ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"192"> lorsqu'on a pompé l'air grossier, & qui centient certainement la matiere de la lumiere, puisque nous voyons les objets qui y sont renfermés, tenoit le vis argent suspendu dans le barometre à la moindre hauteur, ou plutôt pour employer le moyen infaillible que M. Newton nous a donné pour juger du poids dès fluides, ont - ils senti quelque résistance que la matiere de la lumiere fasse à un globe pesant qui la traverse, qui ne doive être attribuée à l'air grossier? S'ils n'ont rien fait de tout cela, on peut conclure que la matiere ignée, considérée comme un amas prodigieux de lumiere pesante, condensée, & réduite en un petit espace, est une pure chimere.

Selon les remarques très détaillées de M. Boerhaave, l'air contient dans ses pores un grand nombre de molécules pesantes, de l'eau, de l'huile, des sels volatils, &c. A l'égard de l'eau, on sait de quelle façon, quelque quantité que ce soit de sel de tartre, exposé à l'air, se charge en fort peu de tems d'un poids égal de molécules d'eau. Cette matiere pesante est donc contenue dans les pores de l'air. La présence des molécules de soufre, de sels, &c. n'est pas plus difficile à constater. Sans recourir à aucun alembic, on n'a qu'à se trouver en rase campagne dans un tems d'orage, y lever les yeux au ciel pour y voir ce grand nombre d'éclairs qui brillent de toutes parts: ce sont des feux, ce sont des soufres allumés, ce sont des sels volatils, personne n'en peut disconvenir; & si dans la moyenne région, dans la région des nuées, l'air se trouve chargé de molécules d'huile, de sel, &c. à plus forte raison en sera - til chargé, & comme imbibé dans le lieu où nous respirons, puisque ces matieres pesantes sortant de la terre, n'ont pas pu s'élever si haut, sans avoir passé par les espaces qui nous séparent des nues, & sans s'y être arrêtées en plus grande abondance que dans ces régions élevées. D'ailleurs ne voit - on pas avec quelle facilité, & à la moindre approche du feu, le vif - argent même, qui est une matiere si pesante, se répand dans l'air; & qui peut douter après cela que l'air ne contienne dans ses pores un très - grand nombre de particules pesantes? Mais, dira - t - on, l'huile ne s'évapore point, elle ne se mêle que très difficilement avec l'air; n'est - ce pas plutôt là une preuve que l'air en est abondamment fourni, & qu'il n'en peut recevoir dans ses pores plus qu'il n'en a déjà reçu? D'ailleurs l'esprit - de - vin, exposé à l'air, ne s'affoiblit - il pas continuellement, & les molécules de l'huile qu'il contient ne s'y répandent - elles pas sans cesse? Lorsque les molécules de l'huile n'ont pas été développées jusqu'à un certain point, elles sont trop pesantes & trop fortement comprimées l'une contre l'autre par l'action élastique de la matiere éthérée pour être détachées l'une de l'autre par l'action dissolvante de l'air. Ainsi l'huile commune ne s'évapore pas: mais lorsque par l'action du feu les molécules de l'huile se sont développées & détachées l'une de l'autre dans les pores de l'eau qui les contient, elles se répandent dans l'air avec facilité, parce qu'elles sont devenues beaucoup plus légeres. Quelle impossibilité y a - t - il donc, après qu'on a vû que l'air pouvoit fournir facilement vingt livres d'eau à vingt livres de sel de tartre, & qu'il les leur fournissoit en effet en peu de tems, que le même air puisse fournir à vingt livres de plomb pendant tout le tems que dure la calcination, je ne dis pas vingt livres de molécules d'eau, que l'action du feu éloigne & chasse des pores de l'air, qui environne le vase dans lequel on calcine le plomb, mais seulement cinq livres de molécules de matieres plus denses, plus pesantes, & en même tems plus subtiles, qui étoient contenues dans les pores de l'air parmi ces mêmes molécules d'eau, lesquelles n'étant plus soutenues dans ces pores par les molécules de cette eau, que le feu en a éloigné, se dégageront des pores de l'air par leur propre pesanteur, viendront se joindre aux molécules du plomb, dont elles augmenteront le poids & le volume. Est - ce qu'il est plus difficile de concevoir que l'air fournisse à vingt livres de plomb un poids de cinq livres, qu'il l'est que le même air fournisse à une même quantité de sel de tartre le poids de vingt livres: c'est tout le contraire, puisque ce poids est quadruple du précédent. On concevra donc enfin distinctement qu'à mesure qu'on calcinera vingt livres de plomb, l'ardeur du feu échauffera l'air voisin du vase qui contient la matiere, qu'elle en éloignera toutes les molécuies d'eau que cet air peut contenir dans ses pores, & que les molécules de cet air étant devenues plus grandes, leur vertu dissolvante aura diminué; d'où il suit que les molécules des autres matieres plus pesantes qui y sont en même tems contenues cessant d'y être soutenues, tomberont sur la superficie du plomb; qu'ensuite ce volume d'air s'étant promptement rarefié, & étant devenu plus léger que celui qui est au - dessus, montera & cedera sa place avec la même vîtesse à un nouvel air, qui déposera de la même façon sur le plomb les molécules pesantes qu'il contient, & ainsi de suite, si bien qu'en fort pea de tems toutes les parties de l'air contenu dans un grand espace, pourront par cette méchanique simple & intelligible, s'approcher successivement l'une après l'autre du plomb que l'on calcine, & déposer les molécules pesantes que cet air contient dans ses pores.

