ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"62"> or, outre l'avantage qui résulte pour le commerce général de ce bas prix, il en résulte un autre très important pour la culture même des terres. Si la main - d'oeuvre des manufactures dispersées étoit à un tel point que l'ouvrier y trouvât une utilité supérieure à celle de labourer la terre, il abandonneroit bien vîte cette culture. Il est vrai que par une révolution nécessaire, les denrées servant à la nourriture venant à augmenter en proportion de l'augmentation de la main - d'oeuvre, il seroit bien obligé ensuite de reprendre son premier métier, comme le plus sûr: mais il n'y seroit plus fait, & le goût de la culture se seroit perdu. Pour que tout aille bien, il faut que la culture de la terre soit l'occupation du plus grand nombre; & que cependant une grande partie du moins de ceux qui s'y emploient s'occupent aussi de quelque métier, & dans le tems surtout où ils ne peuvent travailler à la campagne. Or ces tems perdus pour l'agriculture sont très - fréquens. Il n'y a pas aussi de pays plus aisés que ceux où ce goût de travail est établi; & il n'est point d'objection qui tienne contre l'expérience. C'est sur ce principe de l'expérience que sont fondées toutes les réflexions qui composent cet article. Celui qui l'a rédigé a vû sous ces yeux les petites fabriques faire tomber les grandes, sans autre manoeuvre que celle de vendre à meilleur marché. Il a vû aussi de grands établissemens prêts à tomber, par la seule raison qu'ils etoient grands. Les débitans les voyant chargés de marchandises faites, & dans la nécessité pressante de vendre pour subvenir ou à leurs engagemens, ou à leur dépense courante, se donnoient le mot pour ne pas se presser d'acheter; & obligeoient l'entrepreneur à rabattre de son prix, & souvent à perte. Il est vrai qu'il a vû aussi, & il doit le dire à l'honneur du ministere, le gouvernement venir au secours de ces manufactures, & les aider à soutenir leur crédit & leur établissement.

On objectera sans doute à ces réflexions l'exemple de quelques manufactures réunies, qui non - seulement se sont soutenues, mais ont fait honneur à la nation chez laquelle elles étoient établies, quoique leur objet fût de faire des ouvrages qui auroient pû également être faits en maison particuliere. On citera, par exemple, la manufacture de draps fins d'Abbeville; mais cette objection a été prévenue. On convient que quand il s'agira de faire des draps de la perfection de ceux de Vanrobais, il peut devenir utile, ou même nécessaire, de faire des établissemens pareils à celui où ils se fabriquent; mais comme dans ce cas il n'est point de fabriquant qui soit assez riche pour faire un pareil établissement, il est nécessaire que le gouvernement y concoure, & par des avances, & par les faveurs dont il a été parlé ci - dessus; mais, dans ce cas - même, il est nécessaire aussi que les ouvrages qui s'y font soient d'une telle nécessité, ou d'un débit si assuré, & que le prix en soit porté à tel point qu'il puisse dédommager l'entrepreneur de tous les désavantages qui naissent naturellement de l'étendue de son établissement; & que la main - d'oeuvre en soit payée assez haut par l'étranger, pour compenser l'inconvénient de tirer d'ailleurs les matieres premieres qui s'y consomment. Or il n'est pas sûr que dans ce cas - même les sommes qui ont été dépensées à former une pareille fabrique, si elles eussent été répandues dans le peuple pour en former des petites, n'y eussent pas été aussi profitables. Si on n'avoit jamais connu les draps de Vanrobais, on se seroit accoutumé à en porter de qualités inférieures, & ces qualités auroient pû être exécutées dans des fabriques moins dispendieuses & plus multipliées.

MANUMISSION (Page 10:62)

MANUMISSION, s. f. (Jurisprud.) quasi de manumissio, c'est l'acte par lequel un maître affranchit son esclave ou serf, & le met, pour ainsi dire, hors de sa main. Ce terme est emprunté du droit romain, où l'affranchissement est appellé manumissio. Par mi nous on dit ordinairement affranchissement.

