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Si - tôt que l'on est maître du haut de la breche, on y fait un logement fort à la hâte, avec des gabions & des fascines; & pendant qu'on le fait, & même pendant qu'on charge l'ennemi, & qu'on l'oblige d'abandonner le haut de la breche, on détache quelques soldats pour tâcher de découvrir les mines que l'ennemi doit avoir faites dans l'intérieur du rempart de la demi - lune, & en arracher ou couper le saucisson. Si l'on ne peut pas réussir à les trouver, il ne faut s'avancer qu'avec circonspection, & ne pas se tenir tous ensemble, pour que la mine fasse un effet moins considérable. Souvent l'ennemi laisse travailler au logement sans trop s'y opposer, parce qu'il ne se fait qu'avec une très grande perte de monde, les travailleurs & les troupes étant pendant le tems de sa construction absolument en butte à tout le feu de la place, qui est bien servi, & que la proximité rend très - dangereux: mais lorsque le logement commence à prendre forme, l'ennemi fait sauter ses mines, & il revient ensuite dans la demi - lune, pour essayer de la reprendre à la faveur du desordre que les mines ne peuvent manquer d'avoir causé parmi les troupes qui y étoient établies. Alors il faut revenir sur lui avec des troupes qui doivent être à portée de donner du secours à celles de la demi - lune, & s'établir dans les excavations des mines; & enfin rendre le logement solide, le garnir d'un assez grand nombre de soldats, pour être en état de résister à tous les nouveaux efforts de l'ennemi.
Cet ouvrage ne peut guere être ainsi disputé que lorsque la demi - lune > un réduit, parce que le réduit donne une retraite aux soldats de la place qui défendent la demi - lune, & qu'il met à portée de tomber aisément dans la demi - lune: car s'il n'y en a point & que l'ennemi soit chassé de la demi - lune, il ne peut plus guere tenter d'y revenir, sur - tout si la communication de la place avec la demi - lune est v>e des batteries & des logemens du chemin couvert: car si le fossé est plein d'eau, cette communication ne pourra se faire qu'avec des bateaux, qu'on peut voir aisément du chemin couvert, & qu'on peut renverser avec le canon des batteries; & si le fossé est sec, & qu'il y ait une caponiere, la communication, quoique plus sûre, n'est pourtant pas sans danger, à cause du feu qu'on y peut plonger des logemens du chemin couvert, ensorte qu'il est assez difficile que l'ennemi y puisse faire passer assez brusquement un corps de troupes suffisant pour rentrer dans la demi - lune & s'en emparer; il lui manque d'ailleurs de la place pour s'assembler & tomber tout d'un coup avec un gros corps sur les logemens de la demi - lune.
Il y auroit seulement un cas où il pourroit le faire; savoir, lorsqu'on a pratiqué dans l'angle de la gorge de la demi - lune un espace à peu - près de la grandeur des places d'armes du chemin couvert; cet espace ne peut être vû du chemin couvert, ni de ses logemens, & il y a ordinairement des degrés pour monter du fond du fossé dans la demi -
Le tems le plus favorable pour l'attaque de la demi - lune, de vive force, est la nuit; le feu de l'ennemi en est bien moins sûr qu'il ne le seroit le jour ». Attaque des places par M. le Blond.
Attaque (Page 1:836)
Lorsque la troisieme parallele, ou place d'armes, est solidement établie au pié du glacis, & qu'on veut s'emparer du chemin couvert par la sappe, on s'avance en zig - zag par une sappe sur les arrêtes des angles saillans du chemin couvert attaqué; & comme il est alors fort difficile de se parer de l'enfilade, on s'enfonce le plus profondément qu'on peut, ou bien l'on fait de fréquentes traverses. On arrive aussi quelquefois à l'angle saillant du glacis par une tranchée directe qui se construit ainsi.
