire, qu'il demandera à se rendre à de certaines conditions: mais si les assiégeans présument qu'ils se rendront maîtres de la place par un assaut sans une grande perte, ils ne voudront accorder que des conditions assez dures. Plus les assiégés sont en état de se défendre, & plus ils obtiennent des conditions avantageuses, mais moins honorables pour eux. Le devoir des officiers renfermés dans une place, est de la défendre autant qu'il est possible, & de ne songer à se rendre que lorsqu'il est absolument démontré qu'il y a impossibilité de résister plus long - tems sans exposer la place & la garnison à la discrétion de l'assiégeant. Une défense vigoureuse se fait respecter d'un ennemi généreux, & elle l'engage souvent à accorder au gouverneur les honneurs de la guerre, dûs à sa bravoure & à son intelligence.

Nous supposons ici que de bons retranchemens pratiqués long - tems avant le siége, ou du moins des son commencement, dans le centre ou à la gorge des bastions, mettent l'assiégé en état de soûtenir un assaut au corps de sa place, & qu'il se réserve de capituler derriere ses retranchemens. Il faut dans ce cas se résoudre d'emporter la breche de vive force, & d'y faire un logement sur le haut, apres en avoir chassé l'ennemi.

Lorsqu'on se propose de donner l'assaut aux bastions, on fait pendant le tems qu'on construit & qu'on charge les mines, un amas considérable de matériaux dans les logemens les plus prochains des breches, pour qu'on puisse de main en main les faire passer promptement pour la construction du logement, aussi - tôt qu'on aura chassé l'ennemi.

Lorsqu'on est préparé pour mettre le feu aux mines, on commande tous les grenadiers de l'armée pour monter l'assaut: on les fait soûtenir de détachemens & de bataillons en assez grand nombre, pour que l'ennemi ne puisse pas résister à leur attaque. Ces troupes étant en état de donner, on fait joüer les mines; & lorsque la poussiere est un peu tombée, les grenadiers commandés pour marcher, & pour monter les premiers, s'ébranlent pour gagner le pié de la breche, où étant parvenus, ils y montent la bayonnette au bout du fusil, suivis de toutes les troupes qui doivent les soûtenir. L'ennemi qui peut avoir conservé des fourneaux, ne manquera pas de les faire sauter. Il fera aussi tomber sur les assaillans tous les feux d'artifice qu'il pourra imaginer, & il leur fera payer le plus cher qu'il pourra, le terrein qu'il leur abandonnera sur le haut de la breche: mais enfin il faudra qu'il le leur abandonne; la supériorité des assiégeans doit vaincre à la fin tous les obstacles des assiégés. S'ils sont assez heureux pour résister à un premier assaut, ils ne le seront pas pour résister à un second, ou à un troisieme: ainsi il faudra qu'ils prennent le parti de se retirer dans leurs retranchemens. Aussi - tôt qu'ils auront été repoussés, & qu'ils auront abandonné le haut de la breche, on fera travailler en diligence au logement. Il consistera d'abord en une espece d'arc de cercle, dont la convexité sera tournée vers l'ennemi, s'il y a une breche aux deux faces des deux bastions; autrement on s'établira simplement au haut de la breche. On donne l'assaut à toutes les breches ensemble; parlà on partage la résistance de l'ennemi, & on la rend moins considérable. Pendant toute la durée de cette action, les batteries & les logemens font le plus grand feu sur toutes les défenses de l'ennemi, & dans tous les lieux où il est placé, & sur lesquels on ne peut tirer sans incommoder les troupes qui donnent sur les breches.

Le logement sur la breche étant bien établi, on poussera des sappes à droite & à gauche vers le centre du bastion. On fera monter du canon sur la breche, pour battre le retranchement intérieur; on passera son fossé, & on s'établira sur sa breche, en pratiquant tout ce qu'on vient de dire pour les bastions. Si ce premier retranchement étoit suivi d'un second, l'ennemi apres avoir été forcé de l'abandonner, se retireroit dans celui - ci pour capituler. On l'attaqueroit encore comme dans le premier, & enfin on le forceroit de se rendre. Il est assez rare de voir des défenses poussées aussi loin que nous avons supposé celle - ci: mais ce long détail étoit nécessaire, pour donner une idée de ce qu'il y auroit à faire, si l'ennemi vouloit pousser la résistance jusqu'à la derniere extrémité.