Il y avoit chez les Romains trois formes différentes de manumission.

La premiere, qui étoit la plus solemnelle, étoit celle que l'on appelloit per vindictam, d'où l'on disoit aussi vindicare in libertatem. Les uns font venir ce mot vindicta de Vindicius, qui, ayant découvert la conspiration que les fils de Brutus formoient pour le rétablissement des Tarquins, fut affranchi pour sa récompense. D'autres soutiennent que vindicare venoit de vindicta, qui étoit une baguette dont le préteur frappoit l'esclave que son maître vouloit mettre en liberté. Le maître en présentant son esclave au magistrat le tenoit par la main, ensuite il le laissoit aller, & lui donnoit en même tems un petit souflet sur la joue, ce qui étoit le signal de la liberté; ensuite le consul, ou le préteur frappoit doucement l'esclave de sa baguette, en lui disant: aio te esse liberum more quiritum. Cela fait, l'esclave étoit inserit sur le rôle des affranchis, puis il se faisoit raser, & se couvroit la tête d'un bonnet appellé pileus, qui étoit le symbole de la liberté: il alloit prendre ce bonnet dans le temple de Féronie, déesse des affranchis.

Sous les empereurs chrétiens cette premiere forme de manumission souffrit quelques changemens; elle ne se fit plus dans les temples des faux Dieux, ni avec les mêmes cérémonies; le maître conduisoit seulement l'esclave dans une église chrétienne, là on lisoit l'acte d'affranchissement; un ecclésiastique signoit cet acte, & l'esclave étoit libre: celà s'appelloit manumissio in sacro - sanctis ecclesiis, ce qui devint d'un grand usage.

La seconde forme de manumission étoit per epistolam & inter amicos; le maître invitoit ses amis à un repas, & y faisoit asseoir l'esclave en sa présence, au moyen de quoi il étoit réputé libre. Justinien ordonna qu'il y auroit du - moins cinq amis témoins de cette manumission.

La troisieme se faisoit per testamentum, comme quand le testateur ordonnoit à ses héritiers d'affranchir un tel esclave qu'il leur désignoit en ces termes, N. . . servus meus liber esto: ces sortes d'affranchis étoient appellés orcini, ou charonitoe, parce qu'ils ne jouissoient de la liberté que quand leurs patrons avoient passé la barque à Caron, & étoient dans l'autre monde, in orco. Si le testateur prioit simplement son héritier d'affranchir l'esclave, l'héritier conservoit sur lui le droit de patronage; & quand le testateur ordonnoit que dans un certain tems l'héritier affranchiroit un elclave, celui - ci étoit nommé statu liber; il n'étoit pourtant libre que quand le tems étoit venu; l'héritier pouvoit même le vendre en attendant; & dans ce cas, l'esclave, pour avoir sa liberté, étoit obligé de rendre à l'acquéreur ce qu'il avoit payé à l'héritier.

Les affranchis étoient d'abord appellés liberti, & leurs enfans libertini; néanmoins dans la suite on se servit de ces deux termes indifféremment pour désigner les affranchis.

Quand l'affranchissement étoit fait en fraude des créanciers, ils le faisoient déclarer nul, afin de pouvoir saisir les esclaves.

Il en étoit de même quand l'affranchi, n'ayant point d'enfans, donnoit la liberté à ses esclaves; le patron faisoit déclarer le tout nul.

Ceux qui étoient encore sous la puissance paternelle, ne pouvoient pas non plus affranchir leurs esclaves.

La loi fusia caninia avoit reglé le nombre des esclaves qu'il étoit permis d'affranchir; savoir, que [p. 63] celui qui n'en avoit que deux pouvoit les affranchir tous deux; celui qui en avoit trois, deux seulement; depuis trois jusqu'à dix, la moitié; depuis dix jusqu'à trente, le tlers; de trente à cent, le quart; de cent à cinq cens, la 5e partie; & elle défendoit d'en affranchir au - delà en quelque nombre qu'ils fussent; mais cette loi fut abolie par Justinien, comme contraire à la liberté qui est favorable.