Dans l'expérience dont il s'agit principalement ici, à mesure qu'on bat le plomb avec une spatule, cette poussiere répandue dans l'air s'y insinue, & comme ses particules ne sont pas adhérentes les unes aux autres, elles s'attachent facilement à la superficie des molécules du plomb, formant une espece de croûte sur les superficies de ces molécules, qui les empêche de se réunir, & qui réduit le plomb à paroître sous la forme d'une poudre impalpable. Par où l'on voit que le feu, ou les rayons de lumiere, réunis au foyer d'une loupe, ne fournissent ici qu'un grand mouvement qui désunit les parties du métal, en calcinant les souffres, qui les lient entre elles, & laissent aux particules pesantes, qui viennent des pores de l'air, & qui n'ont pas la même viscosité, la liberté d'environner les molécules du plomb, & de réduire ce métal en poudre. Et si dans la révivification de cette chaux de plomb, il arrive que non - seulement elle perde le poids qu'elle avoit acquis, mais qu'on trouve au contraire le plomb qui en renaît encore plus léger que n'étoit celui qu'on avoit d'abord employé, ne voit - on pas que cela ne vient que de ce que les particules pesantes & subtiles que le plomb a reçues de l'air durant la caleination, & qui enveloppant les particules de ce métal, l'avoient réduit en poudre & en avoient augmenté le poids & le volume, s'unissant aux molécules onctueuses du suif que l'on joint à la matiere dans cette opération, ou que la flamme même leur fournit, se volatilisent de nouveau, & se répandent dans l'air d'où elles étoient venues. Desorte que ce nouveau plomb destitue de cette matiere & des soifres grossiers qu'il a perdus dans l'opération, doit peser moins qu'il ne pesoit avant qu'on l'eût reduit en chaux; ce qui arriveroit dans toutes les matieres que l'on calcine, si le poids des particules qui s'exhalent durant la calcination n'excedoit pas quelquefois le poids de celles qui viennent s'y joindre. Voyez Feu, Chaleur, & Feuélastique . Art. de M. Formey.

Matiere, Sujet (Page 10:192)

Matiere, Sujet, (Gramm.) la matiere est ce qu'on emploie dans le travail; le sujet est ce sur quoi l'on travaille.

