ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"328"> quand elles se sont présentées ensemble. Ainsi les choses n'attirant notre attention que par le rapport qu'elles ont à notre tempérament, à nos passions, à notre état, ou, pour tout dire en un mot, à nos besoins; c'est une conséquence que la même attention embrasse tout - à - la - fois les idées des besoins & celles des choses qui s'y rapportent, & qu'elle les lie.

Tous nos besoins tiennent les uns aux autres, & l'on en pourroit considérer les perceptions comme une suite d'idées fondamentales auxquelles on rapporteroit toutes celles qui font partie de nos connoissances. Au dessus de chacun s'éleveroient d'autres suites d'idées qui formeroient des especes de chaînes, dont la force seroit entierement dans l'analogie des signes, dans l'ordre des perceptions, & dans la liaison que les circonstances, qui réunissent quelquefois les idées les plus disparates, auroient formée. A un besoin est liée l'idée de la chose qui est propre à le soulager; à cette idée est liée celle du lieu où cette chose se rencontre; à celle - ci, celle des personnes qu'on y a vûes; à cette derniere, les idées des plaisirs ou des chagrins qu'on en a reçus & plusieurs autres. On peut même remarquer qu'à mesure que la chaîne s'étend, elle se soudivise en différens chaînons, ensorte que plus on s'éloigne du premier anneau, plus les chaïnons s'y multiplient. Une premiere idée fondamentale est liée à deux ou trois autres; chacune de celles ci à un égal nombre, ou même à un plus grand, & ainsi de suite.

Ces suppositions admises, il suffiroit, pour se rappeller les idées qu'on s'est rendues familieres, de pouvoir donner son attention à quelques - unes de nos idées fondamentales auxquelles elles sont liées. Or cela se peut toujours, puisque tant que nous veillons, il n'y a point d'instant où notre tempérament, nos passions & notre état n'occasionnent en nous quelques - unes de ces perceptions, que j'appelle fondamentales. Nous y réussirions avec plus ou moins de facilité, à proportion que les idées que nous voudrions nous retracer, tiendroient à un plus grand nombre de besoins, & y tiendroient plus immédiatement.

Les suppositions que je viens de faire ne sont pas gratuites. J'en appelle à l'expérience, & je suis persuadé que chacun remarquera qu'il ne cherche à se ressouvenir d'une chose que par le rapport qu'elle a aux circonstances où il se trouve, & qu'il y réussit d'autant plus facilement que les circonstances sont en grand nombre, ou qu'elles ont avec elle une liaison plus immédiate. L'attention que nous donnons à une perception qui nous affecte actuellement, nous en rappelle le signe; celui - ci en rappelle d'autres, avec lesquels il a quelque rapport; ces derniers réveillent les idées auxquelles ils sont liés; ces idées retracent d'autres signes ou d'autres idées, & ainsi successivement.

Je suppose que quelqu'un me fait une difficulté, à laquelle je ne sais dans le moment de quelle maniere satisfaire. Il est certain que, fi elle n'est pas solide, elle doit elle - même m'indiquer ma réponse. Je m'applique donc à en considérer toutes les parties, & j'en trouve qui étant liées avec quelquesunes des idées qui entrent dans la solution que je cherche, ne manquent pas de les réveiller. Cellesci, par l'étroite liaison qu'elles ont avec les autres, les retracent successivement, & je vois enfin tout ce que j'ai à répondre.

D'autres exemples se présenteront en quantité à ceux qui voudront remarquer ce qui arrive dans les cercles. Avec quelque rapidité que la conversation change de sujet, celui qui conserve son sang - froid & qui connoît un peu le caractere de ceux qui parlent, voit toujours par quelle liaison d'idées on passe d'une matiere à une autre. J'ai donc droit de conclure que le pouvoir de réveiller nos perceptions, leurs noms ou leurs circonstances, vient uniquement de la liaison que l'attention a mise entre ces choses, & les besoins auxquels elles se rapportent. Détruisez cette liaison, vous détruisez l'imagination & la mémoire.