En France, dans le commencement de la monarchie, presque tout le peuple étoit serf. On commença sous Louis le Gros, & ensuite sous Louis VII. à affranchir des villes & des communautés entieres d'habitans, en leur faisant remise du droit de taille à volonté, & du droit de mortable, au moyen de quoi les enfans succédoient à leurs peres. On leur remit aussi le droit de suite, ce qui leur laissa la liberté de choisir ailleurs leur domicile. S. Louis acheva d'abolir presque en ierement les servitudes personnelles.

Il se faisoit aussi quelques manumissions particulieres dont on trouve des formules dans Marculphe.

Il reste pourtant encore quelques vestiges de servitude dans certaines provinces, dans lesquelles il y a des serfs ou gens de main - morte, comme en Bourgogne, Nivernois, Bourbonnois. Dans ces provinces l'affranchissement se fait par convention ou par desaveu. Il se fait aussi par le moyen des lettres de noblesse, ou d'une charge qui donne la noblesse, à la charge seulement d'indemniser le seigneur.

Dans les colonies françoises, où il y a des negres qui sont esclaves, ils peuvent être affranchis, suivant les regles prescrites par l'édit du mois de Mars 1685, appellé communément le code noir.

Les maîtres âgés de vingt ans peuvent, sans avis de parens, affianchir leurs esclaves par tous actes entre - vifs, ou à cause de mort, sans etre tenus d'en rendre aucune raison.

Les esclaves qui sont nommés légataires universels par leurs maîtres, ou nommés exécuteurs de leurs testamens, ou tuteurs de leurs enfans, sont tenus pour affranchis.

Les affranchissemens ainsi faits dans les îles, y operent l'effet de lettres de naturalité, & dans tout le royaume.

Il est enjoint aux affranchis de porter un respect singulier à leurs anciens maîtres, à leurs veuves & à leurs enfans, ensorte que l'injure qu'ils leur auroient faite seroit punie plus grievement que si elle étoit faite à toute autre personne. Les anciens maîtres n'ont cependant aucun droit, en qualité de patrons, sur la personne des affranchis, ni sur leurs biens & successions.

Les affranchis jouissent, suivant ces loix, des mêmes droits que ceux qui sont nés libres.

C'est une ancienne maxime de droit, que le ventre affranchit, c'est - à - dire, que les enfans suivent la condition de la mere par rapport à la liberté: les enfans d'une femme esclave sont esclaves.

En France toutes personnes sont libres; & sitôt qu'un esclave y arrive, il devient libre en se faisant baptiser.

Il est néanmoins permis à ceux qui amenent des esclaves en France, lorsque leur intention est de retourner aux îles, d'en faire leur déclaration à l'amirauté, au moyen de quoi ils conservent leurs esclaves. Voyez l'édit de 1716.

Sur les manumissions & affranchissemens. Voyez le liv. XXXX. du digest, & au code le liv. VII. depuis le tit. 1 jusqu'au tit. 25; le Glosse de Ducange, au mot manumissio; le Dict. de Brillon, au mot affranchi, & le tit. de la Jurisp. rom. de M. Terrasson. (A)

MANUSCRIPT (Page 10:63)

MANUSCRIPT, s. m. (Litt.) ouvrage écrit à la main. C'est la consultation des m. s. qui donne à une édition son exactitude. C'est le nombre des anciens m. s. qui fait la richesse d'une bibliotheque. Voyez ces articles Bibliotheque, Litterature, Livre

MANUS DEI (Page 10:63)