La matiere d'un discours consiste dans les mots, [p. 193] dans les phrases & dans les pensées. Le sujet est ce qu'on explique par ces mots, par ces phrases & par ces pensées.

Les raisonnemens, les passages de l'Ecriture - sainte, les caracteres des passions & les maximes de morale. sont la matiere des sermons; les mysteres de la soi & les préceptes de l'Evangile en doivent être le sujet. Synonymes de l'abbé Girard. (D.J.)

Matiere morbifique (Page 10:193)

Matiere morbifique, (Médec.) on a donné le nom de matiere morbifique à toute humeur étrangete ou altérée, qu'on a cru se mêler au sang, & y devenir le germe, le levain, la cause de quelque maladie. Les maladies excitées par ces humeurs nuisibles, ou déplacées, ont été appellées maladies avec matiere ou humorales. Suivant les théories vulgaires, dès que la matiere morbifique est dans le sang, elle y y produit une altération plus ou moins prompte, selon le degré d'énergie qu'elle a, & différente, selon le vice particulier de l'humeur. Boerhaave a prodigieusement multiplié, diversement combiné, & très méthodiquement classé les prétendus vices des humeurs, de façon à établir pour chaque maladie une matiere morbifique particuliere; il a cru appercevoir dans le sang & les humeurs qui circulent dans les vaisseaux formés d'un corps organique, les mêmes altérations qui auroient pû leur arriver par différens mélanges, ou par leur dégénération spontanée laissées à elles mêmes & en repos dans des vaisseaux ouverts exposés à l'action de l'air: ainsi il a substitué à l'histoire & à l'évaluation juste des phénomenes de la nature sa propre maniere de les concevoir; de - là sont venues ces divisions minutieuses & ces classes nombreuses de vices simples & spontanés des humeurs, de viscosité glutineuse spontanée, de diverses acrimonies méchaniques, salines huileuses & savonneuses, & de celles qui résultoient de la differente combinahon des quatre especes; ces soudivisions ultérieures d'acrimonie saline & muriatique ammoniacale, acide, alkalescente, fixe, volatile, simple ou composée, d'acrimonie huileuse, spiritueuse, saline, terrestre & âcre, &c. Les humoristes modernes ont retenu beaucoup de ces vices; ils ont prétendu que l'on en observoit toujours quelqu'un dans toutes les maladies, & qu'il n'y en avoit point sans matiere, sans altération propre & primitive des humeurs; & c'est sur cette idée purement théorique qu'est fondée la regle générale sur l'usage prétendu indispensable des évacuans. Quelques - uns ont jugé que la sueur & la transpiration retenues ou dérangées, fournissoient toujours la matiere morbifique, qui jettoit les premiers fondemens de la maladie; d'autres en plus grand nombre, ont pensé que la matiere morbifique dans toutes les maladies aiguës, n'étoit autre chose que des humeurs viciées qui se préparoient & s'accumuloient dans l'estomac par une suite de mauvaises digestions, d'où elles étoient versées par la voie des veines lactées continuellement ou périodiquement dans la masse des humeurs, & y produisoient d'ordinaire un épaississement considérable, qui, suivant eux, déterminoit la fievre, l'accès ou le redoublement. En conséquence, dans le traitement des maladies aiguës, ils ont eu principalement en vue d'épuiser le foyer de ces humeurs, & d'en tarir la source; c'est d'une théorie aussi fausse qu'insuffisante, qu'a pris naissance un des dogmes fondamentaux de la Médecine pratique la plus accréditée, c'est qu'il faut dans les maladies aiguës purger au moins tous les deux jours; le peu de succès repond à l'inconséquence du précepte: & il est très - certain qu'il seroit moins indifferent & plus nuisible, s'il étoit exécuté aussi efficacement qu'il est vivement recommandé, & qu'on s'empresse de le suivre avec ponctualité. Les anciens médecins chimistes ont aussi prétendu que toutes les maladies