Le pouvoir de lier nos idées a ses inconvéniens, comme ses avantages. Pour les faire appercevoir sensiblement, je suppose deux hommes; l'un chez qui les idées nont jamais pû se lier; l'autre chez qui elles se lient avec tant de facilité & tant de force, qu'il n'est plus le maître de les séparer. Le premier seroit sans imagination & sans mémoire, il seroit absolument incapable de réflexion, ce seroit un imbécille. Le second auroit trop de mémoire & trop d'imagination; il auroit à peine l'exercice de sa réflexion, ce seroit un fou. Entre ces deux excès, on pourroit supposer un milieu, où le trop d'imagination & de mémoire ne nuiroit pas à la solidité de l'esprit, & où le trop peu ne nuiroit pas à ses agrémens. Peut - être ce milieu est - il si difficile, que les plus grand génies ne s'y sont encore trouvés qu'à peu - près. Selon que différens esprits s'en écartent, & tendent vers les extrémités opposées, ils ont des qualités plus ou moins incompatibles, puisqu'elles doivent plus ou moins participer aux extrémités qui s'excluent tout - à - fait. Ainsi ceux qui se rapprochent de l'extrémité où l'imagination & la mémoire dominent, perdent à proportion des qualités qui rendent un esprit juste, conséquent & méthodique; & ceux qui se rapprochent de l'autre extrémité, perdent dans la même proportion des qualités qui concourent à l'agrément. Les premiers écrivent avec plus de grace, les autres avec plus de suite & de profondeur. Lisez l'essai sur l'origine des connoissances humaines, d'où ces réflexions sont tirées.

Mémoires (Page 10:328)

Mémoires, (Littér.) terme aujourd'hui très usité, pour signifier des histoires écrites par des personnes qui ont eu part aux affaires ou qui en ont été témoins oculaires. Ces sortes d'ouvrages, outre quantité d'évenemens publics & généraux, contiennent les particularités de la vie ou les principales actions de leurs auteurs. Ainsi nous avons les mémoires de Comines, ceux de Sully, ceux du cardinal de Retz, qui peuvent passer pour de bonnes instructions pour les hommes d'état. On nous a donné aussi une foule de livres fous ce titre. Il y a contre tous les écrits en ce genre une prévention générale, qu'il est très - difficile de déraciner de l'esprit des lecteurs, c'est que les auteurs de ces mémoires, obligés de parler d'eux - mêmes presqu'à chaque page, ayent assez dépouillé l'amour - propre & les autres intérêts personnels pour ne jamais altérer la vérité; car il arrive que dans des mémoires contemporains partis de diverses mains, on rencontre souvent des faits & des sentimens absolument contradictoires. On peut dire encore que tous ceux qui ont écrit en ce genre, n'ont pas assez respecté le public, qu'ils ont entretenu de leurs intrigues, amourettes & autres actions qui leur paroissoient quelque chose, & qui sont moins que rien aux yeux d'un lecteur sensé.

Les Romains nommoient ces sortes d'écrits en général commentarii. Tels sont les commentaires de César, une espece de journal de ses campagnes; il feroit à souhaiter qu'on en eût de semblables de tous les bons généraux.

On donne aussi le nom de mémoires aux actes d'une société littéraire, c'est - à - dire au résultat par écrit des matieres qui y ont été discutées & éclaircies, nous avons en ce genre les mémoires de l'académie des Sciences & ceux de l'academie des Inseriptions & Belles Lettres; le caractere de ces sortes d'écrits est l'élégance & la précision, une méthode qui ra<pb-> [p. 329] mene au sujet tout ce qui peut l'éclaircir, & qui en écarte avec le même soin tout ce qui est étranger. Ces deux qualités regnent dans la plûpart des pieces qui composent les recueils dont nous venons de parler, & sont suffisamment l'éloge des sociétés savantes qui leur ont donné le jour.