Deux sappeurs poussent devant eux, le long de l'arrête
du glacis, un gabion farci ou un mantelet. Ils font
une sappe de chaque côté de cette arrête. Ils en font
le fossé beaucoup plus profond qu'à l'ordinaire, pour
s'y couvrir plus sûrement du feu de la place. Cette
sappe qui chemine ainsi des deux côtés en même tems,
se nomme double sappe. Elle a un parapet de chaque
côté, & des traverses dans le milieu, de distance en
distance. Voyez
Ces cavaliers bien établis, il est aisé de pousser la tranchée directe jusqu'à l'angle saillant du chemin couvert, & d'établir à la pointe de cet angle & sur le haut du glacis, un petit logement en arc de cercle, dont le feu peut obliger l'ennemi d'abandonner la place d'armes qui est en cet endroit. On étend ensuite ce logement de part & d'autre des branches du chemin couvert, en s'enfonçant dans la partie supérieure ou la crête du glacis, à la distance de trois toises du côté intérieur du chemin couvert, afin que cette épaisseur lui serve de parapet à l'épreuve du canon.
L'opération que l'on vient de décrire pour parvenir de la troisieme parallele à l'angle saillant du chemin couvert, se fait en même tems sur tous les angles saillans du front attaqué. Ainsi l'ennemi se trouve obligé de les abandonner à peu - près dans le même tems. Le logement se continue ensuite de part & d'autre de ces angles vers les places d'armes rentrantes du chemin couvert.
On oblige l'ennemi d'abandonner ces places d'armes par des batteries de pierriers qu'on construit vis - à - vis, & qui joignent les logemens des deux branches du chemin couvert, qui forment les angles rentrans. Ces batteries étant construites, elles font pleuvoir une grêle de cailloux dans les places d'armes, qui ne permettent pas à l'ennemi de s'y soûtenir. On avance toûjours pendant ce tems - là le logement des branches vers la place d'armes; & lorsque l'ennemi l'a abandonné, on continue le logement du glacis tout autour des faces de la place d'armes. On fait un autre logement dans la place d'armes qui communique avec celui de ses faces. Il s'étend à peu - près circulairement le long des demi - gorges des places d'armes. [p. 837]
Ce logement bien établi & dans son état de perfection, empêche l'ennemi de revenir dans le chemin couvert pour essayer de le reprendre.
Tous ces logemens se font avec des gabions & des fascines. On remplit les gabions de terre; on met des fascines dessus, & l'on recouvre le tout de terre.
Sans les mines il seroit bien difficile à l'ennemi
de retarder les travaux dont nous venons de donner
le détail; parce que les ricochets le désolent
entierement, & qu'ils labourent toutes ses défenses,
ensorte qu'il n'a aucun lieu où il puisse s'en
mettre à l'abri: mais il peut s'en dédommager dans
les travaux soûterreins, où ses mineurs peuvent
aller, pour ainsi dire, en sûreté, tandis que ceux
de l'assiégeant, qui n'ont pas la même connoissance
du terrein, ne peuvent aller qu'à tâtons, & que
c'est une espece de hasard, s'ils peuvent parvenir
à trouver les galeries de l'ennemi, & les ruiner.
Si l'on est instruit que le glacis de la place soit contreminé,
on ne doit pas douter que l'ennemi ne
profite de ces contremines, pour pousser des rameaux
en avant dans la campagne; & alors pour
éviter autant que faire se peut, le mal qu'il peut
faire avec ses fourneaux, on creuse des puits dans
la troisieme parallele, auxquels on donne, si le terrein
le permet, 18 ou 20 piés de profondeur, afin
de gagner le dessous des galeries de l'assiégé; & du
fond de ces puits on mene des galeries, que l'on
dirige vers le chemin couvert pour chercher celles de
l'ennemi. On sonde les terres avec une longue aiguille
de fer, pour tâcher de trouver ces galeries.
Si l'on se trouve dessus, on y fera une ouverture,
par laquelle on jettera quelques bombes dedans qui
en feront deserter l'ennemi, & qui ruineront sa
galerie. Si au contraire on se trouve dessous, on la
fera sauter avec un petit sourneau: mais si on ne
peut parvenir à découvrir aucunes galeries de
l'ennemi, en ce cas il faut prendre le parti de faire
de petits rameaux à droite & à gauche, au bout
desquels on fera de petits fourneaux qui ébranleront les terres des environs, & qui ne pourront
guere manquer de ruiner les galeries & les fourneaux
de l'assiégé.