étoient avec matiere; ils en at<cb-> tribuoient l'origine à des fermens morbisiques indéterminés, mais pas plus obscurs ni plus incertains que la matiere morbifique des méchaniciens modernes. Les éclectiques, pour soutenir les droits de leur ame ouvriere, se sont accordés sur ce point avec les humoristes, persuadés que l'ame étoit la cause efficiente de toutes les maladies, & qu'elle n'agissoit pas sans motif; ils se sont vus contraints de recourir toujours à un vice humoral, à une matiere morbifique qui excitât le courroux & déterminât les effets de ce principe aussi spirituel que bienfaisant. L'absurdité de l'humorisme trop généralisé, & la connoissance assurée de quelques affections purement nerveuses ont fait tomber quelques médecins dans l'excès opposé; ils ont conclu de quelques faits particuliers bien constatés, au général, & n'ont pas fait difficulté d'avancer qu'il n'y avoit point de maladies avec matiere, & que tous ces vices des humeurs n'étoient que des suppositions chimériques; que le dérangement des solides étoit seul capable de produire toutes les différentes especes de maladie: & partant de cette idée, ils ont bâti un nouveau système pratique; les émolliens, relâchans, narcotiques leur ont paru les secours les plus indiqués par l'état de spasme & de constriction toujours supposé dans les solides; ils ont borné à ces remedes diversement combinés, toute leur matiere médicale. On voit par là, & c'est ce qui est le plus préjudiciable à l'humanité, que toutes ces variétés de théorie ont produit des changemens qui ne peuvent manquer d'être nuisibles dans la pratique: on ne s'est pas contenté de déraisonner, on a voulu faire des applications, & l'on a rendu les malades des victimes d'une bisarre imagination. Il s'est enfin trouvé des médecins sages qui, après avoir mûrement & sans préjugé pesé les différentes assertions, & sur - tout consulté la nature, ont décidé qu'il y avoit des maladies où les nerfs seuls étoient attaqués, & on les appelle nerveuses. Voyez ce mot. Que d'autres étoient avec matiere; c'est - à - dire, dépendoient de l'altération générale des humeurs, opérée par la suppression de quelque excrétion, & qui ne peut se guérir sans une évacuation critique; elles sont connues sons le nom de maladies numorales. Voyez ce mot. Telles sont toutes les fievres putrides simples, ou inflammatoires, quelques autres maladies aigués, toutes les maladies virulentes, contagieuses, &c. Les maladies chroniques sont presque toutes absolument nerveuses dans leur origine, dépendent du désordre trop considérable & de la lésion sensible de quelque viscere; mais ces vices ne peuvent pas subsister long - tems sans donner lieu à quelque altération dans les humeurs, qu'on observe toujours quand la maladie a fait quelque progrès. (M)

Matiere médicale (Page 10:193)

Matiere médicale, (Thérapeutique.) ensemble, total, système des corps naturels qui fournissent des médicamens. Voyez la fin de l'article Médicament. (b)

Matiere perlée de Kruger (Page 10:193)

Matiere perlée de Kruger, (Chim. & Mat. méd.) qu'on appelle encore magistere d'antimoine. Les chimistes modernes donnent ce nom à une poudre blanche, subtile, qui se précipite des lotions de l'antimoine diaphorétique, soit d'elle - même, soit par l'addition d'un acide, & principalement de l'acide vitriolique.

La nature de ce précipité n'a point été encore déterminée par les Chimistes; car sans compter les définitions évidemment fausses, telles que celle de Boherhaave, qui le nomme un soufre fixe d'antimoine, les idées qu'en donnent Mender & Hoffman ne paroissent rien moins qu'exactes. Le premier avance que « cette poudre n'est rien autre chose qu'une chaux fine de régule », & Hoffman qui observe qu'on obtient cette matiere perlée en une quan<pb->

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