ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"566"> d'où il s'ensuit, que selon la situation de l'oeil, on verra une image de plus ou de moins. Par exemple, si deux miroirs plans sont disposés de maniere qu'ils fassent entre eux un angle droit, chacun de ces miroirs fera d'abord voir une image de l'objet; de plus, on verra une troisieme image, si on n'est pas dans la ligne qui joint l'objet avec l'angle des miroirs; mais si on est dans cette ligne, on ne verra point cette troisieme image.

Les miroirs de verre ainsi multipliés, réfléchissent deux ou trois fois l'image d'un objet lumineux; il s'ensuit que si l'on met une bougie allumée, &c. dans l'angle des deux miroirs, elle y paroîtra multipliée.

C'est sur ces principes que sont fondées différentes machines catoptriques, dont quelques - unes représentent les objets très - multipliés, disloqués & difformes, d'autres infiniment grossis & placés à de grandes distances. Voyez Boite Catoptrique.

Si deux miroirs BC, DS, fig. 29. n. 2. sont disposés parallelement l'un à l'autre, on verra une infinité de fois l'image de l'objet A placé entre ces deux miroirs; car soit fait AD égale à DF, il est d'abord évident, que l'oeil O verra l'image de l'objet A en F par une seule réflexion, savoir, par le rayon OM A. Soit ensuite FB égale à BL, & LD égale à DH, l'oeil O verra l'objet A en H par trois réfléxions & par le rayon OSRLA, & ainsi de suite; de même si on mene la perpendiculaire AB, & qu'on fasse BI égale à AB, DG égale à ID, l'oeil O verra l'objet A en I par une seule réfléxion, & en G, par le rayon OPNA qui a souffert deux réfléxions. On trouvera de même les lieux des images de l'objet vûes par quatre réfléxions, par cinq, par six, par sept, &c. & ainsi à l'infini; d'où il s'ensuit que l'oeil O verra une infinité d'images de l'objet A par le moyen des miroirs plans paralleles BC, DE; au reste, il est bon de remarquer que dans ce cas & dans celui des miroirs, joints ensemble sous un angle quelconque, les images seront plus foibles à mesure qu'elles seront vûes par un plus grand nombre de réfléxions; car la réfléxion affoiblit la vivacité des rayons lumineux.

Il ne sera peut - être pas inutile d'expliquer ici une observation curieuse sur les miroirs plans: quand on place un objet assez petit, comme une épingle, perpendiculairement à la surface d'un miroir, & qu'on regarde l'image de cet objet en mettant l'oeil assez près du miroir, on voit deux images au lieu d'une, l'une plus foible, l'autre plus vive. La premiere paroît immédiatement contiguë à l'objet; de sorte que la pointe de l'image, si l'objet est une épingle, paroît toucher la pointe de l'épingle véritable; mais la pointe de la seconde image paroît un peu éloignée de la pointe de l'objet, & d'autant plus que la glace est plus épaisse. On voit outre cela très souvent plusieurs autres images qui vont toutes en s'affoiblissant, & qui sont plus ou moins nombreuses, selon la position de la glace & de l'oeil, & selon que l'objet est plus ou moins lumineux. Pour expliquer ces phénomenes nous remarquerons, 1°. que de tous les rayons que l'objet envoie sur la surface du miroir, il n'y en a qu'une partie qui est renvoyée ou réfléchie par cette surface, & cette partie même est assez peu considérable; car l'image qui paroît la plus proche de l'objet, & dont l'extrémité est contiguë à l'extrémité de l'objet, est celle qui est formée par les rayons que réfléchit la surface du miroir. Or cette image, comme nous l'avons dit, est souvent assez foible. 2°. La plus grande partie des rayons qui viennent de l'objet pénetrent la glace & rencontrent sa seconde surface dont le derriere est étamé, & par conséquent les empêche de sortir; ces rayons se réfléchissent donc au - dedans de la gla<cb-> ce, & repassant par la premiere surface, ils arrivent à l'oeil du spectateur. Or ces rayons sont en beaucoup plus grand nombre que les premiers qui sont immédiatement réfléchis par la premiere surface. En effet, le verre ainsi que tous les autres corps a beaucoup plus de pores que de matiere solide; car l'or qui est le plus pesant de tous est lui - même fort poreux, comme on le voit par les feuilles d'or minces qui sont transparentes, & qui donnent passage à l'eau, & l'or est beaucoup plus pesant que le verre, d'où il s'ensuit que le verre a beaucoup plus de pores que de parties propres. De plus, le verre ayant, selon toutes les apparences, une grande quantité de pores en ligne droite, sur - tout lorsqu'il est peu épais; il s'ensuit qu'il doit laisser passer beaucoup plus de rayons que la premiere surface n'en réfléchit; mais ces rayons étant arrivés à la seconde surface sont presque tous renvoyés, parce qu'elle est étamée, & lorsqu'ils arrivent de nouveau à la premiere surface, la plus grande partie de ces rayons sort du verre, par la même raison que la plus grande partie des rayons de l'objet est entrée au - dedans du verre. Ainsi, l'image formée par ces rayons doit être plus vive que la premiere: enfin, les rayons qui reviennent à la premiere surface, après avoir souffert une réflexion au - dedans du verre, ne sortent pas tous, mais une partie est réfléchie au - dedans de la glace par cette premiere surface, & delà sont renvoyés de nouveau par la seconde, & ressortant en partie par la premiere surface, ils produisent une nouvelle image beaucoup plus foible, & ainsi il se forme plusieurs images de suite par les réflexions réitérées des rayons au - dedans de la glace, & ces images doivent aller toujours en s'affoiblissant.

