ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"677"> & la Moldavie, joindre le mont Krapack; celui - ci par la Moravie, vient embrasser les montagnes de Bohème.

Une derniere branche des Alpes, court le long des états de Gènes & du Parmésan, pour se réunir à l'Apennin, qui comme un arbre envoie quantité de tameaux dans toute l'Italie, jusqu'au phare de Messine. Il se releve encore dans la Sicile, qu'il parcourt presqu'en tout sens, changeant cent fois de nom.

Le mont Atlas en Afrique, envoye une branche qui va jusqu'à l'Océan, & en produit une autre qui va jusqu'à l'Egypte. Le royaume de Dancali, situé tout à l'entrée de la mer rouge, n'est presqu'autre chose que cette même chaîne, que le détroit de Babel - Mandel interrompt à peine. Les montagnes de la Meque & de l'Yémen, se joignent à celles de l'Arabie Pétrée, & puis à celles de la Palestine & de la Syrie, entre lesquelles est le Liban.

Les monts qui s'étendent le long de la mer en - deçà d'Antioche de Syrie, continuent cette chaîne jusqu'au Taurus. Celui - ci a trois principaux bras; l'un s'étendant à l'occident, court jusqu'à l'Archipel. Le second avançant vers le nord par l'Arménie, va prendre le nom de Caucase, entre la mer Noire, & la mer Caspienne. Le troisieme bras court vers l'orient, passe l'Euphrate, coupe la Mésopotamie en plusieurs sens, va se joindre aux montagnes du Curdistan, & remplit toute la Perse de ses rameaux.

Le bras qui se distribue dans la Perse, ne s'y borne pas. Il entre dans la Corassane, & recevant le nom d'Imaüs, il sépare la Tartarie de l'Indoustan. Entre ses plus considérables parties il s'en détache une qui prend le nom de montagne de Gate, sépare la côte de Malabar de celle de Coromandel, & va se terminer au - cap de Comorin. Une autre partie de l'Imaüs forme trois nouvelles chaînes, dont l'une va jusqu'à l'extrémité de l'île de Malaca; l'autre jusqu'au royaume de Camboge, & la troisieme après avoir partagé la Cochinchine dans toute sa longueur, va finir dans la mer, au royaume de Ciampa.

Le Junnan & autres provinces de la Chine, sont situés dans une appendice de cette montagne. Le Tangut, le Thibet, la Tartarie chinoise, toute la Tartarie russienne, y comprise la grande presqu'île de Kamtschatka, & la Sibérie & toute la côte de la mer Blanche, sont hérissées de cette même chaîne de montagnes qui par diverses branches qu'elles jettent dans la grande Tartarie, va se rejoindre à l'Imaüs. En vain la mer Blanche semble l'interrompre, elle se releve de l'autre côté dans la Lapponie, & courant de là entre la Suede & la Norvege, elle arrive enfin à la mer de Danemark.

Il regne la même économie de montagnes en Amérique. En commençant par l'isthme de Panama, nous y voyons ces hautes montagnes qui séparent les deux mers, traversent la Castille d'or & le Popayan. Cette même chaîne court le long du Pérou, du Chili & de la terre Magellanique, jusqu'au détroit de Magellan qui en est bordé. Une branche de ces montagnes semble sortir du Popayan, coupe la Goyanne & borde toute la côte du Brésil & du Paraguay. Si on parcourt l'Amérique septentrionale, on trouvera semblablement de vastes chaînes de montagnes qui serpentent dans la nouvelle Espagne, dans le nouveau Mexique, dans la Louisiane, le long de la Caroline, de la Virginie, du Maryland & de la Pensylvanie.