MANUS DEI, emplâtre. (Pharm. Mat. med. exter.) En voici la composition d'après la pharmacopée de Paris. Prenez d'huile d'olive deux livres, de litharge d'or préparée dix - sept onces, de cire jaune vingt onces, de verd - de - gris une once, de gomme ammoniac trois onces & trois dragmes, de galbanum une once & deux dragmes, d'opopanax une once, de sagapenum deux onces, de mastic une once, de myrrhe une once & deux dragmes, d'oliban & bdellium de chacun deux onces, d'aristoloche ronde une once, de pierre calaminaire deux ouces. Premierement cuisez la litharge avec l'huile dans une bassine de cuivre, avec suffisante quantité d'eau, jusqu'à consistence d'emplâtre, selon l'art; jettez ensuite la cire dans la bassine, & faites - la fondre avec; cela étant fait, retirez la bassine du feu, & ajoutez le galbanum, la gomme ammoniac, l'opopanax & le sagapenum fondus ensemble, passés à - travers un linge & convenablement épaissis; enfin ajoutez le mastic, la myrrhe, l'oliban, le bdellium, la pierre calaminaire, le verd - de - gris & l'aristoloche réduits en poudre; brassez vigoureusement pour mêler toutes ces choses, & vetre emplâtre sera fait.

Cet emplâtre est du genre des agglutinatifs ou emplastiques proprement dits. Il passe aussi à raison des gommes resines qu'il contient, pour puissant résolutif; & à cause du verd - de - gris, de l'aristoloche, & de la pierre calaminaire, pour dessicatif & mondificatif. (b)

MANUTENTION (Page 10:63)

MANUTENTION, s. f. (Gram.) soin qu'on prend pour qu'une chose ou reste comme elle est, ou se fasse. Les souverains, les magistrats doivent veiller à la manutention des loix.

MANY (Page 10:63)

MANY, s. m. (composition.) espece de mastic de couleur brune, assez sec, dont les Caraïbes, ainsi que les Sauvages des environs de l'Orinoco, font usage pour cirer le fil de coton, & les petites cordelettes de pitte, qu'ils emploient dans leurs diffétens ouvrages: ils s'en servent aussi comme d'un enduit en le faisant chausser, afin de le rendre liquide. C'est un secret parmi ces sauvages; cependant, au moyen de quelques experiences que j'ai faites, le many ne ne me paroît autre chose qu'un composé de parties à - peu - près égales de la résine de l'arbre appellé gommier, & d'une cire naturellement noire, provenant du travail de certaines mouches vagabondes, dont les essains se logent dans des creux d'arbres. Voyez Mouches a miel de l'Amérique. M. le Romain.

MANYL - RARA (Page 10:63)

MANYL - RARA, (Botan. exot.) grand arbre des Indes orientales, portant un fruit assez semblable à l'olive, & qu'on mange. Voyez - en la représentation dans l'Hortus de Malabar. (D. J.)

MAO, MAN ou MEIN (Page 10:63)

MAO, MAN ou MEIN, s. f. (Com.) poids en usage dans quelques lieux des Indes, qui n'a sans doute ces trois noms qu'à cause de la diverse prononciation ou des Orientaux, ou des marchands de l'Europe que le commerce attire en Orient.

Le mao pese dix caris; mais en des endroits comme à Java, & dans les îles voisines, le cari n'est que de vingt raëls; & en d'autres, comme à Cambaye, il vaut vingt - sept raëls, le raël pris sur le pié d'une once & demie poids de Hollande. On se sert du mao pour peser toutes les denrées qui servent à la vie.

Le mao d'Akgbar, ville du mogol, pese cinquante livres de Paris; celui de Ziamger, autre ville des états de ce prince, en pese soixante. Dict. de comm.

MAON (Page 10:63)

MAON, (Géogr. sacrée.) ville de la Palestine dans la tribu de Juda, & qui donne son nom au desert de Maon, où David demeura long - tems durant la persécution que Saül lui fit. Cette ville de Maon est apparemment la même que Moenois, Moeonis, Meneum, qu'Eusebe met au voisinage de Gaze. (D. J.)

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