Les miroirs convexes, sont ceux dont la surface est convexe; cette surface est pour l'ordinaire sphérique.

Les lois des phénomenes des miroirs, soit convexes, soit concaves, sont beaucoup plus compliquées que celles des phénomenes des miroirs plans, & les auteurs de Catoptrique sont même assez peu d'accord entr'eux là - dessus.

Une des principales difficultés qu'il y ait à résoudre dans cette matiere, c'est de déterminer le lieu de l'image d'un objet vû par un miroir, convexe ou concave: or les Opticiens sont partagés là - dessus en deux opinions. La premiere & la plus ancienne, place l'image de l'objet dans le lieu où le rayon réfléchi qui va à l'oeil, coupe la cathete d'incidence, c'est - à - dire, la perpendiculaire menée de l'objet à la surface réfléchissante; laquelle perpendiculaire, dans les miroirs sphériques, n'est autre chose que la ligne menée de l'objet au centre du miroir. Ce qui a donné naissance à cette opinion, c'est qu'on a remarqué que dans les miroirs plans, le lieu de l'image étoit toujours dans l'endroit où la perpendiculaire menée de l'objet sur le miroir, étoit rencontré par le rayon réfléchi; on a donc cru qu'il devoit en être de même dans les miroirs sphériques, & on s'est même imaginé que l'expérience étoit assez conforme à ce sentiment. Cependant le P. Taquet, un de ceux qui ont le plus soutenu que le lieu de l'image étoit dans le concours de la cathete & du rayon réfléchi, convient lui - même qu'il y a des cas où l'expérience est contraire à ce principe; malgré cela, il ne laisse pas de l'adopter, & de prétendre qu'il est confirmé par l'expérience dans un grand nombre d'autres cas. Si les auteurs d'optique qui ont suivi cette opinion sur le lieu de l'image, avoient approfondi davantage les raisons pour lesquelles les miroirs plans font toujours voir de l'image dans le concours de la cathete & du rayon réfléchi; ils auroient vû que dans ces sortes de mi - [p. 567] roirs, le point de concours de la cathete & du rayon réfléchi, est aussi le point de concours commun de tous les rayons réfléchis, que par conséquent des rayons réfléchis qui entrent dans l'oeil, y entrent comme s'ils venoient directement de ce point de concours, & que c'est pour cette raison que ce point de concours est le lieu où l'on apperçoit l'image. Or dans les miroirs, soit convexes, soit concaves, le point de concours des rayons réfléchis n'est pas le même que le point de concours de ces rayons avec la perpendiculaire. Ces raisons ont engagé plusieurs Opticiens à abandonner l'opinion commune sur le lieu de l'image: M. Barrow, Newton, Muschenbroeck, &c. prétendent qu'elle doit être dans le lieu où concourent les rayons réfléchis qui entrent dans l'oeil, c'est - à - dire, à - peu près dans l'endroit où concourent deux rayons réfléchis infiniment proches, venant de l'objet & passant par la prunelle de l'oeil. Cependant il faut avouer, & Barrow lui - même en convient à la fin de son optique, que ce principe, quoique fondé sur des raisons plus plausibles que le premier, n'est pas encore absolument général, & qu'il y a des cas où l'expérience y est contraire. Il est vrai que dans ces cas, l'image de l'objet paroît presque toujours confuse; ce sont ceux où les rayons réfléchis entrent dans l'oeil convergens, c'est - à - dire en se rapprochant l'un de l'autre, de sorte que dans ces cas on devroit voir l'image derriere soi, suivant le principe, parce que le point de concours des rayons est derriere. Barrow, en rapportant ces expériences, dit qu'elles ne l'empêchent pas de regarder comme vraie son opinion sur le lieu de l'image, & que les difficultés auxquelles elle peut être sujette viennent de ce que l'on ne connoît point encore parfaitement les lois de la vision directe. En effet, la difficulté se réduit ici à savoir, quel devroit être le lieu apparent d'un objet qui nous envoyeroit des rayons, non pas divergens, mais convergens; or comme ces rayons devroient presque toujours se réunir avant d'arriver au fond de l'oeil, il s'ensuit que la vision devroit en être fort confuse; & comme une longue expérience nous a accoutumés à juger, que les objets que nous voyons, soit confusément, soit distinctement, sont au - devant de nous; cette image, quoique confuse, nous paroîtroit audevant de nous, quoique nous dussions naturellement la juger derriere; peut - être expliqueroit - on par - là le phénomene dont il s'agit: quoi qu'il en soit, on ne sauroit nier que le principe de Barrow ne soit appuyé sur des raisons bien plus plausibles que celui des anciens.