Ne croiroit - on pas à cet étalage de troncs, de branches & de rameaux, qu'il ne s'agit point ici de ces monts sourcilleux qui se perdent dans les nuës, & séparent les plus grands royaumes du globe terrestre, mais qu'il est question des ramifications de l'aorte, de la veine cave, ou des nerfs sympathi<cb-> ques? Il est cependant vrai que je ne puis guere m'expliquer autrement, & que les principales montagnes de l'univers ont entr'elles un enchaînement assez semblable à celui qu'ont les nerfs, les vertebres ou les vaisseaux sanguins. Le comte de Marsilly avoit cu le projet, sur la fin de sa vie, de prouver cetté singuliere connexion des montagnes. Son livre devoit être intitulé Ossatura terra, l'Ossature de la terre; & le titre étoit ingénieux dans l'idée d'un physicien qui regardoit les montagnes sur le globe, comme l'anatomiste regarde les côtes & les os dans la charpente du corps de l'animal.

Mais toutes les montagnes de la terre ne se continuent pas par une chaîne plus ou moins grande. Il en est de considérables qui sont trés - isolées, comme l'Etna, le Vésuve, le Pic d'Adam, le Pic de Téneriffe & quantité d'autres.

S'il y en a d'une extrème hauteur, comme nous l'avons dit, il s'en trouve aussi d'une hauteur médiocre, comme sont la plûpart des montagnes de France & d'Allemagne; il y en a même sans nombre de très - peu élevées, & qui ne méritent que le nom de coteaux ou de collines.

Il regne quantité de différences dans leur structure, qui doivent être observées. Il y a par exemple, des montagnes dont la cime se termine en pointe; d'autres au haut desquelles on trouve une plaine assez spacieuse, & quelquefois même des lacs poissonneux; d'autres au contraire n'ont que des roches dépouillées de verdure; d'autres n'ont pour sommet que d'affreuses masses de glaces, comme les glaciers de Suisse: en un mot, on trouve une varieté prodigieuse dans la conformation des montagnes; & cette variété en met beaucoup dans les avantages ou desavantages qu'elles procurent aux pays sur lesquels elles dominent.

Les unes produisent des métaux, des minéraux, des pierres précieuses; d'autres du bois pour bâtir ou pour le chauffage; d'autres de gras pâturages; d'autres sont couvertes d'une pelouse sous laquelle on trouve des veines de marbre, de jaspe ou autres pierres, dont les hommes ont tiré de l'agrément ou de l'utilité. Voyez l'article précédent.

Il y a des montagnes qui jettent de la fumée, des cendres ou des flammes, comme l'Etna, le Vesuve, l'Hécla & plusieurs autres: on les nomme volcans. Voyez l'article Volcan.

Quelques montagnes ont le sommet couvert d'une neige qui ne fond jamais; d'autres n'ont point de neige, & d'autres n'en ont que pendant une partie de l'année, plus ou moins longue: cela dépend de leur hauteur, de le r exposition, du climat & de la rigueur ou de la douceur des saisons. Les Aliemands appellent berg, une montagne, & les Espagnols sierra, voyez Sierra.

Les abimes sont opposés aux montagnes. Il y a des montagnes qui en enferment entre elles de si profonds & de si affreux, que l'on ne peut en soutenir la vue sans que la tête en tourne: c'est ce qu'on nomme des précipices. Il y a finalement, telle montagne dont le passage est très - dangereux, ou absolument impossible à cause de ces précipices. (D.J.)

Montagne de glaces (Page 10:677)

Montagne de glaces, (Physiq. & Navigat.) on nomme montagnes de glaces ces amas immenses de glaces, tant en étendue qu'en hauteur, qu'on rencontre dans les mers du Nord, de Groenland, de Spitbergen, dans la baie de Baffin, le détroit de Hudson & autres mers septentrionales.

Ces glaces entassées sont si monstrueuses qu'il y en a de quatre ou cinq cent verges, c'est - à dire de douze ou quinze cent piés d'épaisseur; c'est sur quoi je pourrois citer les relations de plusieurs voyageurs: mais ces citations ne nous expliqueroient point comment ces montagnes prodigieuses se forment. [p. 678] Plusieurs auteurs ont essayé de résoudre cette question, entr'autres le capitaine Middleton anglois, qui a donné à ce sujet les conjectures les plus vraissemblables.