Mémoire (Page 10:329)

Mémoire, (Jurisprud.) signifie la bonne ou mauvaise réputation qu'on laisse après soi. On sait le procès au cadavre ou à la mémoire des criminels de lése - majesté divine ou humaine, de ceux qui ont été tués en duel, ou qui ont été homicides d'eux - mêmes, ou qui ont été tués en faisant rebellion à justice avec force ouverte; & pour cet effet on nomme un curateur au cadavre ou à la mémoire du défunt. Voyez le tit. XXII. de l'Ordonnance criminelle.

La veuve, les enfans & parens d'un condamné par sentence de contumace, qui sera décédé avant les cinq ans, à compter du jour de son exécution, peuvent appeller de la sentence, à l'effet de purger la mémoire du défunt, s'ils prétendent qu'il a été condamné injustement. Voyez le tit. XXVII de l'Ordonnance eriminelle. On brûle le procès de ceux qui ont commis des crimes atroces, pour effacer la mémoire de leur crime. (A)

Mémoire (Page 10:329)

Mémoire, ou Factum, (Jurisprud.) est aussi un écrit qui est ordinairement imprimé, contenant le fait & les moyens d'une cause, instance ou procès. Voyez Factum. (A)

Mémoire des frais (Page 10:329)

Mémoire des frais, (Jurisprud.) est un état des frais, déboursés, vacations & droits dûs à un procureur par la partie. Ce mémoire differe de la déclaration de dépens, en ce que celle - ci est signifiée au procureur adverse, & que l'on n'y comprend que les frais qui entrent en taxe; au lieu que dans le mémoire des frais, le procureur comprend en général tout ce qui lui est dû par la partie, comme les ports de lettres & autres faux frais, & ce qui lui est dû pour ses pertes, soins & vacations extraordinaires, & autres choses qui n'entrent point en taxe. Voyez Dépens. (A)

Mémoire (Page 10:329)

Mémoire, en termes de Commerce, écrit sommaire qu'on dresse pour soi - même, ou qu'on donne à un autre pour se souvenir de quelque chose.

On appelle aussi quelquefois mémoire chez les marchands & chez les artisans, les parties qu'ils sournissent à ceux à qui ils ont vendu de la marchandise, ou livré de l'ouvrage.

Ces mémoires ou parties, pour être bien dressées, doivent non - seulement contenir en détail la nature, la qualite & la quantité des marchandises fournies, ou des ouvrages livrés à crédit, mais encore l'année, le mois & le jour du mois qu'ils l'ont été, à qui on les a donnés, les ordres par écrit, s'il y en a, les prix convenus, ou ceux qu'on a dessein de les vendre, enfin les sommes déja reçues à compte. Voyez Parties.

Les marchands, négocians & banquiers appellent agenda, les mémoires qu'ils dressent pour eux - mêmes, & qu'ils portent toujours sur eux, & conservent le nom de mémoires à ceux qu'ils donnent à leurs garçons & facteurs, ou qu'ils envoient à leurs correspondans ou commissionnaires. Voyez Agenda.

Les mémoires que les commissionnaires dressent des marchandises qu'ils envoient à leurs commettans, se nomment factures, & ceux dont ils chargent les voituriers qui doivent les conduire, se nomment lettres de voiture. Voyez Factures & Lettres de voiture , Dict. de Comm. (v)

MÉMORIAL (Page 10:329)

MÉMORIAL, s. m. (Comm.) livre qui sert comme de mémoïre aux marchands, négocians, banquiers & autres commerçans pour écrire journellement toutes leurs affaires, à mesure qu'ils viennent de les finir.

Le mémorial est proprement une espece de journal qui n'est pas au net; aussi l'appelle - t - on quelquefois brouillard ou brouillon. Voyez Brouillon.

Ce livre, tout informe qu'il est, est le premier & peut - être le plus utile de tous ceux dont se servent les marchands, étant comme la base & le fondement des autres dont il conserve & fournit les matieres. Quant à la maniere de le tenir, voyez l'article Livre, Dict. de Commerce. (D.J.)