Dans l'attaque des retranchemens intérieurs, outre le canon, il faut y employer les bombes & les pierriers. Les bombes y causent de grands ravages, parce que les assiégés sont obligés de se tenir en gros corps dans ces retranchemens, qui sont toûjours assez petits; & par cette raison les pierriers y sont d'un usage excellent par la grêle de pierres qu'ils font tomber dans ces ouvrages, qui tuent & estropient beaucoup de monde.» Attaque des places, par M. le Blond.

Attaque (Page 1:828)

Attaque d'une citadelle; les attaques des citadelles n'ont rien de différent de celles des villes: on s'y conduit absolument de la même maniere. Lorsqu'on est obligé de commencer le siége d'une place où il y a une citadelle, par la place même, on est [p. 829] dans le cas de faire deux siéges au lieu d'un: mais il arrive souvent que cet inconvénient est moins grand que de s'exposer à l'attaque d'une citadelle qui peut tirer de la ville de quoi prolonger sa défense. Il est aisé d'en disputer le terrain pié à pié, & de faire encore un grand & fort retranchement sur l'esplanade, qui arrête l'ennemi. Si l'on avoit d'abord attaqué la ville de Turin au lieu de la citadelle, ce siége n'auroit pas eu le triste évenement que tout le monde sait; c'est le sentiment de M. de Feuquieres. Voyez le IV. volume de ses Mémoires, page 253.

Attaque de flanc (Page 1:829)

Attaque de flanc; c'est dans l'Art militaire l'attaque d'une armée ou d'une troupe sur le flanc ou le côté: cette attaque est fort dangereuse; c'est pourquoi on a soin de couvrir autant qu'on le peut, les flancs d'une armée ou d'une troupe, par des villages, des rivieres, ou fortifications naturelles, qui empêchent l'ennemi de pouvoir former ou diriger son attaque sur les flancs de la troupe qu'il veut combattre. Voyez Flanc & Aîle.

Attaque de front (Page 1:829)

Attaque de front; c'est dans l'Art militaire, l'attaque qui se fait sur le devant ou la tête d'une troupe.

Attaque des lignes de circonvallation (Page 1:829)

Attaque des lignes de circonvallation, c'est l'essort que l'ennemi fait pour y pénétrer & en chasser ceux qui les défendent.

Le plus difficile & le plus dangereux de cette attaque, c'est le comblement du fossé. On se sert pour cet effet de fascines; chaque soldat en porte une devant lui; ce qui sauve bien des coups de fusil avant qu'on arrive, sur - tout quand elles sont bien faites & composées de menu bois. Lorsqu'on est arrivé sur le bord du fossé, les soldats se les donnent de main en main pendant qu'on les passe par les armes. Il faut avoüer que cette méthode est fort incommode & sort meurtriere. M. le chevalier de Folard, qui fait cette observation, propose, pour conserver les troupes dans cette action, de faire plusieurs chassis de 7 à 8 piés de large sur 10 à 12 de longueur, suivant la largeur du fossé. Ces chassis doivent être composés de 3 ou 4 soiveaux de brin de sapin de 4 pouces de largeur sur 5 d'épaisseur, pour avoir plus de force pour soûtenir le poids des soldats qui passeront dessus, avec des travers bien emmortoises. On cloue dessus des planches de sapin. Pour mieux assûrer ces ponts, on peut pratiquer aux extrémités des grapins, qui s'enfoncent sur la berme ou sur le sascinage de, lignes.

Lorsqu'on veut se servir de ces ponts, il faut les faire monter dans le camp & les voiturer sur des chariots derriere les colonnes, à une certaine distance des retranchemens: apres quoi on les fait porter par des soldats commandés à cet esset, qui les jettent sur le fossé lorsque les troupes y sont arrivées, observant de les poser & placer à côté les uns des autres, de maniere qu'ils puissent se toucher. Vingt ponts construits de la sorte, suffisent pour le passage d'une colonne, & laisseront encore des espaces suffisans pour celui des grenadiers.