Le pays, dit - il, est fort élevé tout le long de la côte de la baie de Baffin, du détroit de Hudson, &c. & il l'est de cent brasses ou davantage, tout près de la côte; ces côtes ont quantité de golfes, dont les cavités sont remplies de neiges & de glaces gelées jusqu'au fond, à cause de l'hiver presque continuel qui regne dans ces endroits. Ces glaces se détachent & sont entraînées dans le détroit, où elles augmentent en masse plûtôt qu'elles ne diminuent, l'eau étant presque toûjours extrèmement froide pendant les mois de l'été. Elles refroidissent aussi tellement l'air, qu'il se fait un accroissement continuel à ces montagnes de glaces, par l'eau de la mer qui les arrose à chaque instant, & par les brouillards humides & très - fréquens dans ces endroits, qui tombent en forme de petite pluie, & se congelent en tombant sur la glace. Ces montagnes ayant beaucoup plus de profondeur au - dessous de la surface de la mer qu'elles ne s'élevent au - dessus, la force des vents ne peut pas taire grand effet sur elles pour les mouvoir: car quoique le vent souffle du côté du nord - ouest pendant presque neuf mois de l'année, & que par - là ces îles soient poussées vers un climat plus chaud, leur mouvement est néanmoins si lent, qu'il leur faudroit un siecle pour avancer cinq ou six cent lieues vers le sud.

Les amas de glaçons qu'on voit près du Groenland, ont commencé par se détacher des grandes rivieres de Moscovie, en flottant dans la mer où ils se sont accrus chaque année par la chûte de la neige qui ne s'est pas fondue pendant l'été, en aussi grande quantité qu'elle étoit tombée. De plus, l'eau des vagues de la mer qui se brisent sans cesse contre les masses de glace & qui en réjaillissent, ne manque pas de se geler à leur tour, & forme insensiblement dans ces contrées froides, des masses énormes & anguleuses de glace, comme le remarquent ceux qui navigent en Groenland. On voit de ces montagnes de glace s'élever au dessus de l'eau aussi haut que des tours, tandis qu'elles sont enfoncées sous l'eau jusqu'à la profondeur de quarante brasses, c'est - à - dire plus de deux cent piés. Voilà pourquoi les Navigateurs rencontrent dans les mers du Nord, des montagnes de glace qui ont quelques milles de tour, & qui flortent sur mer comme de grandes îles. On en peut lire les détails dans la pêche de Groenland, par Zordrager. (D.J.)

Montagnes de Rome (Page 10:678)

Montagnes de Rome, (Ant. rom.) Romulus fonda la ville de Rome sur le mont Palatin; & cette ville s'aggrandit tellement dans la suite qu'elle se trouva renfermer sept montagnes dans son enceinte, ce qui lui valut le nom célebre de septicollis, la ville à sept montagnes; mais il ne faut se figurer ces montagnes ou collines, que comme des hauteurs que l'on monte dans plusieurs endroits presqu'insensiblement.

Les sept montagnes, anciennement renfermées dans Rome, étoient 1°. le mont Palatin, Palazzo maggiore; 2°. le mont Quirinal, monte Cavallo; 3°. le mont Caelius, monte di san Giovanni Laterano; 4°. le mont Capitolin, campidoglio; 5°. le mont Aventin, monte di santa Sabina; 6°. le mont Esquilin, monte di S. Mariamaggiore; 7°. le mont Viminal, Viminale.

Outre ces montagnes, il y a aujourd'hui le Janicule ou le Montorio; le mont de Gl'ortuli ou della SS. Trinita, ainsi appellé de la belle église des Minimes, contiguë au jardin du grand duc de Toscane. Le Testaceo, qui a été formé de vases de terre brisés; enfin le Vatican si renommé par l'église de saint Pietre, & par le palais du pape. Nous ne parlerons ici que des sept montagnes de l'ancienne Rome & du Janicule.