M. Wolf dans son optique embrasse un sentiment moyen. Il pretend que quand les deux yeux sont dans le même plan de réflexion, l'objet est vû dans le concours des rayons réfléchis, suivant l'opinion de Barrow, mais que quand les yeux sont dans différens plans, ce qui arrive presque toujours, l'objet est vû dans le concours de rayon réfléchi avec la cathete. Voici comme il démontre cette derniere proposition: soient, dit - il (fig. 38. de l'Opt.) G, H, les deux yeux, A, l'objet, AF la cathete d'incidence, & ADG un rayon réfléchi qui concoure avec la cathete en C; le rayon réfléchi AEH qui passe par l'oeil H, concourra aussi au même point C, & par conséquent l'objet sera vû en C; mais 1°. cette démonstration suppose que les rayons réfléchis EH, GD, sont dans le même plan, ce qui est fort rare; 2°. la proposition est fausse lors même qu'ils y sont: car alors on ne devroit voir qu'une seule image de l'objet A, cependant il y a des cas où l'on en voit deux. Voyez Barrow, lec. 15. 3°. pourquoi l'auteur veut - il que l'on voye l'objet dans l'endroit où les rayons DG, HE concourent? Cela seroit vrai, si tous les rayons qui vont à l'oeil G & à l'oeil H partoient du point C, comme il arrive dans la vision directe, & l'objet seroit alors vû en C, non parce que les axes optiques GD, HE concourroient en C, mais parce que tous les rayons qui entreroient dans chacun des yeux partiroient du point C: or, dans le cas présent, ils n'en partent pas. Il n'y a donc point de raison pour que l'objet paroisse en C.

Nous avons crû devoir exposer ici avec quelque étendue, ces différentes opinions: nous allons marquer le plus succinctement qu'il nous sera possible, l'explication des différens phénomenes des miroirs courbes, suivant le principe des anciens, & nous en marquerons en même - tems l'explication dans le principe de Barrow, afin qu'on juge de la différence, & qu'on puisse décider auquel des deux l'expérience est le plus conforme. Nous remarquerons d'abord, qu'il y a bien des cas où ces deux principes s'accordent à - peu - près: par exemple, lorsque l'objet est fort près de l'oeil, c'est - à dire que l'oeil est presque dans la cathete, le point de concours des rayons réfléchis est à - peu - près le même que le point de concours de ces rayons avec la cathete; ainsi le lieu de l'image est alors à - peu - près le même dans les deux principes. Voyez Dioptrique.

Lois & phénomenes des miroirs convexes. 1°. Dans un miroir convexe sphérique, l'image d'un point radieux paroît entre le centre & la tangente du miroir sphérique au point d'incidence, mais plus près de la tangente que du centre, ce qui fait que la distance de l'objet à la tangente est plus grande que celle de l'image, & par conséquent que l'objet est plus loin du miroir que l'image.

2°. Si l'arc BD (fig. 31.) intercepté entre le point d'incidence D & la cathete AB, ou l'angle C formé au centre du miroir par la cathete d'incidence AC, & celle d'obliquation FC est double de l'angle d'incidence, l'image paroîtra sur la surface du miroir.

3°. Si cet arc ou cet angle sont plus que doubles de l'angle d'incidence, l'image se verra hors du miroir.

Suivant le principe de Barrow, le lieu de l'image dans les miroirs convexes est toujours au - dedans du miroir, parce que le point de concours des rayons réfléchis n'est jamais hors du miroir. Ainsi, voilà déja un moyen de décider lequel des deux principes s'accorde le plus avec les observations. Le P. Dechals dit, qu'après en avoir fait l'expérience plusieurs fois, il ne peut assurer là dessus rien de positif. Mais M. Wolf en propose une dans laquelle on voit clairement, selon lui, l'image hors du miroir. Il prétend qu'ayant pris un fil d'argent ABC courbé en équerre (fig. 38. n°. 3. d'Opt.) & l'ayant exposé à un miroir convexe de telle sorte, que la partie A B étoit située très - obliquement à la surface du miroir, il a vû clairement l'image du fil BA contiguë à ce même fil, quoique le fil BA ne touchât point le miroir.

4°. Si cet arc ou cet angle sont moins que doubles de l'angle d'incidence, l'image paroîtra en dedans du miroir.

5°. Dans un miroir convexe, un point A plus éloigné (fig. 32.) est réfléchi par un point F plus près de l'oeil O que tout autre point B, situé dans une même cathete d'incidence; d'où il s'ensuit, que si le point A de l'objet est réfléchi par le point F du miroir, & que le point B de l'objet le soit par le point E du miroir, tous les points intermédiaires entre A & B dans l'objet, seront réfléchis par les points intermédiaires entre F & E: & ainsi FE sera la ligne qui réfléchira AB, & par conséquent un point B de la cathete semble à une plus grande distance C

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