Quelque attention que l'on puisse avoir en pareil
cas, on ne peut présumer d'empêcher totalement
l'ennemi de se servir des fourneaux qu'il a
placés sous le glacis: mais à mesure qu'il les fait
sauter, on fait passer des travailleurs, qui font
promptement un logement dans l'entonnoir de la
mine, & qui s'y établissent solidement. On peut
dans de certaines situations de terrein, gâter les
mines des assiégés, en faisant couler quelque ruisseau
dans ses galeries; il ne s'agit pour cela que
de creuser des puits dans les environs, & y faire
couler le ruisseau. On se servit de cet expédient au
siége de Turin, en 1706, & on rendit inutile par
là un grand nombre de mines des assiégés.
L'ennemi doit avoir disposé des fourneaux pour
empêcher le logement du haut du glacis; ils doivent
être placés à quatre ou cinq toises de la palissade
du chemin couvert, afin qu'en sautant, ils ne
causent point de dommage à cette palissade, &
qu'ils se trouvent à peu - près sous le logement que
l'assiégeant fait sur le haut du glacis. Lorsqu'il y a
mis le feu, on s'établit dans leur entonnoir; l'assié<cb->
On ne peut donner que des principes généraux sur
ces sortes de chicanes. Elles dépendent du terrein
plus ou moins favorable, & ensuite de la capacité
& de l'intelligence de ceux qui attaquent, & de
ceux qui défendent la place.
Nous avons supposé avant que de parler des mines,
en traitant du logement sur le haut du glacis,
que le feu des cavaliers de tranchée, celui des batteries
de canon & de bombes à ricochet, avoit
obligé l'ennemi de quitter le chemin couvert: mais
si malgré tous ces feux il s'obstine à demeurer dans
les places d'armes, & derriere les traverses, voici
comment on pourra parvenir à l'en chasser totalement,
& à faire sur le haut du glacis le logement
dont nous avons déjà parlé.
Soit que l'ennemi ait fait sauter un fourneau
vers l'angle saillant de son chemin couvert, ou que
l'assiégé ait fait sauter vers ces endroits une partie
des palissades; si - tôt que le fourneau aura joüé, on
fera passer des travailleurs dans son entonnoir, qui
s'y couvriront promptement, & qui ensuite étendront le logement dans le chemin couvert de part &
d'autre des côtés de son angle saillant.
On communiquera la tranchée double, ou la
double sappe de l'arrête du glacis avec ce logement,
pour être plus en état de le soûtenir, s'il en
est besoin, & pour pouvoir communiquer plus sûrement
avec lui. Une des grandes attentions qu'il
faut avoir dans ce logement, c'est d'en bien couvrir
les extrémités, c'est - à dire, de s'y bien traverser
pour se couvrir des feux des autres parties
du chemin couvert, où l'ennemi se tient encore.
Lorsque ce logement sera parvenu auprès des
premieres traverses du chemin couvert, si l'ennemi
est encore derriere, comme il ne peut y être qu'en
très - petit nombre, eu égard à l'espace qu'il y a,
on l'en fera chasser par une compagnie de grenadiers,
qui tomberont brusquement sur lui; après
quoi on fera chercher dans la partie qu'ils auront
abandonnée, l'ouverture ou le saucisson de la mine;
& si on la trouve, comme il y a apparence, on
l'arrachera, & on rendra par là la mine inutile. On
pourra aussi faire passer quelques travailleurs dans
le passage de la traverse: ils y feront un logement
qui sera un des plus sûrs de ceux que l'on peut faire
dans cette proximité de l'ennemi. On percera ensuite
une entrée dans le chemin couvert vis - à - vis ces
traverses; on la prolongera jusque vers le bord du
fossé, en se couvrant de la traverse; après quoi on
fera partir une sappe de chacune des extrémités
de ce passage, c'est - à - dire, environ du bord de la
contrescarpe> lesquels suivront à peu - près l'arrondissement
de cette contrescarpe, vers le mi ieu de
laquelle elles se rencontreront. On enfoncera beaucoup
ce logement, afin qu'il ne cause point d'obstacle
à celui du haut du glacis; & l'on fera ensorte
de laisser devant lui jusqu'au bord du fossé, une
épaisseur de terre suffisante pour résister au canon
des flancs & de la courtine. On blinde ce logement
pour y être à couvert des grenades. Il est d'une
grande utilité pour donner des découvertes dans le
fossé.
On continuera pendant le tems qu'on travaillera
à ce logement dans l'intérieur du chemin couvert,
le logement du haut du glacis, jusqu'aux places
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