1°. D'abord pour ce qui regarde le mont Palatin, les auteurs sont partagés sur l'étymologie de ce nom. Les uns veulent que les Aborigenes, appellés autrement Palatins, arent donné leur nom à cette montagne, lorsqu'ils la vinrent habiter dù territoire de Béate qu'on nommoit aussi Palatium. D'autres en font l'honneur à alatia femme de Latinus; d'autres à Palanto sille d Hyperborée, femme d'Hercule & mere de Latinus. Dautres tirent son origine du verbe palare, qui signifie errer, parce qu'on menoit paître des troupeaux sur cette col ine. D'autres enfin le font venir de Palas sils d'Hercule, & de Dyna fille d'Evandre, qui eut en ce lieu là sa sépulture. Denis d'Halicarnasse semble décider la question au commencement du second livre, où il dit que les Arcadiens étant venus habiter cette montagne, ils nommerent Paleuce la ville qu'ils y bâtirent, du nom d'une ville d'Arca lie dont ils étoient originaires. Le mont Palatin sat le premier que Romalus fit fermer de murailles, par une prédilection particuliere pour cette montagne, où ils avoient été élevés son frere & lui, & sur laquelle il avoit eu l'heureux auspice des douze vautours, qui lui avoit donné la préférence sur son frere Rémus.

2°. Le mont Quirinal; les Curetes qui vinrent de Cures à Rome avec le roi Tatius, donnerent leur nom à cette colline, parce qu'ils y avoient placé leur camp. Denis d'Halicarnasse appelle cette montagne, collem Agonalem: c'est le nom qu'elle portoit avant que les Sabins cussent fait alliance avec les Romains.

3°. Mont Calius; il eut son nom d'un certain Caelius Vibennus, capitaine hétrusque, qui vint avec une troupe d'elite au secours de Romulus contre le roi des Sabins. Cette montagne étoit couverte autrefois de chênes; c'est pourquoi Tacite, lib. IV. Ann. en parlant du mont Calus, ne le désigne que par le nom qu'il portoit alors, Querquetalanum montem.

4°. mont Capitolin; cette montagne fut fameuse par trois noms qu'elle porta. 1°. elle fut appellée mons Saturnius, de Saturne qui l'avoit anciennement habitée, & sous la protection duquel elle fut toûjours depurs: 2°. mons Tarpeïus, de cette fameuse Tarpeia, qu y fut accab ée sous les boueliers des Sabins, comme Denis d'Halicarnasse le racon'e; & qui y eut sa sépulture: 3°. mons Capitolinus, parce qu'en souillant les fondemens du temple de Jupiter sur cette montagne, on y trouva la téte d'un homme; c'est ce nom qui a prévalu dans la suite sur les deux autres qu'elle pertoit auparavant. La maison qu'nabitoit Tatius sur le capitole, fut changée en un temple dédlé à Juno moneta, parce qu'elle avoit donné, dit - on, des avis salutaires aux Romains dans la guerre contre les Arunces; ou selon Suilas, parce qu'elle leur avoit promis que dans la guerre contre Pyrrhus, l'argent ou la monnoie ne leur manqueroit point.

Ce mont fut le plus célebre de tous, à cause du temple de Jupiter commencé par Tarquin l'ancien, achevé par Tarquin le superbe, & dédié par Horatius Pulvillus. C'étoit là où se faisoient les voeux solemnels, où les citoyens prêtoient serment de fidélité, & où les Triomphateurs venoient rendre graces aux dieux de la victoire qu'ils avoient obtenue.

Mais pour dire quelque chose de plus particulier, on conservoit à Rome sur le mont Capitolin, avec une espece de religion, la maison de Romulas couverte de chaume: elle existoit encore du tems de Virgile. Séneque dit noblement, colit etiamnum in Capitolio casam victor gentium populus: Vitruve ajoûte, significat mores vetustatis casa in arce sacrorum, stramentis tecta. C'est ainsi qu'on conservoit encore alors dans la ville d'Athènes l'ancien Aréopage, qui n'étoit couvert que de terre.

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