On peut encore se servir pour le comblement du fossé des lignes, d'un autre expédient qui exige moins de préparatifs. Il faut faire faire de grands sacs de grosse toile, de 8 prés de long, qu'on remplira des deux côtés, de paille, de feuilles d'arbres, ou de fumier, qui est encore meilleur à cause du feu. On roulera sur trois rangs paralleles, un nombre de ces balots à la tête & sur tout le front des colonnes, qu'on jettera dans le fossé, d'abord le premier rang, ensuite le second, & ainsi des autres, s'il en faut plusieurs. Deux ou trois de ces balots suffiront de reste pour combler le fossé, si on leur donne cinq piés de diametre: comme il peut rester quelques vuides entre ces balots, à cause de leur rondeur, on jettera quelques fascines dessus, que les soldats des premiers rangs des colonnes doivent porter. Cette méthode de combler un fossé, a cet avantage, que les soldats qui roulent ces ballots devant eux, arrivent à couvert jusqu'au bord du fossé. On peut se servir egalement de ballots de fascines. Folard, Comment. sur Polybe.

Attaques (Page 1:829)

Attaques d'une place; ce sont en général toutes les actions & tous les différens travaux qu'on fait pour s'en emparer. Voyez Tranchée, Sappe, Parallele ou Place d'armes, Logement &c.

Regler les attaques d'une place, c'est déterminer le nombre qu'on en veut faire, & les côtés ou les fronts par lesquels on veut l'attaquer: c'est aussi fixer la forme & la figure des tranchées. Avoir les attaques d'une place, c'est avoir un plan sur lequel les tranchêes, les logemens, les batteries, &c. sont tracées.

Maximes ou principes qu'on doit observer dans l'attaque des places. I. Il faut s'approcher de la place sans en être découvert, directement, ou obliquement, ou par le flanc.

Si l'on faisoit les tranchées en allant directement à la place, par le plus court chemin, l'on y seroit en butte aux coups des ennemis postés sur les pieces de la fortification où la tranchée aboutiroit; & si l'on y alloit obliquement, pour sortir de la direction du feu de l'endroit où l'on veut aller, & que la tranchée sût vûe dans toute sa longueur par quelqu'autre piece de la fortification de la place, les soldats placés sur cette piece de fortification verroient le flanc de ceux de la tranchée, laquelle se trouvant ainsi enfilée par l'ennemi, ne garantiroit nullement du feu de la place, les soldats qui seroient dedans.

Or, comme l'objet des tranchées est de les en garantir, il faut donc qu'elles soient dirigées de maniere qu'elles ne soient ni en vûe, ni enfilées par l'ennemi d'aucun endroit.

II Il faut éviter de faire plus d'ouvrage qu'il n'en est besoin pour s'approcher de la place sans être vû, c'est - à - dire, qu'il faut s'en approcher par le chemin le plus court qu'il est possible de tenir, en se couvrant ou détournant des coups de l'ennemi.

III. Que toutes les parties des tranchées se soûtiennent réciproquement, & que celles qui sont les plus avancées ne soient éloignées de celles qui doivent les defendre, que de 120 ou 130 toises, c'est - à - dire, de la portée du fusil.

IV. Que les paralleles ou places d'armes les plus éloignees de la place ayent plus d'étendue que celles qui en sont plus proches, afin de prendre l'assiégé par le flanc, s'il vouloit attaquer ces dernieres paralleles.

V. Que la tranchée soit ouverte ou commencée le plus pres de la place qu'il est possible, sans trop s'exposer, afin d'accélérer & diminuer les travaux du siége.

VI. Observer de bien lier les attaques, c'est - à - dire, d'avoir soin qu'elles ayent des communications pour pouvoir se donner du secours réciproquement.

VII. Ne jamais avancer un ouvrage en avant, sans qu'il soit bien soûtenu; & pour cette raison, dans l'intervalle de la seconde & de la troisieme place d'armes, faire de part & d'autre de la tranchée des retours de 40 ou 50 toises paralleles aux places d'armes, & construits de la même maniere, qui servent à placer des soldats pour protéger les travaux que l'on fait pour parvenir à la troisieme place d'armes. Ces sortes de retours, dont l'usage est le même que celui des places d'armes, se nomment demi - places d'armes.

VIII. Observer de placer les batteries de canon sur le prolongement des pieces attaquées, afin qu'elles en arrêtent le feu; & que les travaux en étant protégés, avancent plus aisément & plus promptement.

IX. Embrasser par cette raison toûjours le front

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