MEMPHIS (Page 10:329)

MEMPHIS, (Géog. anc.) ville considérable d'Egypte, située à 15 mille pas au - dessus du commencement du delta ou de la séparation du Nil, sur la rive gaûche de ce fleuve, peu loin des pyramides, & la capitale du nôme auquel elle donnoit son nom.

Cette ville appellée par les Egyptiens Menuf ou Migdol, & par les Hébreux Moph, étoit anciennement célebre. Nabuchodonosor la ruina; mais elle se rétablit; car du tems de Strabon, elle étoit grande, peuplée & la seconde ville d'Egypte, qui ne le cédoit qu'à Alexandrie.

Ses ruines ne sont plus que des masures fort peu distinctes, & qui continuent jusque vis - à - vis du vieux Caire. Parmi ces ruines est le bourg de Geze: cependant on voyoit autrefois dans Memphis plusieurs temples magnifiques, entr'autres celui de Vénus, & celui du dieu Apis. Il n'en reste plus de vestiges. (D. J.)

MEMPHITE (Page 10:329)

MEMPHITE, s. f. (Hist. nat.) nom donné par les anciens à une pierre qui, mise en macération dans du vinaigre, engourdissoit les membres au point de rendre insensible à la douleur, & même à celle de l'amputation. On la trouvoit, dit - on, près de Memphis en Egypte.

On a aussi donné quelquefois le nom de memphitis à une espece d'onyx ou de camée, composée de plusieurs petites couches, dont l'inférieure est noire & la supérieure blanche. Voyez Wallerius, Minéralogie. ( - )

MEMPHITIS (Page 10:329)

MEMPHITIS, (Géog. anc.) nôme ou canton d'Egypte, au - dessus du delta, à l'occident du Nil. Il prenoit son nom, suivant Ptolomée, liv. IV. ch. v. de Memphis sa capitale.

MENALAGOGUE (Page 10:329)

MENALAGOGUE, (Médec.) espece de purgatif, selon la division des anciens, cru propre à evacuer la mélancholie ou bile noire. Voyez Purgatif & Humeur, Médecine.

MENACE (Page 10:329)

MENACE, s. f. (Gramm. & Moral.) c'est le figne extérieur de la colere ou du ressentïment. Il y en a de permises; ce sont celles qui précedent l'injure, & qui peuvent intimider l'aggresseur & l'arrêter. Il y en a d'illicites; ce sont celles qui suivent le mal. Si la vengeance n'est permise qu'à Dieu, la menace qui l'annonce est ridicule dans l'homme. Licite ou illicite, elle est toujours indécente. Les termes menace & menacer ont été employés métaphoriquement en cent manieres diverses. On dira très - bien, par exemple, lorsque le gouvernement d'un peuple se déclare contre la philosophie, c'est qu'il est mauvais: il menace le peuple d'une stupidité prochaine. Lorsque les honnêtes gens sont traduits sur la scène, c'est qu'ils sont menacés d'une persécution plus violente; on cherche d'abord à les avilir aux yeux du peuple, & l'on se sert, pour cet effet, d'un Anite, d'un Milite, ou de quelqu'autre personnage diffamé, qui n'a nulle considération à perdre. La perte de l'esprit patriotique menace l'état d'une dissolution totale.

MENAE (Page 10:329)

MENAE, (Géog. anc.) ville de Sicile, selon Ptolomée, liv. III. chap. iv. qui la place dans les terres entre Nectum & Paciorus. Fazel la nomme Ménée, & Niger Calategirone.

MÉNADE (Page 10:329)

MÉNADE, (Littérat.) c'est - à - dire, furieuse, de MAI/NOMAI, être en fureur. Le surnom de ménades fut donné aux bacchantes, parce que dans la célébration des mysteres de Bacchus, elles ne marchoient que comme des prêtresses agitées de transports fu<pb->

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